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2. L’ Education Thérapeutique

1.5. Les traitements de la migraine

Les médicaments utilisés pour le traitement de la migraine se divisent en deux grandes catégories :

- médicaments de la crise,

- médicaments du traitement de fond.

1.5.1.

Médicaments de la crise

Il existe quatre groupes de substances ayant une efficacité démontrée dans la crise de migraine :

- Les traitements de crise non spécifiques : antalgiques et anti-inflammatoires non stéroïdiens ;

- Les traitements de crises spécifiques : dérivés de l’ergot de seigle et triptans. D’autres substances (caféine, antiémétiques, et psychotropes) sont utiles comme adjuvants.

1.5.2.

Traitements de crise non spécifiques

1.5.2.1.

Antalgiques périphériques

Les antalgiques périphériques exercent leurs effets par l’intermédiaire de l’inhibition non sélective de la cyclo-oxygénase, enzyme essentielle de la synthèse des prostaglandines et des leucotriènes impliqués dans la nociception et l’inflammation.

L’efficacité de l’aspirine est de grade A130, à des doses de 500 à 1000mg. La forme galénique utilisée est de forme hydrosoluble, puisqu’elle s’avère plus favorable en terme de vitesse d’absorption et de biodisponibilité.

L’association du métoclopramide à l’aspirine améliore les troubles digestifs, mais ne potentialise pas l’effet antalgique de l’aspirine. Le métoclopramide est un antiémétique et un modificateur du comportement digestif appartenant à la classe des neuroleptiques. Pendant la crise migraineuse, le délai d'atteinte des sites d'absorption de l'aspirine est souvent allongé par réduction de la motilité gastro-intestinale. En restaurant la motilité digestive, le métoclopramide favorise l'absorption de l'aspirine. L’association du métoclopramide et de l’aspirine n’est justifiée que s’il existe des troubles digestifs (grade A)130, du fait de la potentialisation des effets indésirables et du coût (5 fois le coût de la crise par ces traitements).L’unité de prise de Migpriv® a un coût de 1,34 €, l’unité de prise de Céphalgan a un coût de 0,86 €, alors que le comprimé d’aspirine 1000mg a un coût de 0.17€.

Le paracétamol se révèle peu efficace (grade C) 130 dans le traitement de la crise migraineuse, ce qui contraste avec sa large utilisation, notamment en automédication. Cette substance présente aux yeux des patients une sécurité, bien que pour des prises supérieures à 10 grammes par jour, ou lors de prises régulières, il y a un risque d’hépatotoxicité131. Ces doses sont souvent atteintes chez des patients souffrant de céphalées chroniques par abus médicamenteux.

1.5.2.2.

Les anti-inflammatoires non stéroïdiens

Les AINS exercent des effets antalgiques périphériques et seraient par ailleurs capables de limiter le relargage de sérotonine par les plaquettes et d’exercer un effet sur l’inflammation. Les AINS (Naproxène, Ibuprofène, Kétoprofène, Diclofénac) sont efficaces

sur le marché en France en Janvier 2004, dans cette indication, mais la commission de la transparence a conclu à une amélioration du service médical rendu V132, et selon « La Revue

Prescrire », le ketoprofène est une simple opération commerciale133

.

1.5.2.3.

Antalgiques opiacés

Aucune étude, hormis pour le butorphanol (non disponible en France), n’a démontré l’utilité de ces molécules dans le traitement de la crise migraineuse. D’autre part, leurs effets indésirables sont fréquents, à type de somnolence, sensations vertigineuses, nausées et vomissements, et peuvent aboutir à des céphalées par abus médicamenteux, voire à un comportement d’addiction. Les antalgiques ne sont pas anodins puisque en plus des effets indésirables, ils ont des demi-vies, notamment pour le dextropropoxyphène, longues (12 heures) et risquent une accumulation en cas de prise répétée. Ils doivent être utilisés en dernier recours, avec restriction de huit prises par mois maximum134.

1.5.3.

Traitements de crise spécifiques

1.5.3.1.

Les dérivés ergotés

134

L’ergotamine et les dérivés ergotés interagissent avec les récepteurs sérotoninergiques (action antagoniste), dopaminergiques (action agoniste), et le système noradrénergique (agoniste α adrénergique). Tous deux inhibent la recapture neuronale de la noradrénaline et ont des effets variables sur les récepteurs adrénergiques. Les effets post-synaptiques dépendent de la molécule, de la voie d’administration et de la dose. Le mécanisme d’action de l’effet antimigraineux de ces molécules n’est pas parfaitement connu ; il est vraisemblablement lié à leur effet vasoconstricteur, associé à une inhibition de l’inflammation neurogène et/ou à une inhibition centrale des voies trigéminales135. Cette pharmacologie

explique les multiples emplois de cette substance, comme traitement de la crise et comme traitement de fond.

Les dérivés ergotés présentent une biodisponibilité faible per os (d’où leur utilisation par voie nasale ou injectable), un métabolisme hépatique dépendant de l’isoenzyme CYP 3A4 du cytochrome P450, une longue demi-vie à l’origine d’interactions médicamenteuses, de contre- indications et d’accumulation du médicament en cas d’usage fréquent.

Bien que ces substances soient utilisées depuis plus de 50 ans (Graham et Wolff 1938), les études de pharmacologie clinique attestant leur efficacité sont rares et souvent discutables. Seule la DHE en spray nasal a fait l’objet d’essais cliniques récents et de qualité136

. Le rapport bénéfice/risque semble optimal pour la dose de 2mg.

1.5.3.2.

Les triptans

Cette classe a permis d’améliorer considérablement la prise en charge de la migraine. Les triptans sont des agonistes sélectifs des récepteurs à la sérotonine du type 5HT1D, qui agiraient par une vasoconstriction intracrânienne et/ou d’une diminution de l’inflammation neurogène. Les triptans sont métabolisés par différentes voies métaboliques, si bien que lorsque l’une d’elle est perturbée, une autre voie métabolique la compense. Ceci met en évidence la faible probabilité du risque d’interactions pharmacocinétiques137. Cette notion

n’est pas applicable à l’élétriptan qui est principalement métabolisé par l’isoenzyme CYP 3A4.

Actuellement, il existe un triptan de 1ère génération (Sumatriptan (Imigrane®, Imiject®)) et 8 triptans de 2ème génération dont 4 commercialisés en France (Zolmitriptan (Zomig®), Naratriptan (Naramig®), Eletriptan (Relpax®), Almotriptan (Almogran®). Cette 2ème génération apporte une meilleure efficacité, une sélectivité pour le territoire carotidien, une meilleure biodisponibilité après administration orale et une demi-vie plasmatique plus longue. En résumé, malgré des profils pharmacologiques assez différents, il n’apparaît pas jusqu’à maintenant, de différence majeure d’efficacité parmi les triptans. Le naratriptan (2,5mg) semble moins efficace que le sumatriptan, mais expose à moins de rechutes 138 ; l’életriptan139

est sensiblement plus efficace, mais avec un peu plus d’effets secondaires sur le système nerveux central, notamment une somnolence et de des interactions significatives. Jusqu’à maintenant, aucune étude ne permet de savoir s’il existe une efficacité ou une résistance croisée pour l’ensemble des triptans.

1.5.4.

Le traitement de fond

134

De nombreux médicaments ont été essayés dans cette indication, seuls les médicaments ayant eu deux études cliniques contrôlées versus placebo sont dits majeurs : certains béta-bloquants, certains antisérotoninergiques (pizotifène, méthysergide, oxétorone), flunarizine, anti-inflammatoires non stéroïdiens (naproxène), valproate de sodium,

amitryptiline. Il existe d’autres substances pouvant être utilisées en traitement de fond, mais leur efficacité est moins bien étayée (Dihydroergotamine, Aspirine, Indoramine, Verapamil, Clonidine, Inhibiteurs sélectifs de la recapture de la noradrénaline, Inhibiteurs de la monoamineoxydase… ). Le médicament de premier choix est le propranolol, ce médicament a une efficacité démontrée, et un profil d’effets indésirables acceptable (somnolence, fatigue, troubles du sommeil, syndrome de Raynaud, bradykardie, hypotension). Les alternatives au propranolol sont nombreuses. Il y a l’antiépileptique, l’acide valproïque qui est efficace à la dose de 500mg à 1,5g par jour. L’acide valproïque a comme effets indésirables : alopécie, nausées, tremblements, asthénie, somnolence, prise de poids et dans de rares cas des atteintes hépatiques et pancréatiques. La seconde alternative est l’amitriptyline, un antidépresseur tricyclique à 30-150mg par jour, avec des effets indésirables atropiniques, une augmentation de l’appétit, une sédation et des hypotensions orthostatiques ; elle est particulièrement efficace dans les migraines, avec céphalées de tension134. Les autres molécules antidépresseurs (fluoxétine), inhibiteurs calciques (Flunarizine), agonistes sérotoninergiques (méthysergide, DHE), antiinflammatoires présentent un bénéfice / risque insuffisant compte tenu de leurs nombreux effets indésirables. La dernière molécule, le topiramate140, a avoir obtenue

l’autorisation de mise sur le marché, avec comme indication « traitement prophylactique de la crise migraineuse chez l’adulte » déçoit puisqu’elle se révèle moins efficace que le propranolol, alors que ses effets indésirables sont plus fréquents. Le choix du traitement de fond se fait préférentiellement sur la molécule, ayant le maximum de preuves, mais aussi de l’état physiopathologique du patient.