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Du traitement de la cohabitation du fait religieux et des sciences occultes dans la littérature occultes dans la littérature

IV/ LA SOCIETE COMORIENNE, POUR UNE APPROCHE PARA TEXTUELLE180 DE L’ESTHETIQUE LITTERAIRE

IV.1 Mœurs et coutumes d’une société de métissage

IV.1.2 Du traitement de la cohabitation du fait religieux et des sciences occultes dans la littérature occultes dans la littérature

a) Islam et soufisme

Outre l’importance des traditions et pratiques remontant à la période antéislamique ayant subsisté, l’Islam comorien se voit aussi être totalement imprégné de la philosophie soufie. Le soufisme est :

« un mouvement authentiquement musulman malgré les influences qu’il put subir au cours de son évolution, le soufisme s’appuie sur une tendance coranique de piété écartée par l’Islam officiel, et tend à développer les valeurs spirituelles impliquées par le dogme, mais non incluses dans sa formulation. »197

175 Cette imprégnation soufie se fait par le prisme du système confrérique. Durant de longues années et aujourd’hui encore, le comorien mêle à sa pratique dogmatique (cinq prières, ramadan, lecture du Coran...), une pratique empreinte de mysticisme exécutée sous la forme de dhikr ou de daïra.

Introduite au milieu du XIXème siècle par le Sheikh Abdallah Darweshe198, l’institution des confréries sera par la suite relayée par Al-Maaruf (m.1904), de son vrai nom Said Mohamed Ben Sheikh Ahmed. Ce Sheikh, à l’origine du nom du plus grand hôpital des Comores, fut un des plus grands savants des Comores. Connu et respecté pour son immense sagesse, sa grande piété et sa maîtrise du texte et des principes de La Loi (Le Coran), son aura dépassait de loin les frontières de l’archipel. Né aux Comores, il vécut et étudia à Zanzibar

« en vue d’enseigner le droit, la grammaire arabe et la théologie, portant un intérêt singulier pour la maîtrise du Coran, son interprétation et les différentes formes de sa lecture, ainsi qu’à l’apprentissage des hadiths de l’exemplarité prophétique. »199

C’est lors de ses études à Zanzibar qu’il s’initia aux rituels confrériques en commençant par la Kadriyya. A son retour aux Comores, on peut en déduire qu’il perpétua ce rituel jusqu’à sa rapide rencontre avec le Sheikh Abdallah Darweshe qui l’initiera aux rituels de la confrérie Shadhuliyya et l’investira « comme calife de la voie » 200, lui délivrant ainsi le droit et le devoir de la propager. Mu de sa nouvelle mission et sa recherche constante de la vérité dans le Réel, Al-Maaruf « s’engagera dans cette seconde voie avec une totale dévotion, créant ses propres cercles en Grande Comore et à Anjouan, allant jusqu’à croiser le fer à la mosquée de Mutsamudu où, il faillit perdre la vie au nom de la défense des préceptes religieux et mystiques. »201

Apparues au nombre de cinq202: La Shadhuliyya, La Kadriyya, La Rifâ’iyya, La Dandarawwuiyya et enfin La Sa’adat el ‘allawiyya, seules trois de ces confréries (les trois premières) éclosent et s’implantent durablement. Parmi les trois, l’une connaît un réel rayonnement sur l’ensemble des îles, la Tarîqa Shadhuliyya. On doit donc à Al-Maaruf le rayonnement de cette dernière sur l’ensemble de l’archipel et sa prédominance sur les deux

198 Le nom du sheikh serait devenu un terme désignant les personnes dont la piété et la science sont reconnus au point que la coutume accepte leur refus d’accomplir les rites traditionnels coutumiers, notamment le Anda. Lorsqu’un homme est dit darweshe, l’ensemble de la communauté l’exempte de ce devoir sans qu’il ne perde en rien son mérite et son prestige. Malheureusement, avec le temps, ce qualificatif s’est teinté d’une légère connotation négative car on considère que les darweshe n’existent plus vraiment aux Comores.

199 Soilhaboud Hamza, Omar-la-Baraka, Encres du Sud, 2001, p.22

200 Msaïdie Elarif, les confréries religieuses aux Comores à partir d’un rapport de 1950, Savigny-le-temple, in Tarehi, revue d’histoire et d’archéologie n°10, p.24

201 Soilhaboud Hamza, op. cit, p.22

176 autres comme le prouve la statistique suivante « Elle regroupait à elle seule plus de 70% des adeptes en 1950. »203

Le soufisme « tend à développer les valeurs spirituelles impliquées par le dogme, mais non incluses dans sa formulation. »204

C’est cette absence de formulation au sein du dogme qui pousse aujourd’hui des mouvements comme le wahhabisme à récuser catégoriquement la valeur d’une telle philosophie, allant jusqu’à soutenir l’interdiction de sa pratique dans les îles. Sophie Blanchy rapporte que :

« On croit aux Comores que chaque adepte, lors du jugement dernier, sera présenté à Dieu sous le patronage de son halifa (chef spirituel représentant de la confrérie au sein du village), sorte d’intermédiaire qui témoignera de son engagement dans la « voie ». »205

Cette idée traduit le prolongement dans l’au-delà du principe d’intercession tant combattu par les partisans d’une religion fixée sur la Loi et la Sunna. Dont le wahhabisme qui, bien qu’en progression, est loin de pouvoir éradiquer aussi facilement et radicalement la croyance. Et pour cause, elle fait partie intégrante de l’Islam comorien, illustrée, justifiée et légitimée par une forte activité confrérique. En France même, les comoriens célèbrent leurs saints à la date anniversaire de leur mort, et ce tous les ans.

Il semble qu’aux Comores, on reconnaisse la transcendance créant le rapprochement ultime entre l’homme et Dieu seulement aux Sheikhs. Seul leur degré de piété et de connaissance religieuse ainsi que leur rang élevé par la filiation spirituelle les liants au Prophète Muhammad (pbsl), leur permettent l’accès à la clairvoyance. Cette clairvoyance, c’est la faculté de voir dans l’invisible, de cerner cet invisible, de lire parfois dans les âmes des communs, d’accomplir quelques miracles. Par et grâce à cette clairvoyance, le Sheikh est alors profondément respecté et souvent craint. S’agirait-il d’un déplacement de la finalité soufie ? Loin de reprendre l’idée de lien et de communion à Dieu accessible par n’importe quel ascète, l’espace comorien la lie directement au Sheikh. Et pour cause, les comoriens témoignent d’un très grand respect à la science quelle qu’elle soit. Et être en possession d’une science fait de son possesseur un être digne de considération. Lorsqu’en plus cette connaissance est hautement attestée par des liens (filiation spirituelle, généalogie, diplôme), elle place alors son détenteur à un haut rang dans l’estime humaine, lui octroyant par la même

203

Id.

204 Sourdel Dominique, op.cit., p.84

177 occasion de nombreux privilèges et notamment une facilité d’accès à des fonctions reconnues dans le système hiérarchique traditionnel mais aussi étatique. Ceci est plus frappant dans le contexte des sciences religieuses.

Pour faire plus clair, expliquons l’impact du mouvement soufi dans la tradition comorienne. Comme nous le signalions plus haut, celui-ci fut introduit aux Comores non pas en tant que philosophie ou pensée, mais comme organe d’un système particulier, celui des confréries (associations initiatiques perpétuelles206 rattachées chacune à son fondateur et qui fixent la « voie » (tarîqa) à suivre pour atteindre à l’état mystique). La voie et la confrérie ne faisant plus qu’un, elles ritualisent le moyen d’accession à l’extase pour aboutir à la symbiose d’avec le Créateur. Ces moyens peuvent donc parfois paraître superficiels ou surfaits car canoniquement établis et ritualisés. Il semble alors qu’aux Comores, le système confrérique ait éloigné la communauté des fondements de la pensée soufie incarnée par Al-Hallâj. Pourtant, les personnalités religieuses l’ayant introduite vivaient dans la continuité de cette inspiration. Qu’il s’agisse d’Al-Maaruf, cité plus haut ou de Muigni Baraka, son neveu, fils d’Abdallah bin Ahmad bin Sheikh, sur qui Hamza Soilhaboud écrit la biographie romanesque, chacun de ces pieux personnages, élevés au rang d’ulémas (Saints), a vécu dans la voie des trois principes réunis et inhérents au soufisme : ascétisme, expression poétique, effort philosophique. Après Muigni Baraka (1918-1988), dont les disciples se souviennent comme d’un grand sage, d’autres personnages beaucoup moins importants vont tenter de poursuivre ce cheminement de la pensée.

Or a priori, ne subsiste aujourd’hui, dans l’archipel, que l’ossature ritualiste de la finalité soufie. La poésie étant très peu inclinée vers elle207, l’effort philosophique cédant lentement sa place, tous deux s’effacent face à l’ascétisme triomphant. Quoiqu’il en soit, même dépouillées de l’essence soufie équilibrée par l’Imam Al-Ghazali208, ces tarîqa n’en demeurent pas moins l’émanation et la résultante directe. Et les guides des confréries, avec toutes les qualités qu’on leur reconnaît à tort ou à raison, des chefs charismatiques à la solde

206 Sourdel Dominique, op. cit., p.88

207

Nous n’avons retrouvé dans nos lectures qu’un seul poème d’inspiration soufie. Ce poème d’Abou, Réduction

atomique, est étudié plus bas.

208 Célèbre Imam de Tûs, à la fois grand théologien et philosophe soufi, Mohamed bin Mohamed al-Ghazali est à l’origine d’une forme de réconciliation entre le dogme religieux officiel et la mystique musulmane, le soufisme immanentiste, jugé non conforme à la Loi. Cette réconciliation passe par l’idée que la croyance et donc la foi en Dieu traditionnellement admise doive être complétée par « une connaissance plus intime» peut-être plus individuelle de Dieu. Pour cela, le recours à une ascèse modérée permet à l’âme de s’ouvrir et se libérer en vue de recevoir ce que Sourdel nomme « l’illumination divine » et que la tradition islamique comorienne nomme tout bonnement, selon S. Blanchy, kashfu, traduit par « révélation ». Ainsi, l’imam al-Ghazali insista fortement sur la nécessité de faire acte de dépouillement et de désintéressement dans la pratique de la bienfaisance en préconisant le devoir de recherche de la perfection morale a beaucoup inspiré l’étudiant que fut Mouigni Baraka.

178 du bien. C’est ce qui peut expliquer leur développement spectaculaire au début XXème siècle. De plus, comme l’explique S. Blanchy :

« Le système confrérique a du succès aux Comores comme processus associatif, semblable aux classes d’âge de l’unité sociale du mdji (village) et aux promotions de l école coranique. Les chants et les danses qui sont associées aux prières des confréries, bien que fort éloignées de l’idéal d’expérience soufie (contact mystique avec le divin), ont attiré de 60 à 80% de la population. Etre adepte est une forme de sociabilité ordinaire, et le guide de la confrérie jouit d’une autorité qui ne peut se comparer qu’à celle du maître coranique (c’est parfois la même personne).»209

Avant de clore ce développement autour de l’Islam comorien, nous nous proposons de voir brièvement comment cette religion trouve-t-elle écho dans la littérature d’expression française, si tant est qu’elle en trouve un.

Pourquoi ce scepticisme ? Parce que malheureusement, parmi nos lectures, nous n’avons relevé qu’un poème d’inspiration soufie, ce qui laisse entendre qu’il y a bien imprégnation de cette philosophie dans la littérature mais que celle-ci est infime et qu’il est actuellement difficile d’en proposer une analyse globale. En ce sens, nous nous sommes rapidement penchée sur le poème d’Abou Réduction atomique.210

Je suis celui qui n’en peut mais de pouvoir Aussi loin que remontent mes souvenirs Je n’ai pas de fin dans mon commencement Toujours recommencé en entier, en morceau Je progresse en spirale, aspirant à la réduction Atomique, à l’UN simple et rempli

A quoi bon s’adresser !

Personne n’est au bout de la vie Se taire, éther réintégré dans le noyau De l’atome initial

Où l’image naît de l’action de sa propre image

Ce poème décrit le rapprochement entre l’homme et Dieu comme se faisant de moins en moins distancié jusqu’à l’identification de l’un dans l’autre. Les vers « Je progresse en spirale, aspirant à la réduction / Atomique, à l’Un simple et rempli » traduisent le mécanisme mis en jeu pour aboutir à cette union. Dans la religion musulmane, il est formellement interdit à tout croyant d’associer Dieu à une créature et donc de s’associer lui-même à Dieu, sous peine d’être déclaré associationiste. Ce au point où les prophètes Jésus fils de Marie et Muhammad

209 Blanchy S., op. cit., p.187

179 (pbsl) ont eu à insister, auprès des fidèles, sur leurs traits et attributs humains afin d’éviter toute tendance dans cette direction. Pourtant ici, le poète l’affirme « Je n’ai pas de fin dans mon commencement » Or en Islam, Seul Dieu existe de toute éternité. Est-ce là une poésie de projection identificatoire dans un contexte où la peur du blasphème est très vive et la crainte du shirk encore plus ? Bien au contraire, nous y lisons, nous, la transposition de l’idéal extatique soufi, seule philosophie d’origine musulmane ayant insufflé une totale communion symbiotique entre l’homme et Dieu.

Dominique Sourdel fait une citation d’al-Hallâj à ce sujet « Je suis Celui que j’aime et Celui que j’aime est devenu moi. Nous sommes deux esprits infondus en un seul corps. 211» Ce à quoi renvoie le dernier vers du poème. Par l’effet miroir suggéré dans l’idée d’une image recréée à partir d’une image existante, le poète renforce l’idée d’union parfaite par la pratique ascétique. Le miroir renvoie une image que l’action permet d’identifier comme simultanée et reproduit cette image afin de la restituer après coup telle quelle. « De l’atome initial/ Où

l’image naît de l’action de sa propre image. » L’image produite n’existe alors que dès

l’instant où la symétrie entre l’image initiale et celle recréée se rencontrent à travers le miroir identificatoire. Une rencontre rendue possible par le dhikr, perceptibleà travers les vers « Je

progresse en spirale, aspirant à la réduction/ Atomique, à l’UN simple et rempli ». Ces vers

apparaissent comme la description du mouvement effectué lors des dhikr « Exercice soufi de remémoration du nom de Dieu 212», lorsque placés en cercles, les adeptes guidés par le chef mystique, tout en scandant le nom d’Allah, tournent ensemble, lentement d’abord puis de plus en plus vite, étroitement serrés les uns contres les autres dans des mouvements de va et vient du haut du corps, provoquant de légers sautillements. La forme régulière des trois premiers vers, tous constitués de onze syllabes, tranche avec l’ensemble du onzain dont les derniers vers sont complètement hétérométriques et arythmiques, et peut faire échos au démarrage en lenteur du dhikr. Celle beaucoup plus éparse du poème décrit ainsi, elle aussi, l’idée d’un moyen (le texte poétique) dont les mots sont entreposés et superposés de-ci de-là de sorte à atteindre la peinture parfaite de l’ascension ascétique et donc le fond symbiotique ; parallélisme entre l’action du dhikr aux allures parfois brouillonnes et sa finalité, l’ascension vers Dieu l’Unique dans l’absolu.

Le corps « progresse (ainsi) en spirale » afin de parvenir à le faire disparaître jusqu’à ne devenir plus qu’un atome au profit de l’illumination spirituelle, la « révélation » de « l’UN simple et rempli ». Au terme du dhikr, « L’esprit brûlant d’amour n’étant plus occupé que de

211 Sourdel Dominique, op. cit., p.88

212

180 concevoir l’unicité divine, il est prêt à « s’esseuler devant l’Unique »213. En somme, au terme de l’expérience mystique, survient l’extase et disparaît la personnalité du poète devenu mystique, transcendé dans son amour pour Dieu et par Dieu.

L’aboutissement à « l’UN » crée l’apothéose identificatoire entre le poète et son Créateur. Ici, « Un » renvoie à l’un des 99 noms divins et attesté dans la sourate Al-Ahad, « La foie pure et exclusive »214 , où il est demandé au prophète de répéter que Dieu est Seul et Unique.

Cette lecture est corroborée par une note de Carole beckett.

b) Rites profanes et sciences occultes : les djinns, les wafu, les mazetwani

Islam et rites profanes

Dès la naissance et même bien avant, durant la grossesse, de nombreux rites entourent la vie du nouveau né. On compte alors des évènements comme le Maulid du cinquième mois de grossesse ou du septième mois. Tous deux permettant de faire des douans (invocations et prières) pour demander la protection divine sur l’enfant et la mère. Aux dires des uns et des autres, il s’agit là de rites religieux visant à attirer la bénédiction sur le couple mère enfant. Mais en s’acquérant un peu auprès de certains imams, ceux-ci contredisent ces pratiques qu’ils qualifient parfois de Bid’an (innovation, ajout) et les récusent catégoriquement car jugées illicites au vue de leurs croyances. Pourtant, bon nombre de comoriens perpétuent ces pratiques que beaucoup pensent religieuses. Parfaitement intégrées dans les coutumes, elles sont admises sans le savoir, mais avec le temps, comme faisant partie du prolongement rituel religieux de la grossesse. Ainsi, ne pas faire le maulid pour une femme enceinte est non seulement très mal perçu, mais aussi fortement critiqué par les familles respectives, de sorte qu’infimes sont les personnes dérogeant à ce qui est devenu un rite. Si on évoque le côté novateur et areligieux de ce rite pour justifier du refus, ce dernier sera pris pour un manque de générosité, une tendance religieuse extrémiste et qui plus est un grand fond d’avarice. Le bonheur se vit en communauté, et pour le célébrer, rien de tel qu’un bon repas !

Précisons simplement que bénir une femme enceinte par le biais de prières n’est nullement condamnable en Islam, bien au contraire.

Par conséquent empruntés ou inspirés de la Sunna du prophète Muhammad (pbsl), ces rites sont réorientés et instaurés en passages obligés dont les fondements trouvent légitimité

213

Sourdel Dominique, op. cit., p.88

214 « Al-Quran al-Karim »Traduction du Coran par le Dr Salah Ed-Dine Kechrid, Dar El-Gharb El-Salam, 5ème édition, 1990

181 dans la tradition. Cependant, d’autres rites ne trouvant pas forcément échos dans la religion se mêlent à des devoirs religieux. Dans son ouvrage Ngoma et mission islamique (Da’wa) aux

Comores et en Afrique orientale, Ahmed Abdallah Chanfi décrit parfaitement ces étapes en

insistant sur leurs particularités. En effet, de la section du cordon ombilical suivie de l’enterrement du placenta, puis du Ubuwa hagnwa215 en passant par l’Adhàn216 au choix du prénom de l’enfant et enfin le Akika217, la séparation entre obligations religieuses, rites coutumiers et sunna218, reste très difficile à faire car l’ensemble est lié de façon de plus en plus inextricable et forme un tout. Ainsi beaucoup pensent que les Maoulid des cinquième et septième mois de grossesse préconisés par la coutume sont des actes religieux tandis qu’ils jugent le fait de cacher le prénom du nouveau né dans un lieu sûr et secret avant de le révéler comme issu de la tradition alors qu’inversement, le premier est bel et bien un rite coutumier et le second un acte inspiré de la sunna du prophète (pbsl).

Cette éternelle interaction ou souvent interférence entre les deux origines des rites entrainent des incohérences dans la vie de tous les jours chez des personnes qui se veulent et se proclament profondément musulmanes. A l’exemple du Akika qui est une pratique religieuse fortement recommandée pour tout père musulman mais transposée dans certains villages de la Grande Comore, en prestation coutumière dans le cadre du anda. Nous pourrions citer d’autres exemples de pratiques religieuses aspirées et inscrites dans les prestations coutumières comme la circoncision « Hu rumwa saya ».

Aux Comores, comme dans la plupart des sociétés, la naissance et la mort sont des évènements qui surviennent à une famille au sein d’un groupe. Ils concernent donc tout le monde et en ce sens, autant le village vient féliciter et célébrer la venue d’un nouveau-né, autant il prie pour la disparition d’un membre du groupe. La compassion, la solidarité et la communion étaient les sentiments qui animaient à l’origine le recueillement de chaque villageois au devant de la famille d’un défunt et du défunt lui-même. Avec le temps, ces sentiments ou valeurs humaines ont cédé place à un trio de codes alliant les sentiments