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Un autre aspect de la francophonie, la littérature comorienne : société, histoire, culture et création

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Academic year: 2021

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Un autre aspect de la francophonie, la littérature

comorienne : société, histoire, culture et création

Thoueïbat Djoumbé

To cite this version:

Thoueïbat Djoumbé. Un autre aspect de la francophonie, la littérature comorienne : société, histoire, culture et création. Littératures. Université de la Sorbonne nouvelle - Paris III, 2014. Français. �NNT : 2014PA030039�. �tel-02905656�

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UNIVERSITE SORBONNE NOUVELLE - PARIS 3

ED 120 – Littérature Française et Comparée

Centre d’Études et de Recherches Comparatistes

Thèse de doctorat

Littérature Générale et Comparée

Thoueïbat DJOUMBE

UN AUTRE ASPECT DE LA FRANCOPHONIE, LA

LITTÉRATURE COMORIENNE,

SOCIÉTÉ, HISTOIRE, CULTURE ET CRÉATION

Thèse dirigée par

Monsieur le Professeur Daniel-Henri PAGEAUX

Soutenue le 4 Février 2014

Jury :

M. Daniel-Henri PAGEAUX, Professeur, HDR, Directeur de thèse

Mme. Zineb ALI-BENALI, Professeur, HDR, Université Paris VIII, Examinateur

M. J.C. Carpanin MARIMOUTOU, Professeur, HDR, Université de la Réunion, Rapporteur Mme. Dominique RANAIVOSON, Professeur, HDR, Université de Metz, Rapporteur

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Résumé

Un autre aspect de la francophonie, la littérature comorienne : société, histoire, culture et création.

Cette thèse interroge les origines, les interférences et la production de la littérature comorienne d’expression française. Au confluent entre critique littéraire, historiographie anthropologique des sources et analyse des thématiques dans la création, elle questionne aussi la notion de réception dans un contexte éditorial minimaliste où langue d’écriture et langue vernaculaire s’interfèrent. En près de 30 ans, les quelques 160 ouvrages, publiés de 1985 à nos jours, laissent percer des débuts lents et difficiles. Une réalité qui sera contredite à la fin des années 90 où des maisons d’éditions, même éphémères, naissent avec pour mot d’ordre, promouvoir la littérature comorienne. Va alors s’amorcer une dynamique nouvelle inscrite par le nombre et la variété des genres édités, la multiplicité des thématiques abordées et par l’orientation des revendications littéraires d’ordre esthétique en écho à des revendications identitaires. Parallèlement, transparaît une forme de tâtonnement textuel qui laisse apparaître une dualité narrative sous-tendue dans l’organisation fictionnelle et narratologique des œuvres et mettant en place un type de personnage-pensée à l’origine d’une hybridité textuelle. Par conséquent, cette thèse procède à une forme de bilan de ces trente années d’écriture suivant deux axes d’analyse. Un axe chronologique qui fait coïncider des éléments liés à l’histoire du peuplement avec l’établissement d’une écriture pour les îles afin d’appréhender le contexte originel de production; un axe analytique et herméneutique recoupant faits historiques et sociaux en rapport avec les objets ou motifs de production et révélant la source des interrogations des écrivains comoriens francophones.

Mots clés : Littérature orale et écrite comorienne, Littérature francophone de l’océan indien, société, culture et religion aux Comores, création et réception, édition, hybridité textuelle, esthétique de la violence.

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Abstract

Another facet of Francophonie: Comorian literature, society, history, culture and creation

This thesis questions the origins, interferences and the production of French-speaking Comorian literature. At the junction of literary criticism, anthropologic historiography of the source documents and thematic analysis within the creation, it also investigates the notion of reception in a minimalist editorial context where the written and the vernacular languages interfere with each other. For the past 30 years, the 160 publications that have been published, since 1985 to date, have shown slow and difficult beginnings. A trend that would be reversed from the late 1990s, where many publishing houses have emerged, even if it was quite briefly for some of them, with a shared goal: to promote Comorian literature. A new trend will then begin as proven by the number and variety of genres being published, the diversity of the themes discussed, and the direction of the literary assertions of an aesthetic angle in response to identity assertions. At the same time, a form of textual hesitation transpired, shedding a light on a narrative duality, from a narratologic and fictional organisation of the publications, highlighting a type of character-thought creating a form of literal hybridity. Therefore, As a consequence, this thesis proceeds a kind of statement from thirty years of writing according to two axis of analysis. A chronological axis matches elements which are linked to the peopling History with the establishment of a writing for the islands in order to grasp the original context of production; an analytic and hermeneutic axis matching historical and social facts related to subjects or sources of production and revealing the sources of French-speaking Comorian writers’ questionings.

Key words : Oral and written Comorian literature, French – speaking literature from the Indian Ocean, Comorian society, culture and religion, creation and reception, edition, textual hybridity, violence aesthetic.

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A ces êtres éphémères qui, au détour d’une rencontre fugace, se sont accrochés à mon cœur, Thuwé, Seilhan, Celine, Soumeya, Wafikh, parce qu’il faut du temps pour accomplir certaines choses.

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Remerciements

Exprimer sa gratitude n’est pas chose aisée surtout lorsque celle-ci va en direction de plusieurs personnes, car, c’est bien grâce au soutien, aux encouragements et à l’aide de ces amis que j’ai pu parvenir au terme de ce travail.

Mais puisqu’il faut commencer, voudrais- je en premier lieu, présenter mes sincères remerciements à mon Directeur de Thèse, Monsieur le Professeur Daniel-Henri Pageaux pour ses précieux conseils, et le temps qu’il m’a consacré. Encadrer la jeune maman que je fus, l’étudiante que je continuais d’être et l’enseignante que je devenais s’avéra chose ardue, et pourtant, j’ai pu trouver, en Monsieur Pageaux, une oreille conciliante, ferme et bienveillante. Ma reconnaissance va aussi aux professeurs Jean Bessière, J.C Carpanin Marimoutou, Dominique Ranaivoson et Zineb Ali-Benali pour leur participation en tant que membres de mon jury de thèse.

Une thèse est un travail de longue haleine or celle-ci n’aurait pu aboutir sans la famille. Je remercie donc ma mère pour m’avoir transmis le sens de la persévérance, mes frères et soeurs dont Hafidhou, Naïlat et tout particulièrement Laïlat pour leur disponibilité et leurs requêtes qui m’ont sans cesse permis de gagner en confiance. Merci à Faridat pour ses critiques pointues et avisées. Une pensée de tendresse à ma petite sœur Malika pour ses longues journées à veiller sur mes enfants tandis que nous arpentions, Nourdine et moi, les rayons des bibliothèques de Paris. Et je pense à mon père, ce drôle de marginal.

Mes remerciements s’adressent aussi à ceux de mes cousins qui m’ont donné l’impression de faire quelque chose de particulier et de grand : Karima, Wahab, Ahmed, Fatouma, Kathé et surtout Latufa Mohamed, dont les encouragements m’ont accompagné dans les périodes de lassitude. Enfin, je ne peux oublier mes amis et mes collègues qui m’ont constamment apporté aide et soutien. Je souhaite également exprimer ma gratitude à Mohamed Lihoma et Msa Ali Djamal des éditions De la Lune et Mohamed Ahmed Chamanga de Komédit pour les prêts d’ouvrages que mes maigres moyens d’étudiante ne pouvaient me procurer.

À présent, ma tendre reconnaissance va à Amane, Faïda et leur papa, mon co-équipier et mari sans qui, avec toute la volonté du monde, il m’eut été impossible d’achever ces travaux. Merci Nourdine, d’être ce que tu es, un rêveur et un fou.

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6

SOMMAIRE

INTRODUCTION………..14

PARTIE I………...38

LA LITTÉRATURE COMORIENNE, ENTRE TRADITIONS ET MODERNITÉ I. LA LITTÉRATURE ORALE………...39

I.1 Une littérature prédominante………...39

I.1.1 Littérature orale et/ou tradition orale………40

I.1.2 Une littérature de tous les instants………43

a) Les chants, rythmes des grands moments de la vie………...43

b) L’éloquence au service des conflits………..45

I. 2 La littérature orale comme garante de l’histoire des îles………...47

I.2.1 Traditions, Transmission et connaissances………...47

a) Une histoire qui se transmet………..47

b) La littérature traditionnelle, socle d’identité culturelle……….50

I.2.2 Aux origines des croyances mythologiques………..51

a) Origines du mythe……….52

b) Mythe de l’arrivée des Djins et Séra (esprits et démons)………….52

c) Mythe de la destination Ultime : Djazaïr al Kamar………..54

I.3. Différents aspects de la littérature orale……….55

I.3.1 Une réalisation sous plusieurs formes………...55

I.3.2 Le niyandu : une poésie épique……….60

I.3.3 Le hale ou le conte traditionnel……….64

a) Le cérémonial autour du conte………..65

b) Les motifs et les personnages récurrents du conte comorien………68

c) Un personnage à part, Ibunaswia……….. 70

d)Les contes, des récits d’apprentissage………...72

II. DE L’ORALITÉ A L’ÉCRIT, ÉTAPES D’APPARITION DE LA LITTÉRATURE ÉCRITE………76

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7 II.1.1 Les trois grandes périodes historiques des Comores comme étapes

d’établissement d’une littérature écrite pour les îles……… 77

a) L’écriture sous les sultanats……….. 77

b) L’écriture sous le protectorat et la colonisation : une organisation disciplinaire et instructive à deux vitesses, l’école et le chioni…… 79

c) L’écriture de l’après France : fragilités des structures scolaires…...86

II.1.2 La littérature écrite, une littérature inspirée des œuvres orales………...88

a) Les débuts de la littérature écrite……….. 88

b) De la nécessité de graver l’histoire………... 90

c) De l’oralité à l’écrit, l’exemple du Hale et du Tiyatiri………..92

II. 2 Des textes et des genres……….98

II.2.1 Les premiers textes écrits……….98

a) Ouvrages à portée anthropologique………...98

b) Ouvrages officiels ou juridiques………100

II.2.2 Les genres de l’écrit………...100

a) Essai de classification………..100

b) Le lesso, un livre mobile……….103

c) La poésie : rythmes anciens et modernes………104

d) Le théâtre, genre transposé et/ou importé………...107

II.2.3 Qu’en est-il du polar, de l’autobiographie, de l’épistolaire, du journal intime ?...110

a) Des univers pas encore visités : le roman épistolaire, le journal intime, le récit fantastique………...110

b) Des genres en balbutiement : l’autobiographie, le polar, le roman policier……….111

III. CRÉATION/RÉCEPTION, LES DIFFICULTÉS LIÉES A LA LITTÉRATURE ÉCRITE ………. 114

III.1. L’édition ou ses moyens, une industrie longtemps vide de sens……… 114

III.1.1 Bilan éditorial de la parution du premier roman à nos jours………...115

a) Le retard du développement technique et technologique…………115

b) Première conséquence première : l’absence de maisons d’édition.119 c) Évolution de l’édition de 1985 à 2010……… 120

(9)

8

III.1.2 Editer, se faire éditer, s’éditer, quel recours pour publier ?...122

a) Proposer son manuscrit et être édité………... 122

b) L’Autoédition……….124

c) Une tendance originale: être publié par plusieurs éditeurs………. 129

d) L’avancée via Internet……… 130

III.1.3 Les réponses des intellectuels………...133

a) Le rapport conflictuel entre livre et argent………..133

b) Les problèmes de promotion : production, publication, diffusion..134

c) Du désir de promouvoir à la création de maisons d’éditions……..138

III.2. Écrire en shikomori, les difficultés relatives à la langue………145

III.2.1 Le comorien, langue ou dialecte à écrire?...145

III.2.2 Les codes de l’alphabet latin ou arabe ?...147

III.2.3 Transcrire en shikomori et non écrire, un des partis pris des auteurs...149

III.3. L’écrivain face à lui-même : sa langue, son peuple………...151

III.3.1 L’écrivain son art ou sa langue : le choix cornélien……….151

III.3.2 Du pour qui écrire au pourquoi écrire : la question du lectorat………154

III.3.3 Etre comorien, parler comorien cependant… écrire en français……..157

PARTIE II LITTÉRATURE ET SOCIÉTÉ : LA LITTÉRATURE COMORIENNE FRANCOPHONE OU LE MIROIR DE LA TENSION INDIVIDU ET SOCIÉTÉ ….161 IV/ LA SOCIÉTÉ COMORIENNE, POUR UNE APPROCHE PARA TEXTUELLE DE L’ESTHÉTIQUE LITTÉRAIRE………162

IV.1. Mœurs et coutumes d’une société de métissage………162

IV.1.1 Islam et animisme : l’islam comorien, la religion des antithèses…….163

a) L’apparition de l’Islam………163

b) Pratique modérée de l’islam comorien………163

c) L’islam comorien une combinaison d’antithèses………169

d) Islam et matriarcat………...171

IV.1.2 Du traitement de la cohabitation du fait religieux et des sciences occultes dans la littérature………...174

(10)

9 b) Rites profanes et sciences occultes : les djinns, les wafu, les

mazetwani………180

c) Sciences occultes et guérisseurs………..184

d) Personnages vils et sans foie, portraits sombres des religieux IV.1.3 La société comorienne, un individu pluriel………..193

a) Une éducation du collectif comme source d’équilibre social……..193

b) Autopsie des règles sociétales aux Comores : des références bien marquées………..195

IV.2. Coutumes et traditions………...198

IV.2.1 Le Mila Na’ntsi en Grande Comores ………..198

a) Hiérarchies et strates générationnelles……….. 198

b) Hiérarchies et strates générationnelles à Ngazidja………. 200

c) Les charges relatives à tout grand comorien………...202

IV.2.2 Le anda na Mila……….204

a) Les étapes du Grand Mariage………..205

b) Pouvoir de l’Honneur et passage initiatique………... 212

c) Le gungu, une épée de Damoclès sur les habitants des Lunes……213

V/ LA LITTÉRATURE ÉCRITE OU LE PROLONGEMENT DE LA QUESTION INDIVIDU ET SOCIÉTÉ……… 214

V.1 L’intellectuel et la société : le conflit identitaire………..214

V.1.1.L’élite et la notabilité……….215

a) L’élite politique et la notabilité, le lien causal ou de subordination……….215

b) Briller dans les salons, se cacher au bangweni, Idi Wa mazamba 218 c) Lorsqu’un homme est noble, notable et fonctionnaire d’état……..222

V.1.2 L’individu bâillonné : un compromis impossible entre l’auteur et son univers………225

a) L’impossibilité d’exister indépendamment de la société…………226

b) S’extraire du clan pour exister……… 228

V.2. Choisir de s’opposer c’est devenir marginal, les topoï………...231

V.2.1 De l’opposition à la mort………...231 a) La mort en réponse au désespoir, Mkaya, Fatma, Sitty Mahabouba

(11)

10 b) La mort comme issue fatale à la contestation :

La toute petite fille, Idi Wa Mazamba………....235

V.2.2 La folie, entre aliénation et parole de vérité………..236

a) La disparition du bon sens………...236

b) Djitihadi ou le mythe du fou détenteur de vérité……… 237

c) La folie comme réponse à son individualité : de la marginalisation à la folie……….240

V.3. Un individu en marge : la femme, prétexte littéraire et social………243

V.3.1 La femme au regard de la société………. 244

a) La femme, élément constitutif et créatif du mythe cosmogonique 244 b) Le matriarcat en terre musulmane, un privilège paradoxal……… 247

c) Le personnage du mwana zidakani ou la bienséance du silence pour marque de pudeur……… 249

V.3.2 Thématiques et rôles de la femme en littérature comorienne…………252

a) Des thèmes d’hommes……… 252

b) La femme comme vecteur de l’action……….252

c) Des choix de femmes portés par des voix d’hommes……….255

V.3.3 Visages de la femme dans la trame romanesque………...259

a) Portraits ou clichés………..259

b) La femme comme emblème du sentiment amoureux……… 260

c) La femme : allégorie de l’opposition Orient/Occident………262

V.3.4 Écriture et féminité………265

a) La scolarisation tardive des femmes………265

b) Une plume de femmes ? Touhfat Mouhatre, une écriture sensorielle entre rythme et métonymie……….266

PARTIE III LA LITTÉRATURE COMORIENNE DE LANGUE FRANÇAISE, REFLET D’UNE DYNAMIQUE NOUVELLE………. 270

VI. UN ART EN MOUVEMENT………..271

VI.1 Une nouvelle littérature à travers le roman comorien……….271

VI.1.1Les origines du roman comorien………...271

a) Sources et provenances………271

(12)

11

VI.1.2 Romans de la première génération………..277

a) Romans Historiques……….277

b) Le romancier : un témoin oculaire de son époque………. 280

VI.1.3 Romans de la nouvelle vague, image d’une littérature moderne naissante………283

a) Visages du roman comorien d’expression française………...283

b) Dynamisme du genre romanesque et jeunes auteurs……….. 284

VI.2 La nouvelle poésie VI.2.1 Entre lyrisme classique et envolées nègres :………287

a) Anthologie d’introduction à la poésie comorienne d’expression française, Cris d’ici et d’ailleurs………287

b) Les Testaments de transhumance………... 290

VI.2.2 Pour un parti pris esthétique et pour une poésie washikomori………293

a) Nouvelles écritures Comoriennes, Paille-en-queue-et-vol……... 293

b) La poésie washikomori, une poésie du rythme et du bruit………. 297

VI.3. Visée cathartique des genres transposés : Le théâtre, le conte……….. 299

VI.3.1 Le théâtre, ou la mise en voix de la tragi/comédie: Le notable répudié………..300

VI.3.2 Une mise en scène des maux du réel………...302

a) Les Coulisses d’un mariage incertain ………302

b) Honneur ou bonheur ?...305

VII/ ROMANS, ESSAIS ET NOUVELLES : L’HYBRIDITÉ INTRA-TEXTUELLE DANS LE CONTEXTE DU SHIKOMORI OU DE LA COMORIANNITÉ………...307

VII.1. De la stagnation d’une fiction réalité………307

VII.1.1 Une fiction romanesque à deux voies, Le bal des mercenaires……...307

VII.1.2 Le roman comorien francophone, une mise à distance factice……...311

a) Une écriture pudique………. 311

b) Un « il » excentré pour l’affleurement du « je »………313

c) De l’expropriation du « il » historico-social à l’identification du « je » individuel et personnel, Marâtre……….316

VII.2. Un narrateur impliqué, un auteur omniprésent……….318

(13)

12

a) Un personnage prétexte………...318

b) Entre personnage actant et personnage-pensée………...319

c) Superposition des voix narrateur/personnages………321

VII.2.2 De l’essai au roman, une limite floue……….323

a) Qui parle ? Qui écrit ?... 323

b) Nouvelles sans histoire et hybridité textuelle………. 325

VIII. ENJEUX ET MOTIFS EN LITTÉRATURE COMORIENNE FRANCOPHONE…..329

VIII.1. Deux axes d’écriture : revendication et contestation ………..329

VIII.1.1 Constat et révolte………...329

a) Dans l’écriture romanesque……….329

b) En poésie, pour l’éveil des consciences………..331

VIII.1.2 Écrire, un acte contestataire……….. 337

a) L’écriture, une arme de contestation………...337

b) Écrire pour dénoncer………...339

c) Contre l’art pour l’art : des textes pour la mise en voix de la position intellectuelle et de l’engagement social……….340

VIII.1.3 L’onomastique au secours de la contestation………343

a) Onomastique et dérision autour des noms propres……….. 343

b) Onomastique et dérision autour des sigles et titres donnés aux représentants de l’état………...347

VIII.1.4 Pour une esthétique littéraire comme assise d’une identité intellectuelle et culturelle………348

a) Écrire différemment, c’est exister autrement……… 348

b) L’écriture ou la trace d’une identité propre……….350

VIII.2. Littérature et Terre d’origine, traitement et relation au lieu dans la Littérature comorienne………... 352

VIII.2.1 Attraction/ répulsion ou l’ambivalence du rapport au lieu…………352

VIII.2.2 L’attachement aux îles………...358

a) Le lieu, point de départ et point de retour………... 358

b) Attachement à la Terre mère………... 359

c) Terre, mère de la mémoire……….. 362

(14)

13

a) Une littérature de l’exil ?...364

b) Poésie du départ………..366

c) Chants de l’errance ………..367

VIII.2.4 De la frustration à la haine du lieu, les Comores, une littérature du désamour……… 369

a) Les Comores, entre motif littéraire et personnage éponyme au visage antihéroïque ………. 369

b) Le rejet de la mère patrie tant chérie………...370

c) Mythe et initiation, le héros face à son destin : agir et non subir 375

d) Le motif de l’échec………..376

VIII.3. Esthétique de la violence et de l’obscène………...378

VIII.3.1 Violence et virulence des mots………..378

a) Les mots entre violence et obscénité………...378

b) Violence de l’écriture et écriture de la violence………..381

VIII.3.2 Un pays que l’on ne chante pas, un peuple qui déchante, un écrivain désillusionné……….385

a) D’une réalité violente au tableau d’une contre-utopie……… 385

b) Une réalité dystopique……….387

CONCLUSION……….. 390

BIO-BIBLIOGRAPHIE……… 396

BIBLIOGRAPHIE………... 429

INDEX………. 438

Index des auteurs cités Index des ouvrages cités ANNEXES……….. 442

(15)

14

INTRODUCTION

Cette thèse est intitulée Un autre aspect de la francophonie, la littérature

comorienne ; Société, histoire, culture et création. Elle traite la question de la littérature

comorienne dans son ensemble car nous souhaitons analyser les contextes de son émergence, ses inspirations. Mais pas uniquement, entendu que nous nous proposons aussi d’examiner les aspects de civilisation et d’histoire des Comores dans la mesure où il y a interaction entre la littérature, l’histoire, et la civilisation.

Histoire profondément politique, culture foisonnante axée sur une solide tradition coutumière, civilisation multiforme à l’origine de disparités visibles (dialectes, pratiques sociales et religieuses…), autant d’éléments sources du fond thématique de la littérature des Comores. Celle-ci se proposant de donner à voir et à comprendre tout en interrogeant à la fois cette histoire tumultueuse et ces traditions souvent jugées archaïques.

Hier, il était nécessaire, au vu de la méconnaissance entourant l’archipel des Comores, de le restituer géographiquement afin d’éclairer le lecteur par ces quelques bases essentielles : Qu’est-ce-que les Comores ? Où se situent-ils? Ainsi, le chercheur se faisait un devoir de toujours présenter, en début d’ouvrage, l’archipel dans son ensemble géographique, culturel et parfois social et d’en relever les particularismes : îles aux multiples apports, îles aux parfums…S’ajoutait à ces attraits de poésie un retour inévitable à la civilisation et à l’histoire du pays, notamment l’histoire politique.

Aujourd’hui les choses ont évolué grâce aux différents travaux de recherches effectués sur l’archipel, aussi bien en sociologie, en histoire qu’en ethnologie. Évoluées aussi grâce aux arts urbains (la musique, le graph), au point que de nombreux jeunes collégiens de France énoncent des mots en comoriens entendus dans les textes d’artistes franco-comoriens1 devenus incontournables. En ce sens, les gens connaissent un peu mieux de quoi il s’agit, lorsque nous parlons des Comores. Il pourrait alors sembler malhabile d’en revenir à une présentation de l’archipel dans cette introduction. Pourtant, aujourd’hui plus qu’hier, il s’avère opportun de restituer le cadre géographique et historique de l’archipel, même de façon succincte. Cela devient une nécessité car un devoir de mémoire.

Situées dans le canal du Mozambique, à équidistance de Madagascar et de la côte sud Africaine, les Comores sont un archipel de quatre îles: Ngazidja (Grande Comore), la plus

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15 grande île, Ndzuani (Anjouan), Maore (Mayotte) et Mwali (Mweli), la plus petite. Appartenant à l’aire indianocéane, elles partagent avec la plupart des îles de l’Océan Indien, une langue commune, le français. D’un autre côté, elles développent des aspects linguistiques les reliant à l’aire bantoue, tout en intégrant dans son parler, une forte imprégnation d’arabe. Ce métissage de la langue se retrouve aussi dans la culture car l’archipel a été traversé, comme nous le verrons plus loin, par différentes phases de peuplement et donc différentes époques de migration. Des Africains d’origine bantoue aux Arabes venant de Shiraz, des Indonésiens aux Européens dont les français en particulier, les îles se sont constituées au travers de ces communautés.

Même s’il n’est pas encore possible de dater avec précision les périodes d’apparition des premiers habitants de l’archipel ni d’identifier avec exactitude leur provenance, les recherches les plus sûres les font remonter au VIIIème siècle de l’ère chrétienne. Ces trouvailles laissent aussi entendre que les Comores étaient initialement habitées par des africains du continent et entretenaient des relations commerciales avec les pays du Golfe arabo-persique. A ces deux peuples et à leur mode de vie, leur religion, leur mode de pensée, viennent s’ajouter d’autres apports provenant des îles voisines comme Madagascar, Zanzibar ou d’autres pays comme l’Inde, l’Indonésie ou même la Chine. Les Comores sont nées de ce métissage venu d’horizons lointains et qu’elles ont pourtant su adopter pour ensuite adapter. La littérature comorienne décrit le même schéma de pensée. Ses inspirations sont diverses, ses réalisations aussi. Les premiers textes comoriens sont en swahili ou en arabe. En témoignent les chroniques anciennes d’Abdul Latwif dont l’originale est en swahili, et celle du Cadi Omar de Mayotte écrite en arabe.

Historiquement, l’archipel des Comores compte quatre îles. Culturellement, les mêmes traditions se transmettent de génération en génération, selon quelques variantes. Socialement et religieusement, les mêmes valeurs se partagent et la soumission aux préceptes musulmans est de rigueur dans chacune des îles. Or politiquement, les Comores sont divisées en deux entités : l’Union des Comores constituées des trois îles indépendantes et Mayotte, devenue 101ème département français le 31 mars 2012. Un statut politique qui fait suite au référendum du 29 mars 2009, invitant les mahorais à se prononcer sur leur volonté de voir évoluer le statut de Collectivité d’Outre Mer en celui de Département d’Outre Mer. Cette départementalisation symbolise l’aboutissement d’un processus impulsé dès la consultation électorale du 22 décembre 1974 où Mayotte choisit de rester sous le giron français, tandis que les trois autres îles optaient pour l’indépendance. Une indépendance proclamée

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16 unilatéralement par Ahmed Abdallah le 6 juillet 1975. Il sera renversé par Ali Soilihi quelques mois plus tard, le 3 août 1975. Dès lors, l’archipel bascule dans une histoire politique mouvementée ponctuée par des coups d’états et de tentatives de coups d’état à répétition. Une situation politique si instable qu’elle nourrit chez les citoyens des revendications à contre courant. En effet, comme le rappelle Soeuf Elbadawi rappelle, « Contre toutes logiques de communion héritées de l’histoire, les îles Comores se sont engagées il y a 27 ans dans la voie du séparatisme. »2 Chaque île se veut autonome, refusant toute marque d’assimilation aux autres, prônant une identité à part. Une situation devenue critique en 1997, lorsque Ndzuani proclame son indépendance et exprime le souhait de réintégrer le territoire français. Un état d’urgence qui a amené à repenser la constitution Comorienne en 2002, faisant passer la République Fédérale Islamique des Comores à l’Union des Comores, où chaque île est gouvernée de façon autonome mais dont l’ensemble est présidé par le président de l’Union. Parallèlement, l’histoire politique de Mayotte s’écrit en marge, cristallisant les antagonismes et les rancœurs les plus extrêmes entre comoriens de Mayotte et ceux des autres îles, les clandestins3. Mayotte est une île française, les mahorais sont donc français et non comoriens, comme beaucoup aiment à le rappeler.

Cette période de l’histoire politique des îles, toujours actuelle, offrira une source inépuisable d’interrogations, de questionnements à l’autre, à l’identité dont la littérature et notamment la poésie se fera l’écho.

Au vu de tous ces éléments, il serait alors justifié de nommer « littérature comorienne » seulement l’ensemble de la production littéraire des îles indépendantes. Et nous aurions tôt fait et peut-être bien fait de ne considérer qu’elles. Cependant, nous avons choisi d’étudier la littérature comorienne dans une globalité culturelle, et de parler d’une littérature pour les îles de la Lune, Mayotte comprise. Car si le statut politique diffère par les soubresauts de l’histoire, la culture, les traditions, les croyances et la société sont les mêmes, à quelques nuances près d’une île à l’autre. Ces trois points, culture, histoire et société formant

2 Elbadawi Soeuf, Archipel des Comores, un nouvel élan ?, Africultures n°51 , Octobre 2002, L’Harmattan, 2002 3 De ces stratégies découlent nombre de problèmes dont la mise en place du visa Balladur en 1995, obligatoire

pour tout comorien des îles indépendantes, voulant se rendre à Mayotte. Conséquence des ces lois, les comoriens en partance pour Mayotte embarquent sur des bateaux de fortune, les Kwassa Kwassa, et chassés par les polices maritimes françaises, sont à l’origine de nombreux morts et disparus sur les côtes entre Anjouan et Mayotte. De plus, considérés et appelés « clandestins » lorsqu’ils sont sur l’île, les comoriens de la partie indépendante sont pourchassés, attrapés et expulsés massivement chez eux, lorsqu’ils ne sont pas détenus dans des conditions douteuses et entassés dans la prison de Voidjou. Des évènements que déplorent de nombreuses associations humanitaires, relayées par quelques écrivains. Des évènements que l’on retrouve donc en thématique de fond dans de nombreux textes comme Hamouro de Salim Hatubou.

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17 le fond thématique de notre champ d’analyse, les Comores et sa littérature, il nous apparaît comme évident et judicieux de porter notre attention sur l’archipel en tant qu’unité culturelle et géographique. En ce sens, nous pouvons et choisissons de proposer une étude sur la littérature comorienne francophone de l’archipel dans sa totalité. En effet, quel œil extérieur pourrait différencier un mariage traditionnel à Ngazidja d’un mariage traditionnel à Mayotte, si personne ne le lui dit ?

Il s’agit donc de proposer une analyse des différents aspects de la littérature comorienne dans son ensemble archipélique ainsi que d’émettre des hypothèses théoriques sur ses réalisations. Partant de cette position, nous avons tenté de poursuivre nos recherches sans nous attarder sur les questions politiques qui séparaient les îles. Or, force a été de constater qu’en procédant ainsi, nous niions certaines des réalités du pays. En effet, les îles conservent bien des particularités les unes par rapport aux autres. Les romans bien qu’écrits en français reflètent des préoccupations différentes d’une île à l’autre. Par crainte de nous inclure dans cette logique de division des îles, nous refusâmes d’admettre ses diversités, des particularismes qui pourtant forment le champ culturel et diversifié de l’Archipel des Comores.

Ce champ culturel rend compte de vastes domaines qui témoignent chacun de la pluralité des îles mais surtout de leur richesse culturelle. La musique, la danse, la peinture, la sculpture, autant de domaines qui participent au renouveau de l’art aux Comores. La littérature en fait partie.

Mais avant tout, orale et traditionnelle, elle est présente de façon quotidienne, récurrente et continue dans la société comorienne. Cette littérature, dont les origines remontent à des générations et des civilisations tout aussi différentes les unes des autres et qui ont emmené aux îles leur culture propre et leur mode de vie, est une littérature de la mémoire avant toute chose. Une mémoire qui se transmet lors des nombreuses manifestations liées aux étapes de la vie de chaque comorien par un langage oral nécessitant des codifications, des techniques et qui fait de la littérature orale un art toujours en mouvement. Celle-ci emplie la scène littéraire comorienne et ce depuis toujours, tel que nous le verrons au cours de notre travail.

Cependant aux côtés de cette oralité, se développe un aspect longtemps marginalisé car réservé à une élite : la littérature écrite qui, malgré son existence lointaine n’a laissé que peu de traces de son évolution. Alors qu’on compte un nombre important de genres oraux (plus d’une dizaine entre les poèmes chantés, les discours, les contes…) qui restent encore

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18 grandement exploités et toujours réactualisés, on ne compte que quelques genres écrits et parmi, eux, certains sont tout récents dans l’univers littéraire comorien. Ces genres comme le roman ou le théâtre ont été importés dans les îles il y a à peine une trentaine d’année. Nous savons que l’art écrit marque une forme d’évolution de la part des civilisations la possédant ; aux Comores, il apparaît comme une ouverture vers l’extérieur en aidant à la fois à la continuité d’un patrimoine riche et varié comme la culture, et en lui permettant également de sortir de son isolement, isolement naturel du fait de son insularité. En effet, la langue la plus couramment utilisée, si ce n’est la seule, pour écrire est le français (nous parlons ici de textes faisant appel à un univers plus ou moins fictionnel), c’est la langue d’écriture des nouveaux auteurs, qu’il s’agisse des poètes, des romanciers ou des dramaturges. Ainsi, non seulement nous constatons l’arrivée de genres nouveaux dans l’espace littéraire comorien, mais en plus, nous lisons ces textes dans une langue différente de la langue maternelle des auteurs en question. Ce problème de la langue n’est pas relatif aux Comores seules, il prend en compte un grand nombre de pays ayant été soumis à une domination étrangère comme lors des colonisations.

Nos différentes recherches

L’idée de travailler sur une littérature aussi neuve nous est apparue comme une gageure, un défi à relever. Or, lorsque nous nous sommes aperçues du travail acharné et immense, de la minutie excessive et importante que cela impliquait, nous fûmes beaucoup plus effrayée. Dans les débuts, nous ne savions pas vraiment où nous allions. Nous savions ce que nous voulions, ce que nous espérions réaliser, l’importance que ce travail revêtait pour nous, mais comment nous orienter ou alors, par où commencer.

Nous avons alors été cherché les renseignements à la source même, entreprenant un voyage aux Comores4 afin de pouvoir consulter certaines données sur place puisque la plupart des essais ou des études existant se trouvent au CNDRS (Centre National de Documentation et de Recherches Scientifiques), à Moroni et essayer de rencontrer les quelques romanciers restés au pays. Mais là aussi, les choses ne furent pas si simples, il fallait des relations, et la plupart des écrivains n’étaient pas sur place. De plus, nous ne pouvions rester aux Comores qu’un mois ce qui rendait les recherches encore plus difficiles puisqu’il fallait faire vite. Nous n’avions pas assez de temps, ne connaissions que peu de monde. Cependant, avant de partir,

4 Deux voyages ont été entrepris dans cette direction, un premier séjour de deux mois remontant à Juillet/Août

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19 nous avons obtenu grâce à l’aide de certaines personnes, des noms et des adresses de spécialistes susceptibles de nous aiguiller et de nous mettre sur une voix. De retour en France nous avons pris contact avec le linguiste Ahmed Mohamed Chamanga, nous avons eu la chance par la suite d’être conviées à des manifestations littéraires et des colloques autour de la littérature comorienne, et d’être invitée en tant que critique à effectuer des analyses sur certains manuscrits avant publication. Le milieu des lettres comoriennes est un milieu très ouvert et la plupart des auteurs rencontrés ont accepté de nous aider en répondant à nos questions.

Malgré ces marques de soutien, nous n’en savions pas vraiment plus. Les recherches furent peu fructueuses et ce malgré la consultation de la plupart des ouvrages des différentes bibliothèques où il nous était possible de trouver des données sur les Comores et sa littérature, mais en vain. Rien ne concernait la littérature comorienne écrite comme objet de recherche. Nous nous trouvâmes si souvent confrontée au problème de documentation précise que si nous n’avions pas été portée par ce fond de nationalisme allié à notre curiosité autour des lettres en général et de la recherche en particulier, nous aurions abandonné pour un sujet moins prenant mais plus documenté.

Une autre grande difficulté rencontrée, et pas des moindres, concernant la documentation et la lecture des ouvrages de références, résidait dans une quasi impossibilité de trouver les textes littéraires eux-mêmes, à savoir romans, théâtres, recueils de nouvelles et de poèmes. Le terme dénicher nous vient même à l’esprit lorsque nous regardons les efforts fournis, parfois en vain, pour nous procurer les œuvres formant notre corpus d’étude. Et en effet, maintes fois nous avons dû faire appel à des connaissances de connaissances d’amis en vue de trouver un ou deux ouvrages. Car si une partie des œuvres est éditée chez des éditeurs fiables et viables à l’instar de Komédit, les Editions de la Lune, les Editions du Baobab et l’Harmattan, l’autre partie se dispache auprès de divers éditeurs dont la vie fut soit trop brève soit effective mais inactive. En cela et pour cela, le courage et la ténacité aidant, nous avons dû chercher encore et encore afin de nous constituer un corpus optimal. Or, malgré tous ces efforts, et malheureusement pour nous, des ouvrages sont restés introuvables. Des romans comme La prostitution en héritage, ou L’enfant meuble écrits par Fahoudine Ahamada-M’zé et édités aux éditions Kwanzaa, deux romans qui auraient pu semble-t-il enrichir nos lectures, par la thématique développée, font partie de ces textes maintes fois recherchés mais jamais obtenus. Et les réseaux d’amis et de connaissance constitués au cours de nos travaux et avant, n’ont pas permis de nous mettre en relation avec l’auteur. Ce n’est ici qu’un exemple parmi

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20 d’autres et nous déplorons fortement cette impasse. Cependant, cette difficulté ne se limitait pas à la possibilité ou non de mettre la main sur l’ensemble des œuvres dont s’ornait la littérature comorienne de langue française, tel que nous en avions réellement l’ambition, pensant cela possible, du fait de l’étroitesse du territoire et de la jeunesse de cette littérature. Loin de là. Elle touchait d’une part le moyen de se procurer l’œuvre en question, et d’autre part, les moyens financiers pour les acheter, dans les cas où nous retrouvions les références et que ces références existassent toujours. Financière car, beaucoup des textes du corpus n’étant nullement en bibliothèque, il fallait donc les acheter pour les avoir, et à cela, ajouter les frais de transports fréquemment induits. De quoi décourager les grandes volontés puisque, les délais de livraison, étaient de surcroit, imprécis et pouvaient parfois se rallonger.

Pour cela, nous devons de grands remerciements aux éditions Komédit pour avoir accepté de nous fournir gracieusement une partie de notre matière de recherche dont ils étaient les dépositaires, aux Editions de la Lune d’avoir prolongé cette solidarité. D’autant que nous avons conscience de faire partie des lecteurs donc acheteurs potentiels et nécessaires au développement de cette littérature, mais que ce développement passe aussi et surtout par les transits financiers.

Etat de la recherche

Aujourd’hui encore, il est difficile de trouver des données précises sur l’histoire littéraire des Comores. Beaucoup de sources semblent plus simples à puiser dans les « on dit ». Cela renvoie automatiquement au caractère encore très oralisé de la littérature comorienne. La problématique servant de ligne directrice à notre démarche scientifique s’oriente vers l’émergence d’une littérature comorienne francophone. Il s’agit de voir la Littérature comme une nouveauté participant aussi au prolongement de la littérature francophone au-delà des lieux et pays déjà listés : pays d’Afrique Centrale, ou d’Afrique du Nord, îles de l’Océan Indien (Madagascar, La Réunion, Maurice), Québec etc… Ce qui nous emmena dans un premier temps, à penser la littérature comorienne dans une optique francophone indianocéane. Nous consultâmes les ouvrages de Léopold Sedar Senghor,

Anthologie de la nouvelle poésie nègre et malgache de langue française5, de Jean-Louis

Joubert Littératures de l’Océan Indien6 mais le premier ne faisait même pas allusion aux

5

Senghor Léopold Sedar Senghor, Anthologie de la nouvelle poésie nègre et malgache de langue française, Presses Universitaires de France –PUF- Collection Quadrige, 5ème Édition, 2002.

6 Joubert Jean-Louis, collaborateur Ramiandrosoa Jean-Irénée, Littératures de l’Océan Indien, Vanves, Agence

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21 Comores. Le second en parlait mais il s’agissait bien plus d’un relevé historique des périodes de bouleversements politiques, socioculturels du pays que de sa littérature. Dans son ouvrage, il concluait ses travaux par cette phrase :

« Les longs retards de ce système éducatif expliquent la lenteur de la modernisation culturelle des Comores. Pendant longtemps, il n’a existé aucun journal. Rien d’étonnant, donc, s’il ne s’est pas développé de littérature comorienne moderne, ni en comorien, ni en français…. La littérature comorienne moderne reste un projet. 7»

Cependant, à l’époque de ces travaux, un recueil de contes mahorais Mayotte,

Légendes et histoires drôles 8, avait déjà été publié en 1986. Peut-être ne le mentionne-t-il pas

compte tenu du statut particulier de cette île. Pourtant, il fait référence au roman de Mohamed Toihir, la République des Imberbes, mais rien ne concernait la littérature comorienne comme objet de recherche.

Un autre ouvrage plus récent, L’océan Indien dans les littératures francophones9, analyse différents aspects inhérents au particularisme des îles sans jamais renvoyer aux Comores, comme si encore à ce moment là, en 2001, rien n’avait été écrit dans l’archipel. Or, le pays compte à cette date, plus d’une quinzaine de fictions littéraires toutes éditées chez l’Harmattan, sans compter le recueil de poème de Saindoune Ben Ali édité à la réunion, et l’incontournable anthologie de la poésie comorienne compilée par Carole Beckett. Ainsi, si l’on peut, à juste titre s’interroger sur cette absence, au vu de l’infime quantité d’ouvrages publiés par des auteurs comoriens du temps des recherches menées avant les années 2000, considérer comme légitime les oublis concernant la littérature Comorienne, il n’est du moins pas possible en 2009, de faire le même constat sans un certain dépit. En effet, encore une fois, alors que les Comores parviennent à s’imposer en rapportant des distinctions, avec des auteurs de plus en plus reconnus tels que Salim Hatubou, Nassur Attoumani, Nassuf Djailani et d’autres encore, des ouvrages sortent, proposant des travaux sur les littératures francophones sans même évoquer les Comores. Tel est le cas dans La langue française vue de l’Afrique et

de l’Océan Indien10 où Martin et Drevet proposent des entretiens avec vingt quatre écrivains d’Afrique noire et de l’Océan Indien mais pas un seul auteur comorien.

7

Joubert, op.cit, p.281

8

SaïdYoussouf, Légendes et histoires drôles, Mayotte, UDIR, 1986.

9 Issur Kumari R., Hookoomsing Vinesh Y., (Sous la direction de.), L’océan Indien dans les littératures francophones, Khartala, 2001

10

Martin Patrice, Drevet Christophe, La langue française vue de l’Afrique et de l’Océan Indien, Zellige éditions,

2009. L’ouvrage a été édité avec le soutien de la francophonie, préfacé par le secrétaire général de la

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22 Face à ces vides, nous repensâmes cette littérature dans une optique africaine francophone. Là nous trouvâmes un résumé de La République des Imberbes dans le

Dictionnaire des œuvres littéraires de langue française en Afrique au Sud du Sahara11.

L’auteur, Guy Ossito Midiohouan présente le roman et en propose un résumé. Il énonce en quelques traits les principales caractéristiques d’écriture en ces termes :

« Roman-reportage où la fiction tient une place plutôt mince se présente néanmoins comme une manière de bilan, et le lecteur attentif hésite parfois à entrer dans le jeu.12 »

Découlent par là les premiers éléments d’approche de cette littérature, une réalité historique et sociale transposée dans la fiction. Un aspect sur lequel nous nous attarderons dans cette étude, car éléments du réel se superposent à une transfiguration fictionnelle sans pour autant s’inscrire dans le cadre d’une littérature réaliste. Malgré ces pistes de lecture, Midiohouhan introduit sa présentation de l’archipel par :

« Les Comores sont un pays aussi méconnu en Afrique que la Guinée Equatoriale, tous deux pourtant membres de l’Organisation de l’Union Africaine. »13

Cette explication rendait compte des lacunes sur les Comores à l’époque où Mohamed Toihir était le seul romancier comorien.

En effet, force est de constater qu’encore aujourd’hui, rares sont les ouvrages théoriques traitant de la littérature d’Afrique et/ou des îles, Antilles ou Océan Indien et incluant les Comores. Dans son anthologie des Poètes d’Afrique et des Antilles14, Hamidou Dia ne cite aucun poète originaire des Comores. Or cette anthologie date de 2002. Saindoune Ben Ali a déjà publié Les testaments de Transhumance six années auparavant à la Réunion. Et si en effet, le contexte d’opacité entourant l’œuvre peut justifier cet oubli, il n’en est pas de même pour l’anthologie compilée par Carole Beckett. Celle-ci est publiée en 1995, chez l’Harmattan. En ce sens, les poètes figurant dans cet ouvrage étaient tout à fait à la portée d’Hamidou Dia. Or, aucun ne figure dans son anthologie. Et si l’on regarde de près cette compilation, on ne peut qu’imputer cet oubli à une méconnaissance d’un lieu, d’un pays. Ou être contraint de reconnaître qu’encore une fois, l’archipel des Comores n’a pas été perçu comme appartenant à l’aire culturelle africaine. Une position explicitée par Claire L. Dehon

11

Kom Ambroise, (sous la direction de), Dictionnaire des œuvres littéraires de langue française en Afrique au

Sud du Sahara, volume 2, de 1979 à 1989, L’Harmattan, 2002

12 Guy Ossito Midiohouan signe l’article sur La République des Imberbes. Il propose une analyse succincte et

critique de l’œuvre.

13 Idem

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23 dans son étude Le Réalisme africain15. Elle y propose une analyse sur le roman francophone en Afrique Subsaharienne et préfère considérer les réalités de l’océan Indien comme étant différentes de celles du continent, expliquant que :

« Il a paru essentiel d’inclure des livres venant du plus grand nombre possible de pays francophones de l’Afrique subsaharienne, laissant de côté toutefois ceux des îles de l’Océan Indien : Madagascar, Maurice, les Seychelles, les Comores et la Réunion parce que même s’il existe des points communs, il y a beaucoup trop de différences culturelles pour tirer des conclusions pertinentes.»

Or si d’un point de vue culturel les différences sont réelles, les rapprochements peuvent l’être aussi. Et d’un point de vue littéraire, on peut considérer aisément que :

« Néanmoins, le lecteur familier avec la tradition littéraire française ne peut manquer de questionner l’usage du terme « réalisme » à propos de ces textes. En effet, bien que cela ne soit pas une condition suffisante, il n’y lit de description développées ni de l’environnement, ni du physique, ni de la psychologie des personnages. De plus, il se voit forcé d’accepter comme « réaliste » la magie des sorciers ou le pouvoir des gris-gris dans lesquels il ne croit guère. »16

Ce propos sur le réalisme dans les littératures africaines s’applique aussi bien aux pays du continent que ceux à l’extérieur, dont les Comores.

De toute évidence, soit l’espace comorien n’attirait pas la curiosité des chercheurs francophones qui statuaient de manière approximative à un domaine vide. Sinon comment et pourquoi des auteurs tels que Jean-Louis Joubert, éminent spécialiste des littératures de l’Océan Indien, ne prennent-ils pas le temps d’analyser cette littérature des Comores d’une autre façon qu’en classant en cinq pages, toute une historique des périodes importantes de l’histoire des Comores ? Dans son ouvrage, Les Littératures de l’Océan Indien, malgré une problématique qui s’axe autour des différents aspects et réalisations de l’art littéraire de toutes les îles constituant l’Océan Indien, il n’y a, à proprement parler, que peu de choses concernant les Comores. Ces questions et tant d’autres nous ont alors orienté vers l’ouvrage de Moussa Saïd Ahmed sur la littérature orale des îles, Guerriers, princes et poètes aux Comores dans la

littérature orale. Ici, l’analyse des textes oraux apporte une information riche sur le contexte,

les faits sociaux desquels découle l’acte de production littéraire, même orale. Parallèlement à

15

Dehon Claire L., Le Réalisme africain : le roman francophone en Afrique Subsaharienne, L’Harmattan, 2002, p.21

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24 cet ouvrage, nous avons consulté des manuels historiques ou anthropologiques tels que

Traditions d’une lignée royale des Comores où le travail de défrichement entrepris et amorcé

par le chercheur Damir Ben Ali avec la collaboration de G.Boulinier et P.Ottino, offre un cadre d’étude de l’histoire littéraire du pays.

Dans la foulée, nous consultâmes l’Anthologie d’Introduction à la poésie comorienne

d’expression française17, compilée par Carole Beckett ainsi que l’ouvrage Littérature Orale à

Madagascar et aux Comores18, qui proposent un premier contact nécessaire avec l’écriture poétique des îles. Cependant, bien que riches en informations et intéressants du point de vue de l’éventail des productions poétiques et la diversité des auteurs recensés, ceux-ci ne permettent pas une approche théorique des textes compilés. Par contre, le livre de Moussa Saïd Ahmed sur la littérature orale, Guerriers, princes et poètes aux Comores dans la

littérature orale nous a été d’un très grand secours car même s’il traite d’un autre aspect de la

littérature aux Comores, il nous a permis de cerner certaines des difficultés propres à la littérature écrite comme la diffusion ou le lectorat. S’ajoute à cet ouvrage, le livre de Daniel Ahmed Abdouroihmane qui aurait pu nous être d’une très grande utilité, mais il nous a été impossible d’y avoir accès. A l’époque de nos recherches, La littérature comorienne de l’île

d’Anjouan. Essai de classification et de traduction des genres littéraires oraux et écrits 19 n’était pas encore mis à la disposition du public.

Au bout du compte, nous dûmes nous rendre à une évidence assez désolante, les ouvrages spécialisés susceptibles de traiter de façon théorique des fondements, des caractéristiques ou autres de la littérature écrite des îles de la Lune ont longtemps été inexistants jusqu’à la parution de deux dossiers lui ayant été consacrés dans les revues Tarehi n°5 en mars et Africulture n°51 en octobre 2002. Chacune propose un rappel chronologique ponctué d’analyses sur ses débuts et ses réalisations, un survol condensé et se voulant exhaustif sur ses différentes postures. Dans les deux revues, ce travail est mené par Soilih Mohamed Soilih, écrivain actuellement président de l’ORTC20. Très enrichissants, les constats proposés dans Tarehi donnent les bases, et relayés par les analyses de Daniel Ahmed Abdouroihmane, ils offrent de bonnes pistes de lecture pour les jeunes chercheurs peu

17

Beckett Carole, Anthologie d’introduction à la poésie comorienne d’expression française, L'Harmattan, 1995

18 Littérature orale à Madagascar et aux Comores, Etudes de l'Océan Indien, Collectif, INALCO / Langues'O

2000, n°32.

19

Daniel Ahmed abdouroihmane Café, La littérature comorienne de l’île d’Anjouan. Essai de classification et de

traduction des genres littéraires oraux et écrits, Doctorat Etudes Africaines, INALCO, Paris, 4vol, 743p. 20 Office de Radio et Télévision des Comores.

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25 connaisseurs ; le deuxième dossier présenté par Africultures dispense une analyse plus poussée de la littérature écrite. Celle-ci semble faire suite à la première ébauche consultable dans le Tarehi. Outre ces deux revues, nous pouvons rappeler les quelques rares travaux glanés de-ci de-là sur internet, notamment sur le site de l’association Mwezinet21. Celui-ci ayant longtemps été la référence en matière de publications sur les Comores, il proposait et propose toujours aussi bien de brefs articles sur divers sujets dont la littérature que des textes d’auteurs comoriens. Encore une fois, ces éléments assez éparses, mêmes instructifs n’apportaient que quelques détails souvent superflus. Bien plus tard, est publiée en 2009, une étude synthétique sur la production littéraire des Comores avec comme point de départ, les différentes étapes de migration dans l’archipel. Un travail présenté par Georges Ngal dans son ouvrage Œuvre critique. Articles, communications, interviews, préfaces et études sur

Commande des organismes internationaux 1970-200922 intégralement repris de nos travaux de Maîtrise sur l’émergence du roman comorien francophone23. Il s’agit de notre première ébauche, inspirée des travaux de Moussa Saïd Ahmed, où nous traitons chronologiquement de l’évolution de l’écriture aux Comores et que nous retrouverons plus élaborée au sein de nos présentes analyses. En effet, cette approche n’est pas une analyse critique de la littérature comorienne francophone mais une proposition sur les étapes d’établissements d’une littérature écrite aux Comores, toutes langues d’expressions confondues.

Le constat est bel et bien le même, les Comores n’apparaissent qu’exceptionnellement comme appartenant à l’espace francophone. Et si les travaux publiés avant les années 2000 et se proposant d’analyser les littératures d’Afrique, des Caraïbes et de l’Océan Indien pouvaient occulter les Comores, entendu que le corpus d’étude était alors assez minime, les choses ont beaucoup évolué depuis et l’on serait encore une fois amenée à penser cet oubli comme une forme de mise à l’écart volontaire ou au contraire, le choix de la facilité, car il est vrai que les données sur les Comores sont très dispersées.

Pourtant, aujourd’hui, ces données sur la littérature comorienne francophone existent. De façon disparate, certes, mais ciblées, de plus en plus nombreuses et facilement trouvables. Ces données sont le résultat d’études menées par des étudiants et des chercheurs comoriens. C’est donc comme mus d’un besoin pressant d’affirmer et de marquer l’existence de cet

21 www.comores-online.com/mwezinet/

22 Ngal Georges, Œuvre critique. Articles, communications, interviews, préfaces et études sur Commande des organismes internationaux 1970-2009

23 Djoumbe Thoueïbat, L’émergence de la littérature comorienne francophone à travers le roman, mémoire de

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26 archipel, de lui trouver grâce aux yeux de la communauté intellectuelle francophone et au delà, que les jeunes chercheurs, dont nous-mêmes, nous attelons, avec de maigres moyens, à restituer le paysage littéraire des Comores, faisant apparaître le visage complexe de ses écrits. Depuis le début des années 2010, la littérature comorienne d’expression française devient un axe d’étude, un champ d’exploitation propice à l’investigation intellectuelle et un thème de recherche que les étudiants français ou comoriens originaires de l’archipel choisissent d’explorer. Parallèlement, ce gain de sympathie va donner naissance aux premiers travaux de recherches consacrés aux écrits comoriens et mettre le sujet au centre de discussions et même de colloques universitaires24. C’est donc par leur plume qu’il sera peut-être possible d’amener le regard extérieur sur les îles et par la même occasion, de les lier au monde en les inscrivant dans leur contexte de production, insulaire, indianocéane et africain, francophone.

Voilà l’une des raisons justifiant du nombre de plus en plus grandissant de mémoires et/ou de thèses consacrées au roman comorien.

Malgré tout, il faudra attendre ces trois dernières années pour voir fleurir les premiers travaux conséquents d’études sur la littérature comorienne avec le mémoire de Saadi Mahamoud25, les thèses de Ali Abdou Mdahoma26 dont un exemplaire nous a été remis à l’issue de la soutenance, celle de Ali Mouhamadi Nassurdine27 disponible sur internet dans son intégralité, ainsi que le travail pionnier d’Abdoulatuf Bacar28. Dans la mesure où nos travaux respectifs ont été entrepris à peu près aux mêmes dates, il nous a été difficile de nous référer aux résultats obtenus et aux déductions formulées par nos collègues et amis. En effet, au moment où nous procédions à nos recherches, eux-mêmes n’avaient pas encore terminé les leurs29. Nous avons donc fréquemment eu recours aux revues énoncées ainsi qu’à certains ouvrages très instructifs malgré leur éloignement de notre sujet.

24

Le colloque « Littérature et violence » ainsi que des séminaires autour de la littérature comorienne ont été organisés dans différents sites de Ngazidja et en partenariat avec l’Université des Comores en Février 2012. Ces colloques réunissaient des auteurs dont Aboubacar Saïd Salim, Saindoune Ben Ali, Mohamed Anssouffoudine et des enseignants et des étudiants. De ces assises est né le collectif Djando la Maandzishi.

25

Saandi Mahamoud, Le roman et la société comoriens, Mémoire de Maîtrise en lettres modernes, dirigé par Monsieur le Professeur Claude Mouchard, Université de Saint-Denis, Paris VIII, 2000

26 Ali Abdou Mdahoma, Introduction à l’histoire du roman comorien de langue française, Thèse de Doctorat

Nouveau Régime en Littérature générale et comparée, sous la direction de Monsieur le Professeur Papa Samba Diop, soutenue et présentée publiquement le 29 juin 2011, Université Paris-Est, Créteil

27

Le roman de Mohamed Toihiri entre témoignage et fiction, Thèse de Doctorat en Lettres et arts sous la direction de Michel Schmitt, présentée et soutenue publiquement le 19 novembre 2010, Université Lumière, Lyon 2

28

Bacar Abdoulatuf, Comment se lit le roman postcolonial ? Cas des îles Comores : La République des

Imberbes et Le Bal des Mercenaires, Paris, Les Ed. de la Lune, « Littérature et Critiques », 2009

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27 L’ambition première dans le choix d’un domaine aux abords aussi inexplorés est né d’une démarche assez naïve : nous souhaitions apporter notre petite pierre à l’édifice non pas de la recherche en général, notre prétention n’allait pas si loin, non pas non plus de la recherche dans le monde francophone bien que nous espérons y participer d’une manière ou d’une autre, mais bien plus simplement, et peut-être même tout simplement, à la recherche comorienne. Car d’aucuns demanderont : Quelle recherche comorienne ? Eh bien, dans ce pays où de plus en plus de choses se passent, une université a ouvert ses portes, il y a à peine dix ans. Dix insignifiantes et paradoxalement longues années de tentative d’assise, de rêves d’avenir, de positionnement, de rayonnement. Et pour permettre à cette université qui avance clopin-clopant, d’espérer prospérer, les apports de la recherche seront considérables et en ce sens nécessaires. Voilà pourquoi, nous avons avant tout choisi de travailler sur la littérature de l’archipel des Comores.

A cette première raison, s’ajoutent deux autres toutes aussi importantes : l’une d’elle est le désir de parfaire un travail déjà entamé, par de là un chemin auquel nous nous sommes déjà essayée en présentant deux mémoires, l’un sur le Roman comorien d’expression

Française30 et l’autre sur la Poésie comorienne francophone. La dernière est de manière plus réaliste la plus pragmatique, nous souhaitions proposer un travail que nous espérons de qualité sur un domaine qui nous touche par nos origines, et parvenir à cette quête personnelle, car nous avons conscience de concevoir ce travail de recherche comme un rite initiatique. Mais n’en est-il pas un pour tout individu ? Car si l’on constate les différentes étapes de la recherche, les modes et les techniques d’investigation mises en œuvre, l’énergie dépensée, les moments de doutes et parfois de découragement, les incessantes remises en question, alors parvenir à terme, au terme d’un tel travail, c’est aussi parvenir au terme d’une initiation. Dans quel but et quelle est la finalité d’un tel passage initiatique ? Chaque individu porte certainement en lui les réponses à cette question car ces réponses sont bien diverses pour chaque doctorant. Ainsi, pour nous même, il s’agissait de procéder à une reconquête d’un patrimoine culturel, à une réappropriation d’une histoire qui nous était totalement inconnue tout en étant notre.

En commençant nos recherches, nous pensions être l’une des rares, si ce n’est l’une des deux seules personnes ayant jeté leur dévolu sur ce domaine, la littérature comorienne. Cela pouvait être vrai en 2001, mais dix années plus tard, ce constat n’est plus de mise. En effet,

30 Mémoire de Maîtrise présenté en 2003 : Emergence de la littérature comorienne d’expression française à travers le roman, Paris III, Université de la Sorbonne Nouvelle

(29)

28 autant en 2001, le domaine de la littérature comorienne francophone était encore très peu exploité, autant aujourd’hui, considéré comme un pan fort de la culture comorienne, il connaît un réel engouement. Ce que confirme Daniel Ahmed Abdouroihmane Café en expliquant que :

« Pourtant, ressusciter ce patrimoine culturel serait répondre aux attentes de la société comorienne d’aujourd’hui qui cherche son unité.31 »

Plusieurs raisons peuvent être décelées à ce gain de sympathie. D’une part, les premiers travaux ne présentaient qu’un aspect de cette littérature : l’oralité, et pour cela il nous faut encore nous référer à l’ouvrage de Moussa Saïd Ahmed32, ainsi qu’à la thèse Daniel Ahmed Abdouroihmane Café33. Au vu des diverses bibliographies citées par les chercheurs, les travaux effectués aux Comores par des étudiants comoriens de l’IFERE, institut de formation, dans le cadre de mémoires sont assez nombreux. Pourtant, il nous a été très difficile si ce n’est impossible de pouvoir les consulter. Il semblerait que de nombreux travaux aient été dérobés au CNDRS (Centre National de Recherches Scientifiques et Musée des Comores). La plupart des archives connues aux Comores, sont regroupées dans le musée. L’autre élément et non des moindres, est la création depuis 2002, de l’Université des Comores.

Ce grand bon en avant, pour l’archipel, nécessitait des moyens financiers certes, mais des moyens humains surtout, à savoir des étudiants et des enseignants. Et pour qu’il y ait des étudiants, il fallait aussi que les propositions de formations et donc les cursus soient en adéquation avec les ambitions d’un pays qui souhaite s’affirmer et les aspirations de jeunes étudiants désireux de poursuivre des études tout en travaillant sur les Comores. Une université sans filière littéraire orientée sur le pays d’origine pouvait sembler bancale et en ce sens, il y eut très vite une UFR de Littérature mais malheureusement, une pénurie d’enseignants vraiment diplômés (des docteurs) s’est faite sentir. Cette hypothèse peut se vérifier grâce au parcours de deux jeunes docteurs, Ali Abdou Mdahoma et Ali Mouhamadi Nassurdine, tous deux ayant enseigné aux Comores grâce à leur Maîtrise et leur DEA, mais aucun n’avait le statut ni le diplôme de docteur. Ali Mouhamadi Nassurdine explique lui même à ce propos, que sa thèse34 devenait une :

31 Evolution de la littérature de tradition orale aux Comores. Tarehi - Revue d'histoire et d'archéologie, (Revue

éditée par l'association INYA), Mars-Avril-Mai 2002, n°5, p.26

32

Moussa Saïd Ahmed, Guerriers, princes et poètes aux Comores, Dans la littérature orale, Paris, L’Harmattan, 2000

33 Daniel Ahmed abdouroihmane Café, La littérature comorienne de l’île d’Anjouan. Essai de classification et de traduction des genres littéraires oraux et écrits, Thèse de Doctorat nouveau régime en Etudes Africaines,

présentée et soutenue publiquement en 2000 à l’INALCO.

34 Le roman de Mohamed Toihiri entre témoignage et fiction, Thèse de Doctorat en Lettres et arts sous la

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