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Nous allons ici traiter d’une relation qui relève sans doute aujourd’hui davantage du plausible ou du probable que du réel ou de l’observé : le numérique peut en théorie apporter énormément de choses au territoire, permettant aux élus de développer un argumentaire de

marketing territorial qui sera ensuite délivré aux médias, aux entreprises et aux habitants pour

les inviter à découvrir le territoire, à l’adopter, s’y installer, y demeurer… Mais il peut aussi le desservir globalement en développant davantage le clivage entre une partie riche et urbaine (celle des villes) où l’accès à Internet sera aisé pour tous et une autre plus isolée, plus rurale ou les débits et les conditions d’accès resteront très médiocres (celle des champs). Il semble que le manque de recul, de données réelles qui auraient pu être analysées nous interdise des conclusions hâtives ou définitives. Le numérique est pour nous à cette heure un « outil des

possibles », doté d’une forte capacité à transformer un territoire mais ne l’ayant encore jamais

tout-à-fait démontré hors d’un cadre expérimental (tout du moins en France, selon les lectures que nous avons pu faire). Nous pourrions en ce cas considérer que territoire et numérique sont susceptibles d’être de très bons amis : le premier valorisé ou peut-être magnifié (on entend parfois dire « augmenté ») par le second…

1.4.1 - Devons-nous parler de territoire ou de géocyberespace ?

Aux yeux du citoyen, dans le discours des élus, dans les plaquettes commerciales des opérateurs, l’effet des TIC sur le territoire est de contracter à la fois la perception de l’espace et celle du temps (cette phrase se rencontre très souvent dans les différentes littératures que nous avons parcourues). Pour certains chercheurs, ce point de vue revient plutôt à entretenir :

- le mythe de la « neutralité spatiale » des TIC (Claisse, 1976) qui garantirait aux usagers l’accès aux mêmes services d’information et de communication depuis tout lieu, effaçant le risque de « fracture géo-numérique » et appuyant l’idée d’un territoire, devenu « a-spatial », qui se dissocierait de sa réalité matérielle et échapperait à toute contrainte physique. Gérard Claisse parle de mythe au motif qu’il n’a jamais été prouvé cette capacité supposée des TIC. Si cette position était défendable voici quarante ans, qu’il nous soit permis aujourd’hui de la remettre en cause. Ce mythe d’alors est à nos yeux une réalité quotidienne : sous le nom de

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In « Les élus de proximité à l’heure du numérique territorial : quelles marges de manoeuvre ? », pp. 16-17

« réalité virtuelle » il est désormais possible d’effacer le sentiment d’une contrainte géo-temporelle physique,

- le mythe de la « révolution spatiale » des TIC (Claisse, 1976), conséquence de leur capacité à véhiculer l’idée d’un espace sans distance, d’une déterritorialisation des échanges qui autoriseraient une nouvelle organisation libérée des contraintes de l’espace et du temps,

- le mythe de « l’effet structurant » de leur réseau (Offner, 1993) qui, au nom du paradigme de la causalité, induirait mécaniquement l’accès au progrès social ou économique du territoire, à l’édification d’une société équitable et juste, comme « panacée aux difficultés du monde moderne, reposant sur une conception morale du

social : harmonisation des contraintes, des libertés, des aspirations des groupes et des citoyens en vue du projet collectif » (Bergeron, 1982),

- une utopie ubiquitaire inhérente à une certaine idée de la modernité ou de l’hypermodernité (Ascher, 2005).

Mais commençons par tenter définir ce que nous entendons par « territoire ». Selon Michel Lussault (201048), il s’agit d’un espace doté de valeurs sociétales, résultant de l’assemblage de matière (le paysage) et de ce qu’il nomme des « opérateurs ». Un opérateur (un homme, un virus, un artefact, un collectif, un animal) est défini comme toute entité en capacité d’opérer un « acte spatial », c’est-à-dire d’engager avec un espace donné une relation de réalité et de jeu de distances. Cette vision est assez voisine de celle de Jean-Pierre Jambes (200949) qui, s’appuyant notamment sur les travaux de Claude Lacour (1996) et de Denis Maillat (1995), défend l’idée du territoire :

- en tant qu’objet d’intermédiation et d’apprentissage,

- en tant qu’ensemble d’agents et d’éléments économiques, socioculturels, institutionnels dotés de modes de fonctionnement et de régulation spécifique en perpétuelle interaction,

- en tant qu’ « une organisation cognitive destinée à renforcer les échanges et à

produire des externalités positives dans des configurations spatiales plurielles ».

Le territoire est donc un lieu qui offre des opportunités d’interaction, de production et de transfert de connaissance, où l’homme est en apprentissage, en écoute, en dialogue. « Il est un

lieu d’appartenance et d’identification, un lieu de médiation entre les hommes et leur culture » nous dit Jean-François Deneux50 (p. 61).

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Propos extraits de la conférence « A quoi sert la géographie ? » qu’animait M. Lussault le 4 février 2010 à l’ENS de Lyon

49

In « Terriroires apprenants. Esquisses pour le développement local du XXI ème siècle » 50

Les TIC, par leur native capacité à transmettre une information structurée (un « savoir »), nous semblent être le compagnon naturel de ce territoire « apprenant » mais elles sont aussi un opérateur (au sens que Lussault donne à ce terme) qui est complexe car protéiforme. Il demeure aujourd’hui impossible de concevoir mentalement l’exhaustivité :

- des services que les TIC peuvent offrir à l’homme maintenant ou demain, ici ou ailleurs,

- des impacts des TIC sur les interrelations des habitants, sur leur interaction avec le territoire, avec le milieu vivant,

- des perceptions qu’elles vont autoriser de l’espace qui est autour et entre les hommes, - des façons si multiples dont ceux-ci vont s’approprier le territoire électroniquement

innervé, le vivre, le développer, le construire ou le déconstruire.

Les TIC sont notamment un radical vecteur de changement dans la façon de pratiquer l’espace (le parcourir, le traverser, l’atteindre). Sébastien Munafo51 inscrit la relation de l’espace, des outils de télécommunication et de la mobilité physique des individus dans la « Thèse de la

substitution » en ce sens que l’utilisation des TIC est source d’épargne de mobilité spatiale.

Alain Rallet écrit52 (p. 8) :

« La thèse de la substitution s’appuie sur un imaginaire puissant, l’imaginaire spatio- temporel qui entoure le développement des TIC. Selon cet imaginaire, les télécommunications permettent de faire à distance ce que les individus faisaient à proximité et donc de substituer des relations virtuelles à des relations physiques. Alimentant des visions fantasmées du rôle des télécommunications dans les interactions spatio-temporelles, cet imaginaire a fait l’objet de nombreuses critiques (récemment Musso, 2008 sur le cyberespace). Il est toutefois sans cesse renouvelé par l’enrichissement spectaculaire et continuel des technologies de communication, de sorte qu’il fonctionne toujours comme arrière-plan de la thèse de la substitution selon laquelle l’usage des TIC amène les individus à diminuer le nombre de leurs déplacements »

L’auteur rappelle que cette thèse, qu’ont décrite de nombreux chercheurs bien avant lui (Henry Bakis et Gabriel Dupuy entre autres) est ancienne puisque déjà convoquée au moment où on inventait le téléphone mais également au milieu des années 1960 par le philosophe et sociologue Marshall Mc Luhan dans son ouvrage « The medium is the message » (1967). Il y définit le concept de « village global » qui, grâce aux technologies de l’information réunirait toutes les diversités de notre monde en un seul et même lieu (ou plutôt peut-être « sentiment

de lieu »), en une seule et même communauté « où l'on vivrait dans un même temps, au même rythme et donc dans un même espace ».

51

In « Réduire la mobilité par la télécommunication : un leurre ? »

52

In « Diffusion des TIC et mobilité : permanence et renouvellement des problématiques de recherche », pp. 7-16

En opposition à la thèse de la substitution vient celle dite « de la complémentarité et de

l’induction » (Munafo, 2015). Selon cette dernière, si les télécommunications réduisent

quelques déplacements (notamment pendulaires), elles tendent surtout à long terme à en stimuler d’autres (Rallet 2001, Rallet et al. 2009). Sébastien Munafo observe que le développement des TIC n’a provoqué ni de réduction de la mobilité ni de modification de la concentration des emplois dans les agglomérations mais au contraire des déplacements plus longs sur des territoires plus morcelés. L’idée défendue est celle qu’on se déplace moins pour le travail et que cela libère du temps pour certains déplacements de loisir. Il est par ailleurs considéré que le développement des TIC pousse paradoxalement les acteurs à privilégier toujours plus de concentration dans les endroits les mieux dotés en infrastructure de télécommunication.

L’enquête que nous avons conduite sur le sujet des tiers lieux (que nous présentons en chapitre 5) vient plutôt en discordance avec ces différents propos, invalidant certains mythes évoqués plus haut (précisément celui de la révolution spatiale mais aussi celui de la neutralité spatiale). Bien que cela fasse plus de quarante ans que la relation des TIC à l’espace soit un axe de recherche scientifique et de prospective, les technologies de l’information nous semblent résolument demeurer un objet des possibles, signifiant ainsi que les façons dont les acteurs vont en saisir les enjeux relativement au territoire, en orienter les impacts, en définir les applications, en prioriser leur mise en œuvre, en financer leur réalisation, en organiser leur déploiement restent plus souvent potentielles que forcément réelles.

Quand elles le deviendront, peut-être alors ne parlerons-nous plus de territoire mais plutôt de « géocyberespace » ? Pour Henry Bakis53 (P. 286) :

« Le mot géocyberespace décrit l’espace géographique à l’ère des réseaux de la communication électronique de l’information. Il se distingue autant du mot « géoespace » qui désignerait l’espace des kilomètres, de la distance physique, des lieux (l’espace euclidien) que du mot ‘’cyberespace’’ - traduction de l’anglais cyberspace créé en 1984 par un auteur de science-fiction afin de désigner un monde virtuel où plongent les habitants de mégalopoles hyper-informatisées. Il a été adopté par des ingénieurs et des chercheurs en sciences sociales qui l’ont utilisé dans diverses acceptions :

o une technique d’interaction avec l’ordinateur

o une expérience sociale sur le réseau (Rheingold 1995, Muhein 2005) : « le

cyberespace c’est… des mots, des liens affectifs, des données, de l’information et du pouvoir qui sont produits par ceux qui utilisent la télématique. Même si les métaphores spatiales sont plus susceptibles de véhiculer ce concept de lieu partagé par les communautés virtuelles, c’est souvent la métaphore biologique qui est la plus adéquate pour marquer la manière dont la cyberculture évolue… Chacune de ces colonies – les communautés du réseau – est une

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expérience sociale qui n’a été planifiée par personne, mais qui a pourtant lieu. »54

o une simple ‘’reconfiguration de l’espace social, un dédoublement de la vie

ordinaire’’ (Muhein 2005) dans un monde où les frontières se brouillent et le corps s’efface, où l’autre existe dans l’interface de la communication, mais sans corps, sans visage, sans autre toucher que celui de l’ordinateur, sans autre regard que celui de l’écran. (Le Breton, 1999)55

o la visualisation cartographique des flux sur le web (Dodge 1999),

o le territoire des infrastructures informationnelles. On peut y associer l’espace

des flux (Castells 1996) assez proche : le nouveau système de communication transforme l’espace et le temps, dimensions fondamentales de l’expérience humaine. Les lieux perdent la substance même de leur signification culturelle, historique et géographique, pour être intégrés dans des réseaux fonctionnels produisant un espace des flux qui se substitue à l’espace des lieux. Le temps lui-même est effacé lorsque le passé, le présent et l’avenir peuvent être programmés pour interagir les uns avec les autres en un même message. L’espace des flux et le ‘’temps intemporel’’ sont ainsi les fondements matériels d’une nouvelle culture, laquelle transcende et intègre la diversité des systèmes de représentation transmis par l’histoire : la culture de la virtualité réelle où le simulacre est la réalité en gestation »56

Nous avons là des perceptions particulièrement variées de ce concept de géocyberespace qui chacune prise individuellement nous semble juste mais qui, lues les unes après les autres, paraissent quelque peu confuses : un entrechoc de définitions menant à nous demander si nous parlons bien du même objet. Un élu trouverait facilement à se perdre en ces mots et nous pouvons comprendre la difficulté qui est sienne à saisir le dossier du territoire numérique dans ses composantes non métrées.

Certains auteurs disent cette difficulté à aborder le territoire numérisé. Ainsi le philosophe et politologue Pierre Musso écrit57 (p. 172) :

« Les réseaux d’informations ont deux propriétés particulières : le caractère ‘’immatériel’’ de ce qu’ils transmettent et l’indifférence à la distance. Il en résulte une double difficulté à appréhender le monde du cyberespace, car deux oppositions doivent être pensées : l’une entre l’informationnel et le physique, et l’autre entre ce qui est situé et le ‘’ n’importe où’’ et le ‘’n’importe quand’’ (« anywere-anytime ») »

Ici est peut-être une difficulté : nul ne sait distinguer le visage ou les frontières du « cyber-

territoire ». Il est un espace d’information et de transaction multiforme où « s’échangent des représentations sociales, se confrontent des cartes mentales d’acteurs, s’instituent des hiérarchies et des conflits d’images et de réputations, s’ordonnent des points de vue

54

In « Les communautés virtuelles », Addison Wesley, 1995, p. 6

55

in « L’adieu au corps », 2013, Metaillé, p.139

56

in « La société en réseaux », 2001, p. 472 57

in « Critique de la notion de territoire numérique. Les dilemmes de l’économie

d’acteurs, des projets d’action, des conceptions du monde, des imaginaires et des valeurs »

nous dit encore Pierre Musso58 (p. 172).

Appréhender ce nouveau territoire réclame une capacité à analyser des « distances qui ne sont

plus physiques, mais sociales, symboliques et mentales », à évoluer dans une hypermétrique à

cinq dimensions pour le caractériser : les quatre dimensions de l’espace et du temps ajoutées à celle du point de vue de l’acteur.

1.4.2 - Peut-être pouvons-nous appeler la notion d’a-territoire ?

Le discours sur l’impact de la société de l’information sur le territoire est parfois paradoxal. Isabelle Pailliart (200259, p. 55) relève que dans les écrits de Jacques Delors (Président de la Commission européenne en 1994, auteur du rapport « Croissance, compétitivité et emploi ») la dimension territoriale de la société de l’information n’apparaît pas très franchement.

Quelques années plus tard (1998), nous remarquons que le PAGSI (que nous avons vu au chapitre 1.1.4) considère également l’espace national sans distinction territoriale, sans prise en compte de la diversité de ses territoires. La société de l’information porte en son nom même l’idée d’un faible ancrage territorial, d’une société qui serait « a-localisée », « a-spatiale » ou « a-contextualisée ».

Pour Isabelle Pailliart, c’est sous la forme d’oppositions que se manifestent les relations entre les productions discursives ayant trait à la société de l’information et les territoires. En effet, l’expression « société de l’information » met l’accent sur une économie particulière : celle de la connaissance, du savoir, des réseaux immatériels (qui ne sauraient pourtant exister sans la présence de réseaux parfaitement matériels bien que non visibles car généralement enfouis). Elle induit une économie, parfois nommée « nouvelle économie » qui repose sur la production et la circulation de l’information et semble se situer en rupture avec des formes d’économie plus traditionnelle, plus ancienne dont sont porteurs les territoires.

« De même, l’insistance mise sur l’innovation technique en particulier dans le domaine de l’information et de la communication caractérise un objectif de modernité qui paraît renvoyer les territoires à la tradition ou encore au « retard ». Enfin, l’expression sous-entend l’apparition d’une nouvelle société en opposition avec l’existant. Alors que les sociétés locales sont placées sous le signe de l’histoire et de la continuité des pratiques, la notion de révolution informationnelle locale semble donc déplacée. » (Pailliart, 2002)

L’auteure va encore plus loin quand elle écrit que la société de l’information ne correspond à aucune réalité locale sauf si elle sert à nommer autrement Internet et les services afférents :

58

in « Critique de la notion de territoire numérique. Les dilemmes de l’économie

numérique », pp. 168-175 59

elle ne s’inscrit pas dans les politiques publiques locales, elle ne constitue pas un élément de débat de proximité, ni ne se présente comme une référence dans les actions menées localement. Isabelle Pailliart justifie en trois facteurs cette prise de position :

- « l’expression ‘’société de l’information’’ est faiblement pertinente désignant une

société en rupture avec les pratiques traditionnelles, dont l’application, au niveau local ne peut donc qu’être en contradiction avec l’une des caractéristiques des territoires, c’est-à-dire le poids du social, de l’histoire, des cultures

- la notion même de société de l’information s’inscrit dans le cadre d’une politique

publique nationale qui se manifeste à la fin des années 90 à travers plusieurs actions : un plan d’action gouvernemental, un plan d’action ministériel, la préparation d’une loi sur la société de l’information, une consultation publique (portée par le manifeste de la Commission Européenne « e-Europe : un société de l’information pour tous », publié en 1999). Ces éléments restent étrangers cependant à la vie locale

- l’idée de société de l’information rencontre un faible enthousiasme au niveau local.

Cet élément est assez évident dans les réactions des militants associatifs, des commerçants ou encore des responsables des petites et moyennes entreprises. L’expression suscite scepticisme ou parfois même réaction de refus de la part des utilisateurs des TIC et plus précisément d’Internet ou de services informatiques. Les arguments sont divers : l’important investissement financier par rapport à l’obsolescence rapide du matériel, le lourd investissement en termes de temps et de compétences au regard des résultats qui paraissent flous, l’absence de convivialité et de sociabilité que semblent entraîner les TIC » (Pailliart, 2002)

Pour Gérald Berthoud60 (op. cit.), l’existence même de l’identité et de la cohésion nationales se trouve fortement mise en cause dans cette société globale et innervée par les nouvelles technologies de l’information et de la communication. Et du même coup, ce sont les idées, mais aussi les réalités de la citoyenneté, de la souveraineté et donc de l’État nation qui perdent de leur force. Mais rien ne serait pourtant plus simpliste que d’imaginer que la globalisation équivaut strictement à un mouvement d’homogénéisation culturelle et d’uniformisation planétaire, même si bien sûr elle tend à réduire considérablement les différences.

« Productrice d’énormes inégalités entre les individus, les groupes et les pays, la globalisation contribue à renforcer et même à produire, à travers le monde, des particularismes culturels, propres à entrainer un repli identitaire » (Berthoud, 2000, p.168)

60

1.4.3 - Le débat sans fin du territoire polyfracturé

La notion de fracture est souvent utilisée pour pointer une des probabilités d’échec les plus grandes d’une politique d’aménagement qui au final reviendrait à ne pas traiter de manière harmonieuse et égale les différentes parties du territoire. L’expression fracture numérique désigne le risque ou le fait que les progrès qui sont supposés accompagner le déploiement de la fibre optique (le très haut débit) ne sauraient bénéficier à l’ensemble des populations de ce territoire (distinguant ce que la sociologue Périne Brotcorne61 appelle les « info-riches » qui ont accès à l’information numérique, p.48) :

- parce qu'elles résident en un espace peu considéré des investisseurs car trop éloigné des noyaux urbains, mal desservi, insuffisamment peuplé et trop peu rentable,

- parce qu’elles sont trop peu familières de l’univers informatique qu’il convient a

minima de maîtriser pour accéder à l’offre de contenus et de services déployée,

- parce qu’elles sont insuffisamment accompagnées, s’estiment trop isolées ou ne perçoivent pas l’intérêt de l’univers dématérialisé qui leur est présenté. Périne Brotcorne rappelle que les TIC ne sont pas des technologies génériques auquel un simple accès conduirait automatiquement à l’usage : « il ne suffit pas à un individu de

se connecter pour passer de l’autre côté de la barrière numérique » (Ben Youssef,

200462)

Une définition plus précise est donnée par le sociologue Luc Vodoz63 :