• Aucun résultat trouvé

2.6 Synthèse et problématique de recherche

2.6.1 Synthèse

Sur la base de notre recherche bibliographique, nous positionnons nos travaux à l’intersection des trois grands domaines que sont : la conception de produit, la conception de l’usage et la conception collaborative que nous retrouvons autour des OICs (Figure 28).

Figure 28. Positionnement de nos travaux de recherche

Notre étude de la littérature, nous a permis de mettre en évidence, que l’usage du produit devient une source d’innovation pour créer de la valeur pour l’utilisateur [Maxant, 2004 ; Vallette, 2005]. La notion de valeur étant elle-même liée à la notion de satisfaction.

Dans ce cadre, nous avons pu définir l’usage du produit ainsi que la notion d’expérience utilisateur. Notre compréhension de l’usage du produit, basée sur la littérature [Hassenzahl et Tractinsky, 2006; Brangier et Bastien, 2010], est modélisée selon le schéma de type UML [Rumbaugh et al., 2004] (Unified Modelling Language) (Figure 29). Dans ce schéma, l’usage du produit est considéré comme l’interaction entre l’utilisateur et le produit dans un contexte donné. Cette interaction prend un sens large et multidimensionnel (interactions physique, visuelle, directe, indirecte, fluide, cognitive, expressive, etc.). Le produit est défini par ses fonctionnalités, ses formes, ses caractéristiques esthétiques, son bruit, son interface, etc. Quant à l’utilisateur, il est caractérisé par ses caractéristiques physiques, cognitives, psychologiques, sa personnalité, ses attentes, ses expériences avec des produits similaires, etc. L’interaction produit-utilisateur se déroule dans un contexte spécifique (environnement physique, environnement social, environnement organisationnel) pour donner l’usage du produit. L’usage du produit conduit à des effets vis-à-vis de l’utilisateur. Ces effets sont liés au concept d’expérience utilisateur qui contient, selon le modèle de Brangier et Bastien (2010), l’utilisabilité,

92

l’émotionnalité, l’accessibilité et l’influençabilité. Cette notion permet de définir les leviers qui permettent de travailler sur la satisfaction de l’utilisateur.

D’après ce modèle, la définition de l’expérience utilisateur passe par un certain nombre de perceptions et réponses lors de l’usage du produit qui résulte de l’interaction « Utilisateur, Produit et Contexte ». Donc, pour agir sur la satisfaction de l’utilisateur, il faut agir sur l’expérience de l’utilisateur. Nous faisons l’hypothèse que modifier le produit et/ou l’usage permettra de modifier l’expérience utilisateur et donc sa satisfaction. Cette modélisation de l’usage du produit peut être intégrée dans une vue « usage » dans un contexte de conception intégrée [Tichkiewitch et al., 1995].

93

De cette hypothèse et de l’état de l’art réalisé, nous constatons et nous considérons aussi que le processus de conception n’est plus uniquement le fait de concevoir le produit en termes de formes, de matériaux, de fonctionnalités et de process (Figure 30-a); il n’est pas aussi uniquement question de concevoir un usage séparément de la réalité technique du produit (Figure 30-b). En effet, nous considérons le processus de conception du produit comme un processus de conception du couple ‘produit-usage’. Il s’agit d’un processus simultané pour concevoir le produit et son usage pour arriver

à une convergence du couple ‘produit-usage’ (Figure 30-c).

Figure 30. Trois stratégies de conception : (a) du produit puis de l’usage ; (b) de l’usage puis du produit ; (c) du couple ‘produit-usage’

Afin de répondre aux enjeux de la conception du couple produit/usage, et pour concevoir des produits répondant aux véritables problématiques de l’utilisateur dans une approche de conception centrée sur l’Homme, une collaboration multidisciplinaire des acteurs de différents corps de métiers est indispensable. En accord avec les travaux de l’équipe ERCOS, nous avons pu identifier, parmi d’autres, trois corps de métier principaux pour la conception du couple ‘produit-usage’ : l’ergonomie, la conception mécanique et le design industriel (cf. chapitre 2.3.3). Nous avons pu présenter différents efforts pour l’intégration et l’articulation de ces disciplines dans le processus de conception de produits. Nous nous sommes intéressés plus particulièrement aux travaux de Guerlesquin (2012) pour articuler ces trois métiers à travers l’étude de la collaboration du designer industriel, de l’ergonome et du concepteur mécanicien tout au long du processus de conception de produits.

De plus, nous avons aussi introduit les notions de domaine technique et domaine d’usage qui nous semblent plus à même de représenter notre vision. En effet, la distinction entre les métiers et/ou disciplines est souvent difficile à faire. Un designer industriel aura tendance à intégrer l’usage au sens activité en lien avec l’esthétique du produit pour définir un ensemble cohérent. Ainsi la notion de domaine technique et de domaine d’usage permet de dissocier les centres d’intérêts et ensuite charge aux acteurs métiers de « naviguer » dans ces domaines en fonction des objectifs ponctuels ou plus généraux du projet de conception.

94

En continuité des travaux de Guerlesquin (2012), nous positionnons notre recherche dans le domaine de la collaboration multidisciplinaire appliquée au couple produit/usage. Nous nous focalisons plus particulièrement sur les phases de convergence multidisciplinaire (Figure 31). Selon de nombreux auteurs [Sagot et al., 2003 ; Marsot et Claudon, 2004 ; Mahdjoub, 2007 ; Guerlesquin, 2012], des difficultés subsistent dans ces phases de collaboration entre «ergonome-concepteur mécanicien-designer ». Cela s’explique par les différences culturelles, la variété des connaissances, de savoir-faire, et la divergence des opinions [Mahdjoub, 2007].

Figure 31. Le processus de conception de produit comme une série des phases de convergence et de divergence multidisciplinaires

Face à ce constat, nous avons souhaité nous focaliser sur les objets intermédiaires de conception. Nous présentons l’intérêt de tels artefacts pour les phases de convergence multidisciplinaire. Nous avons également évoqué les caractéristiques des OICs positionnées sur deux axes : ouvert/fermé et commissionnaire/médiateur [Mer et al., 1995 ; Jeantet, 1996]. De plus, nous avons montré que c’est dans leurs situations d’usage que ces objets doivent être construits et utilisés. Nous avons aussi évoqué les travaux de Guerlesquin (2012) pour formaliser les phases de convergence entre ergonome/designer industriel/concepteur mécanicien. L’approche proposée insiste sur l’intérêt de la définition d’OICs communs adaptés (formalisation mixte) à ces acteurs métiers pour les phases de convergence multidisciplinaire. Cependant là aussi, nous avons pu mettre en évidence certaines limites des travaux

95

concernant le choix et la définition des OICs dans un contexte de convergence multidisciplinaire sur le couple produit/usage. Sur la base de cette synthèse, le chapitre suivant propose notre problématique et les hypothèses de recherche associées.