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d’autorégulation : concepts au cœur du portfolio numérique d’apprentissage au secondaire

2.8 Synthèse et rappel des objectifs de recherche

Nous avons amorcé notre cadre théorique par une exploration d’éléments reliés à l’enseignement et à l’apprentissage de l’oral. Longtemps vu comme le parent pauvre de la didactique du français, étant donné la place limitée qu’il occupait en classe de français (Sénéchal, 2011), il est aujourd’hui largement étudié, et des chercheurs travaillant d’arrache- pied ont permis de le conceptualiser de manière plus précise et plus utile pour que le milieu scolaire puisse en tirer profit (voir notamment Dols et Schneuwly, Dumais, Lafontaine, Messier, Pellerin et Sénéchal). Ainsi, leurs efforts ont entre autres mené vers la proposition de modèles

Features of Regulation

Levels of

Regulation Regulation Sources of Motivation Source of Task Conditions Performance Indices

Observation Modeling Vicarious reinforcement Presence of models Discrimination

Emulation

Performance and social feedback

Direct/social

reinforcement Correspond to model Stylistic duplication

Self-control Representation of process

standards Self-reinforcement Structured Automatization

didactiques, dont ceux de Dolz et Schneuwly (1998) puis de Lafontaine (2001). Bien que la mise en œuvre de ces modèles didactiques dans les milieux scolaires ait fait ses preuves (Dumais, 2008 ; Messier, 2007), du travail reste encore à faire, entre autres quant à certains outils pouvant appuyer le travail des professionnels dans les classes (Lafontaine, 2007). Parmi ceux-ci, nous n’avons qu’à penser à l’utilisation de la vidéo comme appui à la réflexion, dont les effets positifs ont entre autres été montrés dans le domaine de la formation des maîtres (Lavoie et Bouchard, 2017 ; Tochon, 2002), mais aussi dans l’apprentissage des langues secondes au primaire (Pellerin, 2014 ; 2018). Or, les mêmes effets peuvent-ils être constatés dans le domaine de l’enseignement-apprentissage de la production orale en français langue maternelle, au secondaire ?

Le portfolio constitue également un des outils n’ayant pas fait l’objet, à notre connaissance, d’études systématiques au Québec dans le domaine de la didactique de l’oral. Pourtant, il a été exploré dans de nombreux autres contextes. Nous n’avons qu’à penser au Portfolio européen des langues, destiné à l’origine à l’apprentissage de langues étrangères dans un contexte européen propice à cette réalité (Conseil de l’Europe, 2011), ou bien au ePEARL, développé par une équipe de l’Université Concordia (Abrami et al, 2013 ; Venkatesh et al., 2013). En plus d’offrir aux élèves des avantages intéressants en matière de développement d’habiletés cognitives et d’autonomie (Harnell-Young et al., 2007 ; Scallon, 2007), il permet d’offrir un portrait global et, surtout, continu de l’élève dans le développement de ses compétences (Simon et Forgette-Giroux, 2000). Outre son aspect longitudinal, il offre la possibilité, grâce aux outils numériques, de regrouper plus facilement des traces de types variés (fichiers texte, audio, vidéo, etc.) démontrant l’évolution et les progrès d’un élève (Chou et Chang, 2009). Bien sûr, certains défis sont associés à l’utilisation de cet outil. À titre d’exemples, nommons son aspect chronophage (Dolmans et Van Merriënboer, 2016) et la nécessité d’un accompagnement constant et important de la part de l’enseignant (Chang, Chen

et al., 2012). Au regard de ce que nous apprend la littérature sur cet outil, nous nous sommes

interrogé sur les bénéfices qu’il serait possible de tirer de son utilisation dans un contexte d’enseignement-apprentissage de la production orale.

Évidemment, cette avenue nous amène à élargir notre exploration de différents concepts. L’autoévaluation est le premier de ceux-ci. Notre revue de la littérature nous a permis de

constater à quel point ce processus est complexe et qu’il demande du temps et une planification rigoureuse de la part de l’enseignant pour que l’accompagnement de l’élève soit efficace et ciblé (Durand et Chouinard, 2012). La recherche en didactique de l’oral nous a d’ailleurs montré que la pratique de l’autoévaluation était bénéfique pour les élèves dans le développement de leur compétence (Dumais, 2008). Mais qu’en est-il du recours à ce moyen d’évaluation dans un contexte de réalisation d’un portfolio d’apprentissage ? Cet outil favorisant un travail réflexif sur le long-terme amène-t-il les élèves à mieux développer leur capacité d’autoévaluation, à devenir plus efficaces dans cette opération ?

Autre concept à considérer : l’engagement des élèves dans un contexte d’apprentissage de l’oral. Par sa nature complexe et ses multiples dimensions, ce concept s’est taillé une place de choix dans les travaux scientifiques en éducation et en psychologie (Reschly et Christenson, 2012), étant donné sa grande importance pour l’apprentissage des élèves. Que ce soit la dimension cognitive, faisant référence à l’utilisation de stratégies cognitives complexes et efficaces par l’élève (Fredricks et al., 2016b), ou bien la dimension affective, touchant la relation entre l’élève, les objets d’apprentissages et la relation avec les autres acteurs de son milieu scolaire (Appleton et al., 2006), l’étude de l’engagement chez les élèves nous permet bien souvent de disposer de connaissances guidant les interventions des enseignants (Eccles et Wang, 2012). Ces éléments issus de la recherche ont suscité chez nous des questionnements quant à l’apport du portfolio numérique d’apprentissage dans l’engagement des élèves, plus particulièrement quant à ses dimensions affective et cognitive.

D’ailleurs, l’importance de la dimension cognitive et des stratégies métacognitives liées à la réalisation d’un portfolio numérique d’apprentissage nous a amené à nous intéresser aux stratégies d’autorégulation. À travers le modèle cyclique de l’autorégulation élaboré par Zimmerman (2000 ; Zimmerman et al., 2017), nous avons recensé les processus et stratégies qui permettent à un élève, dans un premier temps, de planifier adéquatement ses buts d’apprentissages ainsi que ses stratégies cognitives et métacognitives en vue de réaliser une tâche en visant l’atteinte des buts fixés, et ce, au regard de ses expériences passées, de rétroaction reçue dans d’autres contextes d’apprentissages, et de croyances et perceptions influençant son niveau de motivation. Grâce à cette planification, il pourra ensuite réaliser la tâche en veillant continuellement à ce que ses stratégies le guident vers l’atteinte des buts visés. S’il constate que

sa démarche n’est pas en adéquation avec ces derniers, il pourra ajuster le tir et adapter son plan de match. Enfin, une réflexion sur sa performance lui permettra de tirer des conclusions, d’y réagir en déterminant les causes de ses succès et échecs, puis en prenant des décisions quant à ce qu’il fera dans des situations similaires subséquentes. Or, le développement de ces stratégies demande un entrainement et un suivi constant (Zimmerman, 2013), et c’est pourquoi nous ne pouvons donc faire autrement que de nous demander comment l’utilisation du portfolio numérique d’apprentissage, encore une fois en raison de l’aspect continu du travail qu’il implique, peut apporter un soutien aux élèves dans le développement de leur capacité d’autorégulation en production orale.

Comme nous venons de l’exposer, les concepts qui sont au cœur de notre cadre théorique ont suscité différentes questions auxquelles nous tenterons de fournir des réponses à travers l’atteinte des différents objectifs de recherche que nous avons ciblés. Ainsi, rappelons que notre recherche vise les objectifs suivants :

• Objectif général : Décrire et analyser l’apport général du portfolio numérique d’apprentissage pour le développement de la compétence en production orale d’élèves du secondaire en classe de français, langue d’enseignement ;

• Objectif spécifique 1 : Décrire et analyser l’apport du portfolio numérique d’apprentissage pour l’autoévaluation de la compétence en production orale d’élèves du secondaire en classe de français, langue d’enseignement ;

• Objectif spécifique 2 : Décrire et analyser l’apport du portfolio numérique d’apprentissage sur l’engagement affectif d’élèves du secondaire dans la réalisation des tâches de production orale en classe de français, langue d’enseignement ;

• Objectif spécifique 3 : Décrire et analyser l’apport du portfolio numérique d’apprentissage dans le recours à des stratégies d’autorégulation d’élèves du secondaire lors des activités de production orale en classe de français, langue d’enseignement.

Chapitre 3 : Méthodologie

Dans le but d’atteindre nos objectifs de recherche (section 3.1), nous avons retenu un devis de recherche que nous expliquerons à la section 3.2. Puis, comme le recommande la 6e édition du Publication Manual of the American Psychological Association (2013), nous exposerons les détails relatifs aux participants et au contexte de recherche (section 3.3). Suivront les protocoles de collecte de données (section 3.4), puis les méthodes de traitement et d’analyse retenues (section 3.5). Nous exposerons, pour terminer, les précautions éthiques (section 3.6) ainsi que les forces et limites de la méthodologie (section 3.7).