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Chapitre I : L’autisme, qu’est ce que c’est ?

5. Les autres troubles envahissants du développement

5.1. Le syndrome d’Asperger :

5.1.1. Histoire du concept

En 1943, le pédiatre Hans Asperger a observé, dans sa clinique, certains

enfants (quatre garçons) présentant des caractéristiques de personnalité et un

comportement très similaires. Il a réalisé une description incroyablement fine des

difficultés et des aptitudes de ces enfants (Asperger, 1944). Il a ainsi remarqué qu’il

y avait un retard de « maturité sociale » chez ces enfants. En effet, les différents

aspects liés à leurs aptitudes sociales étaient assez inhabituels quelle que soit la

phase de développement (Attwood, 2009). Ces enfants avaient un manque

d’empathie et des difficultés à se faire des amis.

Ainsi, Asperger a noté des problèmes de communication, par exemple, le

langage était souvent correct grammaticalement mais étrange (trop adulte ou/et

affecté ou/et hautain.). La communication se limitait surtout à des conversations en

sens unique. Il a également noté que ces garçons étaient maladroits dans le sport,

pour s’habiller et manger proprement. Enfin, il a observé que ces enfants ne

s’intéressaient qu’à un aspect très spécifique d’une chose. Par exemple, ils

collectionnaient des objets inutiles de manière obsessionnelle. Ils étaient de

véritables spécialistes dans leur domaine d’intérêt, comme les nombres et la chimie,

et certains parmi eux connaissaient par cœur le plan de circulation du tramway. Ces

pairs et n’avaient pas ou peu de lien avec la vie quotidienne (Vermeulen & Rogé,

2009).

Asperger a constaté que certaines caractéristiques pouvaient être identifiées

dès l’âge de deux ou trois ans, tandis que d’autres se manifestaient après cet âge. Il a

observé que certains parents (surtout les pères) partageaient quelques

caractéristiques de leur personnalité avec leur enfant et a souligné à cet égard que

ceci venait de facteurs génétiques ou neurologiques plutôt que psychologiques ou

environnementaux.

En 1944, Hans Asperger a publié son article « Die Autistischen Psychopathen

im Kindesalter », que nous pourrions traduire, dans la terminologie française, par «

trouble de la personnalité ». Il s’agirait donc davantage d’une description de la

personnalité troublée plutôt qu’une maladie mentale à part entière comme la

schizophrénie (Attwood, 2009).

En 1981, Lorna Wing consacra un article au syndrome d’Asperger, depuis,

l’intérêt pour ce syndrome est allé en grandissant (Vermeulen & Rogé, 2009). Il a

été introduit dans les classifications internationales des maladies, à côté de

l’autisme, dans les troubles envahissant du développement en 1994 dans le DSM-IV

et en 1993 dans la CIM-10.

5.1.2. La sémiologie clinique du Syndrome d’Asperger

5.1.2.1. Les troubles des interactions sociales :

A partir de leurs études en 1989, Carina et Christopher Gillberg ont noté six

critères dont deux montrent les aspects du comportement social. Le premier critère

est nommé « Altération de l’interaction sociale» où l’enfant présente au moins deux

des caractéristiques suivantes (Attwood, 2003) :

· L’incapacité à établir des relations avec ses pairs.

· L’absence de désir d’établir des relations avec eux.

· Le manque d’appréciation des réponses comportementales.

· Des comportements sociaux et émotionnels inappropriés.

Le second critère indique les altérations du comportement social, l’enfant doit

montrer au moins une des caractéristiques :

ü Un usage restreint des gestes.

ü Un langage corporel gauche ou maladroit.

ü Une expression inappropriée.

ü Un regard tendu, étrange.

Szatmari et des collègues canadiens annoncent, dans la même année, leurs

critères de diagnostic. Ils ont souligné les caractères inhabituels du comportement

social (Szatmari, Bremner, & Nagy, 1989) et indiquent plusieurs aspects qui

n’étaient pas spécifiquement indiqués dans les critères de Gillberg: l’absence de

regard, l’incapacité à « transmettre des messages visuels », le détachement ou les

difficultés à ressentir les sentiments d’autrui et le fait de s’approcher trop près des

autres. On observe que le concept d’espace personnel et le degré d’inconfort qui

résulte de cet empiétement sont moins conscients chez l’enfant avec autisme. En

1990, l’Organisation Mondiale de la Santé a annoncé ses critères de diagnostic du

syndrome d’Asperger. Ils ont ainsi souligné que les enfants pouvaient souffrir d’un

manque dans le jeu social et le partage mutuel d’intérêts, d’activités et d’émotions et

de modulations du comportement en fonction du contexte social. En 1994, la

DSM-IV a ajouté aux précédents critères l’absence éventuelle de réciprocité sociale et

émotionnelle (Attwood, 2003).

5.1.2.2. Les troubles de la communication :

Le langage est relativement protégé et évolue dans des délais normaux.

Néanmoins, l’expression de l’enfant est parfois maladroite et la prosodie inadaptée.

De plus, il utilise des vocabulaires précieux et inhabituels dans un discours souvent

pédant. On peut observer des problèmes dans la syntaxe avec des inversions de

pronoms. Son discours semble répétitif et centré sur des thèmes dont l’intérêt est

souvent restreint à des aspects techniques. Il peut exister des stéréotypies verbales et

des néologismes. Parfois, l’enfant montre des difficultés à comprendre certaines

expressions subtiles -jeux de mots, proverbes, figures de style euphémismes,

métaphores, etc.(Lenoir, Bodier-Rethore, & Malvy, 2007).

v La communication non verbale est perturbée dans deux sens :

v Les troubles de l’expression se manifestent par une pauvreté du

registre des mimiques, par des gestes conventionnels inappropriés.

v Les troubles de la compréhension se traduisent par des erreurs

d’interprétation des signaux corporels et émotionnels de leurs

interlocuteurs.

5.1.2.3. Les troubles moteurs :

L’enfant est identifié comme étant maladroit, ayant des difficultés de

coordination et d’habileté. Il peut avoir des difficultés pour attacher ses lacets,

apprendre à faire du vélo, écrire à la main ou attraper un ballon. Ainsi, il montre une

démarche inhabituelle ou immature quand il court ou marche. Selon Attwood

(2009), les ergothérapeutes et les kinésithérapeutes peuvent confirmer un retard

d’acquisition des aptitudes motrices ou un trouble moteur spécifique chez ces

enfants. Attwood ajoute que ce thérapeute peut indiquer d’autres caractéristiques

inhabituelles du développement de l’enfant et de ses degrés d’acquisition. L’enfant

peut alors bénéficier de programmes pour améliorer ses aptitudes motrices, quoique

les problèmes de coordination soient le point de départ vers un diagnostic du

syndrome d’Asperger (Attwood, 2009).

Certains enfants peuvent présenter des mouvements corporels involontaires,

rapides et soudains (tics moteurs) et des vocalisations incontrôlables (tics vocaux)

qui ressemblent aux symptômes du syndrome de la Tourette (Ehlers et Gillberg

1993 ; Gillberg et Billstedt 2000 ; Kadesjo et Gillerg 2000 ; Ringman et Jankovic

2000 ; cités Attwood, 2009).

5.1.2.4. Les troubles de l’humeur :

Les enfants ayant le syndrome d’Asperger souffrent de troubles de l’humeur

(Attwood, 2003). Certains semblent être toujours anxieux, ce qui peut être le signe

d’un Trouble Anxieux Généralisé (TAG) comme par exemple les enfants qui

utilisent leur intellect plutôt que leur intuition. Ces enfants agissent comme cela pour

réussir dans certaines situations sociales. Ce comportement met l’enfant dans un état

d’alerte et d’anxiété qui peuvent causer une fatigue mentale et physique (Attwood,

2009).

Afin d’éviter les situations anxiogènes, l’enfant développe des mécanismes de

compensation. Par exemple à l’école, l’enfant refuse d’assister aux cours ou de

parler (Kopp & Gillberg, 1997). Il peut manifester une réaction phobique à certaines

situations sociales, à des expériences sensorielles comme un aboiement de chien ou

à des modifications dans la routine scolaire quotidienne. Cela peut ainsi mettre

l’enfant dans un état d’inquiétude en raison du changement inattendu de ses

prévisions (Attwood, 2009).

5.1.2.5. Les trouble du comportement

Les enfants Asperger présentent plusieurs modalités de comportements,

aptitudes spécifiques dans certains domaines précis et restreints, à caractère

technique, aidés par une mémoire mécanique bien développée. Les thèmes sont

parfois étranges, bizarres ou anecdotiques, par exemple, les horaires de trains, les

trajets d’avions. Ces intérêts spécifiques sont divers souvent en décalage avec ceux

habituels à leur âge.

De plus, ils présentent de manière encyclopédique des sujets divers et variés

comme les races animales, les planètes, le corps humain voire les chiffres ou les

lettres (Edelson, 2010)

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. Il semble que l’enfant cherche une immuabilité qui lui

permet de gérer les changements de son environnement. Les enfants peuvent par

exemple avoir une passion pour la collection de certains objets comme le démontre

ce témoignage : « J’aimais aussi collectionner les bouchons de tubes de Smarties.

Ils étaient oranges, verts, bleus, rouges et jaunes avec une lettre de l’alphabet.

J’avais plus d’orange et seulement quelques bleus et je n’ai jamais complété

l’alphabet. Le problème était que je voulais ouvrir tous les tubes de Smarties dans

les confiseries, pour voir la lettre sous le bouchon, mais cela mettait les gens en

colère » (Jolliffe, Lansdown; Richard, & Robinson;Clive, 1992, p. 13). Ces

comportements peuvent être pour l’enfant à la fois une source de plaisir et une

méthode de relaxation.

5.1.3. Les capacités intellectuelles

Le quotient intellectuel total de ces enfants est normal ou supérieur (Q.I > 70),

leurs capacités cognitives sont le plus souvent hétérogènes avec une maitrise du

registre verbal souvent supérieure à celui du raisonnent perceptif. Environ 50% des

enfants Asperger présentent des aptitudes avancées de raisonnement

verbal(Attwood, 2009).