• Aucun résultat trouvé

4- Présentation Des Résultats

4.1. Le processus d’accompagnement

4.1.4. Suivi/maintien du lien d’accompagnement

Dans leur suivi, les agents affirment avoir la responsabilité de veiller au respect des engagements des clients et de s’assurer que les conditions leur permettant de poursuivre leur formation sont toujours présentes.

Les interviews nous apprennent que plus la formation du jeune client avance, plus les agents tentent de fonctionner de façon similaire au marché du travail afin de favoriser la réussite du jeune une fois que celui-ci intégrera un emploi.Ainsi, les interviews auprès des agents mettent en lumière un mode de gestion des absences en trois étapes. À la première étape, si le client cumule plusieurs absences au cours d’un même mois, un constat d’absences répétées est fait. Cependant, pour la plupart des agents, aucune action ou intervention n’est entreprise à ce moment auprès du jeune. Ainsi, en début d’inscription, des agents tolèrent un taux d’absences pouvant parfois aller jusqu’à 40 %. À la deuxième étape, les agents tolèrent 20 % d’absences. Ainsi, le jeune qui dépasse le pourcentage autorisé pour un second mois est convoqué pour une rencontre. Finalement, à la troisième étape, les agents tolèrent un maximum de 10 % d’absences avant de convoquer le jeune pour discuter de sa situation. Un agent mentionne qu’il est fréquent, lors de ces discussions à propos des absences répétées du jeune, que l’intervention ressemble davantage à une intervention psychosociale, puisqu’il s’agit d’aborder les difficultés qui empêchent le jeune d’avancer.

« Au début, on leur dit : je t’ai convoqué, c’est en raison d’absences nombreuses, ou : un des intervenants m’a dit que tu ne feelais pas très bien. Parce qu’aussi, il y a une entente d’échange de renseignements entre l’école, ou l’organisme à qui je réfère, afin de connaitre son rendement au niveau personnel et scolaire. Puis à ce moment-

là, je le convoque puis je l’amène à me parler de ce qu’il vit. C’est presque de l’intervention psychosociale » (SN4/H/1).

Selon les professionnels rencontrés, la tolérance plus grande en début de parcours permet au jeune de s’adapter graduellement. Cependant, au-delà du stade où est rendu le jeune dans son cheminement, le type de formation peut aussi influencer la souplesse dont fera preuve l’agent. En effet, la norme est de 10 % d’absences tolérées, mais un agent précise que dans certains cas, comme pour un DEP, il contacte le client dès que ce dernier atteint 5 % d’absences. Il explique cette procédure par le fait qu’un DEP est un cours intensif, donc si le jeune s’absente, cela risque d’avoir des répercussions sur ses notes et sur son apprentissage de façon plus marquée que dans le cas, par exemple, de l’éducation aux adultes, où le jeune à la possibilité de progresser à son rythme.

« En formation générale c’est plus facile qu’en formation professionnelle […] la personne avance par elle-même […]. À l’école c’est comme aux adultes, ça marche par module. Donc ils vont voir le professeur et ils avancent dans leur module. […] la formation professionnelle, quand c’est d’une durée donnée, qui commence en janvier pis qui se termine en octobre, je pourrais donner l’exemple de « vente-conseil »; ce n’est pas par module. Donc si la personne s’absente, elle manque le fil pour réussir sa formation » (SN7/G/1).

Plusieurs personnes interrogées ont mentionné que la gestion des absences est un domaine où il y a beaucoup de souplesse et de variabilité d’un agent à l’autre. Il apparait donc que cette gestion demeure à la discrétion des agents. Ceux-ci le confirment d’ailleurs et semblent présenter des points de vue différents sur leur façon de faire. Certains tentent de resserrer davantage les conditions et stipulent qu’il serait bien d’être plus stricts, tandis que d’autres pensent qu’il est nécessaire de garder une souplesse avec cette clientèle déjà fragile. Quelques jeunes dépassent les limites en ce qui concerne les absences ou les dates butoirs, mais comme l’explique un agent d’aide à l’emploi interrogé, tous les cas qui bénéficient d’exception ou qui ont des autorisations spéciales sont justifiables. Les agents mentionnent notamment que les jeunes de 18-24 ans bénéficient souvent de plus de souplesse quant à leurs absences, car les programmes jeunesse desservent majoritairement des jeunes multi problématiques, ce qui nécessite davantage d’indulgence de la part des agents s’ils souhaitent les garder dans les mesures. Cependant, il a été mentionné que dans les cas où le jeune adulte ne vit pas de problèmes particuliers et que son manque d’engagement n’est dû qu’à une faible motivation, l’agent sera moins tolérant à son égard pour ce qui est des absences.

Le suivi du cheminement

Dans chaque centre d’éducation des adultes se trouve un intervenant dédié uniquement aux jeunes qui sont référés par le CLE. Durant la période où le jeune est investi dans son projet de formation, les agents des CLE s’assurent qu’il soit entouré et encouragé par les intervenants qui œuvrent dans les établissements de formation. Ceux-ci sont parfois engagés par Emploi-Québec, parfois par un autre établissement comme un CJE par exemple.

« Ici, on a deux CJE qui offrent l’accompagnement dans les écoles. Il y a une intervenante engagée par le CJE, qui est postée dans l’école et qui va s’occuper des étudiants qui étudient avec Emploi-Québec. Elle va donc les cibler et les rencontrer, et elle va leur offrir ses services s’ils en ont besoin et puis elle va faire un suivi. […] Moi j’ai des contacts avec ces intervenants-là » (SN13/E/2).

« Dans chaque école secondaire aux adultes, il y a un intervenant qui s’occupe juste des élèves qui sont référés par les CLE. […] Ça ne part pas de nous, ce n’est pas nous qui l’engageons, ce sont les écoles qui ont un responsable des élèves CLE. […] dans chaque école il y a un intervenant avec qui on a un lien » (PN26/B/2).

Quant au programme Jeunes en action, les agents des CLE reçoivent tous les mois un rapport du cheminement de chaque jeune inscrit à la mesure, via un formulaire informatisé. L’information échangée entre les agents d’aide à l’emploi et les collaborateurs des milieux peut concerner le rendement scolaire, l’assiduité et tout autre problème auquel ils jugent bon de s’intéresser. Selon les intervenants rencontrés, ces collaborations et échanges permettent de faire des interventions concertées et de travailler dans le même sens, ce qui aide à garder une cohérence dans les actions et les discours auprès des jeunes.

« J’appelle l’intervenante dans l’école qui travaille avec les CJE et je dis : Vois-tu tel étudiant? As-tu un contact avec lui? Sais-tu ce qui se passe? Ça va mal…. Donc là elle me dit : Je vais regarder ça plus attentivement. Puis elle va aller voir le jeune » (SN13/E/6).

Cependant, les personnes rencontrées rapportent que dans le cas de la mesure de formation, le contact avec les écoles est généralement plus difficile.

« Le suivi se fait beaucoup avec les écoles aussi. On a 2-3 écoles plus près d’ici et ils vont nous appeler, mais c’est plus difficile parce que les écoles, c’est plus grand par rapport au carrefour jeunesse-emploi » (PN25/C/4).

Souvent, les difficultés rencontrées se retrouvent au plan des demandes de prolongation pour compléter une formation. Un intervenant d’un milieu de formation peut demander à ce qu’un jeune bénéficie de plus de temps pour compléter des cours, mais l’agent d’aide à l’emploi doit, de son côté, se soucier de respecter le budget alloué. Par conséquent, il ne peut pas toujours consentir à l’octroi d’une allocation supplémentaire pour le jeune au-delà des 36 mois.

« Là où on a parfois des problèmes, c’est souvent sur les prolongations. L’école nous dit : Nous on le prolongerait de quelques mois, finalement il était supposé terminer au mois de septembre, mais il va finir en mai 2011. Oups! C’est parce qu’il faut comprendre aussi que nous on a des budgets à respecter premièrement, mais on doit aussi s’assurer que le jeune fait ce qu’il a à faire […] alors c’est souvent là qu’il va y avoir peut-être… pas des accrochages, mais un petit peu de : hey bien là moi mon jeune ça lui prendrait ça. L’agent dit : non non non! Et parfois je rentre en ligne de compte. C’est là que mon rôle prend toute son importance » (PN27/D/1).

« Si j’appelle dans une autre école je sais très bien que je vais m’obstiner avec l’intervenant qui est là. Parce que moi j’ai des règles à faire respecter et en plus, si j’ai de la souplesse et que la souplesse est « surdépassée » hey bin c’est parce qu’à moment donné il y a des limites! Je suis obligé de m’obstiner avec l’intervenant en plus d’avec le jeune, ça ne marche pas là! Comme intervenants on est supposés être capables de trouver quand même un terrain d’entente. Si je te dis que j’ai certaines limites et que le client les a plus que dépassées, et bien regarde à moment donné : non! Il ya des écoles avec qui c’est beaucoup plus difficile, beaucoup beaucoup beaucoup plus difficile! » (PN34/B/10).

Concrètement, une fois que la personne est engagée dans une mesure (Jeunes en action, mesure de formation, etc.) les contacts se font plutôt sporadiquement avec le jeune, ou encore par l’intermédiaire de l’organisme ou de l’établissement responsable de livrer la mesure. La fréquence des contacts avec le client est déterminée par l’agent et varie d’un jeune à l’autre, selon ses besoins. Ainsi, certains vont être contactés une fois par mois, d’autres aux deux semaines, ou encore de façon hebdomadaire. Ainsi, certains ont un suivi régulier systématique tandis que pour d’autres, ce suivi est effectué au besoin. Le jeune peut lui aussi contacter l’agent d’aide à l’emploi et certains, selon leurs besoins, appellent leur agent de façon quotidienne. Celui-ci essaie alors de répondre aux besoins du jeune, la majeure partie du temps en le référant vers un organisme approprié. Lors de ces contacts avec le jeune, l’agent prend le temps de s’informer à

propos de son cheminement dans le projet, mais tente aussi de s’informer à savoir si d’autres aspects de sa vie peuvent nuire à son cheminement et à sa réussite.

« Ça va être de voir comment ça va, comment ça va à la maison. Parce que […] si ça ne va pas bien à la maison, ça n’ira pas bien à l’école. Si ça ne va pas bien à la maison, ça n’ira pas bien sur le marché du travail. Si tu ne manges pas parce que tu n’as pas d’argent, ça n’ira pas bien à l’un ou l’autre non plus […] on regarde tout ça; on regarde comment ça va avec les amis, comment ça va avec les parents, on regarde comment ça va avec son plan d’action comme tel » (PN26/B/4).

Les agents considèrent que dans leur travail, ils doivent s’adapter à chaque cas spécifique, le but étant de répondre (directement ou par le biais de références) à tous besoins susceptibles d’avoir une influence sur la réussite du projet. Le suivi d’un jeune adulte inscrit dans des services d’emploi demeure donc très variable d’un cas à l’autre. Cependant, ces situations où le suivi est plus intense concernent surtout les jeunes qui font partie du programme Alternative jeunesse. Effectivement, les agents qui travaillent au sein du programme Alternative jeunesse s’impliquent, plus souvent que les autres, dans de multiples sphères de vie du client. Ils s’attardent, entre autres, à instaurer une relation privilégiée, à offrir davantage de soutien et à avoir des contacts plus fréquents avec le jeune. Les agents interviewés stipulent que le suivi effectué auprès des jeunes clients peut aller loin dans certains cas. Par exemple, un des agents mentionne qu’il doit parfois s’assurer que son client ait un bon suivi médical ou qu’il prenne sa médication au besoin. Ainsi, il peut demander à ce qu’il lui apporte ses factures de médicaments pour s’assurer qu’il se les procure. Les agents qui se sont exprimés à ce sujet, affirment tenter d’agir sur tout ce qui est susceptible d’influencer la réussite du jeune, à condition que ce dernier le lui permette. Certains agents ont également affirmé que l’aide octroyée peut consister à effectuer des recherches avec le jeune selon son besoin, lequel peut être, par exemple, de trouver un logement ou un organisme d’aide sur un sujet particulier, ou encore de faire un budget, etc.

« Il y en a que ça n’allait pas bien du tout quand ils étaient à l’école plus jeunes, puis là ils arrivent et ils pètent des scores puis ça va super bien. Mais avant je me suis assuré qu’ils aient eu un soutien médical. Parce que ça va jusque-là aussi, si tu ne les as pas tes concerta, ça se peut que ça aille pas bien. Puis ça va aussi loin que : je regarde si il a sa facture de concerta tous les mois pour être sûr qu’il les a pris. Peut- être qu’il ne les a pas pris, mais si il me remet sa facture, j’ai plus de chance qu’il soit au moins allé à la pharmacie. Des fois le suivi ça va aussi loin que ça : as-tu pris tes médicaments? » (PN26/B/5).

4.2. Nature et fonction du travail d’accompagnateur