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Structure financière et accès au financement externe

Section I - Position bilancielle des emprunteurs et amplification des chocs initiaux

A) Structure financière et accès au financement externe

La théorie du canal patrimonial s’appuie sur la sensibilité des bailleurs de fonds au cycle

de l’activité pour justifier la transmission des chocs. Certes, les fondements théoriques de ce mécanisme de transmission s’appuient exclusivement sur des bases microéconomiques relatives aux frictions informationnelles. Face à un marché des capitaux qui est loin d’être parfait, l’information revêt un intérêt majeur pour tout acte de placements et d’investissements.

Cette problématique est reprise par certains éléments théoriques et empiriques afin de justifier certaines relations de dépendance entre agents économiques. D’ailleurs, Bernanke et Blinder (1988) présentent dans leur modèle macroéconomique la dépendance des emprunteurs au financement bancaire en s’appuyant sur les asymétries informationnelles.

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Sept ans après, Bernanke et Gertler revisitent les positions de Bernanke et Blinder pour incorporer la position patrimoniale, variable financière clé, dans les explications des

phénomènes d’amplification de chocs, absente dans les analyses conceptuelles précédentes67.

En affirmant que la position patrimoniale de l’emprunteur influe, en grande partie, sur les critères d’obtention de liquidités, Bernanke et Gertler (1995) offrent une seconde lecture très novatrice, confortée par les analyses empiriques des crises antérieures. La nouvelle approche défendue par ces deux auteurs révèle que les effets patrimoniaux revêtent un intérêt direct pour comprendre le cheminement et l’amplification de certains chocs.

Avec cette approche, la structure financière de l’emprunteur n’est plus neutre dans les décisions de financement des bailleurs de fonds. Ce qui signifie fondamentalement que l’évolution à court et moyen termes des décisions d’investissement, de production, d’emploi, de fixation des prix, de stockage est directement rattachée aux conditions de financement des entreprises qui reposent systématiquement sur l’état de leur bilan.

1. Le lien entre le bilan des emprunteurs et l’accès au financement

La plupart des analyses théoriques autour du canal patrimonial révèlent que la structure bilancielle des emprunteurs joue un rôle déterminant sur les décisions de financement. Elle constitue la variable-clé dans les décisions des apporteurs de capitaux. En clair, le coût du financement est fonction de la santé financière de l’emprunteur potentiel. Toute recomposition de sa structure bilancielle, induite par des chocs d’origine monétaire ou non, est susceptible de modifier les décisions des bailleurs de fonds.

a) La richesse nette au cœur de la relation entre emprunteurs et prêteurs

Il est important de noter que l’interaction entre bilan des emprunteurs et disponibilité des fonds externes, repose essentiellement sur le concept de richesse nette qui fait, naturellement, allusion à la santé financière de l’emprunteur. Le concept de richesse nette, notion se rapportant à des considérations microéconomiques, accorde une place majeure à la position patrimoniale comme étant un indicateur avancé de référence, susceptible de fournir des informations précieuses et spécifiques sur la santé financière des agents privés.

67 Cf. B. Bernanke et M. Gertler, «Inside the black box: the credit channel of monetary policy transmission», Journal of Economic Perspectives, Fall, vol. 9, 1995, p. 27-48.

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portefeuilles d’actifs. En résumé, la richesse nette est peut être assimilée au levier d’endettement. Selon leur santé financière, qui est tributaire du cycle conjoncturel, les agents privés peuvent obtenir plus ou moins de ressources externes auprès des établissements de crédit notamment sur le marché des capitaux. Un niveau de richesse nette, jugé suffisamment élevé pour couvrir les pertes, signifie pour les bailleurs de fonds que la situation financière de l’emprunteur est solide. Ainsi, les investisseurs estiment que le risque de faillite ou de non remboursement est faible. Pour les ménages, la solidité de leur bilan, facteur déterminant pour lever des fonds, dépend essentiellement de la valorisation de leur patrimoine net.

b) Evaluation de la richesse nette interne

Si la richesse nette est au cœur de toutes les décisions de financement et de dépenses

des agents privés, il est normal que les apporteurs de capitaux cherchent à la mesurer ou bien à l’évaluer. Toutefois, la mesure de cette variable semble délicate. Pour les ménages, c’est plutôt l’ensemble des actifs mobilisables (immobilier et financier) ainsi que la dette totale contractée qui peuvent servir d’indicateurs pour évaluer leur richesse nette interne.

Alors que, pour les entreprises, la méthodologie semble être un peu plus compliquée dans la mesure où il faut anticiper les flux de trésorerie. La richesse nette recouvre l’ensemble des actifs mobilisables et des recettes futures de l’entreprise. On pourrait objecter que l’évaluation de la richesse nette des sociétés non financières est plus instable. Néanmoins, il se trouve que dans la réalité, les créanciers font appel à d’autres critères pour affiner leur évaluation.

76 c) Dissemblance des méthodes d’évaluation

Selon les pratiques comptables imputables à chaque économie, la méthodologie

d’évaluation de la richesse nette interne n’est pas forcément la même, ce qui pose un problème majeur lorsque l’on veut proposer un système de mesure identique. Si des dissemblances existent entre les différents pays, il se trouve que son évaluation s’appuie sur des données qui sont étroitement liées à la dynamique du cycle conjoncturel.

Ce qui revient à admettre le caractère procyclique de la richesse nette interne. Cette dernière, manifestement, augmente en phase ascendante du cycle, contribuant ainsi à améliorer la disponibilité des fonds alloués par les établissements de crédit, ce qui permet de financer largement les besoins des entreprises. A l’inverse, en période de retournement conjoncturel, les entreprises et les ménages vont rencontrer plus de difficultés pour lever des fonds sur le marché du crédit.