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Chapitre 3. Recension des écrits sur les interventions éducatives 56

3.1   Stratégies utilisées en éducation à la santé 56

L’éducation à la santé est l’une des grandes fonctions de l’infirmière en société. Une intervention éducative efficace et efficiente se doit d’être appuyée sur des stratégies pédagogiques éprouvées. Cette section décrit diverses stratégies éducatives utilisées en santé. Dans un premier temps, elle explique les différentes stratégies favorisant une modification de comportements, puis elle identifie les principes qui sous-tendent ces types d’interventions, tels les différents courants; béhavioriste, cognitiviste et humaniste (Aliakbari et al., 2015). Elle traite, par la suite, des raisons qui soutiennent l’importance d’adopter une approche

humaniste dans l’accompagnement et le soutien de personnes atteintes d’une maladie chronique (Achenbaum, 2012; C. M. Chou et al., 2014). Elle souligne l’intérêt d’avoir un cadre de planification pour développer une intervention éducative en santé.

La transmission d’informations sur divers sujets, sous forme orale ou écrite, est l’une des façons qui a permis aux sociétés de se développer. La transmission d’informations peut aussi s’effectuer d’une personne à une autre et elle représente certainement l’une des premières méthodes éducatives employées dans le domaine de la santé. Les professionnels de la santé faisaient jadis figure d’érudits au sein de la population; ils possédaient les connaissances sur les comportements à adopter afin de vivre sainement, qu’ils transmettaient ensuite à la population (Aliakbari et al., 2015). Cette façon de faire a une portée plutôt limitée sur l’adoption d’un comportement et la rétention d’information (Ballard, 1987; M. P. Kelly et Barker, 2016). Il est désormais reconnu que les stratégies éducatives structurées et centrées sur les besoins de la personne assurent une bien meilleure rétention des connaissances (Elsman et al., 2014; Zernike et Henderson, 1998). Toutefois, l’accroissement des connaissances, comme le rappellent Gibson et al. (2002), ne suffit pas à assurer un réel changement du comportement. Il faut se rendre à l’évidence, la transmission d’informations et l’accroissement des connaissances en santé ont un impact plutôt limité sur la modification et le maintien des comportements d’un individu ou d’une population.

Ce constat a orienté le milieu de la santé et les infirmières à privilégier des stratégies éducatives suscitant une participation plus active de la personne (Rijken et al., 2014). C’est principalement sous cet éclairage que les stratégies éducatives, présentes dans cette étude, furent développées. Les découvertes dans ce domaine ont ainsi amené les chercheurs à proposer des théories et des modèles de modification de comportements axés sur la participation directe et active de la personne dans la gestion de sa propre santé (Leppink et van den Heuvel, 2015; Mackey et Bassendowski, 2017). Il est possible de regrouper l’ensemble de ces théories et ces modèles dans l’un ou l’autre des grands courants de pensée suivant : le béhaviorisme, le cognitivisme ou l’humanisme (Artino et Konopasky, 2018). Ces trois paradigmes, quoique différents, ont un point commun; ils visent tous l’apprentissage et l’adoption de comportements. Cependant, chacune de ces approches utilise des méthodes différentes pour y parvenir.

L’approche béhavioriste développée par Watson (1913), par exemple, s’appuie sur le principe qu’il est possible de faire adopter un comportement grâce à des techniques de renforcement (Aliakbari et al., 2015). Selon ce système de pensée, une personne est de prime abord, passive. Le professionnel de la santé doit donc réaliser des actions de renforcement pour l’inciter à adopter un comportement. Toujours selon cette approche, il faut que la personne éprouve de la satisfaction lorsqu’elle adopte un nouveau comportement ou, tout au moins, cela ne doit pas lui causer de la frustration ou de l’insatisfaction (Aliakbari et al., 2015). Quant à l’approche cognitiviste, elle mise plutôt sur la participation active de la personne à ses activités d’apprentissage (Aliakbari et al., 2015). Le professionnel de la santé cherche donc à déterminer le « modus operandi » qui est présent chez la personne et qui lui permet d’acquérir des connaissances ou de modifier un comportement. Une fois cette approche identifiée, le professionnel de la santé peut le reproduire afin de maximiser l’acquisition des connaissances et de susciter une modification de comportements. L’approche humaniste, quant à elle, considère l’apprenant comme une personne capable de faire des choix (Aliakbari et al., 2015). Dans cette approche, les interventions éducatives sont davantage axées sur les besoins exprimés de la personne, ses intérêts et ses habiletés, afin de l’aider à prendre en charge sa santé et, ultimement, à changer ses comportements. Les interventions éducatives peuvent modifier positivement les croyances des patients, ce qui peut conduire à un changement de comportement (Saounatsou et al., 2001). Bien que les approches cognitiviste et béhavioriste soient encore utilisées dans le développement d’interventions éducatives en santé, l’approche humaniste est aujourd’hui la plus largement utilisée, surtout pour développer des interventions éducatives auprès de personnes atteintes de maladies chroniques (Achenbaum, 2012; C. M. Chou et al., 2014; Debussche, 2014). Étant donné qu’il considère la personne comme partie prenante des décisions prises sur sa santé et son bien-être, le modèle conceptuel de Neuman s’inscrit dans une approche humaniste. La description succincte que nous venons de faire des différentes approches en éducation à la santé, de leur impact et de leur utilisation a pour objectif de rappeler les différents paradigmes utilisés en éducation pour la santé et de situer l’approche préconisée dans notre étude.

En accord avec les principes humanistes, plusieurs auteurs ont développé des interventions éducatives en santé pour les personnes atteintes de maladies chroniques (Achenbaum, 2012;

Cloninger, 2013; Massimi et al., 2017). Ces interventions avaient pour objectif d’accroître chez l’individu l’estime de soi et la capacité de faire des choix éclairés. Aujourd’hui, les interventions éducatives à l’intention des personnes atteintes de maladies chroniques ont aussi pour objectif d’encourager, chez ces dernières, une meilleure autoprise en charge (autogestion) de leur santé. C’est ce que l’on appelle aussi le « self-management ». Selon Hewner (2014), ce type d’approche permet aux professionnels de la santé de prodiguer des soins étant à la fois plus efficients et plus efficaces. Outre l’approche éducative utilisée pour promouvoir la santé, il faut aussi examiner les modèles d’accompagnement pour les personnes atteintes d’une maladie chronique.

Différentes approches permettent au professionnel de la santé de détecter les facteurs liés à l’adoption d’un comportement favorable à la santé (Godin, 2012). Cependant, ces approches ne fournissent pas la méthode à suivre pour développer une intervention de ce type. L’intervention éducative se construit idéalement à l’aide d’un outil tel que la schématisation d’intervention de Bartholomew et al. (2016) que l’on nomme « intervention mapping ». Cette schématisation propose une série d’étapes à suivre afin de développer une intervention éducative. Généralement, ce type de guide permet de tenir compte des déterminants du comportement, de l’environnement et de la santé lors du développement d’une intervention éducative (Bartholomew et al., 2016). L’utilisation d’un tel outil vise à développer une intervention éducative concrète qui soit le plus près possible de la réalité vécue par la personne atteinte d’un problème de santé. La schématisation d’intervention a été utilisée dans diverses situations de santé, et ce, autant dans une perspective de promotion de la santé qu’en prévention de maladies ou de complications de celles-ci (Bartholomew et al., 2016). Il s’agit également d’un guide ayant été éprouvé pour le développement d’une intervention éducative qui vise la réduction de la consommation de sodium (Cornélio et al., 2013). Cette intervention ne pourra pas être utilisée dans le cadre de cette étude pour plusieurs raisons qui seront évoquées ultérieurement. La documentation scientifique actuelle a tendance à montrer l’efficacité d’une approche plus personnalisée lors du développement d’une intervention en santé pour les personnes atteintes de maladies chroniques, comme chez les personnes âgées. Il est essentiel de développer une intervention novatrice dès qu’un problème de santé chronique nécessite un changement de comportement.