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Introduction générale

Chapitre 2 Composants technologiques potentiels pour un projet de microcentrale

2.4 Transport et Stockage de la chaleur

2.4.2 Stockage thermique

2.4.2.1 Accumulation par chaleur sensible

De nombreuses possibilités de stockage thermique sont identifiées [99] [30].

La variété de choix concerne surtout le médium de stockage, qui peut être solide (béton armé, sel, céramique, métaux...) ou liquide (fluide caloporteur, sels, mélanges de sels liquides, sodium liquide...).

La performance d'un médium allant globalement de pair avec son coût brut, les centrales solaires de haute puissance à CP (30MW et plus) ont opté pour l'utilisation de mélanges de sels liquides.

L'utilisation de matrices métalliques (acier, fonte) serait intéressante énergétiquement, mais d'un prix de revient prohibitif.

L'utilisation du béton, ou de céramiques moulables, potentiellement réalisable avec des coûts équivalents (environ 20€ / kWht ) a été abandonnée pour plusieurs raisons :

Si le prix du béton brut est le plus faible de tous (environ 1$/kWht) d'une part le coût final de réalisation pratique est beaucoup plus élevé (par exemple les canalisations en acier nécessaires aux échanges thermiques dans la matrice représentant à elles seules 75% du prix de revient).

D'autre part les échanges thermiques dans les matrices solides massives sont difficiles à maîtriser dynamiquement (faible conductivité et diffusivité).

Enfin, la grande incertitude quant à la résistance du béton aux cyclages thermomécaniques (dilatation différentielle entre le béton et l'armature ou les canalisations) sur le long terme est considérée comme trop risquée.

Il faut noter que le prix de revient annoncé de 20€ / kWht , dans l'étude de stockages par béton et céramique pour la centrale Andasol-1, est possible à la condition de réalisation à grande échelle commerciale. Il est vraisemblable que de petites unités reviendraient au moins au double. Les essais de cyclage thermique de modules expérimentaux ont cependant montré la cohérence technologique de cette solution, affichant des pertes thermiques globales de 10 à 15% pour une température voisine de 180°C [100].

L'utilisation de sels liquides s'est avéré être la solution la plus convenable aux centrales solaires à CP [99] [101], pour des raisons à la fois de coût et de performances. La solution à deux réservoirs (un "chaud et un "froid") en particulier montre la plus grande souplesse d'utilisation (particulièrement important pour maîtriser la température de surchauffe de vapeur) . Les sels sont transférés du réservoir froid vers le réservoir chaud à travers un échangeur lorsque le chauffage solaire est disponible et transférés en sens inverse lors du fonctionnement autonome (figure 1.14 p.34).

Ces stocks de grande taille présentent également des pertes thermiques très faibles. Par un effet d'échelle sur la taille des échangeurs caloporteur / stock et de la surface du réservoir à isoler relativement à son volume , les fuites thermiques sont diminuées à mesure que la capacité thermique augmente. En l'absence de charge ou décharge, la température du médium peut ne baisser que d'une trentaine de degrés sur une période de 6 semaines.

Cette caractéristique est particulièrement importante pour l'emploi de sels fondus dont il faut prévenir la solidification pour éviter des dysfonctionnements et des dommages mécaniques sur le réservoir.

A noter que les systèmes SEGS ont été initialement équipés de brûleurs à gaz pour palier aux carences d'énergie solaire. Les solutions de stockage thermique retenues (mélange de sels nitrate / nitrite) ont été optimisées en terme de prix de revient du kWh thermique ; mais il est également démontré que capacité thermique différentes seraient obtenue en optimisant le prix de revient final de la production énergétique [97]. Un autre critère d'optimisation possible est le dimensionnement des échangeurs entre caloporteur et stock.

Les réservoirs thermoclines fonctionnent sur un principe voisin. Un seul réservoir contenant du sel fondu peut être naturellement stratifié thermiquement de par la variation de densité du sel selon la température. Le réchauffage des sels se fait, de même, à travers un seul échangeur mais depuis le bas du réservoir , zone froide où les sels sont plus denses, vers le haut, zone plus chaude et moins dense ; et vice -versa lors du refroidissement.

Les fluides caloporteurs précédemment définis peuvent également servir de médium de stockage thermique, à la manière des ballons d'eau dans le domaine du chauffage domestique.

Cette solution de stockage directe présente moins de contraintes techniques que les précédentes pour des petits systèmes, puisqu'alors il n'y a plus besoin d'échangeurs thermiques entre le caloporteur et le médium de stockage.

Le prix élevé des fluides caloporteurs à haute performance exclue cette solution pour les systèmes de haute puissance.

En revanche, les huiles minérales sont bon marché et se prêtent tout à fait au stockage thermique pour des températures maximales voisines de 300°C.

Un autre avantage de cette solution est de garantir l'optimalité des transferts thermiques : D'une part l'absence d'échangeurs entre le stock et l'usage diminue les pertes entropiques (transferts à travers les résistances thermiques) ; d'autre part l'usage mixte d'un liquide, à la fois stock et caloporteur, favorise la souplesse et la dynamique des transferts thermiques.

De même que dans les installations sanitaires, la stratification du réservoir peut être mise à profit pour diminuer les pertes entropiques au sein du réservoir lui-même, qui devra être conçu dans ce sens.

2.4.2.2 Stockage thermique direct, indirect et semi-direct

Un stockage thermique est dit indirect lorsque le médium de stockage, de nature différente du caloporteur utilisé dans la boucle principale, est chauffé et refroidi à travers des échangeurs. C'est le cas des matrices solides, les sels liquides et la plupart des matériaux à changement de phase solide/liquide, qui ne peuvent généralement pas être utilisé comme caloporteurs.

L'inconvénient du stockage indirect est de générer des pertes entropiques à travers les échangeurs : Les transferts thermiques ne sont en effet possibles que par le biais d'un gradient de température. La température moyenne du caloporteur sera donc toujours supérieure à celle du stock lors de l'accumulation thermique, et inférieure lors de la restitution.

La conséquence sur le fonctionnement d'un moteur est la baisse de son rendement thermomécanique lors de la décharge du stock, ainsi que peut le traduire une analyse entropique. Ce phénomène aura d'autant plus d'influence que le niveau de température sera bas. Les échangeurs utilisés devront donc minimiser autant que possible ces différences de température, tout en restant économique.

Le stockage est direct lorsque la réserve thermique est constituée par un réservoir de caloporteur. Le processus de stockage est donc nettement plus simple que pour le stock indirect. L'absence d'échangeurs entre le médium de stockage et le caloporteur est non seulement moins coûteuse en terme d'investissement "matériel", mais également favorable à l'efficacité de la conversion thermomécanique.

En terme de capacité thermique, la chaleur spécifique massique des huiles thermiques usuelles est nettement supérieure à celle d'un matériau solide tel que le béton ou le chlorure de sodium, potentiellement utilisable en tant que médium de stockage. Mais en tenant compte de la densité des matériaux, la chaleur spécifique volumique des huiles et du béton, donc le volume d'une réserve de capacité donnée, sont du même ordre de grandeur ; le prix de revient d'un caloporteur utilisé pour le stockage est donc un critère déterminant.

Pour palier aux inconvénients respectifs des stockages direct et indirect, on peut imaginer une solution intermédiaire, réalisant une part d'accumulation thermique par le fluide caloporteur et une autre par une matrice solide. Cette solution est connue dans le domaine de température au voisinage de l'ambiance, notamment le stockage en aquifère [102] ou dans le domaine de la climatisation passive [103].

L'utilisation d'une matrice solide poreuse (galets, veines ou nappe fluides séparées par des parois en béton ou céramique) réaliserait un volume utile de stockage bon marché, tandis qu'un volume important de liquide favoriserait la dynamique des échanges thermiques avec la matrice poreuse comme dans les boucles externes, tout en assurant une partie du stockage.

Par analogie au comportement d'un aquifère, un tel stock thermique serait intermédiaire entre un médium purement solide (grande inertie thermique des transferts conductifs, bonne conductivité) et purement liquide (inertie thermique réduite par mélangeage), avec l'avantage de pouvoir isoler thermiquement le réservoir, donc un meilleur rendement global du cycle.

Les milieux poreux traversés par un fluide sont générateurs de pertes de charge. On peut cependant nuancer ce défaut dans la mesure où il est possible d'optimiser la porosité selon le besoin. Dans le cas de matrice de type nodulaire (galets...) on pourra optimiser la taille des éléments, et dans le cas de matrices lamellaires (plaques de béton armé...) la taille des veines fluides et l'épaisseur des éléments solides.

Il convient également de choisir soigneusement les matériaux et / ou les procédés de fabrication des éléments solides, de s'assurer de leur stabilité en contact prolongé avec une huile minérale, afin de ne pas polluer le caloporteur avec des particules nuisibles aux échangeurs, tant en terme de fonctionnement que de diminution de leur durée de vie par abrasion.

2.4.2.3 Accumulation par chaleur latente

Le processus de changement de phase d'un matériau a lieu à une température sensiblement constante, et avec une densité énergétique rapportée au volume (ΔQstock)/Vstock , pouvant être 2 à 3 fois plus importante que pour le stockage par chaleur sensible.

Le principal intérêt du stockage par chaleur latente est la constance en température, le système de régulation de l'installation s'en trouvant simplifié et l'efficacité énergétique accrue, surtout en ce qui concerne la conversion thermomécanique.

En ce sens le changement de phase d'eau de l'état liquide en vapeur est une bonne solution sur le plan énergétique, mais la présence de phase gazeuse nécessite un volume important et une pression élevée. Cette solution est toutefois utilisé comme stocks "tampon" de certaines centrales : par exemple la centrale à tour PS10 à Sanlucar (figures 2.9 p.49 et 2.10 p.52) comprend une réserve de vapeur à 250°C sous 40 bars autorisant un fonctionnement d'une heure seulement. Il s'agit davantage d'un système de régulation thermique, destiné à "gommer" les variations de l'ensoleillement, que d'un véritable stockage.

Les média véritablement considérés pour le stockage thermique de masse présentent donc un changement de phase solide/liquide. De nombreux média sont intéressants dans des domaines de température étendus [99] [104] et il semble possible de trouver au moins un matériau répondant à presque n'importe quel besoin de stockage thermique.

• En premier lieu, le processus de solidification des MCP génère souvent des contraintes mécaniques importantes, surtout à la fin de la cristallisation. Cela peut être critique quant à la sécurité et nécessite d'une part un sur-dimensionnement thermique et mécanique, d'autre part un système de maintient du stock à une température supérieure au seuil de solidification en cas d'arrêt de la centrale.

• En second lieu, la cinétique des transferts thermiques dans un stockage à MCP est assez complexe. La proportion de liquide et de solide varie au sein d'une unité de stockage. La distance locale entre un échangeur et le front solide change fondamentalement la nature des échanges : De purement conductifs lorsque le médium est solide, ou avec un front solide peu éloigné ils deviennent convectifs lorsque le volume de liquide est important et une part de l'énergie est temporairement stockée sous forme sensible. Il faut ajouter à cela que le phénomène de surfusion (retard à la solidification) entraîne un écart important avec l'idéal d'une température constante, surtout peut faire chuter considérablement la capacité d'échange par endothermie.

• Enfin, il faut ajouter que ces produits, de par leur composition chimique, sont loin d'être neutres vis- à-vis de l'environnement.

Du point de vue économique, certains MCP sont abordables économiquement, mais on comprend aisément que le surcoût occasionné par la structure complexe des unités de stockage est défavorable à l'utilisation commerciale des MCP, du moins dans le domaine des hautes températures. C'est pourquoi aucune centrale héliothermique de puissance actuelle n'utilise de MCP comme médium de véritable stockage thermique.

2.4.2.4 Conclusion sur le stockage thermique

Des multiples possibilités, les solution de stockage thermique par chaleur sensible sont les plus neutres pour l'environnement.

Le stockage solide, nécessairement indirect utilise des matériaux de base très bon marché, mais nécessitant des échangeurs coûteux.

Le stockage direct par un fluide caloporteur bon marché (huiles minérales) semble une alternative économiquement viable pour des systèmes de petite taille et énergétiquement favorable, mais présentant l'inconvénient d'un grand volume de fluide qui devra nécessairement être renouvelé périodiquement, et, pour ne pas être absolument neutre, augmenterait l'impact indirect sur l'environnement et aggraverait le risque d'une pollution accidentelle.

Un stockage semi-direct, panaché des deux précédents, serait une solution de compromis entre leurs avantages et inconvénients respectifs.

Entre ces trois solutions, il est difficile de trancher quant à la conception présentant le meilleur compromis entre économie et performance. Un étude approfondie ayant fait suite à celle qui vient d'être présentée, concertée entre les partenaires du projet, a abouti au choix de l'eau comme caloporteur et médium de stockage direct.