• Aucun résultat trouvé

REVUE DE LA LITTÉRATURE ET CONTEXTE DE L’ÉTUDE

1.2 Politique linguistique du Nigeria

1.2.3 Statut du français au Nigeria

55

compte les critères d’étrangeté que nous avons abordés plus haut, il suffit de considérer le fait que ces langues viennent d’ailleurs pour déterminer leur statut d’étrangéité. Le facteur géographique peut donc être le facteur principal à prendre en compte dans ce cas. L’on peut aborder les autres facteurs dont une langue peut être étrangère par rapport à une autre. Il s’agit de la distance culturelle et linguistique entre une langue donnée – les langues locales – par rapport à la langue dite étrangère. Celles-ci vont également impacter la manière pédagogique d’enseigner la langue. Il faudra dans ce cas apprécier les particularités culturelles et linguistiques de chaque langue et construire un pont pédagogique – curriculum – afin de faciliter l’acquisition de la langue étrangère à enseigner-apprendre (Conseil de l’Europe, 2001 : 130).

Notre travail est centré sur l’étude de cas des pratiques d’apprenants universitaires nigérians dans un environnement en ligne de l’enseignement-apprentissage du français langue étrangère. Le français est l’une des langues étrangères présentes au Nigéria. Il s’agit d’une langue qui est activement adoptée dans le pays pour plusieurs raisons. La suite abordera le statut ainsi que l’enseignement-apprentissage du français au Nigeria.

1.2.3 Statut du français au Nigeria

Il sera difficile d’attribuer avec certitude un statut au français langue étrangère au Nigeria. En effet, la langue française et le Nigeria partagent une histoire particulière que nous discuterons prochainement.

Dans les précédentes pages, nous avons pu mettre la lumière sur le fait que le Nigeria est un pays anglophone, c’est l’une des anciennes colonies britanniques. En outre, le statut de l’anglais en tant que l’unique langue officielle du pays, est assuré jusqu’au 1996, l’année à laquelle le chef d’état de l’époque, le Général Sanni Abacha, annonce par le biais de son ministre de l’éducation que le français allait devenir la deuxième langue officielle du Nigeria prochainement (Faniran, 2017 : 7). En se référant au discours du chef de l’état, Igboanusi & Pütz (2008) soulignent que l’objectif de cette décision était de rendre le Nigeria bilingue. Décidément, le Général Sanni Abacha a annoncé le 14 décembre 1996 que « le Nigeria lance résolument un programme de formation en langues sur le plan national qui permettra, dans un bref délai, à notre pays de devenir complètement

56

bilingue40 » (Igboanusi & Pütz, 2008 : 235). L’on remarque dans cette citation que le chef de l’état était déterminé à rendre les citoyens nigérians bilingues non seulement en annonçant son intention de changer le statut de la langue française dans le pays, mais également en encourageant le lancement d’un programme de formation en langue, française en occurrence, avec le but de faciliter l’acquisition du français pour chaque nigérian. Les auteurs ont poursuivi en confirmant que le français a finalement obtenu le statut de la deuxième langue officielle du Nigeria d’après la section 1, numéro 10 du document officiel de la Politique Nationale sur l’éducation en 1998 (Ibid). Pour, Offorma (2012 : 140), il s’agit d’une décision logique puisque tous les pays frontaliers du Nigeria sont francophones. L’auteur poursuit son argument et stipule que si l’on considère l’emplacement géographique du pays, le Nigeria aurait pu graduellement devenir un pays francophone également. En revanche, l’influence coloniale britannique a changé l’orientation linguistique de la nation. Les chercheurs tels que Igboanusi & Pütz (2008), Nwosu & Opara (2011), Offorma (2012) et Faniran (2017) parmi d’autres, se sont intéressés aux éventuels défis, possibilités et implications liés à la décision de faire du français la deuxième langue officielle du Nigeria, et ce par rapport à l’avenir de la langue anglaise. En effet, la politique linguistique que le chef d’état Monsieur le Général Sanni Abacha, a mis en place a rendu obligatoire l’enseignement du français dans tous les établissements scolaires du pays, c’est-à-dire à l’école primaire, à l’école secondaire et à l’école tertiaire. Faniran (2017 : 8) explique que les mesures nécessaires ont suivi l’annonce du chef de l’état de façon immédiate et les ressources étaient également fournies afin d’assurer la mise en œuvre de la politique. Concrètement, l’équipe ministérielle a fait appel aux professionnels et ces derniers ont eu la mission de rédiger le curriculum officiel pour l’enseignement du français à tous les niveaux académiques afin que celui-ci puisse être utilisé dans tous les établissements scolaires du pays (Igboanusi & Pütz, 2008 : 237 ; Faniran (2017 : 8).

Le chef de l’état, Monsieur le Général Sanni Abacha, est décédé le 8 juin 1998, peu après le lancement des actions pour faire du Nigeria un pays bilingue. Son décès a ralenti et progressivement conduit à l’abandon de la politique linguistique mise en place (Faniran, 2017 : 8).

40 Nigeria is resolutely launching a programme of national language training that will in a short order, permit our country to become thoroughly bilingual.

57

L’avenir du statut du français au Nigeria est par conséquent resté incertain désormais (Faniran, 2017 : 8 ; Ezeodili, 2017 : 114).

Au fil des années, l’enseignement-apprentissage du français au Nigeria se fait suivant les intérêts ou coopérations politiques et économiques entre le gouvernement nigérian et le gouvernement français (Ezeodili, 2017 : 114). Le français s’est vu disparaitre dans la liste des matières jadis obligatoires dans certains établissements alors qu’il a pu maintenir son statut de matière obligatoire dans d’autres (Offorma, 2012 : 143).

Néanmoins, un nouvel intérêt politique récent a provoqué la reconsidération du statut du français au Nigeria. Le 30 janvier 2016, le Ministre d’Etat pour l’Education Monsieur Anthony Anwukah a annoncé que le Gouvernement nigérian allait bientôt réintroduire le français comme la deuxième langue officielle du pays (Faniran, 2017 : 8). L’annonce a bien évidemment fait la Une des journaux comme ‘The Punch’ du 4 février 2016 et ‘The Guardian’ du 21 février de la même année. Ce nouveau développement gagne évidemment l’intérêt des chercheurs comme Nwosu & Opara (2011), Ezeh & Okeke (2011), Araromi (2013) et Faniran (2017), pour n’en citer que quelques-uns. Ces derniers ont étudié les perspectives, le défi et les éventuelles implications de cette nouvelle politique concernant le statut du français au Nigéria.

La décision de rendre obligatoire l’enseignement-apprentissage du français ou encore la communication en langue française dans le contexte scolaire nigérian concerne en premier lieu les enseignants (Nwosu & Opara, 2011 : 49). Les chercheurs se demandent la place que doit occuper la langue française dans l’enseignement supérieur, surtout dans le cadre des étudiants inscrits en cursus linguistique. Ils estiment que le besoin d’avoir la préconisation d’un cadre commun de référence pour l’enseignement du français se manifeste vivement dans un contexte tel que le Nigéria afin d’atteindre les objectifs de la politique linguistique du pays (Nwosu & Opara, 2011 : 50).

Comme nous l’avons noté plus haut, le statut de la langue française au Nigeria est particulier. Il a un statut plus important qu’une simple langue étrangère. Or, son statut politique de langue seconde a fait l’objet de révision à au moins deux reprises. Les chercheurs estiment qu’il faut plus qu’une décision politique pour rendre effective l’acquisition du français pour les nigérians. Offorma

58

(2012 : 144) évoque le besoin d’innovation curriculaire par exemple, Mbanefo (2011 : 66) souligne le besoin de revoir à la hausse la capacité d’accueil dans les établissements universitaires nigérians, Faniran (2017 : 14) tout comme Nwosu & Opara (2011 : 57) suggèrent la révision complète de la pédagogie en ce qui concerne l’enseignement-apprentissage du français en tant que langue seconde ou étrangère. Nwosu & Opara (2011 : 57) en s’inspirant du cadre européen commun de référence pour les langues, insistent sur le besoin d’établir et de respecter un cadre commun de référence pour l’enseignement-apprentissage du français en Afrique et au Nigeria notamment.

Il s’agira par la suite d’aborder concrètement l’enseignement-apprentissage ainsi que la promotion du français en contexte académique du Nigeria. Nous ferons le point brièvement sur les méthodologies de l’enseignement-apprentissage du français après avoir évoqué les pratiques pédagogiques et promotionnelles de la langue française dans le pays.

Il a été question dans les précédentes pages d’effectuer un rappel des relations particulières qui existent entre le Nigeria et le français. La position géographique du Nigeria le place naturellement parmi les communautés francophones (Offorma, 2012 : 140). Des évènements politiques ont abouti à la déclaration du français comme deuxième langue officielle du Nigeria à deux reprises. À la suite de l’annonce du chef d’état, Monsieur le Général Sanni Abacha, la déclaration a eu lieu pour la première fois en 1996. Elle semblait rester une décision sur papier et sans implémentation active depuis 1998. En revanche, le gouvernement nigérian actuel s’est intéressé à la reconsidération de celle-ci (Faniran, 2017 : 8). Le nouveau statut du français est entré en vigueur en 2008 (Nwosu & Opara, 2011 : 49). En effet, semblable aux événements qui se sont déroulés en 1996, le nouveau gouvernement a annoncé son intention de faire du français une deuxième langue officielle du Nigeria (The Punch, 2016 ; The Guardian, 2016 ; Faniran, 2017 : 8).

Ce nouveau développement gagne évidemment l’intérêt des chercheurs. Tenant compte du nouveau statut du français au Nigeria, les professionnels et chercheurs du contexte académique du pays doivent se poser des questions sur l’impact pédagogique et d’éventuels défis de ce type de décision (Nwosu & Opara, 2011). L’on peut donc se poser quelques questions afin de mieux aborder le sujet de la pédagogie liée à l’enseignement-apprentissage du FLE en contexte universitaire nigérian. A qui (pays ou cadre de référence) le Nigéria cherchait-il l'inspiration concernant les méthodologies d'enseignement des langues, notamment le français ? Puisque le

59