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Contrairement au résultats du chapitre III, nous n’avons pas obtenu de lumines- cence lorsque le cristal est à température ambiante. Plusieurs hypothèses peuvent être avancées :

— L’électron excité par un photon de quelques dizaines d’eV peut s’échapper du cristal avant de recombiner avec le trou. Le rendement de photoémission est dans le cas général de l’ordre de 10%, ces électrons sont perdus pour l’émission de photons de luminescence ;

— La densité d’excitations secondaires produite par le photo-électron est loca- lement grande. L’interaction entre excitations diminue le nombre de photons de luminescence pouvant être émis ;

— L’extinction de la luminescence par les états de la surface et des premières couches du cristal est très important, diminuant d’autant l’intensité de lumi- nescence pouvant être détectée ;

— Le flux de photons VUV est très faible par rapport au flux de photons utilisées dans les expériences précédentes (de l’ordre de 106 photons par impulsion). De fait, nous partons dès le départ avec un signal de luminescence plus faible que sous excitation UV ou IR.

Les trois derniers points semblent les plus à même de justifier la quasi-absence la plus raisonnable. En effet, la première ne peut justifier à elle seule un rendement de luminescence aussi faible. Concernant le deuxième point, en se basant sur les résultats obtenus dans le chapitre précédent pour de grandes densités d’excitation, l’interaction entre excitations ne semble devenir efficace que pour des distances entre excitons assez courtes. Le libre parcours moyen d’électrons de 30 eV est de quelques nanomètres à dizaines de nanomètres. Ainsi, il est possible de former des zones loca- lement assez denses pour avoir interaction entre les excitons. Du fait d’un coefficient d’absorption plus élevé que pour une excitation UV, les excitations sont formées en moyenne plus proches de la surface. Ainsi, les effets de surface sont plus forts sous excitation VUV que sous excitation UV. Ces deux effets sont impossibles à sépa- rer ici. Au final, le manque de signal sur le détecteur semble provenir de l’addition entre des effets de surface et d’interaction entre excitations diminuant fortement le nombre d’émetteurs, et une densité d’excitation initiale beaucoup plus faible que pour les expériences avec le faisceau UV. Nous allons par conséquent directement étudier le spectre d’émission à basse température. La figure V.1 présente le spectre obtenu lorsque le cristal est irradié par un faisceau dont l’énergie des photons est de 35,5 eV (l’harmonique 23 du champ laser à 800 nm (1,55 eV)).

Nous observons que le signal de luminescence obtenu est très faible. En effet, l’acquisition est faite en mettant le gain de la caméra au maximum et pour un temps d’accumulation plus long que pour les acquisitions effectuées sous excitation UV ou IR. Ici encore, le faible nombre de photons excitateurs est une limite forte à l’observation des spectres de luminescence.

Le spectre mesuré indique qu’à part la bande DX située à 3,366 eV, d’une lar- geur à mi-hauteur 2,8 meV, proche de la limite de résolution (1,8 meV), l’émission de l’exciton libre, normalement située vers 3,376 eV n’est pas détectée. Les autres émissions aux énergies plus faibles semblent également assez considérablement atté- nuées voire absentes. Seule l’émission TES à 3,33 eV se détache du fond assez bruité du spectre. Nous pouvons aussi noter que le rapport d’intensité des bandes DX et TES est ici environ 40 % inférieur à celui dans le cas d’une excitation UV (voir

104 105 106 3,20 3,25 3,30 3,35 3,40 Énergie (eV) In tens ité (Nb . coup s)

Figure V.1 – Spectre d’émission excitonique du cristal excité par des photons d’énergie égale à 35,6 eV, pour T = 15 K.

chapitreIII).

Ces premiers résultats peuvent être comparés à celles obtenues par Tainoff et al. [Tainoff 09] pour une excitation d’un cristal de ZnO à 90 nm (≈ 14eV ) à 10 K. Dans ce cas, le spectre d’émission présente la bande DX, aucune émission FX n’est détectée. Aucune autre émission n’est visible. Il est étonnant que dans ce dernier cas, l’émission TES soit absente car elle est associée à l’exciton DX comme une des voies de désexcitation radiative de cet exciton lié. Par contre, la présence de la bande A, que nous avons attribué dans le chapitre III à une recombinaison de l’exciton lié à un défaut accepteur n’est pas confirmée par nos mesures.

Nous rappelons ici que sous excitation UV à 15 K (voir chapitre III, section III.1.2), cette bande AX est détectée, mais est moins intense que l’émission TES (d’un facteur 4 environ), sous la forme d’un épaulement de la bande TES du côté basse énergie. Il est alors possible que dans notre cas elle ne ressorte pas suffisamment du bruit, ce qui de toute façon place son intensité à un niveau environ 16 fois inférieur à celui donné par Tainoff et al. Nous pouvons rapprocher également nos résultats à ceux obtenus pour les NP sous excitation UV (voir figure III.10), pour lesquelles les répliques phononiques sont également absentes.

Dans ce cas VUV à 35,6 eV, l’électron primaire peut exciter plusieurs paires électron-trou secondaires pouvant posséder elles-même un excès d’énergie cinétique. Les électrons et les trous peuvent alors éventuellement s’éloigner mutuellement. Dans ces conditions, les électrons et les trous peuvent alors être capturés séparément, de façon semblable à cas IR évoqué dans le chapitre III. Dans ce cas, l’éloignement de l’électron et du trou mène à la formation préférentielle des excitons liés, la formation d’excitons libres étant défavorisée. Néanmoins, nous ignorons la valeur d’énergie cinétique moyenne des excitations secondaires, par rapport à celle des excitations induites par le faisceau à 266 nm (de l’ordre de 1 eV), nous empêchant d’aller plus avant dans la discussion.

Toutefois, le comportement des excitations créées par des photons se rapproche aussi de celui en environnement réduit (les NP). Nous pouvons ainsi évoquer aussi le rôle sûrement important de la surface et des couches superficielles dans ce cas. Pour des longueurs de pénétration du rayonnement VUV de l’ordre de 20 nm, à comparer aux dimensions des NP utilisées (40 × 6 × 6 nm), une fraction importante des paires électron-trou puis des excitons FX peut subir des pertes non-radiatives. La stabilité de l’exciton DX dans cet environnement s’en trouve également très affectée.

Rappelons qu’à basse température, l’exciton libre lors de son mouvement (diffu- sion) peut être capturé par un défaut D0 pour former l’exciton lié DX. Ce dernier est parfaitement immobile sur le site initial du défaut. Il est très probable que, dans cette zone proche de la surface, l’exciton libre subisse avant l’éventuel piégeage des désexcitations non radiatives. De même, la stabilité de l’exciton DX dans ces zones perturbées est sûrement fortement réduite pour les mêmes raisons.

Nous pouvons également souligner à nouveau ici le fait que pour une concentra- tion homogène de D0 de l’ordre du ppm, la distance moyenne entre deux défauts est de l’ordre de 30 nm, à comparer avec la profondeur de pénétration du rayonnement VUV de 20 nm. Dans cette zone proche de la surface, les processus de désexcitation non radiative des excitons FX sont vraisemblablement plus probables que la cap- ture par D0. Une autre question peut concerner la concentration de défauts D0 à la surface et dans les couches superficielles : Est-elle identique dans ces zones à celle dans le volume du cristal ? Nous n’avons pas d’élément de réponse à ce sujet.

Nous avons à notre disposition une source de photons accordable dans le domaine 20-50 eV. La section suivante traite de l’influence de l’énergie du photon VUV sur le spectre de luminescence.

i) Influence de l’énergie du photon incident sur le spectre de lumines-

cence du cristal

Nous étudions maintenant l’influence de l’énergie des photons incidents sur le spectre de luminescence. La figure V.2 présente les spectres de luminescence obtenus dans les mêmes conditions, mais pour différentes énergies de photon qui sont :

— l’harmonique 17 du champ laser, pour une énergie de photon de 26,3 eV, — l’harmonique 23, pour une énergie de photon de 35,6 eV,

— l’harmonique 29, pour une énergie de photon de 44,9 eV.

Les spectres ne sont pas normalisés au flux incident. Le spectre d’émission pos- sède la même allure dans les trois cas. Il semblerait donc que l’énergie du photon excitateur ne joue pas un rôle prépondérant dans cette gamme d’énergie sur l’allure du spectre.

Les mesures avec des photons excitateurs de quelques eV (chapitre III) ont mon- tré que la température joue un rôle important dans l’allure du spectre d’émission du cristal. Nous allons maintenant étudier l’effet de la température sur le spectre d’émission du cristal pour des photons excitateurs dans la gamme VUV-XUV. ii) Influence de la température sur le spectre d’émission du cristal

L’énergie de photon est fixée à 35,6 eV. La figure V.3 présente les résultats obtenus pour des températures allant de 10 à 50 K. Il nous est impossible de mesurer le spectre de luminescence à une température supérieure à 50 K, le signal devenant trop faible.

104 105 106 3,20 3,25 3,30 3,35 3,40 Énergie (eV) In tens ité (Nb . coup s) Eph = 44,9 eV Eph = 26,3 eV Eph = 35,6 eV

Figure V.2 – Spectre d’émission excitonique du cristal excité par différentes énergies de photon, pour T = 15 K. Il est nécessaire de prendre en compte la différence de flux suivant les harmoniques. L’harmonique 23 (Eph= 35, 6 eV) est

la plus intense, tandis que l’harmonique 17 (Eph= 26, 3 eV) est la moins intense.

104 105 106 3,20 3,25 3,30 3,35 3,40 In tens ité (u . ar b. ) T = 15 K T = 30 K T = 40 K T = 50 K Énergie (eV)

Figure V.3 – Spectres d’émission du cristal excité par des photons d’énergie 35,6 eV, pour différentes températures d’échantillon. Pour T > 50 K, le signal de luminescence est trop faible pour être mesuré avec la caméra.

Nous observons que l’intensité du pic de luminescence associé à l’émission DX à 3,366 eV diminue rapidement avec l’augmentation de température. Par compa- raison, le rapport des émissions de DX entre 15 K et 50 K est ici de 12. Pour la même gamme de températures, ce rapport est de 4 sous excitation UV (voir section III.2.1 du chapitre III). Aucune émission supplémentaire n’apparaît lorsque la tem- pérature augmente, contrairement au cas sous excitation à 266 nm. Sous excitation UV, les émissions apparaissant à température intermédiaire sont dues au piégeage des excitations sur des défauts accepteurs, en particulier la bande AX à 3,31 eV. Sous excitation VUV-XUV, le faible nombre de photons excitateurs peut être ici rédhibitoire dans le but de mesurer ces émissions, celles-ci étant plus faibles que l’émission DX. En effet, à 50 K, le rapport d’intensité entre la bande DX et la bande AX dans le cas UV (voir chapitre III, section III.2.1) est de l’ordre de 11, ce qui rend ici son éventuelle détection impossible.

De toutes le mesures effectuées sur le cristal par le faisceau VUV, il apparaît clairement que les effets d’interaction, que ce soit avec les états proches de la surface ou entre les excitations secondaires, couplé au faible flux de photons VUV, sont des limites fortes à l’observation des pics secondaires dans le spectre. En effet, si la différence d’intensité de luminescence des pics secondaires par rapport au pic le plus intense est trop élevée, la probabilité que le signal soit noyé dans le bruit est grande. Nous avons comparé dans cette section le spectre d’émission du cristal excité par le faisceau VUV aux cas où le faisceau excitateur avait une énergie de photon plus faible. Nous allons maintenant effectuer les mêmes mesures avec les NP, que nous comparerons au cas du cristal.