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Dans ce chapitre nous avons étudié la relaxation des excitons dans l’oxyde de zinc sous forme d’un cristal macroscopique et de NP. La dynamique de relaxation de l’exciton lié dans le cristal est intimement liée à celle de l’exciton libre, du fait du couplage exciton-défaut. De plus, contrairement à beaucoup d’études précédentes, nous avons mesuré une durée de vie de luminescence de l’exciton lié de l’ordre de la nanoseconde.

En accord avec le spectre d’émission à température ambiante, la cinétique de luminescence est plus complexe qu’il n’y paraît, notamment lorsque le régime d’ex- citation est modifié (de 1 vers 3 photons). Sous excitation à un photon, la présence de la surface se manifeste par l’accélération de la cinétique aux premiers instants de celle-ci. Cette accélération n’est pas présente sous excitation à trois photons. Nous attribuons cela à la différence de profil de densité d’excitation suivant les deux régimes. Sous excitation UV, les effets de surface sont « amplifiés » car la densité d’excitation est maximale en surface, par rapport à la distribution d’excitation IR, plus homogène. Cette différence se retrouve ensuite sur les déclins par l’apparition d’une composante rapide aux temps courts.

Néanmoins, la comparaison directe n’est pas aisément justifiable, en ce sens que les bandes d’émission composant le spectre à température ambiante ne sont pas les mêmes suivant le mode d’excitation (FX étant absent du spectre sous excitation IR).

Les mesures en fonction de la température mettent en évidence que la cinétique de relaxation de l’exciton lié DX n’est pas seulement influencée par les effets ther- miques tendant à accélérer la cinétique de luminescence. La comparaison entre la cinétique de luminescence de FX et DX a mis en évidence que la relaxation de l’ex- citon lié, pour des températures supérieures à 70 K, est pilotée par la relaxation

de l’exciton libre. L’hypothèse retenue pour expliquer ce comportement est que, du fait de l’augmentation de température, le piégeage de l’exciton libre sur le défaut neutre D0 est compensé par le dépiégeage dû aux effets thermiques, et pour des températures suffisamment grandes, la relaxation de l’exciton lié est « masquée » par le dépiégeage thermique.

Sous excitation UV, contrairement à l’exciton lié seul, la cinétique de lumines- cence de ses différentes répliques ne présentent pas de composante liée à l’interaction avec la surface. L’hypothèse retenue est que le couplage entre l’exciton lié et le pho- non est diminué par l’interaction avec la surface. Il s’en suit que seuls les excitons se trouvant en profondeur dans le cristal sont susceptibles de relaxer avec l’émission couplée d’un photon et d’un phonon. Cette hypothèse trouve un écho favorable dans le spectre d’émission des NP, dépourvu de répliques et dans lesquelles les cinétiques sont fortement accélérées par l’interaction avec la surface.

L’étude de la cinétique de luminescence de l’exciton AX à 100 K, par rapport à celle de FX sous excitation UV, a mis en évidence une modification de la relaxation induite par le piégeage de l’exciton sur le défaut accepteur. Cela différencie les deux excitons piégés (DX et AX) en ce sens que DX et FX possèdent la même cinétique de luminescence à cette température. Il est difficile d’aller plus avant dans l’étude de l’influence du défaut sur lequel se piège l’exciton, les défauts chimiques étant introduits non intentionnellement, et étant pour la plupart non identifiées.

Nous avons comparé la cinétique de luminescence de l’exciton AX pour les deux modes d’excitation. Nous avons observé un ralentissement de la cinétique lors du passage de 1 à 3 photons. Ce ralentissement, allant de pair avec l’absence d’émission de FX sous excitation IR, peut être responsable de la différence de durée de vie de la luminescence entre les deux modes d’excitation, à température ambiante.

Nous avons tenté de simuler la dynamique de relaxation des populations d’ex- citons libres FX et d’excitons lié DX par un modèle cinétique simplifié. Dans un premier temps, nous avons considéré la formation d’excitons liés DX uniquement par le piégeage d’excitons libres sur les défauts, considérant de fait que toutes les excitations créées par le laser forment des excitons FX et DX. De ce modèle simplifié, nous avons obtenu plusieurs informations :

— Pour de basses densités d’excitation, la dynamique de relaxation de la popu- lation d’excitons libres est fortement accélérée, la durée de vie obtenue étant plus faible que celle de la population DX. La population DX décroît avec sa durée de vie intrinsèque. Pour ces densités d’excitation, le paramètre d’inter- action q fixe le rapport des populations DX/FX, intégrés temporellement, — Pour de fortes densités d’excitation, les cinétiques de déclin des populations

ralentissent, avec l’apparition d’un plateau dans la cinétique de la popula- tion DX. De plus, la population d’excitons libres devient plus grande que la population DX.

La prise en compte d’un schéma cinétique plus complet, prenant en compte la for- mation des porteurs de charges, soit par excitation UV directe d’un électron de la bande de valence vers la bande de conduction, soit par excitation multiphotonique séquentielle à partir d’un défaut profond dans le gap, augmente grandement la dif- ficulté de l’interprétation des résultats obtenus lors des simulations. Les premières tentatives de résolution numérique effectuées avec un jeu de paramètres fixés ar- bitrairement conduisent à une évolution du nombre total d’excitons FX et DX en fonction de la densité d’excitation dont le comportement semble changer suivant le

mode d’excitation UV ou IR.

Dans les NP, il est difficile d’obtenir des informations sur la dynamique de re- laxation intrinsèque de l’exciton, car celui-ci est constamment en interaction avec les états de surface. Les cinétiques résultantes sont très rapides, comparées avec celles obtenues dans le cristal.

Nous avons enfin étudié succinctement les effets d’intensité sur la cinétique de relaxation de l’exciton lié. Lorsque la densité d’excitations augmente, la durée de vie de la luminescence est réduite. À forte densité d’excitation, nous obtenons ainsi des durées de vie comparables à celle donnée dans des études antérieures. Nous expliquons ce fait par la compétition entre :

— d’une part la possibilité qu’ont les excitons d’interagir entre eux lorsqu’ils sont suffisamment proches les uns des autres,

— d’autre part la possibilité pour un défaut de piéger plus d’un exciton libre, formant ainsi des complexes multi-excitons liés D0X(i).

Ces deux phénomènes ont pour conséquence une accélération de la cinétique de luminescence. Il est par conséquent impossible de déterminer lequel de ces effets est responsable de l’accélération des cinétiques observées ici. Nous avons utilisé la détection par mélange de fréquences afin d’observer les premiers instants de la ci- nétique, inaccessibles avec notre système de détection habituel. Malheureusement, les conditions expérimentales ont un impact encore plus important, du fait du prin- cipe de détection. Nous sommes capables de mesurer des durées de vies de l’ordre de quelques picosecondes, sans pouvoir conclure sur les dynamiques observées à ces densités d’excitation importantes.

Jusqu’à maintenant, les énergies de photon excitateurs utilisées sont relativement faibles (quelques eV). Le régime d’excitation a une influence certaine sur la relaxa- tion des excitons, que ce soit par le profil de densité d’excitons initial, ou par les possibilités de relaxation, notamment pour l’exciton libre, non détecté sous excita- tion à 3 photons IR. Avec des énergies de photon plus importantes, des processus de relaxation supplémentaires sont susceptibles d’apparaître. La dynamique de relaxa- tion de l’électron dans la bande de conduction, dont les temps caractéristiques sont femtosecondes, nous sont inaccessibles. Par contre, le profil de densité d’excitation peut être modifié en fonction de l’énergie du photon excitateur. Dans certains cas, cela peut avoir un effet sur la relaxation de l’exciton.

L

UMINESCENCE EXCITONIQUE EXCITÉE PAR

DES PHOTONS DE GRANDE ÉNERGIE

(VUV

ET

X) - D

ES SIMILITUDES INATTENDUES AVEC

L

EXCITATION

IR

ET

UV

Dans les chapitres III et IV, nous avons étudié les caractéristiques de l’émission excitonique de l’oxyde de zinc, lorsque l’échantillon est excité par un faisceau de photons possédant une énergie de quelques eV. Dans ce cas, les excitations sont formées d’électrons excités dans une zone proche du bas de la bande de conduction, et de trous dans le haut de la bande de valence.

Dans le cas où les photons excitateurs possèdent une énergie plus grande, de plusieurs dizaines ou centaines d’eV, il devient possible d’exciter les électrons se trouvant dans des bandes plus profondes et/ou les électrons excités dans la bande de conduction auront une énergie cinétique suffisante pour permettre l’ouverture de canaux de relaxation supplémentaires (voir chapitre I, dernière partie). L’exis- tence de ces canaux peut entraîner une modification profonde de la dynamique de luminescence des excitons, par l’apparition de composantes supplémentaires.

À notre connaissance, il n’existe qu’une seule publication concernant la lumi- nescence de ZnO excitée dans le domaine VUV à 90 nm (≈ 14 eV) [Tainoff 09] à l’aide de rayonnement synchrotron et aucune par une excitation dans le domaine X autour de 1 keV. Nous avons donc également réalisé une série d’expériences plutôt exploratoires avec un faisceau VUV et de rayons X avec une énergie de photon res- pectivement 20-50 eV et de l’ordre de 1 keV. Plus précisément, outre l’observation dans ces conditions de la dynamique de relaxation des excitons DX et FX en fonc- tion de la température, nous avons voulu tester également l’influence éventuelle de la présence d’un niveau de cœur dans ce domaine d’énergie.

Nous analyserons dans ce chapitre les différents résultats obtenus sur le cristal commercial, ainsi que sur les nano-particules synthétisées par la technique LECBD. Les expériences utilisant un faisceau de photons VUV (photons d’énergie de 20 à 50 eV dans notre cas) obtenu par génération d’harmoniques d’ordre élevé ont été menées au CELIA. Les expériences dans ces gammes d’énergie VUV permettent d’étudier la relaxation d’excitations formées en majorité à proximité de la surface (2/3 des excitations sont formées dans les 20 premiers nanomètres sous la surface). De plus, le

libre parcours moyen des électrons ayant une énergie cinétique de quelques dizaines d’eV n’est pas simple à estimer mais peut être très court, de quelques dizaines à quelques nanomètres [Ritchie 75]. Cela a pour conséquence la possible formation d’excitations secondaires très rapprochées. L’interaction entre excitations pourra donc devenir probable. Pour être observable, cet effet nécessite malgré tout des densités d’excitation (un flux de photons VUV) suffisamment élevées. Il est par conséquent possible que la signature de l’interaction entre excitations ne soit pas directement détectable, et soit mélangée avec les effets d’interaction avec les états proches de la surface.

Les expériences utilisant un faisceau de rayons X ont été réalisées au synchrotron SOLEIL, sur la ligne Métrologie. La bande de cœur à considérer dans ce cas est associée aux états 2p du zinc, situées à 1022-1044 eV (données obtenues sur le site du Center for X-Rays Optics). Nous avons utilisé deux énergies d’excitation, l’une en dessous de ce seuil, à 950 eV, et l’autre au dessus, à 1100 eV. Pour ces énergies de photon, la profondeur de pénétration est plus grande que dans le cas VUV, de la centaine de nanomètres au micron selon que l’on se situe en dessous ou au dessus du seuil d’absorption des états 2p du zinc. Dans ce cas, les excitations seront en moyenne créées plus en profondeur dans le solide. Le libre parcours moyen des électrons possédant une énergie cinétique de l’ordre de 1 keV est en général assez faible, de l’ordre du nanomètre [Ritchie 75], les pertes d’énergie par collisions inélastiques avec les électrons de la bande de valence étant très probables. Cependant, la présence d’une bande de cœur induit la possibilité supplémentaire d’absorption du photon incident avec formation d’un trou profond. La relaxation de ce trou est en général caractérisé par une dynamique très rapide (pas seulement par effet Auger) pouvant aboutir à la création de zones nanométriques contenant plusieurs trous relaxés (et électrons), possédant donc une forte densité locale d’excitations électroniques, avec pour conséquence des effets de « quenching » de la luminescence et des accélérations des déclins associés [Belsky 95, Belsky 96].

Le chapitre se décompose de la manière suivante. La première partie est consa- crée aux spectres d’émission excités soit par des photons VUV, soit par des photons X. Les deux gammes d’énergie d’excitation seront vues séparément, avec une com- paraison entre excitation du cristal macroscopique et les NP synthétisées par la technique LECBD. La deuxième partie du chapitre sera consacrée aux cinétiques de luminescence.

V.1

Les états de cœur dans l’oxyde de zinc

Proche du niveau de Fermi, les bandes d’états électroniques sont un mélange des différents états atomiques de chaque constituant du cristal, de manière analogue aux orbitales moléculaires d’une molécule composées des orbitales atomiques de valence des constituants atomiques de l’édifice. Pour les bandes de cœur en revanche, l’électron est fortement attiré par le noyau atomique, et les bandes de cœur associées conservent essentiellement le caractère atomique de l’état de départ. La proximité des différents voisins a pour effet un léger élargissement en énergie des bandes par rapport au cas états atomiques de départ. Toutefois, cet élargissement reste faible par rapport à la position en énergie de la bande.

Il est par conséquent possible d’estimer rapidement la position en énergie des différentes bandes de cœur d’un cristal en utilisant les données tabulées sur les états

atomiques des constituants du cristal. Dans le cas de ZnO, nous allons regarder préférentiellement les états 2p du zinc dont l’énergie de liaison est tabulée à 1033 eV1.

Nous allons étudier dans cette partie le spectre d’émission du cristal et des NP lorsque l’échantillon est excité par des photons de grande énergie. Nous séparons le cas où l’énergie de photon est de quelques dizaines d’eV du cas où le photon possède une énergie proche du keV. Nous comparerons les résultats obtenus à ceux présents dans le chapitre III.

V.2

Luminescence excitée par des photons de 20