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Influence de la température sur les cinétiques de luminescence

III.6 Conclusions du chapitre

IV.1.3 Influence de la température sur les cinétiques de luminescence

Nous étudions ici l’influence de la température sur la cinétique de luminescence de l’exciton lié, et de l’exciton libre lorsque bien sûr l’émission de ce dernier est présente. L’étude est séparée en deux parties suivant le régime d’excitation, UV ou IR.

Dans le cas de l’excitation par le faisceau IR, nous ne pouvons étudier que l’exci- ton lié. De plus, la plage de température sur laquelle l’émission de DX est détectable est réduite. Nous observerons tout particulièrement l’allure de la montée de lumi- nescence, liée au peuplement de l’état DX.

Dans le cas de l’excitation UV, nous pourrons comparer les cinétiques des deux excitons jusqu’à la température de 120 K. Nous aurons ainsi des informations sur le piégeage de l’exciton par le défaut. Nous étudierons aussi attentivement l’évolution de la dynamique de relaxation de l’exciton lié lorsque la température augmente.

Nous rappelons ici que tous les déclins sont mesurés pour une zone spectrale d’émission de largeur 1,8 meV (résolution du spectromètre) centrée sur le maximum d’émission observé.

i) Effet de la température sur la dynamique de relaxation de l’exciton

lié sous excitation IR

Dans le cas ou le cristal est irradié par le faisceau IR, l’émission associée à l’exciton libre n’est pas détectée, et ce quelle que soit la température de l’échantillon (voir figure III.4 dans le chapitre III). Dans ces conditions, nous n’avons accès qu’à la cinétique de déclin de l’exciton lié DX en fonction de la température. Les acquisitions sont effectuées avec des énergies d’excitation IR comprises entre 1 et 3 µJ. La densité d’excitation créée est comprise entre 1, 28 × 1015 et 3, 46 × 1016 cm−3. La figure IV.3 présente les résultats obtenus pour des températures allant de 15 à 70 K (l’émission DX n’est plus détectable au-delà de 70 K).

Nous observons deux résultats intéressants : Le premier concerne le temps de montée de la luminescence. À 15 K (courbe bleue, vue dans la section précédente), le temps de montée de la luminescence est bien visible, avec une valeur de 350 ps ; à 40 K (courbe rouge), ce temps de montée est beaucoup plus court, d’environ 100 ps ; à 50 K enfin (courbe verte), le temps de montée disparaît complètement.

Le deuxième résultat concerne le temps de déclin : à 15 K, il est de 1,5 ns (vu précédemment) ; à 40 K, le temps de déclin est de 2,1 ns ; à 50 K, le temps de déclin continue d’augmenter, avec un temps caractéristique de 3,2 ns.

Comme déjà mentionné auparavant (section IV.1.2), ce temps de montée est la conséquence de processus conduisant à la formation des excitons DX via les proces-

0 2 4 6 8 10 Temps (ns)

In

tensité normalisée (u. ar

b.) T = 15 K T = 40 K T = 50 K T = 70 K 1,6 ns 2,1 ns 3,6 ns 0,35 ns 0,1 ns 0,6 ns 3,2 ns 0,5 ns

Figure IV.3 – Cinétiques de luminescence de l’exciton lié pour différentes tem- pératures, sous excitation IR.

sus séquentiels de création des porteurs de charge, et de capture des porteurs par le défaut neutre et ionisé. La présence de ce temps de montée indique que les étapes de formation des excitons DX ne sont pas instantanées, en particulier vraisembla- blement la capture des porteurs de charge durant leurs durées de vie, aboutissant à la formation de DX. Les mécanismes d’interaction et les effets quantiques mis en jeu dans la formation de DX sont complexes, peu décrits, et difficiles à formaliser et décrire numériquement.

Dans ce contexte, la diminution du temps de montée quand la température aug- mente de 15 à 40 K, puis sa disparition à 50 K, peut être comprise par le fait que la durée de vie thermique τthDX diminue fortement avec la température. En effet, si on écrit1 1

τDX th

= ν0exp (−Ea/(kBT )) avec ν0 de l’ordre des fréquences d’interaction exciton-phonon LO (ν0 ≈ 5 × 1011 s−1), et si on prend l’énergie d’activation ther- mique Ea de l’ordre de l’énergie de piégeage de l’exciton sur le défaut, on obtient pour différentes températures les durées de vie résumées dans le tableau IV.1.

Température (K) τthDX (ns)

15 ≈ 21

40 ≈ 6, 5 × 10−2

70 ≈ 1, 5 × 10−2

100 ≈ 8, 0 × 10−3

Table IV.1 – Durées de vie thermique de l’exciton lié pour T de 15 à 100 K

La durée de vie des excitons DX s’écrit ainsi τDX−1(T ) = τ0K−1 + τth−1, avec τ0K la

1. En toute rigueur, cette équation est fausse, car il est nécessaire de considérer le système à 3 populations FX, DX et D0 en interaction, tel que décrit plus loin. Elle permet néanmoins de

durée de vie de DX à 0 K, et τthla durée de vie thermique décrite ci-dessus. Pour une température basse, la durée de vie thermique devient très grande et les processsus thermiques n’influencent pas la relaxation de DX. À plus haute température par contre, la durée de vie de DX est donnée par la durée de vie thermique. Dans ce cas, les processus liés à la formation des excitons liés sont masqués par la destruction de l’édifice exciton-défaut formant DX de plus en plus rapide quand la température augmente.

Il semblerait par conséquent que seule la partie liée à la montée de la lumines- cence soit affectée par les effets thermiques, et soit par conséquent intrinsèque à certains processus de formation de l’exciton lié. Par contre le déclin de la cinétique semble contrôlé par autre chose que la simple durée de vie de l’exciton lié. Malheu- reusement, il n’est pas possible de mesurer la cinétique de luminescence à plus haute température, l’intensité de luminescence étant alors trop faible. Il est néanmoins in- téressant de constater (voir le tableau IV.2) que l’augmentation des durées de vie observées avec la température est progressive.

Température (K) τ mesurés (ns)

15 1,6

40 2,1

50 0,5 & 3,2

70 0,6 & 3,6

Table IV.2 – Durées de vie radiative de l’exciton lié mesurées pour différentes températures, sous excitation IR.

Les résultats obtenus indiquent que le déclin observé de l’émission DX doit alors être contrôlé par un autre « phénomène » que l’effet thermique. Nous discuterons ce point après avoir présenté les résultats sur les mesures de déclins de l’exciton lié et de l’exciton libre sous excitation UV.

ii) Effet de la température sur la dynamique de relaxation de l’exciton

lié sous excitation UV

Nous effectuons ici une série de mesures équivalentes sous excitation UV. Les énergies d’excitation utilisées ici vont de 10 à 100 nJ non focalisées suivant la tem- pérature de l’échantillon. La densité d’excitation créées sera au plus de 8, 54 × 1017 cm−3. Nous pouvons considérer les excitations comme étant isolées. Sous excitation UV, l’émission de l’exciton libre est clairement observable (présence d’un épaulement à 3,37 eV dès 15 K, section III.1.2 du chapitreIII). Le rapport d’intensité de lumines- cence entre l’émission DX et l’émission FX est d’environ 60-70. À 70 K, l’émission FX est clairement discernable de l’émission DX (voir chapitre III, section III.2.1), le rapport d’intensité de luminescnece entre DX et FX étant alors de 20. L’émission de l’exciton lié est détectée jusqu’à des températures plus élevées (140-150 K) que dans le cas précédent (70 K).

Nous étudions ici l’évolution de la cinétique de luminescence de l’exciton lié lorsque la température augmente. De manière analogue aux mesures précédentes, la résolution spectrale (1,8 meV) du spectromètre permet de sélectionner uniquement l’émission DX. La figure IV.4 présente les cinétiques obtenues pour des températures allant de 10 à 100 K.

0 2 4 6 8 10 Temps (ns)

In

tensité normalisée (u. ar

b.) T = 15 K T = 50 K T = 70 K T = 100 K 0,85 ns 1,5 ns 1,1 ns 0,24 ns 0,21 ns 0,22 ns 0,21 ns 0,90 ns

Figure IV.4 – Cinétiques de luminescence de l’exciton lié DX pour différentes températures, sous excitation UV.

Les déclins mesurés entre 15 et 100 K présentent deux composantes (voir section IV.1.2), dont les temps caractéristiques donnés par un ajustement bi-exponentiel sont présentés dans le tableau IV.3. La composante la plus rapide et sensiblement identique à celle à plus basse température est comme déjà mentionné due aux pertes de surface, les excitons DX créés dans une zone du cristal trop proche de la surface étant alors fortement déstabilisés. Par contre, la composante lente possède un temps caractéristique un peu inférieur à celui obtenu précédemment (IR) mais qui présente le même comportement, c’est-à-dire une augmentation avec la température, pour atteindre 1,6 ns à 100 K (voir tableau IV.3).

Température (K) τf ast (ns) τslow (ns)

15 0,21 0,85

50 0,22 0,90

70 0,21 1,1

100 0,24 1,5

Table IV.3 – Durées de vie radiative de l’exciton lié mesurées à différentes tem- pératures. τf ast est le temps caractéristique de la composante rapide, τslow celle

de la composante lente.

L’augmentation de la durée de vie mesurée de l’exciton DX avec la température est un comportement inattendu et « anormal », que les seuls effets thermiques ne peuvent justifier. Sous excitation IR, il est difficile d’aller plus avant dans l’interpré- tation de l’augmentation de la durée de vie de luminescence de l’exciton lié avec la température, le mécanisme de formation séquentielle de DX possédant trop de de- grés de liberté pour permettre un interprétation. De plus, nous ne pouvons comparer sa durée de vie à aucune autre émission, la bande AX résultant d’un autre exciton lié n’ayant aucune raison d’avoir une dynamique de relaxation identique à celle de

DX. Sous excitation UV, la formation de DX passe à priori en majeure partie par la formation de FX. Il faut alors considérer le système à deux excitons DX et FX, et son comportement avec la température. C’est l’objet de la section suivante.

iii) Comparaison entre la dynamique de luminescence de l’exciton lié et

de l’exciton libre sous excitation UV

Dans le paragraphe précédent nous avons considéré uniquement la cinétique de luminescence de l’exciton lié. Celle-ci augmente avec la température, en désaccord avec les seuls processus thermiques. Une hypothèse possible est que ce phénomène soit relié au mécanisme de piégeage-dépiégeage de l’exciton sur le défaut, couplant les deux populations d’excitons. Pour tenter d’en apprendre plus, nous comparons la cinétique de luminescence de l’exciton lié et celle de l’exciton libre dans les mêmes conditions. Des mesures précédentes, nous ne pouvons faire cette étude que sous excitation UV, car l’exciton libre n’est pas détectée lorsque le cristal est excité par le faisceau IR (voir paragraphe III.2.2, du chapitre III). De plus, le mécanisme de formation de DX est différent, ce qui induit des possibles modifications de la dynamique de luminescence. Nous nous concentrerons ici sur le cas UV. Le cristal est excité par des impulsion UV dont l’énergie est comprise entre 70 et 120 nJ. La densité d’excitons créée est aux alentours de 8 × 1017 cm−3. De manière analogue aux autres acquisitions, la résolution spectrale (1,8 meV) est suffisante pour séparer les deux émissions. La figure IV.5 présente la comparaison entre les cinétiques de luminescence des deux excitons pour deux températures, 70 et 100 K, dans les mêmes conditions d’excitation.

0 2 4 6 8 10

Temps (ns)

In

tensité normalisée (u. ar

b.) DX, T = 70 K DX, T = 100 K FX, T = 70 K FX, T = 100 K 0,24 ns 0,20 ns 0,25 ns 1,5 ns 1,5 ns 1,1 ns 1,1 ns 0,21 ns

Figure IV.5 – Comparaison entre la cinétique de luminescence de l’exciton lié et celle de l’exciton libre pour T = 70 et 100 K, excités par le faisceau UV.

Nous observons, pour les deux températures, que la dynamique de luminescence des deux excitons est la même, que ce soit aux temps courts ou aux temps longs. En effet, l’ajustement des courbes donnent les résultats présentés dans le tableau IV.4.

Température - émission τf ast (ns) τslow (ns)

70 K - FX 0,20 1,1

70 K - DX 0,21 1,1

100 K - FX 0,25 1,5

100 K - DX 0,24 1,5

Table IV.4 – Durées de vie radiatives de l’exciton libre FX et de l’exciton lié DX pour les deux températures présentées dans la figure IV.5. τf astet τslow sont

les temps caractéristiques des composantes respectivement rapides et lentes de chaque déclin.

Aux temps courts, nous avons vu précédemment que sous excitation UV, les excitons créés dans une zone proche de la surface sont déstabilisés, ce qui entraîne une accélération de la cinétique de luminescence, du fait de la destruction non radiative par les états de surface.

Dans le domaine de température où il y a coexistence de la luminescence des excitons FX et DX dans le spectre d’émission, le comportement des déclins mesurés est le même, attestant d’une durée de vie de luminescence de l’exciton lié de l’ordre de la nanoseconde à basse température, et dont le déclin de luminescence est contrôlé par l’exciton libre pour des températures plus élevées. Ces résultats sont en désaccord avec un ensemble d’études donnant une durée de vie de luminescence de l’exciton DX beaucoup plus courte que celle de l’exciton libre (de 50 à 400 ps). C’est en particulier pour ces raisons que le concept de force d’oscillateur géante (voir dans le chapitre I pour une description sommaire du modèle) a été utilisé pour ZnO, afin de justifier la durée de vie anormalement courte de DX. Malgré certaines difficultés de fond et d’interprétation liées à l’application de ce concept de force d’oscillateur géante au cas de ZnO en particulier, une partie de la littérature s’y réfère. Nos résultats montrent ainsi qu’il n’est pas nécessaire d’utiliser le modèle de force d’oscillateur géante. Nous nous sommes placés dans des conditions de faible densité d’excitation. Nous aborderons en section IV.4 les effets d’une plus grande densité d’excitation sur la cinétique de luminescence de l’exciton lié.

Nous avons effectué une modélisation simple du système à deux populations FX et DX afin de déterminer si possible les principaux paramètres gouvernant ce comportement particulier lié au piégeage de FX sur le défaut, selon les conditions de température, de densité de défauts D0, ... C’est l’objet de la section suivante.

IV.1.4

Modélisation du processus de piégeage de l’exciton