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ET DE SOUS FER

I- 3-2 La spatialité post-indépendante : reflet des dérives gouvernementales.

Après avoir situé les contrées diégétiques et leurs correspondances réelles, qui se situent notamment dans certains pays d’Afrique de l’Ouest, il serait intéressant de se pencher à présent sur la réalité spatiale. Comment se décline-t-elle dans nos trois textes ? Pour Keita, Béti et Kourouma, l’espace est un élément participant au même titre que les régimes mis en accusation, à la détresse de l’Africain. En effet, l’espace des indépendances est un lieu qui supprime toutes les libertés.

[http://lefaso.net/spip.php?page=impression&id_article=8361].

198 Mamadou Diarra, « soupçonné d’être impliqué dans la disparition du journaliste Birama Touré !», in Malijet, mars 2020. [En ligne : https://malijet.co/societe/soupconne-detre-implique-dans-la-disparition-du-journaliste- birama-toure-karim-keita-declare-persona-non-grata-dans-la-famille-toure-de-bagadadji].

199 « L’écrivain Ousmane Diarra menacé de mort au Mali », France info, juin 2016. [En ligne : https://culturebox.francetvinfo.fr/livres/romans/l-ecrivain-ousmane-diarra-menace-de-mort-au-mali-236575] 200 Ousmane Diarra, La route des clameurs, Paris, Gallimard, 2014.

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- Spatialité post-indépendante chez Béti, Kourouma et Kéita

Nos écrivains décrivent et dénoncent généralement des espaces qui portent la marque du système totalitaire. Ce sont des espaces en proie à la précarité et à l’insécurité, où l’Africain sans défense est amené à se battre pour sa survie. Rappelons que dans la littérature africaine, les mégapoles ont souvent été synonymes de théâtres de divers conflits, notamment culturels. Elles sont décrites comme sources de malheurs. À l’inverse, les villages étaient perçus comme des lieux procurant repères et sérénité. Les exemples ne manquent pas pour le rappeler. Fama, le prince du Horodougou, honni et rejeté par le nouveau pouvoir, comme un vestige de civilisation d’un temps révolu, ne recouvre ses prérogatives princières que dans son village. De même, Samba Diallo, le héros de Cheikh Hamidou Kane est un protagoniste désorienté suite à son déplacement loin de son village (la contrée des Diallobés), vers la ville. Nombre de critiques s’accordent pour dire que les villes sont l’expression d’une transition difficile entre le monde africain et la modernité occidentale. Jean Marc-Ela les considère comme des symboles de contradictions troublantes et difficilement conciliables201. En revanche, le village procure

repère, calme et sérénité. Toutefois, ce schéma n’est pas toujours conforme à la réalité. En fait, il ne semble plus y avoir de refuge pour les personnages au village qui, à son tour, est décrit comme chaotique. On assiste à une rupture dans la manière de percevoir le village africain, notamment dans Sous fer. Cette approche permet à Fatoumata Kéita de « décaper » les pratiques ancestrales rétrogrades dont le village demeure le foyer par excellence. C’est le lieu qui symbolise les souffrances de Nana ainsi que de son père. Kanda y perd le statut de père de famille et se voit dicter par sa famille, les règles de la communauté. Lorsque Nana quitte la ville pour le village de Muruba, elle perd elle aussi de sa sérénité. Quant à la ville, elle ne perd pas sa réputation habituelle d’espace contraignant et de perdition. Si le village traumatise l’héroïne de Kéita à cause des mutilations génitales, c’est en ville qu’elle manque de se faire violer dans la rue dans l’indifférence totale :

Se détachant alors d’elle dans un moment de douleur, de toute sa force, il la gifla, mécontent. Nana tomba à ses pieds, dans une flaque d’eau sale. D’une main ferme, il la releva et la détacha du sol. De nouveau il l’immobilisa contre le mur, plongeant ses lèvres au creux de son cou. Un dégoût saisit la jeune fille et lui donna la nausée. Elle serra très fort les

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lèvres. La main de l’homme repartit, parcourant le torse nu de la jeune fille. Elle s’attarda sur son ventre, puis sur son bas-ventre. D’une barbarie immonde, il déchira le léger tissu qui l’empêchait à présent d’arriver à ses fins. Avec ses puissants pieds, il écarta les frêles cuisses de Nana et tenta de la violer202.

Il existe une rupture épistémologique entre le traitement de l’espace opéré par les auteurs de la négritude – qui décrivent en général un environnement agréable et protecteur – et celui des écrivains des générations suivantes. En effet, l’espace dans Sous Fer, En attendant le

vote des bêtes sauvages et Perpétue et l’habitude du malheur symbolise la prison, l’absence de

liberté, le danger et la précarité. Cela lui confère une fonction particulière dès lors que sa description ne consiste plus à mettre en avant un aspect esthétique du paysage mais à renforcer la thèse défendue par l’auteur, en l’occurrence la mauvaise gouvernance et la détresse des citoyens. Les grandes villes ont ainsi une mauvaise réputation et sont assimilées à un environnement misérable. Leur nature réelle est perceptible à travers la présence des gueux, des mendiants et des sans-abris :

Au monument des Laissés-pour-compte, ils étaient là, aveugles, borgnes, lépreux et oisifs couchés à même le sol, confiant au ciel leur mal de vivre, leur indigence. Nana et son compagnon [de fortune] sans nom se retrouvèrent là, au milieu de tous ces va-nu-pieds aux ventres très souvent creux203.

L’expression « monument des Laissés-pour-compte » instaure une relation faite de rejet entre ces citoyens marginalisés et leur environnement marginalisant. L’extrait suivant apporte davantage d’informations sur l’organisation de la vie et les relations entre les gens dans une ville :

Kanda rechignait à l’idée de recourir aux services des aides ménagères. Il estimait que la plupart de ces filles, une fois en milieu urbain, étaient traitées comme des moins que rien. Maltraitées, rabaissées, nommées par abus ou par oppression dans le langage « bonnes à tout faire », elles étaient parfois violentées physiquement, violées, exploitées sexuellement par le neveu, le fils ou le mari de leurs employeurs204.

La modification des anciennes structures a provoqué l’exode rural des jeunes filles vers les grandes villes. Désireuses de fuir la misère économique, elles y recherchent des emplois

202 Fatoumata Kéita, Sous fer, cité, p. 154. 203 Ibid., p. 151.

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surtout ménagers. Cette réalité rappelle la ghettoïsation de l’espace urbain où l’insécurité domine. Mais le malheur de ces aides ménagères, plus que les agressions sexuelles qu’elles subissent, s’explique par le fait qu’elles sont récupérées par les réseaux de prostitution. Nombre d’entre finissent dans les griffes des proxénètes. Néanmoins, les maisons closes apparaissent comme une sorte d’allègement compensatoire. À l’image de Martin, qui se refugie dans l’alcool, ces naufragés de l’existence semblent trouver une espèce d’échappatoire à travers le sexe. Dans cet espace où la vie perd ses valeurs et où les hommes tentent de survivre, le sexe n’est pas associé à l’amour, ni aux sentiments. Il est détourné de son objectif premier.

Lorsque Mongo Béti dépeint le parcours du frère d’Essola – qui passe majeure partie de son temps dans les bars et qui est incapable de s’assumer financièrement – il cherche aussi à porter le message de détresse des populations africaines à ses lecteurs. Bien qu’Essola le juge inutile et improductif, bien qu’il le déteste à cause de son immoralité et son mercantilisme, Martin n’en partie coupable205 comme nombre de ses frères marginalisés. Pour tenter

d’échapper à leur espace clos et monotone et à leur malheur, les personnages de Béti mènent une vie de débauche, tel Martin :

- As-tu vu Martin ? - ne m’en parle pas -Viens plutôt m’aider tout de suite à le transporter. Du car, je l’ai vu tomber dans le fossé, complètement ivre ; impossible qu’il ne se soit pas fait très mal - Et il en a été ainsi pendant ta longue absence ; chaque jour, j’ai redouté l’accident fatal. Une vraie malédiction ! - Si nous en sommes toujours là, nous autres les Noirs, c’est la faute à des gens comme Martin. Et finalement, ce que tu appelles l’accident fatal serait peut-être ce qui pourrait arriver de mieux206.

Sur la route, le camion qui transporte Essola manque de renverser à plusieurs reprises, quelques « adeptes du karkara »207. Si pour ces gens, la rue semble synonyme de mœurs

dissolues, l’espace familial se présente, à son tour, comme un actant qui oppresse et humilie. En effet, c’est au domicile de son mari que Perpétue subit le viol organisé par lui. La maison maritale, censée procurer un minimum de sécurité, se transforme soudain en maison de passe : Edouard, en prostituant sa femme, agit comme un véritable proxénète. Selon Béti, il s’agit là

205 On prendra garde à ne pas l’innocenter dans un élan de déterminisme excessif, car bien qu’il explique les conditions de vie insupportables de ses personnages, l’auteur croit qu’ils ont choisi, plutôt que de se battre, de chercher à lutter pour le changement. Ils acceptent la soumission et l’échec.

206 Mongo Béti, Perpétue et l’habitude du malheur, cité, p. 25.

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également d’une coutume répandue dans plusieurs familles modestes. En effet, il est fréquent de rencontrer des hommes prêts à organiser des rencontres adultères entre leur employeur et leur épouse pour décrocher un emploi : « autrement comment comprendre que Perpétue eût si longtemps enduré la bestialité avérée du commissaire ? Il l’avait prise si fréquemment certaines nuits »208. Peu à peu, la pauvre femme s’habitue aux malheurs et humiliations qu’elle subit par

la faute de son mari. Il en est de même pour les opprimés du régime de Baba Toura s’accommodant des pires indignités au sein même de leurs familles. Ils sont disposés à accepter toutes les humiliations aussi longtemps que cela leur permettra d’oublier leur quotidien insupportable. Les propos suivants d’Édouard révèlent une pratique banale et généralisée :

Comme tu retardes, ma pauvre Perpétue, déclara Édouard avec un sourire d’une sérénité désarmante. Comme tu retardes vraiment ! Ce que je t’ai demandé, un peu sournoisement il est vrai, n’a rien de monstrueux. Cette pratique est maintenant monnaie courante partout dans le pays, et surtout dans la capitale même, depuis l’indépendance. On dit que les choses se passent de cette façon-là partout dans le monde ; alors, pourquoi se passeraient-elles autrement chez nous209.

On réalise à travers ces exemples que les personnages se conforment à des contraintes spatiales ; elles-mêmes liées à une structuration qui est fonction de la dictature et sa gestion désastreuse du pouvoir.

Dans En attendant le vote des bêtes sauvages, Kourouma se démarque de Béti et Keita par une singulière façon d’aborder l’espace. Il décrit un lieu urbain hostile à la démocratie. Le voyage initiatique du personnage principal est l’occasion pour lui de témoigner sur les capitales et les grandes villes d’Afrique. Les prisons sont au centre de ce témoignage et deviennent de ce fait, un élément de réquisitoire à l’encontre des régimes despotiques. Le portrait de l’environnement carcéral que Kourouma dresse montre l’intérêt qu’ont les dirigeants dictateurs à se doter d’impressionnantes infrastructures carcérales pour terroriser les citoyens opposants. L’univers pénitentiaire et sa gestion jouent aussi un rôle prépondérant : « une charge qui passait avant la responsabilité de premier ministre. La prodigieuse charge de régisseur de la prison »210.

La quasi-totalité des dictateurs font l’apologie des prisons. Conçues pour infliger douleur et

208 Mongo Béti, Perpétue et l’habitude du malheur, cité, p. 218. 209 Ibid., p. 215.

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désespoir, elles sont un espace de cruauté et de torture, aussi bien physique que psychologique. Si les espaces urbains et ruraux sont décrits comme invivables pour les citoyens ordinaires, les prisons sont, quant à elles, érigées pour anéantir ceux qui y entrent. Elles deviennent de véritables mouroirs. Kourouma s’attarde sur les espaces de tortures des chefs d’État dits modérés ou démocrates qui jouissent encore d’une opinion favorable auprès des organismes internationaux. L’un des dictateurs les plus illustres est probablement Félix Houphouët Boigny de Côte d’Ivoire dont le double fictionnel est représenté par le président au « totem caïman » :

L’accusé enchaîné est envoyé dans la prison de Saoubas et soumis aux soins du député Sambio, le cruel tortionnaire qui, sous la torture, fait reconnaître par l’accusé les faits et les preuves établis par le directeur de la Sûreté. Il n’est pas rare que le président en personne, à l’issue de son footing matinal, en sueur entre dans la salle de torture et supervise les interrogatoires. Les aveux lui sont soumis. Le président au totem caïman les analyses, les recoupe, les vérifie avec le soin de celui qui coud le caleçon de sa femme, et décide de faire déférer ou non l’accusé devant la cour de la sûreté de l’État. Le secrétaire général du parti unique, le député Philippio Yaco, grand spécialiste de droit criminel, en tant que procureur de la République, au cours d’un procès à huit clos, condamne le prévenu à la peine capitale ou à la détention à perpétuité211.

La présence de tant de personnalités politiques dans cet espace montre à quel point l’interrogatoire des détenus est l’occasion d’extorquer des informations. Elles sont à l’affût du moindre aveu, de la moindre information capable de renforcer le pouvoir ou de compromettre les opposants. L’extrait précédent révèle un dysfonctionnement notoire de la justice dont le corollaire fait que l’espace carcéral n’est plus une institution destinée à punir et à corriger les coupables. Désormais, il n’est plus question d’institution pénitentiaire au service du pays et de la justice. Ce schéma-là, à savoir l’érection d’édifices pénitentiaires aux fins d’anéantissement des opposants, est présent dans tous les pays africains régis par une dictature. Kourouma décrit la situation de personnes emprisonnées et torturés en masse sous le règne de l’empereur Bokassa pour leur soutien ou leur adhésion à des idéologies hostiles au gouvernement du pays. Par exemple, le narrateur donne des informations sur la prison de Nagaragba :

Une minuscule prison serrée entre le fleuve et la forêt, dans une enceinte de cent mètres sur cent, ne comportant chacune que cinq parties exploitables : les cellules Birao, le safari ou antichambre de la mort, la maison blanche et les portes rouges. Isolement et Birao ne comportaient

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chacun que quatorze cellules et Safari deux. En tout et pour tout trente cellules dont deux pour les condamnés à mort212.

Les commentaires de Didier Bigo apportent davantage d’informations matérielles sur ce que l’on pourrait appeler le complexe carcéral de Ngaragba. Selon lui, les cellules Birao et Safari se présentent ainsi :

- Birao est un bâtiment de 5 mètres sur 15, formé de 14 cellules assez longues mais basses et séparées par un couloir. Les prisonniers y sont enchaînés mais peuvent des fenêtres voir les activités des autres et parler entre eux.

- Les cellules des condamnés à mort, ou cachots, sont au nombre de 2. Prévue pour un homme, chaque cellule où la lumière n’entre jamais contient 3 à 4 prisonniers. Lors des événements d’avril 1979, on y entassera jusqu’à 30 enfants, ce qui explique les morts par asphyxie d’un grand nombre d’entre eux. Les prisonniers par dérision nommeront cet endroit Safari par référence au grand hôtel de luxe construit au bord de l’Oubangui 213..

Le dictateur au totem hyène est probablement l’être le plus cruel pour ses nombreux prisonniers. Les cellules sont remplies au delà leur capacité. Kourouma qualifient cet espace carcéral de mouroir. En effet, tous les détenus de Ngaragba risquent d’y mourir sans avoir eu un procès juste, à l’exception de ceux qui finalement acceptent de se rallier à Bokassa Ier afin de

travailler à la consolidation de la dictature. On retrouve une situation similaire dans le parcours d’Essola qui renonce officiellement à son statut d’opposant au pouvoir de Baba Toura afin d’être libre et d’éventuellement collaborer. Les textes de Kourouma, Béti et Keita révèlent un espace-prison qui est le symbole d’une gouvernance corrompue et criminelle. Dans ce lieu meurtrier, les individus sont brisés et finissent par accepter leur sort. Le regard de nos écrivains – empreint non pas de compassion mais de compréhension pour leurs concitoyens – permet de les décharger en partie de leurs responsabilités. Dans ces lieux où règnent la tricherie et les mœurs dissolues, leurs habitants eux aussi deviennent dupes et la fourbes. Pensons aux nombreux personnages alcooliques de Perpétue et l’habitude du malheur, à la corruption matérielle dans laquelle sombre la mère de Nana dans Sous fer ; pensons aussi aux nombreux torturés dans En attendant le vote des bêtes sauvages.

212 Ibid., p. 204.

213 Didier Bigo, « Ngaragba, l’impossible prison », Revue française de science politique, Paris, Presses de sciences po 1989, n° 6, p. 867-886 [http://www.persee.fr/doc/rfsp_0035-2950_1989_num_39_6_394452].

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L’analyse de cette première partie a permis de déterminer en partie le caractère subversif et pamphlétaire des œuvres de notre corpus. Leurs différents aspects (générique, historique, sociopolitique) rejoignent le point de vue de Dominique Maingueneau et de sa notion de paratopie, à savoir l’examen d’éléments entrant de près ou de loin dans la genèse de l’œuvre pour mieux en appréhender le sens. Par l’analyse paratopique, on découvre que l’une des plus grandes motivations de l’écrivain à vouloir dénoncer est la dégradation de la vie de ses concitoyens. Les présidents-dictateurs mis en accusation par Keita, Kourouma et Béti, ne semblent pas être au pouvoir pour servir le peuple. Bien au contraire, ils protègent leur règne, s’enrichissent illégalement et instaurent une dictature pour s’accaparer les ressources nationales. Les écrits à caractère polémique et pamphlétaire accordent une importance primordiale au contexte qui les a vus naître et y renvoient constamment ; ils sont donc très imprégnés de données sociologiques et de lieux communs présents dans la société à laquelle il s’adresse.

On le sait, les frontières entre fiction et réelles sont parfois difficiles à établir. Que le lecteur parte du texte pour chercher la signification à travers des éléments « paratopiques », ou qu’il parte de ces derniers pour interroger le texte, le résultat est le même. Le niveau « paratopique » ainsi que le niveau discursif permettent une plus grande intelligibilité du texte. Kourouma, Béti et Fatoumata Keita ont choisi l’écriture romanesque-pamphlétaire, non seulement à cause du contexte socio-historique de leur pays mais aussi à cause de leur vécu personnel. Mongo Béti et Ahmadou Kourouma, notamment, sont non seulement portés par un élan de dénonciation mais aussi, et surtout, par une volonté de se venger des régimes qui les ont chassés de leur pays. Ces écrivains africains veulent avant tout se frayer une identité réelle au sein de la littérature. Ils réclament une littérature émancipée, libérée des canons classiques fixés et imposés par les esthètes hexagonaux. Ainsi, la subversion concerne à la fois le fond et la forme. En effet, Kourouma, Béti et Keita refusent d’écrire selon les normes imposées par l’Académie Française. De plus, ils transgressent la langue française par l’emploi de nombreux termes étrangers, de tournures locales et de bien d’autres procédés n’appartenant pas à la langue française. Ils l’agressent en quelque sorte en introduisant des interférences à la fois syntaxiques, sémantiques, phonétiques, phonologiques, linguistiques ainsi que d’autres types de phénomènes sociolinguistiques. Désormais, à côté de l’écriture de la politique, s’élabore une politique de

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l’écriture. La deuxième partie de notre travail va expliquer cet autre aspect de la subversivité touchant surtout la forme et la langue.

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