• Aucun résultat trouvé

DIMENSIONS PAMPHLÉTAIRES CHEZ MONGO BÉTI, AHMADOU KOUROUMA ET FATOUMATA KÉITA

II- 3-2 Figures de style pamphlétaires chez Kourouma, Béti et Kéita

Un examen approfondi permet de repérer dans les textes de notre corpus plusieurs faits de modulations stylistiques dont la fonction principale réside dans l’intensité qu’elles confèrent à la plume de l’écrivain non seulement dans la critique verbale mais également dans la façon indirecte, voire détournée, de décaper la tyrannie. En effet, la langue fait l’objet d’un traitement spécial, dirigé contre de nombreuses cibles. Ainsi l’ironie, la parodie, la métaphore biologico-

382 Dans certains de ses romans, Kéita met en scène des femmes qui refusent le lévirat, notamment dans Quand les

cauris se taisent, (2017) et Les Mamelles de l’amour, 2017. Dans Sous fer, certaines l’acceptent alors que Fata et

sa famille s’opposent à la polygamie. 383 Ibid.

161

médicale, le paralogisme, les attaques ad hominem, sont autant de procédés rhétoriques répertoriés par Marc Angenot dans son ouvrage La parole pamphlétaire comme inhérents à la littérature de combat. C’est pourquoi, outre leurs multiples aspects subversifs, les textes d’Ahmadou Kourouma, de Mongo Béti et de Fatoumata Kéita, entretiennent un jeu linguistique complexe qui convoque un certain nombre de modulations stylistiques, mises à contribution à la fois pour véhiculer une idéologie – pouvant être celle de l’auteur et ou du peuple – et pour en combattre également, c’est-à-dire les sources de l’oppression –. En premier lieu, de tels moyens permettent de s’attaquer à un tyran et à son entourage sans se compromettre, de dévoiler subtilement, et peut-être de manière enjouée, la nature d’une idéologie néfaste. Ils influent, en second lieu, sur le lecteur dans une visée persuasive. Citons de nouveau Marc Angenot :

L’agression peut s’exprimer de façon directe et hyperbolique ; elle peut aussi, plus subtilement, prendre des voies détournées, se produire à couvert, avec l’avantage hypocrite qu’elle n’expose pas directement l’attaquant et qu’elle met les rieurs du côté de celui-ci : c’est dans cette fonction que nous recensons la plupart des figures métalogiques. Nous parlerons enfin du dialogisme, trait formel essentiel à la parole pamphlétaire, lui aussi appelé par le telos du genre même385

Évidemment, nous n’avons pas la prétention d’évoquer l’exhaustivité des particularités stylistiques polémiques et pamphlétaires de notre corpus, ni d’ailleurs en exposer toutes les fonctions. Cette étape de notre analyse va simplement examiner quelques-unes qui sont d’une certaine manière consubstantielles au pamphlet.

a- La parodie

D’un point de vue théorique, ce concept est complexe et donc difficile à cerner de par ses multiples manifestations contextuelles. Selon Clive Thomson, « la parodie est un processus intégré, structural et modélisant qui reprend, répète, invente et transcontextualise des œuvres d’art existantes386. Peu importe le contexte, tout texte ou énoncé parodique ne se construit qu’à

partir d’un autre, dans une visée critique, satirique ou non. Ce genre d’attaque se structure avec

385 Ibid., p. 237.

386 Clive Thompson, « Problèmes théoriques de la parodie », Études littéraires, Paris, 1986, n° 19, 1 [https://doi.org/10.7202/500736ar].

162

la cible sous-jacente avant de se construire dessus. Ce qui suppose une relation intertextuelle, selon Genette notamment. On pourrait également parler de polyphonie si l’on considère le phénomène d’un point de vue bakhtinien. La parodie ne naît pas ex nihilo. Cependant, dans le cas d’Ahmadou Kourouma, l’usage de la parodie dissimule plusieurs ruptures épistémologiques. La première rupture se donne à lire à travers l’agression contre les normes de la langue française avec lesquelles rivalisent les structures du malinké. Le français est parodié à travers de formes spécifiques, c’est-à-dire des entorses volontaires faites à sa syntaxe, ou à sa sémantique, comme on peut l’observer dans le passage suivant : « elle fut la championne de lutte des filles des montagnes et elle mourra sans qu’aucune femme réussisse à mettre sa nuque par terre »387. Ajoutons à cela, la transgression des canons régissant les genres littéraires dont

les frontières n’existent plus. Aucun trait spécifique ne permet, par exemple, de classer les héros selon les normes classiques. Or, les traits élogieux sous lesquels se décline Koyaga, bien que rappelant les valeurs de noblesse du héros traditionnel, sont excessifs et caricaturaux. Cette absence de conformisme est une des expressions de la parodie qui consiste à se moquer des codes officiels ou institutionnels. À ce sujet, Bakhtine écrit : « la parodie littéraire écarte plus encore l’auteur de son langage, complique davantage son attitude à l’égard des langages littéraires

de son époque, sur le territoire même du roman »388. La Négritude est parodiée à son tour à travers

son discours identitaire devant restituer sa dignité à l’Afrique. C’est ce qui paraît dans le portrait de la mère du héros qui est une parodie subtile des premiers discours littéraires sur la femme africaine. Avec les écrivains de la Négritude, la femme africaine, mère symbolique de l’Afrique, était hypocritement magnifiée et passait pour un être épanoui dans une civilisation noire séculaire devant lui accorder un mérite exceptionnel. Les attributs surhumains de Nadjouma sont un écho à cette particularité de la Négritude que l’on retrouve notamment dans ce poème de Senghor :

Femme nue, femme noire

Vêtue de ta couleur qui est vie, et de ta forme qui est beauté ! J’ai grandi à ton ombre ; la douceur de tes mains bandait mes yeux Et voilà qu’au cœur de l’Été et de Midi, je te découvre,

Terre promise, du haut d’un col calciné

Et ta beauté me foudroie en plein cœur, comme l’éclair d’un aigle389

387 Ahmadou Kourouma, En attendant le vote des bêtes sauvages, cité, p. 39. 388 Mikhaïl Bakhtine, Esthétique et théorie du roman, cité, p. 129-130. 389 Poèmes, Paris, Seuil, 1984, p. 16.

163

En dressant un portrait de la femme africaine relevant davantage du mythe, du surnaturel et de l’irréel, Kourouma tourne en dérision le discours senghorien et affiche les tares et les insuffisances des sociétés africaines. Le discours anthropologique occidental est soumis à la même logique : celui-ci décrit les autochtones africains comme des sauvages à civiliser et sur leur barbarie et leur cruauté. Il leur attribue le nom de Paléos, appellation risible et caricaturale de paléonigritiques : « des hommes totalement nus. Sans organisation sociale. Sans chef. Chaque chef de famille vit dans son fortin et l’autorité du chef ne va pas au delà de la portée de sa flèche. Des sauvages parmi les sauvages avec lesquels on ne trouve pas de langage de politesse ou violence pour communiquer »390. Ce ton parodique convoque des lieux communs et

des interprétations de l’histoire dépréciatives vis-à-vis de l’homme noir avant d’y jeter le discrédit en dégageant les abus et en s’en moquant. La parodie en ce sens postule une idéologie militante claire.

Il ne fait aucun doute que les conditions féminines dépeintes dans Perpétue et l’habitude

du malheur ainsi que dans Sous fer sont des répliques parodiques au postulat de la Négritude. Et

la quasi-totalité de l’œuvre de Mongo Béti est un témoignage de conflits entre la ligne des écrivains de la première génération – avant les indépendances – et celle de la génération d’après. Mais l’échange qui s’est tenu entre Essola et sa mère à la fin du récit replonge le lecteur dans un discours, certes nuancé, mais analogue à celui des ethnographes :

Vous avez assassiné Ruben ou bien vous vous êtes accommodés de ce crime pour que vos fils préférés, rendus irresponsables par votre excessive indulgence, continuent à festoyer impunément avec la rançon de leurs sœurs, à se repaître en quelque sorte du sang de ces malheureuses, comme des cannibales391.

On ne peut s’empêcher en lisant le terme de cannibales de se souvenir de textes empreints de mépris, jugés indécents et ayant naguère offensé Senghor et ses collègues poètes Aimé Césaire et Léon Gontras Damas. Ainsi est contenu dans ces mots d’Essola, non pas une charge critique approuvant et renchérissant sur la doctrine occidentale civilisatrice mais le désaveu d’une Afrique idyllique qui ne se reproche rien. En substance l’auteur fait dire à son

390 Ahmadou Kourouma, En attendant le vote des bêtes sauvages, cité, p. 11-12. 391 Mongo Béti, Perpétue et l’habitude du malheur, cité, p. 299.

164

héros un message qui dit la réalité sans fard pour choquer et conduire à des questionnements. De plus il soutient que certaines traditions et coutumes sont cruelles et doivent par conséquent être dépassées. Le mariage forcé auquel fut soumise l’héroïne est la conséquence directe de pratiques séculaires dégradantes. On retrouve le même schéma concernant Nana, l’héroïne de Fatoumata Kéita, donnée en mariage contre son gré, telle Perpétue. Ce qui provoqua chez elle, désolation et incompréhension au point de vouloir la mort comme solution : « tout ce que je veux à présent, pensa-t-elle, c’est mourir. Oui, la mort, destination inéluctable qui vous mène dans un monde où tout est repos et silence »392. Les pratiques mises en cause ne sont pas

l’apanage du seul pays de Kéita : elles concernent la majeure partie de l’Afrique. Pour nos écrivains, notamment, la femme symbolise l’Afrique393 mais ce symbolisme parodie

l’hypotexte394, à savoir le discours de la Négritude qui ne serait qu’un mensonge et un échec.

C’est également ce qu’on peut lire dans Sous fer à travers la flétrissure de la figure de la mère : « Nana voulait mourir aussi pour châtier cette mère et sa cupidité sans limites »395.

En définitive, la parodie est une imitation burlesque et critique à l’encontre de doctrines, d’idées ou d’énoncés à partir desquels elle se construit. Son aspect polyphonique correspond à un fait de modulation stylistique assez proche de l’ironie qui permet à l’énonciateur de ne pas assumer explicitement sa pensée.

392 Cité, p. 147.

393 Dans une interview accordée à Biakolo, Mongo Béti affirme : « Oui, je pense que c’est une interprétation très bonne. Il est certain – d’ailleurs, je le dis plusieurs fois dans le roman lui-même, que Perpétue, du moins le personnage, est symbolique. C’est un personnage auquel j’ai voulu donner une dimension symbolique. D’ailleurs, je dois dire qu’au fur et à mesure que je vieillis, je trouve de plus en plus passionnant tout ce qui est dans le genre symbolique. Je pense que le nom Perpétue contient quelque chose de la fatalité, de la continuité dans la condition féminine, et aussi dans la condition africaine, c’est vrai. Les deux conditions se ressemblent d’ailleurs ; il y a une espèce de fatalité qui fait que tous les efforts de Perpétue et de la femme africaine ainsi que de la femme en général – de même que tous les efforts des Africains pour se libérer – avortent toujours » (« Entretien avec Mongo Béti », réalisé par Anthony Omoghene Biakolo, op. cit., p. 12.)

394 À ce sujet, Amina Azza Bekkat écrit : « Écoutons Gérard Genette définir cette notion : J’appelle donc hypertexte tout texte dérivé d’un texte antérieur par transformation simple (Nous dirons désormais transformation tout court) ou par transformation indirecte : nous dirons imitations. Toute relation liant un texte B (que j’appellerai, hypertexte) à un texte antérieur A (que j’appellerai bien sûr hypotexte) sur lequel il se greffe d’une manière qui n’est pas celui d’un commentaire » (op. cit., p. 329).

165

b- L’ironie

L’ironie, figure de style ayant trait à la polyphonie, est particulièrement prisée par le pamphlétaire africain. Selon Carole Fillière, elle est « une figure par laquelle on veut faire entendre le contraire de ce qu’on dit : ainsi les mots dont on se sert dans l’ironie, ne sont pas pris dans le sens propre et littéral »396. Cette définition est complétée par ces remarques de

Vincent Jouve :

L’ironie serait donc une sorte de citation implicite, consistant pour l’énonciateur à faire entendre dans son propos une voix qui n’est pas la sienne et dont, par une série d’indices (qui ne tiennent parfois qu’au seul contexte), il montre qu’il se distancie […]. [L]’ ironie apparaît comme une combinaison de voix qui, bien que confondues dans un même énoncé, renvoient à des locuteurs différents : l’un prenant en charge le contenu explicite (l’énonciateur E), l’autre le refusant (le locuteur L)397.

Cela signifie que le langage utilisé en situation d’énonciation ironique ne se perçoit comme tel qu’en fonction du contexte. L’ironie instaure donc une dualité au sein de l’énoncé de sorte que le destinataire est invité à un décryptage spécifique du message : à savoir comprendre un sens autre, voire contraire, de ce qu’expriment les mots. Entre les paroles prononcées par le locuteur et la pensée de l’énonciateur, il existe un écart dont le décodage dépend des compétences de l’allocutaire. Celui-ci doit pouvoir partager des lieux communs avec l’énonciateur pour une compréhension optimale du message. L’usage d’une telle figure de style permettrait aux écrivains d’éviter « la répression ». Il consiste donc en une sorte de dissimulation : en effet, la distanciation qui s’en dégage se perçoit comme une protection contre les dérives autoritaires du pouvoir qui surveille de près tout discours hostile. Ainsi, l’auteur brouille les pistes en jouant avec le discours des protagonistes qui sont ses intermédiaires.

L’ironie est présente chez Béti, Kourouma et Kéita. Dans Perpétue et l’habitude du

malheur, le dictateur est affublé de certains attributs – très valorisants en apparence – qui

expriment dignité et élévation : « Excellence Bien Aimé Cheik Baba Toura », « Excellence

396 L’esthétique ironique de Leopoldo Alas Clarin, Madrid, Casa Velasquez Éditions, 2011, p. 4. 397 Poétique des valeurs, Paris, PUF, 2001, p. 119

166

Grandissime et Très Magnanime Monsieur le Président Très Affectionné »398. Dans En

attendant le vote des bêtes sauvages, Kourouma dénonce, d’une manière détournée plusieurs

dictateurs, tel Bokassa, « le Maréchal », « l’Empereur, en bon papa de tous les habitants de l’Empire »399. Ces exemples sont en réalité de violentes attaques contre les dictateurs tels Baba

Toura et Bokassa. L’ironie épouse ici des contours d’attaque ad hominem puisque les auteurs s’en prennent à des personnalités réelles. L’un comme l’autre sont de « fins connaisseurs » des dégâts de la dictature et des souffrances de leur peuple. Aussi loin de cautionner les dérives de gouvernance, ils s’en moquent et font dire au narrateur le contraire de ce que les sujets pensent de leur dirigeant. Le maniement de l’ironie leur sert d’arme et de stratagème afin de ne pas se compromettre. L’appellation « père de la nation » est une tournure fallacieuse et ironique pour désigner les premiers présidents qui, en réalité, détruisent volontairement leur nation afin de « profiter » ou de faire « profiter » certaines multinationales étrangères. L’ironie est convoquée également pour dénoncer subtilement le pervertissement de la société que le régime – selon Jean Baudrillard400 – a transformée en une société de la séduction : « tu soignes bien ta

publicité, toi. S’il y avait encore des élections à la mode d’avant l’indépendance, rassure-toi, tu serais élu. Manque de pot, le président y a mis bon ordre et ça ne sert plus à rien, la publicité américaine »401. Rappelons que c’est Baba Toura qui, en accédant au pouvoir, a tout misé sur

ses organes de propagande dans l’unique but de séduire et de tromper son peuple. En effet, la publicité faite autour de la personne du dictateur a donné lieu à un culte de la personnalité. Il est au centre de tout : il est magnifié par les organes de presse, il dirige la radio et la télévision nationale de manière à concentrer toutes les attentions et à écraser tout opposant. Ce narcissisme associé à une folie des grandeurs caractérise à bien des égards la plupart des premiers présidents de l’Afrique indépendante. Par ailleurs, l’ancien colonisateur n’est pas épargné par l’ironie kouroumienne : la subtilité dont fait preuve l’auteur témoigne d’un usage acerbe du « verbe » envers les Africains et lesdes dirigeants français :

Malheureusement dans le langage des montagnards, c’est le même vocable qui dit bagarre, lutte et guerre. Et Tchao se présenta au commandant du cercle administratif colonial pour aller participer à un

398 Cité, p. 144. 399 Cité, p. 208.

400 De la séduction, op. cit.

167

vaste championnat du monde de lutte qui se déroulait au delà des mers. Les Français l’accueillirent, le félicitèrent de son patriotisme : - Il était le premier homme nu à répondre à l’appel pathétique de la mère patrie, la France en danger402.

Cet extrait critique la naïveté de certains Africains qui se font exploiter allègrement par l’ancien colonisateur. Finalement, Tchao ne reçut pour toute récompense qu’une médaille sans valeur. Kourouma y dénonce aussi la pratique qui consiste pour la France à se servir des Africains dans le cadre de la guerre froide. L’expression ironique « mère patrie » suppose que faire la guerre au nom de la France est un devoir pour les Africains et un droit de la Métropole sur les ressortissants de ses colonies anciennes. D’autre part, l’ironie apparaît dans Sous fer mais sous une forme différente. C’est un moyen habile de ridiculiser certaines croyances aux forts relents patriarcaux :

L’adage ne disait-il pas : « Quand une femme est mauvaise, elle ne peut enfanter que de mauvais enfants ? » Nba Nankan se demanda alors en quoi elle avait été mauvaise dans son foyer, tout le temps que son mariage avait duré avec le père de Kanda. Avait-elle une seule fois abandonné le domicile conjugal à la suite d’une altercation avec son mari ? Avait-elle été un jour insoumise au père de Kanda ? L’avait-elle un jour échangé contre un autre homme, trompé ? N’était-elle pas restée derrière lui, soumise à sa volonté, comme le recommandaient les coutumes mandingues ? s’interrogea-t-elle maintes fois403.

À travers cet extrait, l’écrivaine malienne dévoile ses opinions vis-à-vis de croyances rétrogrades non fondées, relevant davantage du mythe que de la vérité. Son objectif est atteint car son style ironique s’avère très efficace En effet, il est dit explicitement que le choix monogamique de Kanda est un échec. On le sait : dans les sociétés patriarcales tout écart de conduite à l’encontre des us et coutumes est synonyme de malheur. Toutefois, les réflexions de Nba Nankan sont le lieu d’une contradiction flagrante entre l’adage et la réalité. En effet, la protagoniste est le prototype de la femme patriarcale, d’où d’ailleurs ses incompréhensions. On constate que Kéita pose un regard sarcastique sur cette situation tout en évitant de s’attirer la colère des gardiens du temple du Mandé. Tout le développement de l’adage conserve un ton ironique au travers notamment des nombreux questionnements du personnage qui ne parvient à

402 En attendant le vote des bêtes sauvages, cité, p. 13. 403 Cité, p. 23.

168

aucune interprétation cohérente. Il est envahi par un doute et une confusion qui dénotent l’absurdité de certaines formes de croyances en société patriarcale. Ce niveau de lecture demande une participation du lecteur qui devient le complice de l’auteur. Ainsi il s’établit un pacte de lecture garant d’un décodage allant chercher, au delà des mots, le rire sournois et ironique de l’écrivain.

c- La métaphore biologico-médicale

Ces termes renvoient à tout ce qui, dans le texte, rappelle la présence de facteurs malsains et dangereux. Ce qui suppose qu’il s’agisse d’une « figure de l’agression » qui fonctionne à la manière d’une métaphore filée dont chaque élément exprime une étape différente dans ce qui est supposé être le pourrissement partiel ou généralisé de la nation. Évidemment, pareille grille d’analyse relève d’une certaine conception organiciste de la société perçue comme un grand corps à préserver des agents pathogènes. Et lorsque ce corps est malade, il devient nécessaire de le soigner. C’est dans cette perspective que l’écrivain diversifie