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Spécificités de l’atelier d’écriture

Dans le document Ateliers d’écriture thérapeutiques (Page 41-44)

Dans ces ateliers, l’écriture favorise l’expression d’un certain nombre d’idées et d’émotions. Les associations d’idées, les symbolisations ainsi

permises, sont parfois renforcées par le cadre dans lequel elles sont élaborées. Nous entendons par « symbolisation », au sens large, la re-présentation indirecte d’une idée, d’un conflit ou d’un désir dont on es-saierait de favoriser l’expression par les scénarios possibles en écriture.

C’est dans son étymologie que « symbole » nous convient le mieux : chez les Grecs, c’était un signe de reconnaissance formé par les deux moitiés d’un objet brisé que l’on rapprochait afin de le reformer. Ainsi, à l’origine, c’est le lien qui fait sens. Dans nos ateliers, nous tenterons par les thématiques formulées comme consignes d’écriture de favori-ser une expression massive de symboles. Ainsi l’écriture, de séance en séance, d’année en année, pourra être un lien générateur de sens.

La production écrite offre ainsi aux participants à la fois la possibi-lité de se mesurer à autrui et de se fondre dans un idéal de groupe. À ce double investissement se rajoute le thérapeute qui, loin d’être un men-tor ou de jouer le rôle d’un simple animateur, est le garant des règles du groupe et un objet de projection.

La différence (marquée) entre une œuvre littéraire (que l’auteur ait ou non des troubles psychologiques) et l’écrit d’un patient lors d’un atelier d’écriture réside dans son élaboration. Le terme d’élaboration psychique, même s’il n’est présent que dans le troisième triptyque, est le fil conducteur de nos ateliers à visée thérapeutique. Il ne s’agit pas uniquement, comme nous l’avons vu dans le chapitre 2 « De l’écriture cathartique à l’écriture thérapeutique », d’une expression du moment par la médiation de l’écriture. L’un des objectifs souhaités est préci-sément cette élaboration psychique que l’écriture favorise – de par la distance qu’elle permet. Nous entendons par élaboration psychique le travail accompli généralement par l’appareil psychique. Ce travail est supposé maîtriser les excitations qui arrivent à l’appareil à penser afin de réduire le risque pathogène. Il consiste donc à intégrer les excitations dans le psychisme et de favoriser les connexions associatives. C’est un travail psychique permanent, tel un chantier en cours ; nous prenons le risque de faire une analogie entre le travail possible en atelier d’écriture à visée thérapeutique et le mode ainsi décrit du travail de l’appareil psychique lui-même. Pour ce faire, la notion de triptyque théorique est essentielle : les parties I et III du tableau 3.1 seraient le lieu et le temps de travail à être effectué, et la partie II celle qui favoriserait les connexions, la symbolisation, l’expression et surtout le lien et la trans-formation qui peuvent en découler. Car ce qui est commun à toute pathologie, ce sont ces dysfonctionnements possibles de l’appareil psy-chique, que le triptyque de l’atelier pourrait aider à « restaurer » et, en tout état de cause, à rétablir. Ce qui se passe au sein de l’atelier avec ces différentes règles qui le régissent (cf. partie IV, « Guide du thérapeute ») permettra de relancer le travail d’élaboration psychique. Néanmoins, une relation transférentielle forte doit rester aussi constante dans nos

ateliers en tant que travail thérapeutique. Rappelons qu’une relation transférentielle est une sorte de déplacement de l’affect d’une repré-sentation à une autre. Cette « sorte de déplacement » peut être autant un déplacement vers le thérapeute, que ce dernier devra savoir gérer, qu’un déplacement face au groupe, ou même aux personnages créés dans l’écriture. Encore une fois, la capacité du thérapeute à savoir connaître et/ou reconnaître la symbolique dans la représentation créée est nécessaire. Parfois, toute la difficulté peut résider dans ces difficul-tés transférentielles avec le thérapeute, un thérapeute à « partager » avec les autres membres du groupe. Mais cette difficulté, essentielle-ment retrouvée en début de participation à l’atelier, peut être aussi un outil thérapeutique déterminant de la suite du parcours du patient au sein de l’atelier d’écriture à visée thérapeutique. D’où la différence capitale entre un atelier d’écriture à visée thérapeutique, où le théra-peute sera à même de gérer cette sphère transférentielle, et un atelier d’expression par l’écriture.

L’écrit s’inscrit dans une relation, avec des implications transférentielles, et peut ainsi représenter pour certains un matériel interprétable. Quoi qu’il en soit, c’est une communication immédiate dans le moment.

Conduire un atelier d’écriture, a fortiori si cela est dans un but théra-peutique, nécessite, indépendamment de la motivation, une formation.

Celle-ci impose au thérapeute non seulement une culture artistique, mais encore, et cela nous semble une condition sine qua non, un apprentis-sage socratique, une formation préalable en tant que cothérapeute à des ateliers d’écriture. Il est certain que dans des ateliers à visée pédagogique d’autres qualités sont requises pour les animateurs. Là encore une expérience des groupes, indépendamment d’une formation littéraire, est hautement profitable. Le thérapeute anime son atelier – animation entendue ici au sens où elle peut être un processus par lequel se concré-tisent, au cours d’une thérapie de groupe, certaines capacités d’un indi-vidu qui n’étaient jusque-là que potentielles.

Tableau 3.1. Les trois composantes du triptyque théorique

Groupe atelier Écriture Temps

Groupe Thème Symbolisation

Lieu Fond/forme Élaboration

Cadre Contrainte/liberté Assouplissement

Temps Mise à distance Émotions

Plaisir/déplaisir Plaisir/déplaisir Plaisir/inhibition Inhibition/démarrage Surprise Adaptation Pensées illimitées

Contenant Contenu/contenant Contenant/contenu

Neri (1997) définit l’animation comme étant produite par le concours de deux facteurs : « La grande intensité de la participation affective qui caractérise la vie du groupe et la présence à son intérieur de manières de penser parfois très différentes de celles qui sont propres à la famille et au monde dont l’individu provient. »

Dans le document Ateliers d’écriture thérapeutiques (Page 41-44)