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Le socle commun 1. Généralités

DI. Le service public dans la législation fédérale

B. Le socle commun 1. Généralités

En France, trois principes sont qualifiés de <dois du service public>P2. En Suisse, ces divers principes apparaissent également, parfois en filigrane seu-lement, dans les différentes lois fédérales sectorielles touchant au service public. D'autres principes figurent également dans ces lois sectorielles. A cet égard, le principe dit «de qualité» vient spécialement à l'esprit. Le Conseil fédéral le mentionne dans son Rapport123. Cependant, les exigences à ce sujet sont définies dans les lois sectorielles124, si bien qu'il est difficile, pour ne pas dire impossible, d'en donner une définition générale.

Il faut encore noter que le constituant vaudois a synthétisé ces différentes lois de manière assez élégante. Ainsi, l'article 40 Cst. VD prévoit-il que <<l'Etat et les communes agissent avec diligence et conformément aux principes d'égalité, d'accessibilité, de qualité, d'adaptation et de continuité»125. Le prin-cipe d'accessibilité est, en réalité, un corollaire du prinprin-cipe d'égalité126. Bien que ces différents principes ne soient pas érigés en véritables droits constitu-122

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Voir notamment, parmi de très nombreux auteurs, CARBAJO (n. 20), p. 40 5S; FRIER (n. 1), p. 220 ss; CHEVALLIER (n. 5), p. 94-98.

FF 2004, 4318.

FF 2004, 4318.

Sur cette disposition, voir Luc RECOROON [membre de l'Assemblée constituante],

«Tâches de l'Etat et des communes), in PIERRE MOOR (éd.), La Constitution vaudoise du 14 avri/2003, Berne, 2004, p. 139-177, 142-143.

RECORDON (n. 125), p. 143.

La notion de service public en droit suisse

tionnels subjectifs, sous réserve du principe d'égalité127, ils pourraient néan-moins donner lieu à des réclamations de la part d'usagers, voire à un dédom-magement pour les torts subisl28 - encore qu'il semble pour le moins délicat de fonder un cas de responsabilité de l'Etat ou des communes en la matière.

2. Le principe d'égalité

Le principe d'égalité est, comme nous l'avons vu, ancré dans la Constitution fédérale l29. Il est également exprimé, d'une manière ou d'une autre, dans les lois sectorielles. Ce principe est notamment consacré en matière tarifairelJo Dans certains cas, ce principe est même renforcé par l'idée d'universalité, laquelle vise essentiellement les services en réseaulJI . Ainsi, des prestations ne doivent pas seulement être offertes de manière égale, mais plus encore de manière universelle. Les exemples par excellence sont ceux des télécommu-nications et des services postaux pour lesquels un service universel est garanti 132.

Dans son Rapport, le Conseil fédéral identifie certains principes fondamen-taux, parmi lesquels figurent <des principes d'accessibilité et de la couverture du territoire»133 qui sont, en réalité, une forme de concrétisation du principe - plus général- d'égalité, voire du principe d'universalité. En vertu de ces principes, <des prestations doivent être fournies pour tous et dans toutes les régions selon les mêmes principes» et «être aisément accessibles pour tous les groupes de la popuiatioo», de façon à contribuer «à assurer la cohésion sociale et régionale»134. Des tempéraments sont néanmoins possibles dans certains domaines 135. Enfin, les prix des prestations doivent, de l'avis du

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Art. 10 Cst. VD et, bien évidemment, 8 Cst.

RECORDON (n. 125), p. 143.

Art. 8.

Voir. par exemple. l'an. 10, al. l, de la loi fédérale sur les transports publîcs du 4 octobre 1985 (LTP; RS 742.40), à propos de l'application des tarifs «à tous de manière identique» ou encore l'article 14, al. 2, LPO.

Dans ce sens, CHEVALLIER (n. 5), p. 103.

Art. 92, al. 2, Cst. Voir supra II, C, 2.

FF 2004, 4318.

FF 2004, 4318. Voir, par exemple, l'art. 2 LPO.

Voir, dans cet ouvrage, BELlANGER/CAVALER! RUDAZ, III, B, 2, c (rapport coût/utilité du raccordement des régions Îsolées au réseau d'électricité).

VINCENT MARTENET

Conseil fédéral, «être abordables pour toUS», de façon à contribuer «à assu-rer la cohésion économique et sociale»136

Ce principe d'égalité a connu de nouveaux développements dans le domaine du service public lié à des infrastructures. Ainsi, l'une des tendances très nette de la législation récenteJ37 et de la jurisprudence138 est de permettre un accès non discriminatoire à ces infrastructures. Le concept de réseau et l'accès à celui-ci deviennent centraux en ce domaine139.

En somme, le principe d'égalité trouve potentiellement application dans une triple perspective. En premier lieu, il peut viser classiquement les relations entre le prestataire et les usagers. En deuxième lieu, il se rapporte aux rela-tions entre le détenteur du réseau, par hypothèse public, et les prestataires.

En troisième lieu, il concerne les relations entre le détenteur du réseau et les usagers. A notre sens, ces trois aspects devraient être justiciables. Lorsque le détenteur du réseau ou les prestataires sont des personnes privées, ils ne sont soumis au principe d'égalité que si cela ressort de la législation secto-rielle applicable. En effet, un effet horizontal direct ne saurait raisonnable-ment être conféré à l'article 8, alinéa l, Cst.

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FF 2004, 4318. Dans la même optique, CHEVALLIER (n. 5), p. 101-102, à propos de la France.

Voir notamment l'art. 4, al. 2, LCFF: «[Les CFF] ont l'obligation de permettre aux entreprises de transport qui ont obtenu J'accès au réseau d'accéder sans discrimina-tion à l'infrastructure, conformément à /a loifédéra/e du 20 décembre 1957 sur les chemins de fer.». Voir également l'article 9a de la loi fédérale sur les chemins de fer du 20 décembre 1957 (LCdF; RS 742.101). ainsi que l'article II (obligation d'intercon-nexion) de la loi fédérale sur les télécommunications du 30 avril 1997 (L TC; RS 784.10).

ATF 12912003 II 497, 538~541, Entreprises Electriques Fribourgeoises, dans lequel le Tribunal fédéral qualifie d'abusifle comportement d'une entreprise en position domi-nante qui dispose seule des infrastructures indispensables à la fourniture d'une pres-tation et qui refuse, sans raisons objectives, de les mettre à la disposition de ses concurrents. Voir néanmoins ATF 131/2005 II 13, Swisscom Fanet A G, dans lequel le Tribunal fédéral estime que l'ordonnance révisée sur les services de télécommunication (OST) ne constitue pas une base légale suffisante pour le dégroupage du raccordement d'abonnés (ouverture du «dernier kilomètre}}).

Sur ce point, voir spécialement CHRISTIAN BOVET, «Aspects des économies de ré-seaux)), in AUERIDELLEY!HOTTELIERIMALINVERNI (éd.), Aux confins du droit - Essais en l 'honneur du Professeur CHARLES-ALBERT MORAND, Bâle, Genève, Munich, 2001, p. 491-518; voir également, dans cet ouvrage, BELLANGER/CAVALERI RUDAZ, III, B, 2, III, B et III, C.

La notion de service public en droit suisse 3. Le principe de continuité

Le principe de continuité signifie que le service public doit être offert sans interruption. Une telle exigence figure dans plusieurs lois fédéralesl40• Elle se retrouve généralement dans les concessions de service publicJ41 • Le Conseil fédéral met également ce principe en avant dans son Rapportl42 •

Ce principe pourrait être invoqué en cas d'interruption d'un service public, pour des causes naturelles ou humaines (erreur humaine, sabotage, grève, etc.). Sèlon les cas, il pourrait servir d'appui à des prétentions d'usagers à l'encontre du prestataire de service. Pour l'heure, le contentieux demeure très limité en Suisse, mais un potentiel existe.

4. Le principe de mutabilité

Le principe de mutabilité implique que le service public s'adapte à l'évolu-tion des besoins sociaux. Un tel principe se déduit des objectifs se trouvant au début des lois sectorielles. Ces objectifs sont souvent exprimés Cn des termes très généraux et offrent suffisamment de souplesse afin de permettre une adaptation du service public aux circonstances nouvelles.

Ce principe de mutabilité vise aussi bien l'infrastructurel43 que les services fournis aux usagers 144. Selon le Conseil fédéral, il importe de tenir compte de l'évolution des besoins de la population tout comme ceux des entreprisesl45

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Voir, par exemple, l'art. 2, al. 1, 2ème phrase injine, LPO (obligation d'assurer les prestations relevant des services postaux «en règle générale tous les jours ouvrables, mais au moins cinq jours par semaine)}).

Cela résulte notamment de l'obligation faite au requérant d'une concession de rendre vraisemblable qu'il sera en mesure d'assurer l'offre de services, le financement des investissements nécessaires ainsi que l'exploitation <r,pendant toule la durée de la concessÎom), Voir l'art. 15, let. b, LTC, s'agissant de la concession relative au service universel de télécommunication, ou l'an. Il, aJ. l, Jete, de la loi fédéra]esurla radio et la télévision, du 21 juin 1991 (LRTV; RS 784.40), s'agissant de la concession de diffusion de programmes de radio et de télévision. Voir notamment PIERRE MooR, Droit administratif. vol. III «L'organisation des activités administratives, Les biens de l'Eta!», Berne, 1992, p. 129.

FF 2004, 4318.

Voir, par exemple, l'art. 3, al. 3, 2ème phrase, LCFF: «Les CFF maintiennent l'infras-tructure en bon état el l'adaptent aux exigences du trafic et aux progrès de la technique».

Voir, par exemple, l'article 10 LPO: <<La Poste précise son offre de prestations. A cet effet. elle lient compte des besoins de la populations et de l'économie ainsi que des progrès de la technique}).

FF 2004, 4318.

VINCENT MARrnNET

C. Les différents modes de gestion et les tendances en la