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Introduction

En dépit de l’intégration de manière spectaculaire de la téléphonie mobile dans le quotidien des populations, l’Afrique reste toujours confrontée au défi de la démocratisation d’Internet. En 2010, le continent était encore très loin du compte, il ne comptait que 14% de taux de pénétration contre 64% pour les pays développés(UIT 2010)156. Comparé à l’Europe occidentale, l’Amérique du Nord et l’Asie de l’Est, Internet est à un faible niveau de développement en Afrique. Cette faiblesse est-elle imputable à son retard économique ? Au sein des pays développés, Internet est une réalité ; il s’est rapidement développé du fait de la présence de facteurs techniques et socio-économiques favorables. Ainsi, un bon déploiement infrastructurel et un contexte social propice à l’appropriation de la technologie d’Internet ont conduit de manière efficace la construction de la société de l’information et des savoirs dans les pays du Nord. Dans sa publication de 2010157, l’UIT a classé les pays selon leur Indice de Développement des Tic ((IDI) compris entre 0 et 1)158 ; les pays riches sont en tête de peloton, la Suède est à 7,85, la Corée du Sud à 7,68, la France à 6,55 ou l’Estonie à 6,41. Nous pouvons en déduire qu’un accès efficient à Internet doit s’inscrire dans une dynamique fondée d’abord sur trois facteurs : une bonne couverture du territoire en infrastructures (constituées d’un ensemble de réseaux raccordés par des câbles et des antennes relais formant ce que P. A. Muet et N. Curien (2004) appellent « le réseau des réseaux »), des possibilités d’accès

156 D’après la publication de l’UIT:Mesurer la société de l’information, 2010. 12p. 157 Ibid.

158Selon l’UIT, l’IDI est « un outil compose de 11 indicateurs reflétant l’accès aux Tic, l’utilisation des

Tic et les compétences dans ce domaine ; cet indice a été élaboré pour mesurer le niveau et l’évolution sur la durée des Tic en tenant compte de la situation des pays tant développés qu’en développement. Il est plus pertinent que les autres indicateurs qui ne rendent pas compte des progrès d’ensemble que réalise les pays en vue de devenir des société de l’information » p. 3.

127 démocratiques aux terminaux et des conditions sociales et économiques propices à l’appropriation ; telle est la réalité pour les pays développés.

S’agissant des infrastructures, l’observation de leur répartition à l’échelle internationale met en évidence, le retard du continent en termes de connexion et à l’échelle continentale, une répartition spatiale déséquilibrée des câbles sous-marins entre les États. Cependant, le retard infrastructurel de l’Afrique n’empêche pas la croissance du nombre d’internautes. Il est passé de « 50,4 millions d’internautes en 2007 à 87 millions en 2009 » inégalement répartis, avec « 21,4 millions en Afrique du Nord (Maghreb et Égypte),

5,1 millions en Afrique du Sud et 23,9 millions en Afrique subsaharienne »159pour un continent qui comptait 963 millions d’habitants en 2009 ; toutefois l’Afrique est toujours en bas du classement sur le nombre d’internautes. Dans ce contexte de timidité du développement d’Internet, les objectifs institutionnels et gouvernementaux de faire de cette révolution numérique, une panacée à des décennies de crise socio-économique, semblent être loin de se réaliser ; la région africaine est la partie la plus touchée par la fracture numérique. Mais, des efforts substantiels ont été mobilisés pour augmenter la connectivité du continent et renverser la tendance pour les mal-connectés au réseau mondial. Si des difficultés liées à l’accès au backbone international se sont posées avec acuité dans les années 2000, aujourd’hui, la situation est en amélioration. Des pays comme le Burkina Faso, le Mali ou le Tchad qui constituaient en 2000 de véritables déserts numériques, bénéficient d’une connectivité relativement bonne grâce à de nombreux projets d’équipements menés dans le continent.

Cependant, la situation n’étant pas totalement favorable au développement d’accès similaires à ceux des pays développés des stratégies à l’initiative des institutions, de la société civile ou des populations elles-mêmes ont été élaborées pour la vulgarisation d’Internet dans le continent. Sur cette question de l’accès des populations aux nouvelles technologies, l’Afrique présente également des hétérogénéités dans les e-projets. Soulignons qu’analyser ces projets de manière exhaustive à l’échelle du continent est une tâche difficile, raison pour laquelle seuls quelques projets conduits soit par les États ou la société civile seront étudiés pour mettre en exergue leur rôle dans le processus de déploiement d’Internet. D’ailleurs, pour nous simplifier davantage la tâche, nous nous fondons sur un certains nombre de

159http://www.journaldunet.com/ebusiness/le-net/nombre-internautes-afrique.shtml (Le, 04 décembre 2010)

128 publications160 portant sur ce volet des e-projets et des politiques en matière de Tic en Afrique.

Ainsi, ces analyses somme toute succinctes de la situation africaine sur les deux volets du déploiement des infrastructures et des accès aux terminaux nous donnent un aperçu sur la situation des Tic en Afrique. Elles nous permettent aussi de montrer que le Sénégal a une avance par rapport à d’autres États du continent. En effet, le Sénégal se distingue par sa relative bonne connexion au backbone international et une démocratisation de la téléphonie, résultat d’une collaboration entre divers acteurs territoriaux à savoir, l’État et l’opérateur historique qui sont à la base des politiques des télécommunications menées depuis les années 1980, la société civile, à la source de plusieurs e-projets locaux et les usagers à l’origine de stratégies populaires d’accès aux terminaux. Ainsi, comment évolue le processus de déploiement d’infrastructures dans le continent ? Qu’en est-il des e-projets menés par les États et la société civile et destinés à favoriser l’accès des populations aux terminaux,? En quoi, le Sénégal représente t-il une particularité dans ce processus d’insertion des Tic en Afrique ?

160 Ces publications sont des articles scientifiques d’un certains nombre d’auteurs (A ; Chéneau-Loquay 2002, R. Ntambue, 2002, M. C. Diop2002, g et de rapports institutionnels (SMSI de 2003 et 2005), UIT (2008 et 2009), l’institut PANOS 2007, la Rencontre Bamako 2000, Enda Tiers Monde etc.).

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I. RÉPARTITION SPATIALE DES INFRASTRUCTURES DANS LE MONDEET

DÉVELOPPEMENT DES E -PROJETS EN AFRIQUE