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En accord avec les observations réalisées par microscopie optique et MEB, l’hétérogénéité des engobes sud-gaulois, au sein d’un même tesson, visualisée par l’intermédiaire des écarts-types, est relativement importante, contrairement aux engobes italiques très fins à cette échelle (Tableau III.D.1). Comme les fractions fines des

Arezzo « Ateius » Arezzo « Perrenius » La Graufesenque Bram

prélèvements argileux analysées précédemment (II.D.2), les plus grosses variations constatées concernent le silicium (et donc indirectement l’aluminium) et le fer, et sont liées à la présence de cristaux d’hématite et de quartz de tailles supérieures au volume analysé par la sonde (quelques microns cube). Les points dont les valeurs s'écartaient trop des valeurs moyennes, typiquement pour des teneurs en SiO2 (quartz), Fe2O3 (hématite) ou TiO2 (rutile ou anatase) supérieures à 90%, ont été éliminées du calcul de la valeur moyenne.

La composition moyenne de l’engobe et les écarts types, mesurés pour chaque atelier, sont reportés dans le Tableau III.D.3. À titre comparatif, les valeurs moyennes obtenues pour l’engobe des 39 fragments de sigillées italiques, sont également présentées dans ce tableau.

La plus forte hétérogénéité mesurée au sein d’un même échantillon, va engendrer des dispersions également plus importantes au sein d’une même fabrique. En observant les écarts types pour chaque atelier (Tableau III.D.3), on peut effectivement constater que la dispersion mesurée pour les éléments silicium et aluminium est en général, beaucoup plus élevée d’un tesson à l’autre, pour les centres sud-gaulois que pour les italiques. Toutefois chaque atelier, présente des caractéristiques qui lui sont propres et pour la plupart des éléments considérés, la composition élémentaire varie peu.

Microsonde Engobes Na2O MgO Al2O3 SiO2 P2O5 K2O CaO TiO2 MnO Fe2O3 BaO

0.08 0.95 23.22 55.70 0.17 8.02 1.39 0.72 0.05 9.63 0.08 Graufesenque (78) 0.06 0.22 2.37 2.79 0.04 0.85 0.87 0.10 0.01 1.00 0.02 0.05 1.11 22.60 58.69 0.15 6.31 1.01 0.71 0.04 9.24 0.08 Le Rozier (3) 0.01 0.08 0.15 0.63 0.01 0.86 0.06 0.05 0.01 0.19 0.01 0.05 0.91 25.28 54.69 0.21 6.66 1.08 0.77 0.06 10.23 0.07 Espalion (36) 0.02 0.16 3.05 3.79 0.06 0.60 0.39 0.10 0.01 1.06 0.02 0.08 0.99 29.00 52.50 0.18 4.93 0.76 0.84 0.05 10.58 0.08 Carrade (13) 0.04 0.22 3.19 3.43 0.04 0.50 0.20 0.15 0.01 0.83 0.01 0.87 1.43 22.49 55.81 0.17 7.63 1.17 0.71 0.04 9.61 0.07 Aspiran (8) 0.17 0.59 2.20 2.89 0.05 0.91 0.19 0.15 0.01 0.96 0.01 0.32 1.15 31.12 44.96 0.13 9.47 1.44 0.78 0.05 10.52 0.07 Montans (37) 0.14 0.22 1.39 1.39 0.09 1.69 0.53 0.15 0.01 1.43 0.02 0.95 3.23 26.94 49.51 0.12 6.58 1.53 0.58 0.07 10.38 0.09 Italiques (39) 0.37 0.45 0.60 0.77 0.02 0.90 0.48 0.08 0.02 0.61 0.02 Tableau III.D.3 : Composition chimique moyenne et écart type (sous les valeurs moyennes) de l’engobe des productions des différents ateliers de sigillées sud-gaulois (La Graufesenque, Le Rozier, Espalion, Carrade, Aspiran et Montans), ainsi que des productions italiques (donnée à titre comparatif), déterminée par microsonde électronique et donnée en masse d’oxyde (11 éléments principaux normalisés à 100).

La première étude réalisée sur les engobes des sigillées de La Graufesenque (Sciau Ph. et al., 2007), avait mis en évidence l’existence d’un seul groupe, relativement homogène. Si on observe les Tableaux en Annexe 1 (p.260-261) et 2 (p.262), on s’aperçoit qu’il n’existe en effet, aucune variation perceptible entre les engobes des tessons provenant de l’ensemble Fronto et datés du début de la période de production (+15 / +20) et ceux des sigillées produites ultérieurement, retrouvées au sein de l’atelier ou sur les différents sites de consommation. Les ateliers considérés comme satellites à La Graufesenque, ont un engobe très proche en composition de celui utilisé par ce centre (Tableau III.D.3, Figures III.D.3 et III.D.5). Il existe en particulier une zone de recouvrement relativement importante entre les engobes des sigillées d’Espalion et celles de La Graufesenque. La plupart des tessons attribués à Espalion se caractérisent toutefois par de plus faibles teneurs en potassium, et une

proportion plus forte en fer et en aluminium (Tableau III.D.3). Les productions de Carrade se différencient très nettement de celles de La Graufesenque par ces mêmes caractéristiques encore plus marquées, comme par exemple les teneurs en potassium qui sont quasiment deux fois plus faibles (Figure III.D.3). Il existe en revanche une zone de recouvrement entre les sigillées de Carrade et celles d’Espalion. Les trois échantillons attribués au Rozier présentent en moyenne un rapport Al/Si et des teneurs en potassium plus faibles que la plupart des fragments de La Graufesenque (Tableau III.D.3). Cette variation n’est cependant pas aussi importante que la dispersion observée entre les différents tessons attribués à ce grand centre millavois. Deux de ces trois fragments ne se distinguent donc pas du groupe de La Graufesenque (Figure III.D.3), et le troisième présente des teneurs en potassium très faibles qui le rapprochent des productions de Carrade. Ce qui différencie principalement les sigillées d’Aspiran de celles de La Graufesenque et de ces autres ateliers satellites, ce sont les teneurs en sodium de l’engobe qui sont nettement plus importantes pour cette fabrique et permet donc de les isoler facilement (Figure III.D.5).

Figure III.D.3 : Diagramme de répartition des productions de sigillées sud-gauloises, en fonction des teneurs en potassium et du rapport aluminium sur silicium de leur engobe, déterminées par Microsonde électronique.

Chacun de ces ateliers présente donc des caractéristiques qui lui sont propres, cependant ces variations s’effacent devant les fortes différences qui existent entres ces productions et les sigillées de Montans. L’analyse en composante principale de la Figure III.D.4, réalisée à partir de la composition chimique de l’engobe de toutes les sigillées sud- gauloises étudiées, met bien en évidence la présence de deux groupes : l’existence de ces deux ensembles découlent d’une part de la proximité des ateliers satellites (Espalion, Carrade, Le Rozier et Aspiran) avec le centre principal de La Graufesenque, et d’autres part des fortes variations chimiques qui séparent ce groupe des productions montanaises. L’engobe des sigillées de Montans se caractérise en particulier par de fortes teneurs en aluminium pour une proportion de silicium plus faible (Figure III.D.3), ce qui conduit à un rapport Al/Si important (0.70), plus proches des argiles de type kaolinite (0.84) et du prélèvement VPJ-2, étudié au chapitre précédent (Figure II.D.1). Les sigillées de Montans sont donc nettement

0 0.35 0.40 0.45 0.50 0.55 0.60 0.65 0.70 0.75 0.80 12 11 10 9 8 7 6 5 4 Aspiran Montans La Graufesenque Carrade Espalion Le Rozier

différenciables par la composition chimique de leur engobe des productions du groupe de La Graufesenque.

Figure III.D.4 : Analyse en composantes principales (ACP) de type Pearson (n), réalisée à partir de la composition chimique de l’engobe des sigillées sud-gauloises. Les onze principaux éléments chimiques (Na, Mg, Al, Si, P, K, Ca, Ti, Mn, Fe et Ba), sont pris en compte aussi bien pour la pâte que l’engobe, et la projection suivant les axes F1/F2 représentent 45.06 % de la variance totale.

Si l’on compare à présent les engobes des sigillées sud-gauloises à ceux des italiques, il est clair que quel que soit l’atelier considéré, les engobes des sigillées sud-gauloises se différencient des italiques par des teneurs plus faibles en sodium, mais surtout en magnésium : sur le diagramme de la Figure III.D.5, ces deux productions forment deux ensembles bien distincts et il n’existe aucune zone de recouvrement entre les deux. La grande majorité des couvertes sud-gauloises ne contiennent pas plus de 1.5 % de MgO, alors que pour les italiques, ces teneurs sont toujours supérieures à 2% et même à plus de 3% pour la plupart des fragments étudiés. De toutes les argiles illitiques prélevées à proximités des principaux ateliers sud-gaulois et analysées précédemment (cf. § II.D.2), l’échantillon espalionnais ESP- 4 est celui qui contient le moins de magnésium dans sa fraction fine (1.5%). Cependant même si les engobes de Montans et d’Aspiran en contiennent quasiment autant, les autres ateliers sud-gaulois se caractérisent par des teneurs en magnésium encore plus faibles (Figure III.D.5).

En ce qui concerne le sodium, les dispersions observées pour les engobes italiques sont plus importantes, toutefois ces teneurs sont toujours supérieures à 0.3%. À l’inverse pour la grande majorité des engobes sud-gaulois, cet élément est présent à l’état de traces. Sur le diagramme de la Figure III.D.5, les sigillées des ateliers de La Graufesenque, du Rozier, d’Espalion et de Carrade, forment un noyau concentré avec des teneurs en sodium très faibles (< 0.1%). La dispersion observée entre les fragments de ces différents ateliers est peu élevée : seuls trois tessons de la Graufesenque provenant de la fosse « Fronto » et attribuables au tout début des productions sud-gauloises, présentent des teneurs un peu plus fortes en sodium. Les

Aspiran Montans La Graufesenque Espalion Le Rozier Carrade

engobes de Montans et en particulier d’Aspiran, se distinguent en revanche des autres couvertes sud-gauloises étudiées, par une quantité de sodium plus élevée et une dispersion nettement plus marquée pour cet élément, entre les différents fragments.

Figure III.D.5 : Diagramme de répartition des productions de sigillées italiques et sud-gauloises, en fonction des teneurs en magnésium et sodium de leur engobe, déterminées par Microsonde électronique.

Figure III.D.6 : Analyse en composantes principales (ACP) de type Pearson (n), réalisée à partir de la composition chimique de l’engobe de sigillées italiques et sud-gauloises. Les onze principaux éléments chimiques (Na, Mg, Al, Si, P, K, Ca, Ti, Mn, Fe et Ba), sont pris en compte aussi bien pour la pâte que l’engobe, et la projection suivant les axes F1/F2 représentent 48.84 % de la variance totale.

Aspiran Montans La Graufesenque Le Rozier Espalion Carrade Italie Na2O 0 0.2 0.4 0.6 0.8 1 1.2 1.4 1.6 4.0 3.5 3.0 1.0 0.5 2.5 2.0 1.5 Italie Aspiran Montans Espalion Carrade La Graufesenque Le Rozier

Quoi qu’il en soit, les variations constatées précédemment entre les différents tessons italiques, ou entre les ateliers sud-gaulois (notamment en potassium, aluminium et sodium) s’effacent très largement face aux différences concernant le magnésium, qui existent entre ces deux groupes. Une analyse en composante principale, a été menée afin d’effectuer une comparaison quantitative de l’ensemble de ces données (Figure III.D.6). La projection suivant les axes F1/F2 des différents échantillons, met bien en évidence la différence entre les engobes des sigillées sud-gauloises et ceux des italiques : ces deux productions forment deux ensembles bien distincts et il n’existe aucune zone de recouvrement entre les deux.