• Aucun résultat trouvé

du diffractogramme d’un engobe de sigillée de qualité ne pose pas de difficulté particulière si ce n’est qu’il faut pouvoir disposer d’une surface plane suffisamment grande (de l’ordre du cm2). L’épaisseur de l’engobe (de l’ordre de 15-20 µm) est en général suffisante pour s’affranchir, en grande partie, de la contribution de la pâte (Vendier L. et al., 2002).

Comme les prélèvements argileux analysés précédemment (cf. § II.D.3), l’engobe de tous les fragments de sigillée analysés, se caractérise par une proportion importante d’hématite bien cristallisée qui présente des pics de diffraction relativement fins (Figures III.D.7 à III.D.11). Ils contiennent également tous du quartz, dont la position des pics est toujours constante, ce qui permet de caler parfaitement les diagrammes de diffraction en (sinθ/λ). On peut ainsi constater un décalage systématique entre les raies de l’hématite contenue dans les engobes et celles du diagramme caractéristique d’une hématite pure. Comme pour les prélèvements argileux analysés précédemment, ce décalage se situe vers les grands angles, ce qui implique une diminution du paramètre de maille. Lors d’une étude publiée en 2006 sur les deux ateliers de La Graufesenque et de Montans (Sciau Ph. et al., 2006), un traitement de type Rietvield ainsi que des analyses réalisées par EELS (spectroscopie de perte d’énergie des électrons) sur les engobes de quelques fragments, ont mis en évidence la présence de cristaux d’hématite contenant environ 8 % d’aluminium et 5 % de titane dans leur structure.

La plupart de ces engobes ne contiennent qu’un faible taux de calcium (environ 1%), qui est cependant suffisant pour former de l’anorthite (CaAl2Si2O8), comme on a pu le constater pour les prélèvements argileux analysés précédemment (II.D.3). Toutefois, les trois raies caractéristiques du pyroxène apparaissent également sur quelques diagrammes de diffractions et ce quel que soit l’atelier considéré. Il semble peu probable que cette phase minérale se soit formée dans l’engobe, mais la pâte en contient en revanche une part importante. L’épaisseur de l’engobe de certains fragments (inférieure à 15 µm) n’est pas toujours suffisante pour permettre d’isoler complètement son signal de celui de la pâte. L’intensité de la raie principale de l’anorthite peut ainsi dépendre dans certain cas de l’épaisseur de l’engobe. Comme les préparations argileuses étudiées au chapitre précédent (II.D.3), ces engobes se caractérisent par la présence de spinelle et de corindon, dans des proportions cependant différentes selon le centre de production considéré.

Les engobes d’une quinzaine de tessons de sigillées italiques ont été étudiés par DRX. Quelle que soit leur provenance, d’un échantillon à l’autre, les diagrammes obtenus sont similaires et présentent les mêmes caractéristiques. Trois d’entre eux sont présentés dans la Figure III.D.7.

Figure III.D.7 : Diagrammes de diffraction des rayons X, I = f(sinθ/λ) (λCuKα), réalisés au CEMES sur l’engobe de fragments de sigillées italiques retrouvés à Arezzo, Bram et La Graufesenque (Q : quartz, H : Hématite, S : Spinelle, C : Corindon, An : Anorthite et P : Pyroxène).

Ces engobes italiques se caractérisent par une forte proportion de spinelle et la quasi- absence de corindon. Les raies du spinelle sont relativement larges et les diagrammes obtenus présentent plus de similitudes avec les prélèvements d’argiles chauffés à 950°C, qu’à 1050°C (Figure II.D.19), ce qui est en accord avec les températures de cuisson évaluées à partir de la composition minérale des pâtes. Les raies principales du corindon se détachent à peine du bruit de fond. Des diagrammes de diffraction ont été réalisés sur trois tessons recuits à 1050°C, afin d’améliorer la cristallinité de ces deux phases et ainsi d’évaluer leur prépondérance l’une par rapport à l’autre. Après re-cuisson, ces engobes italiques présentent les mêmes caractéristiques minéralogiques que les prélèvements argileux les plus riches en magnésium et en particulier l’échantillon Va-7, qui à cette même température présente un rapport du signal corindon / spinelle similaire (Figure II.D.4).

Figure III.D.8 : Diagrammes de diffraction des rayons X, I = f(sinθ/λ) (λCuKα), réalisés au CEMES sur l’engobe de fragments de sigillées attribués à l’atelier de La Graufesenque et retrouvés sur ce site (Q : quartz, H : Hématite, S : Spinelle, C : Corindon, An : Anorthite et P : Pyroxène).

Les premières études réalisées sur les engobes des sigillées de La Graufesenque (Sciau Ph. et Vezian A., 2002 et Sciau Ph. et al., 2005), avait mis en évidence la faible variabilité de composition minérale existant entre les engobes des différents tessons et cela, quelle que soit la période de production. Les plus fortes variations d’un tesson à l’autre concernent le quartz, mais il suffit souvent de changer très légèrement la position de l’échantillon pour modifier de façon significative les rapports entre les intensités de ses pics de diffraction, ce qui atteste d’une répartition assez hétérogène des cristaux, à relier au degré de lavage des engobes. La Figure III.D.8 présente les diffractogrammes de l’engobe de trois d’entre eux.

A la différence des sigillées italiques, ces engobes se caractérisent par la prépondérance du signal du corindon sur la phase spinelle. Le profil de ses raies témoigne d’une bonne cristallinité, ce qui, par analogie aux prélèvements argileux analysés au chapitre précédent (II.D.3), est en accord avec une cuisson aux alentours de 1050°C. Elles présentent toutefois un décalage constant vers les petits angles, signe d'un paramètre de maille plus grand

que celui du corindon pur. Comme pour l’hématite, d’après le traitement de type Rietvield réalisé en 2006 sur l’engobe de cinq fragments (Sciau Ph. et al., 2006), ce décalage en 2theta se justifie par la présence d’environ 8% de fer dans la structure du corindon. D’après cette même étude, les cinq engobes étudiés contiennent 40% de corindon environ (en pourcentage d’oxyde), pour seulement 3 % de spinelle, la proportion d’hématite étant évaluée autour de 35% et le quartz à environ 20%. Parmi les phases minoritaires, le rutile a parfois également été détecté.

Les engobes d’Espalion présentent les mêmes caractéristiques minéralogiques que celles de La Graufesenque (Figure III.D.9). Pour ceux de Carrade et du Rozier (Figure III.D.9), le corindon est également prépondérant sur la phase spinelle, cependant les raies qui lui sont associées sont plus larges et moins intenses que pour les ateliers de La Graufesenque : c’est surtout le cas des engobes de Carrade pour qui le corindon a un signal très faible. La proportion de quartz est également plus importante pour ces deux ateliers. Il semble probable que les sigillées du Rozier, mais surtout de Carrade aient été cuites à des températures de cuisson moins élevées qu’à La Graufesenque ou à Espalion.

Les engobes d’Aspiran qui contiennent plus de magnésium que les autres, présentent des variations par rapport aux autres ateliers sud-gaulois. Le spinelle présente en effet un signal plus intense que celui du corindon.

Pour les engobes des sigillées de Montans, les modèles de diffraction montrent un peu plus de variations entre les échantillons (Figure III.D.10). Cependant ils présentent tous des caractéristiques similaires. Leur composition minérale est très proche de celle des engobes des ateliers de La Graufesenque, toutefois ils contiennent une plus forte proportion de corindon que ces derniers, en accord avec une quantité d’aluminium plus élevée. Un traitement de type Rietvield a également été réalisé en 2006 sur l’engobe de trois fragments attribués à Montans (Sciau Ph. et al., 2006), et a mis en évidence la présence d’une proportion plus importante de corindon (46 %) et de quartz (23 %), mais une quantité plus faible d’hématite (30 %) et de spinelle (1.5%).

Il est clair que comme on l’a vu au chapitre précédent (II.D.3), le rapport Mg / Al influe directement sur le rapport spinelle / Corindon. Les engobes italiques se différencient ainsi nettement des sud-gaulois par la prépondérance de la phase spinelle et la quasi absence du corindon. Seuls les engobes de l’atelier d’Aspiran, qui contiennent plus de magnésium que ceux des autres centres, se rapprochent minéralogiquement parlant des sigillées italiques.

Comme cela avait déjà été constaté (Dejoie C. et al., 2005), la matrice vitreuse contribue au diagramme de diffraction sous forme d’une bosse très large qui augmente le bruit de fond entre 0.10 et 0.17 en sinθ/λ. Même si elle est difficilement quantifiable, son intensité est proportionnelle à la quantité de phase amorphe. Or si l’on regarde les diagrammes obtenus pour ces différents ateliers on peut constater que cette large bosse est plus marquée pour les échantillons de la Graufesenque et de ces ateliers satellites (Le Rozier, Espalion et Aspiran), que pour tous les Italiques, ceux de Montans et également de Carrade, ce qui témoigne d’une plus forte proportion de la phase amorphe.

Figure III.D.9 : Diagrammes de diffraction des rayons X, I = f(sinθ/λ) (λCuKα), réalisés au CEMES sur l’engobe de fragments de sigillées attribués aux ateliers d’Espalion, de Carrade, du Rozier et d’Aspiran (Q : quartz, H : Hématite, S : Spinelle, C : Corindon, An : Anorthite et P : Pyroxène).

Les études précédentes réalisées en 2005 et 2006 sur les engobes de sigillées de La Graufesenque et de Montans, ont permis d’estimer la proportion de phase vitreuse qu’ils contiennent : pour La Graufesenque, elle représente environ 85% de la masse totale de

l’engobe, mais seulement 75% environ pour Montans (Dejoie C. et al. 2005 et Sciau Ph. et al. 2006). Les analyses réalisées par EELS (spectroscopie de perte d’énergie des électrons), lors de cette même étude (Sciau Ph. et al. 2006), ont également permis d’évaluer la composition chimique de cette matrice vitreuse. Elle est principalement constituée d’oxygène, de silicium et d’aluminium (dans un rapport relativement constant d’un atome d’aluminium pour quatre de silicium), mais également de potassium et de calcium en très faible proportion et répartis de façon hétérogène. Aucun métal de transition (Ti, V, Cr, Mn, Fe, Co, Ni, Cu) n’a été détecté, ce qui implique une certaine transparence de la matrice vitreuse.

Figure III.D.10 : Diagrammes de diffraction des rayons X, I = f(sinθ/λ) (λCuKα), réalisés au CEMES sur l’engobe de fragments de sigillées attribués à l’atelier de Montans et retrouvés sur ce site (Q : quartz, H : Hématite, S : Spinelle, C : Corindon, An : Anorthite et P : Pyroxène).

Ces résultats ont permis d’expliquer en partie pourquoi les engobes des productions de la Graufesenque présentent un aspect généralement plus brillant et de meilleure qualité que ceux de Montans. Ce sont les liaisons Si-O qui forment le squelette et donc la cohérence du

verre. Seule une quantité limitée d’atome de silicium peut donc être remplacée par de l’aluminium. Les engobes de Montans contiennent une plus faible proportion de silicium et une trop grande quantité d’aluminium qui ne leur permettent pas de former, même à haute température, autant de phase vitreuse qu’à la Graufesenque, d’où l’aspect plus terne de ces sigillées (Dejoie C. et al. 2005). Pour le fragment de la Graufesenque qui présente un engobe très brillant, la large bosse caractéristique de la phase amorphe est effectivement plus intense que pour les autres échantillons attribués à cet atelier (Figure III.D.8).

III.D.2.b) Analyse par microdiffraction des rayons X sur source