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Un siècle de débats autour du Liber de episcopis Mettensibus

D. LES INTERPRÉTATIONS DU LIBER

1. Un siècle de débats autour du Liber de episcopis Mettensibus

1. Un siècle de débats autour du Liber de episcopis Mettensibus

Il n’a jamais existé au Moyen Âge de traités théoriques cherchant à définir les caractéristiques du genre connu sous le nom de gesta episcoporum et que les historiens médiévaux auraient cherché à imiter servilement. Ce sont les chercheurs modernes, Michel Sot en tête, qui ont dégagé les aspects communs à un certain nombre d’ouvrages consacrés à l’histoire des lignées épiscopales1 ; chaque texte gardant son originalité et sa spécificité. Il est donc difficile de juger une œuvre ancienne suivant un modèle reconstruit par la recherche scientifique. Il faut d’autre part ajouter que la définition d’un genre littéraire passe souvent à l’époque médiévale par le biais d’exemples concrets qui font autorité. Les formulaires de lettres des chancelleries en sont une bonne illustration. Il a cependant existé au Moyen Âge, dans le domaine qui nous intéresse, un modèle reconnu dans toute la Chrétienté latine et qui a pu servir de référence à tous les historiens qui ont voulu restituer l’histoire des évêques d’un diocèse. Il s’agit du Liber Pontificalis, une histoire de la Papauté qui connut une très large diffusion2. Dans cette perspective, il paraît donc judicieux de se demander jusqu’à quel point Paul Diacre a tenté de se conformer à la trame fournie par le livre romain.

Il faut ajouter enfin que la structure de certaines œuvres du lettré frioulan ne se laissent pas facilement appréhender comme le prouvent les débats sans cesse réactivés autour de l’Histoire des Lombards, à tel point que la question de savoir si cet ouvrage est complet ou inachevé n’est toujours pas tranchée. L’originalité de Paul Diacre va ainsi de pair avec les problèmes rencontrés par les chercheurs pour qualifier le plan et l’organisation de ses travaux historiographiques. Les débats tenus depuis plus d’un siècle autour du Liber de episcopis

mettensibus illustrent parfaitement ces difficultés.

1 Michel Sot, Gesta abbatum, gesta episcoporum, coll. typologie des sources du Moyen Age Occidental, Turnhout, 1981.

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Paul Diacre, le Liber Pontificalis et le développement des Gesta episcoporum en Gaule

Paul Diacre a pendant longtemps été considéré comme le précurseur, qui serait à l’origine du développement et de l’épanouissement d’un nouveau genre historiographique en Gaule à l’époque carolingienne : les gesta episcoporum, composés sur le modèle du Liber

Pontificalis. Cette opinion est apparue très tôt au sein de l’érudition moderne, et l’éditeur du Liber de episcopis Mettensibus, Georg Pertz, avance dans sa notice introductive que

« Paul Warnefrit, diacre de l’église d’Aquilée… l’année 784 rédigea, à Metz à ce qu’il semble, un libelle portant sur les gestes des évêques de Metz, à la demande d’Angilram l’évêque de Metz et archichapelain du roi Charlemagne. Il imita pour cela le Liber Pontificalis, célèbre déjà depuis un certain temps…»1.

Tout lecteur potentiel de l’édition de G. Pertz, qui rappelons-le, fait toujours autorité, est donc amené à prendre acte du fait que Paul Diacre s’est efforcé d’imiter le Liber

Pontificalis, et qu’il a tenté de composer des gesta episcoporum malgré la pauvreté de ses

sources. Or, le brillant savant allemand n’a pas jugé bon d’appuyer ces assertions sur des arguments précis. Son point de vue s’est cependant transformé en lieu commun qui a été accepté et repris par les historiens de la fin du XIXe siècle et du début du XXe siècle, comme le prouvent les premières lignes de l’édition critique des Gesta episcoporum Mettensium du XIIe siècle. En écho à son collègue des Monumenta Germaniae Historica, Georg Waitz écrit en effet que

« L’évêché de Metz fut le premier de ce côté des Alpes à connaître une description des gestes de ses prélats. Ce fut l’œuvre de Paul Diacre qui travailla à la demande d’Angilram, alors qu’il résidait à la cour de Charlemagne… »2.

1 PERTZ, M.G.H., SS., t.II, p.260 : « Paulus Warnefridi, Aquileiensis ecclesiae diaconus… anno 784, petente

Angilrammo Mettensi episcopo et Karoli regis archicappellano, Mettis ut videtur, libellum de Gestis episcoporum Mettensium conscripsit. Imitatus est in eo Gesta pontificum Romanorum, iam tunc a longo tempore inclyta...».

2 Waitz, M.G.H., t.X, p.531: « Mettensis episcopatus cis Alpes primus res ab antistilibus gestas vidit descriptas,

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Le rapprochement de l’œuvre de Paul Diacre avec le genre des gesta episcoporum se retrouve dans les travaux portant sur l’historiographie médiévale au cours du XXe siècle et lorsque F. L. Ganshof s’est efforcé de dresser un tableau des œuvres à caractère historiographique composées sous les dynasties mérovingienne et carolingienne1. Il fait du

Liber de Paul Diacre, le point de départ du développement de l’historiographie épiscopale en

Gaule2. Cette idée a été reprise et même amplifiée par les travaux de Michel Sot, qui s’est livré à une étude systématique du genre littéraire connu sous le nom de gesta episcoporum3. Sans tomber dans les simplifications, puisqu’il ne passe pas sous silence l’existence du dernier chapitre des Libri Historiarum de Grégoire de Tours consacré aux pontifes tourangeaux, l’historien français fait cependant de Paul Diacre le précurseur de la composition de gesta « de ce côté-ci des Alpes ». Michel Sot entendait en effet montrer que les gesta

episcoporum étaient un genre carolingien, qui s’épanouit principalement entre Loire et Rhin

avant de connaître des développements ultérieurs dans l’Empire des Ottoniens4. Or Paul Diacre, un des plus grands lettrés du haut Moyen Âge, véritable trait d’union entre la culture italienne et la cour de Charlemagne, semblait tout désigné pour assumer la responsabilité de l’introduction d’un nouveau genre historiographique en Gaule. Dès lors, la cause était entendue : Paul Diacre, avait bien tenté de se conformer au modèle de rédaction fourni par le

Liber Pontificalis, et les imperfections et la brièveté de son ouvrage devaient être mises sur le

compte de sources lacunaires. D’autre part, l’historien lombard était à l’origine de la floraison de gesta episcoporum qui caractérisa l’époque carolingienne dans une aire géographique située entre Loire et Rhin.

Une première remise en cause de ce schéma, formulée dès la fin du XIXe siècle, fut l’œuvre de Louis Duchesne, grand spécialiste des listes épiscopales de l’ancienne Gaule et du

Liber Pontificalis. Dans la conclusion de son étude consacrée à cet ouvrage5, Duchesne tente de mesurer la postérité du livre romain, et il évoque l’œuvre de Paul Diacre avec des mots très durs : « C’est une compilation d’un intérêt médiocre, où, sauf pour quatre évêques, saint

Clément, saint Auctor, saint Arnoul et saint Chrodegang, on ne trouve guère autre chose que le nom et l’ordre de succession des pontifes de l’église messine. Le rapprochement de cet ouvrage avec le livre pontifical romain ne pourrait pas se justifier, si la notice du dernier

1F. L. Ganschof, « L’historiographie dans la monarchie franque sous les Mérovingiens et les Carolingiens », dans La storiografia altomedievale. Settimane di studio del centro italiano di studi sull’ Alto Medioevo, 10-16

avril 1969, p.631-685, n° XVII, t.2, Spolète, 1970.

2 Ibid., p.656-657.

3 M. Sot, Gesta abbatum, gesta episcoporum, Typologie des sources du Moyen Age occidental, Turnhout, 1981. 4 Ibid., p. 33-35.

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évêque, saint Chrodegang, n’était calquée sur celle des papes, dont elle reproduit le cadre, l’ordre et la formule »1. En dépit de sa dureté, l’analyse de Duchesne est très pertinente puisqu’elle rejette l’idée qui veut que Paul Diacre se serait attaché à calquer son œuvre sur le modèle du Liber Pontificalis. Elle ne nie cependant pas que l’ouvrage romain ait pu avoir une influence limitée sur le travail de l’érudit lombard. Cependant ces observations très perspicaces ne rencontrèrent qu’un écho limité parmi les historiens français et allemands.

L’historien anglo-saxon Walter Goffart, spécialiste notamment de l’historiographie du haut Moyen Âge, opéra un renversement complet de perspective dans les années quatre-vingt du siècle dernier. Selon lui, Paul Diacre n’aurait pas cherché à imiter le Liber Pontificalis, sauf dans la partie finale de son œuvre consacrée à Chrodegang. Le modèle de composition dont se serait inspiré l’historien lombard présenterait beaucoup plus de subtilité et serait à rechercher du côté de la Genèse. L’œuvre tout entière, bien loin de privilégier l’histoire des évêques de Metz, aurait une portée symbolique très marquée et serait avant tout destinée à la famille carolingienne. En quelques années, les perspectives ont donc radicalement changé en ce qui concerne le Liber de episcopis Mettensibus de Paul Diacre : on est passé d’un ouvrage calqué sur le Liber Pontificalis, à une œuvre influencée de façon marginale par le livre romain et qui répondrait à des schémas de composition beaucoup plus ambitieux.

Il est temps de nous pencher à notre tour sur ces problèmes et de tenter d’analyser la structure interne du Liber de Paul Diacre, mais avant cela, il nous a paru important de donner quelques points de repère sur le Liber Pontificalis et sur le genre historiographique connu sous le nom de gesta episcoporum, en étudiant les caractéristiques fondamentales de ces textes et la chronologie de leur apparition dans le monde franc.

La première rédaction du Liber Pontificalis remonte au début du VIe siècle et l’ouvrage connut des continuations jusqu’au IXe siècle. Il n’est pas question de retracer ici les péripéties qui sont à l’origine de la composition de cette œuvre, en pleine période de domination ostrogothique sur Rome et l’Italie2. Il faut cependant s’arrêter quelques instants sur la structure interne de ce livre qui a servi de modèle au rédacteur de gesta episcoporum. Le Liber Pontificalis se présente comme une suite de notices classées dans l’ordre chronologique ; chaque pape depuis saint Pierre a droit à une notice, qui fournit généralement

1 Ibid., p.215.

2 Nous renvoyons aux travaux de Louis Duchesne, Etude sur le Liber Pontificalis, Paris, 1877. Voir également l’article de Françoise Manfrin, Liber Pontificalis, dans le Dictionnaire historique de la Papauté, sous la direction de P. Levillain, p.1042-1043, Paris, 1994.

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le même type d’information : le nom et le rang du pontife, son lieu de naissance et son ascendance, la durée de son règne, les décrets qu’il a pris, les constructions mises en chantier, les ordinations qu’il a célébrées, et enfin sa date de décès ainsi que le lieu où repose son corps1.

Cette trame ainsi définie appelle plusieurs remarques. Premièrement, l’histoire de Rome et dans une certaine mesure celle de la Chrétienté s’identifient complètement à la lignée des papes. Les auteurs de gesta episcoporum n’ont pas eu de mal à transposer ce schéma dans le cadre de leur cité au moyen de quelques adaptations. L’évêque est représenté comme le père de la communauté chrétienne, son protecteur et son intercesseur auprès des puissances célestes. Michel Sot a attiré l’attention sur le vocabulaire utilisé par les rédacteurs de gesta pour désigner leurs pontifes, qui renvoie souvent au champ lexical de la famille2. D’autre part, ces auteurs insistent plus sur la sainteté de la lignée épiscopale, qui se doit d’être ininterrompue et orthodoxe, que sur un prélat en particulier. Même les mauvais évêques ont leur place dans les gesta dans la mesure où ils constituent des preuves a contrario de la sainteté de la lignée. De plus, la recension des lieux autour desquels s’enracine la mémoire des évêques, aboutit à la présentation d’une véritable géographie du sacré à l’intérieur de la cité3.

Une autre caractéristique de ces ouvrages doit être mentionnée : les gesta episcoporum soutiennent souvent les revendications matérielles des églises. Au souci de montrer la sainteté de la lignée épiscopale se mêlent donc des préoccupations matérielles plus immédiates. On constate en effet souvent que la rédaction est contemporaine d’une remise en ordre du temporel épiscopal ou de l’existence de menaces contre les biens fonciers appartenant aux églises. Aussi les rédacteurs de gesta ont-ils recours à plusieurs procédés afin d’affirmer les droits de l’évêque et de sa communauté. Ils n’hésitent pas, par exemple, à retranscrire le contenu de chartes, ou à rappeler le souvenir des liens qui unissent les saints évêques à certains domaines ou bâtiments menacés. Arguments juridiques et arguments hagiographiques

1 Sot, [1981], p.32-33.

2 Michel Sot, « Historiographie épiscopale et modèle familial au IXe siècle », dans les Annales E. S. C., Paris, p.443-446, mai Juin 1978.

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se juxtaposent donc pour faire des gesta episcoporum des instruments efficaces au service des communautés ecclésiastiques1.

Le Liber Pontificalis connut un énorme succès pendant tout le Moyen Âge, à tel point qu’il est courant de retrouver sa trace dans les grandes bibliothèques épiscopales et abbatiales de l’Occident médiéval2. Mais cette diffusion fut lente durant le haut Moyen Age.

Un pèlerin revenu de Rome à la fin du VIe siècle, en apporta un exemplaire à Tours alors que Grégoire, l’évêque de cette cité, était sur le point de terminer la rédaction de ses

Libri Historiarum3 . L’historien tourangeau en profita pour ajouter dans le dixième et dernier livre de son œuvre, un passage consacré aux pontifes tourangeaux, calqué sur le modèle du

Liber Pontificalis4. Il s’agit incontestablement de la première tentative d’imitation du prototype romain : chaque évêque dispose d’une notice qui est classée dans l’ordre chronologique. Grégoire de Tours s’est efforcé de redonner, pour chacun de ses prédécesseurs, le même type d’informations que l’on trouve dans le Liber Pontificalis : ainsi il donne dans la plupart des cas, le nom du souverain contemporain de l’évêque, la durée de son pontificat avec mention éventuelle de vacances, et enfin son lieu de sépulture. Le dixième livre des Histoires de Grégoire de Tours ne fut cependant pas imité et aucun auteur à l’époque mérovingienne en Gaule ne semble avoir marché sur les traces du saint pontife.

Il faut dire que l’ouvrage de l’historien tourangeau a rarement été diffusé sous sa forme complète, et il n’existe qu’un seul manuscrit contenant l’intégralité du texte. Ce témoin date du XIe siècle provient du Mont Cassin. Dès le siècle qui a suivi sa rédaction, l’œuvre de Grégoire a connu d’importantes altérations qui ont souvent eu comme conséquence la disparition du livre X consacré aux évêques de Tours. A titre d’exemple, l’abréviateur anonyme du VIIe siècle, dont le travail se retrouve dans 6 manuscrits des VIIe et VIIIe siècles, a délibérément écarté les quatre derniers livres des Histoires, afin de ne pas mentionner l’alliance burgondo-austrasienne sous la prédominance du roi burgonde Gontran. Il a également effacé dans les six premiers livres, bon nombre de chapitres relatifs à l’Eglise afin de mettre l’accent sur les faits et gestes des rois mérovingiens. Cet abréviateur peut être à

1 Michel Sot, « Arguments hagiographiques et historiographiques dans les Gesta episcoporum », dans

Hagiographies, culture et sociétés, IVe- XIIe siècle, Actes du colloque organisé à Nanterre et à Paris du 2 au 5

mai 1979, p.95-104, Paris, 1981.

2 Guenée, [1980], p.250 ; avec 68 manuscrits dénombrés, Le Liber Pontificalis fait partie des succès du Moyen Âge.

3 Sot, [1981], p.33. 4

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juste titre considéré, non comme le premier historien de la France, mais comme le premier historien de la monarchie franque1.

On sait d’autre part que Bède, dans la premier tiers du VIIIe siècle, eut sous les yeux un exemplaire du Liber Pontificalis, qu’il utilisa pour dresser son martyrologe et pour composer son Histoire Ecclésiastique du peuple anglais. Les liens tissés entre la papauté et la jeune église anglo-saxonne à partir de l’époque de Grégoire le Grand, expliquent dans une large mesure la présence du livre romain dans une contrée aussi éloignée de l’Urbs. Il est à noter que si Bède se sert du Liber Pontificalis, comme source d’informations sur Rome, il n’a jamais cherché à imiter la structure de cet ouvrage, que ce soit pour le compte du diocèse d’York ou pour celui de son monastère de Jarrow2.

Les gesta episcoporum réapparaissent et se multiplient en fait à partir de l’époque carolingienne. Il est inexact de dire que ce genre littéraire est passé d’Italie en Gaule, car la péninsule ne donna naissance à aucune œuvre proche des gesta episcoporum avant le Pontifical d’Agnellus de Ravenne au IXe siècle, et encore, son exemple fut très peu suivi3. En fait, ce genre historiographique, d’inspiration romaine, trouva surtout un terrain d’élection dans l’aire culturelle située entre Loire et Rhin. Outre le cas du Liber de episcopis

Mettensibus de Paul Diacre, sur lequel nous aurons à revenir, il faut mentionner la

composition de pareilles œuvres au Mans et à Auxerre4. Dans la cité sarthoise, l’évêque Aldric, formé à l’école cathédrale de Metz, fut un important dignitaire de la cour de Louis le Pieux. Il fit rédiger dans les années 830, un dossier afin de défendre le temporel de son église. Ce corpus comprend, outre de nombreux faux, une imitation du Liber Pontificalis5. Une autre œuvre inspirée du livre romain vit le jour à Auxerre vers 873-876, sous la plume des chanoines Alagus et Rainogala, qui faisaient partie de ce que les historiens modernes ont appelé « l’école d’Auxerre », très active sur le plan culturel sous Charles le Chauve et ses successeurs. Là aussi, les deux auteurs connaissent le Liber Pontificalis, et ils s’en inspirent

1

Voir les travaux de Martin Heinzelmann, notamment : « Grégoire de Tours « père » de l’histoire de France ? », dans Historiens de France, Historiens de la France. Actes du colloque international de Reims, 14 et 15 mai 1993, sous la direction de Y. M. Bercé et P. Contamine, p.19-45, Paris, 1994. Voir également Pascale Bourgain et Martin Heinzelmann, « L’œuvre de Grégoire de Tours. La diffusion des manuscrits », dans Grégoire de Tours

et l’espace gaulois. Actes du congrès international de Tours 3-5 novembre 1994, sous la direction de N. Gauthier

et H. Galinié, p.273- 317, Tours, 1997.

2Duchesne, Etude sur le Liber Pontificalis..., p.214-215; Sot, [1981], p.33. 3 Picard, [1988], p.543-546.

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Actus pontificum Cenommanis in urbe degentium, éd. G. Busson et A. Ledru, Le Mans, 1902 ; Gestes des

évêques d’Auxerre, éd. et traduction sous la direction de Michel Sot, Les Belles Lettres, Paris, 2002.

5 Voir Philippe le Maitre, « évêques et moines dans le Maine, IVe- VIIIe siècle », dans La christianisation des

pays entre Loire et Rhin (IVe- VIIe siècle), Revue Historique de l’Histoire de France, Paris, janvier- juin 1976, 2e

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pour reconstituer l’histoire des évêques d’Auxerre. Il faut également mentionner l’apparition des premiers gesta consacrés à des abbés, avec l’œuvre composée à la demande de l’abbé de Fontenelle, Ansegise, vraisemblablement entre 823 et 833. Le genre s’épanouit ensuite et des

gesta sont rédigés à la fin du IXe siècle et au Xe à Saint-Gall, à Lobbes et à Reims où Flodoard donne à son travail une ampleur qui dépasse de beaucoup le simple cadre d’une œuvre portant sur les évêques rémois1. L’étude des manuscrits montre que beaucoup de copies ont été réalisées dans le Regnum Francorum au IXe siècle, peut-être à partir d’un exemplaire rapporté par l’entourage de Charlemagne après le couronnement de 8002. L’influence du livre romain sur la culture franque ne date vraiment que de cette époque.

Revenons maintenant à l’exemple messin. Paul Diacre possède une bonne connaissance du Liber Pontificalis qu’il a utilisé comme source pour composer son Histoire

Romaine, sa Vita du pape Grégoire le Grand (dont la date de rédaction est difficile à préciser),

et enfin son Histoire des Lombards. Quand et comment le lettré lombard a-t-il eu connaissance du livre romain ? Il est vraisemblable qu’un exemplaire se trouvait soit à la cour de Pavie où Paul a résidé pendant la première partie de sa vie, soit au Mont Cassin. Paul s’est