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Caractérisation du secteur de la formation professionnelle et champs théoriques

Position 3 : dans cette catégorie se retrouvent des organismes de formation positionnés sur un besoin récurrent en compétences et bénéficiant d’un bon niveau de prise charge au regard du

1.3. Théorie de la qualité : normaliser la meilleure façon de faire

1.3.2. Le service, un produit particulier

La notion de service a notamment été défini par Judd (1964) : « les services marchands sont les transactions d’une entreprise ou d’un entrepreneur avec le marché lorsque l’objet de cette

transaction est autre qu’un transfert de propriété d’un bien tangible ». La notion de non-transfert de propriété reste centrale dans la compréhension de la nature du service (Kotler & Dubois, 2000 ; Lejeune, 1989), même si ce dernierpeut avoir une partie tangible, matérielle. Un concept important a émergé des recherches sur les prestations de service, celui de servuction. La servuction est un néologisme, conçu à partir des termes « service » et « production », proposé par Eiglier et Langeard (1987) qui permet de désigner le processus de production d’un service. Ces mêmes auteurs définissent la servuction comme « l’organisation systématique et cohérente de tous les éléments physiques et humains de l’interface client-entreprise nécessaires à la réalisation d’une prestation de service dont les caractéristiques commerciales et les niveaux de qualité ont été déterminés ». Le terme est très utilisé dans les recherches en marketing et dans l’étude de la participation du client qui est inséparable de la production des services. La notion de participation dépend grandement du service consommé. En ce sens les définitions proposées par les auteurs varient. Pour certain, la participation se définit comme les informations et les efforts fournis par le client en amont de la consommation de la prestation (Kelley, Donnelly & Skinner, 1990). Cette définition est trop restreinte car elle implique une consommation passive durant la prestation. Ce qui s’adapte mal, par exemple, à une prestation de formation. C’est pourquoi dans d’autres tentatives de définition on retrouve la question de l’implication du client dans la production et la délivrance du service (Dabholkar, 1990 ; Bettencourt, 1997 ; Rodie & Kleine, 2000 ; Hsieh & Yen, 2005), mais également dans sa définition ou spécification (File, Judd, & Prince, 1992 ; Lusch & Vargo, 2006 ; Vargo & Lusch, 2008). A chaque auteur nous retrouvons une définition dans laquelle varie la place de la conception (définition, co-design), de la co-production et de la participation à la délivrance, sans qu’une définition unique et claire du concept n’ait émergé à ce jour au sein de la communauté scientifique (Plé, Lecocq & Angot, 2010).

Le service, en soi, est immatériel et intangible, même s’il n’existe pas de service « pur » au sens où chaque service recouvre une dimension tangible et une dimension intangible (Flipo, 1989). Le service contient nécessairement une composante matérielle, laquelle permet de classer les services selon leur dominante tangible ou intangible (Eiglier, Langeard & Mathieu, 1997). Dans la formation, les supports, le matériel de formation, consommé ou non, l’accès à des ressources pédagogiques, la remise d’une attestation ou d’un parchemin, sont autant de composantes matérielles qui soutiennent la réalisation du service. Cependant, ce service sera considéré comme plutôt intangible comparé à un service d’hôtellerie ou de restauration. Cette notion est importante car le client va s’appuyer sur ces éléments tangibles pour évaluer la qualité du

service en amont et en aval, mais également de manière globale. Il existe ainsi une indivisibilité entre les éléments tangibles et intangibles du service (Eiglier, Langeard & Mathieu, 1997).

Figure 18 - La recherche de tangibilisation du service (Eiglier, Langeard & Mathieu, 1997)

Un autre élément important concernant l’évaluation de la qualité des services est sa variabilité. Il n’est pas possible de standardiser une action de formation, sauf si l’on inclut les MOOC dans cette classification. En effet, même le e-learning implique un accompagnement, un tutorat personnalisé. Contrairement aux produits qui peuvent être matériellement standardisés, notamment grâce à la métrologie, aucune norme métrologique ne pourra être applicable à un service ou à une action de formation. Les spécificités de la prestation de service « impliquent l’impossibilité d’inspecter et de mesurer la qualité du service comme un bien à la sortie de son processus de fabrication » (Boyer & Nefzi, 2009). Ce constat complexifie la notion d’écart et oblige à regarder la qualité d’un service à travers son processus de production (contrôle du comment) et de la perception des clients qui consomment le service. Sur ce point, la valeur accordée à un service, et/ou mise en avant lors de sa commercialisation, dépend plus du secteur dont il dépend que de la nature du service (Décaudin & Lacoste, 2006). Cela implique que la proposition de valeur et la perception de sa qualité pourraient varier selon le secteur d’activité dans lequel se situe une action de formation, le marché visé (commerciaux dans l’immobilier, les responsable qualité dans l’automobile, les managers dans le service…) et sa nature (thématique, contenu, modalités).

Figure 19 - Les quatre caractéristiques des services (Eiglier, Langeard & Mathieu, 1997)

De manière générale, il est admis que l’évaluation de la qualité repose sur des résultats et des processus (Parasuraman, Zeithaml & Berry, 1985). C’est-à-dire qu’il est important de définir comment la qualité du service est perçue par le client et de quelle manière cette qualité est influencée, construite (Grönroos, 1984). La qualité du service est mesurée sur la base de la concordance entre le niveau du service et les attentes du client (Lewis & Booms, 1983), c’est -à-dire « La différence entre les attentes du consommateur concernant la performance du service et sa perceptions du service reçu » (Asubonteng, Mc Cleary & Swane, 1996). La qualité perçue d’un service dépendant par ailleurs de l’expérience du client, de son vécu : « la satisfaction liée à une expérience de service spécifique, en fusionnant avec les évaluations nées d’expériences précédentes, influence la perception globale de qualité d’une entreprise de service » (Llosa, 1996). Au-delà de ce « paradigme de la confirmation des attentes » (Sabadie, 2003), il apparaît crucial de distinguer les concepts de satisfaction et de qualité perçue. Sabadie rappelle trois principes pour distinguer la qualité et la satisfaction :

1) La satisfaction est purement expérientielle, elle résulterait de l’état d’esprit du client suite à une prestation de service tandis que la qualité concernerait la prestation en elle-même ;

3) La satisfaction est définie comme étant à la fois cognitive et affective, la qualité perçue étant essentiellement cognitive.

Une manière simple de schématiser la qualité des services est de la faire reposer sur 4 facteurs qui concourent par ailleurs à la construction de l’image de l’organisation prestataire :

- Le service attendu : l’attente du client construite notamment par le discours commercial, le discours publicitaire et par le « bouche à oreille » ;

- La perception du service : les éléments tangibles et intangibles sur lesquelles se basent le client pour évaluer la qualité du service, mis en perspective avec son vécu (expérience similaire précédente) et son attente initiale ;

- La qualité technique : pour la formation, cette notion pourrait recouvrir le contenu et la manière de le dispenser. Soit le niveau technique de la formation, soit la technique de transmission des compétences et des savoirs.

- La qualité fonctionnelle : pour le client c’est l’usage du service. Pour la formation professionnelle cela pourrait renvoyer à la mise en pratique des compétences, a posteriori, et, en temps réel, au fait que le bénéficiaire trouve des réponses à ses problématiques professionnelles.

Ces quatre points peuvent se recouper et dépendent du bénéficiaire qui mettra l’emphase sur les éléments tangibles ou intangibles, techniques ou fonctionnels en fonction de son expérience et de sa compréhension de la manière dont ses propres attentes peuvent être comblées.

Figure 20 - The service quality model (Grönroos, 1984)

Malgré le caractère unique de chaque client, Parasuraman, Berry et Zeitaml (1991) ont établi, au travers de leurs recherches, 5 dimensions dans les attentes des clients d’une prestation de service (connu comme la mesure « ServQual ») et dont la satisfaction dépend grandement des processus mis en place par le prestataire. Il s’agit de :

- La fiabilité : la capacité à fournir le service attendu ;

- La tangibilité : tous les attraits matériels qui entourent ou concourent à la prestation de service : équipement, personnel, matériel (ex : salle de formation, tenue du formateur, qualité matérielle des supports…) ;

- La réactivité : la volonté d’aider le client et de lui fournir promptement un service ; - L’assurance : la connaissance et la courtoisie des employés du prestataire et leur

capacité à mettre le client en confiance ;

Cette mesure ServQual a été qualifiée de « modèle général, profondément marqué par la vision marketing des auteurs, qui permet d’identifier les principales étapes de l’élaboration d’une politique de qualité dans une entreprise de service, et les principales raisons de défaillances d’une telle politique » (Eiglier, Langeard & Dageville, 1989) mais qui « ne peut constituer une mesure générique susceptible d’être appliquée à n’importe quel service » (Boyer & Nefzi, 2009). De plus ce modèle multi-critères est mis en difficulté par la variabilité des attentes des clients.

La qualité des services recoupe également un enjeu majeur lié au management des « personnes employées par l’entreprise de service et dont le travail requiert d’être en contact direct avec le Client » (Eiglier, 2002), qui ont un rôle opérationnel et relationnel (Boyer & Nafzi, 2009). L’idée étant que l’absence d’homogénéité des attentes des clients doit être compensée par une autonomie accrue des employés afin de favoriser l’émergence de solutions adaptées (Callot, 2002). Ainsi, deux facteurs déterminants pour le succès commercial d’une entreprise sont la motivation des employés et la manière dont cette motivation permet aux employés de satisfaire les clients (Heskett, 1987). Mais il peut apparaître délicat, d’un point de vue de pilotage de la qualité, de mettre en place un système qui garantisse une homogénéité de la prestation (garantie de service) sans « paralyser » la prise d’initiative et la capacité d’adaptation des collaborateurs, nécessaires à la prise en compte des attentes particulières des clients (Meyronin & Ditandy, 2007). Multidimensionnelle, la qualité du service va dépendre de systèmes et procédures d’une part et des interactions du personnel avec le client d’autre part (Boyer & Nefzi, 2009).

Figure 21 - La roue de la qualité de service (Callot, 2002, d’après les travaux de Heskett, 1987)