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Caractérisation du secteur de la formation professionnelle et champs théoriques

Position 3 : dans cette catégorie se retrouvent des organismes de formation positionnés sur un besoin récurrent en compétences et bénéficiant d’un bon niveau de prise charge au regard du

1.3. Théorie de la qualité : normaliser la meilleure façon de faire

1.3.3. Apports de la qualité dans le secteur de la formation professionnelle

Un défi émerge lorsqu’il s’agit de considérer la question de la qualité dans un secteur comme la formation professionnelle, que l’on s’en tienne à l’approche classique des grands penseurs ou que l’on considère la difficulté à évaluer la qualité des services. L’approche retenue par le cadre qualité du décret du 30 juin 2015 est celui de l’analyse et du contrôle des pratiques. Si certaines exigences mènent à la production de données chiffrées (enquête d’insertion, questionnaire de satisfaction, réussite aux examens), la conformité ne vient pas de l’analyse des données et des écarts par rapport à une valeur référence mais de l’existence ou non de la mise en place des outils de récolte des données. Dans cette approche de la qualité, peu de place est offerte à la mise en place d’un protocole de contrôle de la qualité par l’analyse statistique, telle que recommandée par Ishikawa.

Pourtant, rien ne s’oppose à la mise en œuvre d’une démarche qualité dans la mesure où « Il ne s’agit donc pas seulement de répondre efficacement à une demande donnée et normée, mais de mobiliser tout le personnel vers la définition du service qui satisfera le client, de rationaliser la chaîne de production en partant de cet objectif, d’en rendre le processus transparent, de repérer

des indicateurs de performance et de les assortir d’incitations (récompenses et punitions) à améliorer en permanence le service fourni » (Vinokur, 2006). Ainsi, si nous sommes conscients des facteurs de contingence propres aux organismes de formation qui influencent leur fonctionnement (Ngongang, 2013), les grands auteurs de la qualité ont proposé des principes méthodologiques dans lesquels il est possible de puiser (Zéro défaut, Amélioration Continue, Optimisation des processus, Collecte et exploitation des données).

De plus, si nous considérons, comme Beckford (2010), que la qualité dans le secteur des services n’est pas une question de standardisation et de contrôle mais qu’elle repose sur les compétences, les savoirs et l’éducation, alors la qualité de la formation constitue un double enjeu pour l’économie d’un pays. D’abord celui de considérer ce qu’est la qualité d’une action de formation, et quels sont les savoirs et les compétences mobilisés. Ensuite comment cette qualité contribue-t-elle de manière générale à la qualité de l’économie des services au niveau national. Cette approche semble cependant ouvrir un paradoxe quasi insoluble. La vérification de la qualité de la formation dépendrait de la vérification des compétences des acteurs des organisations délivrant les formations. Compétences qui elles-mêmes dépendraient, en grande partie, de la qualité de la formation reçue par ces acteurs, ce qui induirait de garantir la qualité des organismes à l’origine de ces formations… Ainsi, si l’approche par les compétences présente un certain intérêt, elle pose un problème d’opérationnalité évident à ce stade et elle ouvre une direction opposée à l’orientation prise par les pouvoirs publics.

« La notion de qualité de l’éducation conduit à s’interroger sur une question théorique plus vaste, celle de la définition du produit de l’éducation et de ses spécifications » (Chatel, 2006). Et pour cela il faut interroger la notion de client. Or, la question de savoir qui est le client de la formation n’appelle pas de réponse évidente. Pour catégoriser les parties prenantes il faut distinguer :

 le bénéficiaire qui suit la formation, techniquement le « stagiaire » de la formation professionnelle,

 le prescripteur qui autorise ou incite le stagiaire à suivre la formation, en général son employeur, et qui peut être co-financeur,

 le financeur : Organisme Collecteur, Etat, Régions, Pôle Emploi.

La mise en place d’une action de formation est généralement conditionnée à l’entente de ces trois parties sur la base du besoin du stagiaire et/ou du prescripteur, et de l’assentiment du

financeur dont la contribution est souvent déterminante pour la concrétisation du projet de formation. L’organisme de formation doit formellement fournir des gages de qualité à chacune de ces parties prenantes durant le processus de construction du projet de formation pour obtenir leur adhésion. S’il semble falloir satisfaire toutes les parties prenantes, il apparaît que, d’une part, leurs attentes et, d’autre part, leur pouvoir de négociation et de contrainte, ne sont pas les mêmes. Les financeurs ont le pouvoir de fixer la norme qualité tandis que les attentes des stagiaires et des prescripteurs vont faire l’objet d’une première négociation bilatérale qui influencera le choix de la formation et du prestataire.

Un schéma pourrait permettre d’illustrer la façon dont les attentes des parties prenantes s’agencent. L’organisme de formation ayant à gérer les zones d’intersection :

Figure 22 - Représentation des différentes parties prenantes de la formation professionnelle (Bensimhon & Miel, 2019)

Par ailleurs, pour revenir à la question du produit de la formation, nous soutenons qu’en cohérence avec l’intention des financeurs publics et des prescripteurs d’action de formation, la qualité renvoie ici à la qualité de la formation dispensée, et à ses effets sur les capacités réelles

des personnes dans l’exercice de l’activité professionnelle (Chatel, 2006). Mais l’évaluation des compétences en situation de travail, plusieurs mois après l’action de formation, sous la responsabilité du prestataire, n’est pas une option tant cela présente des difficultés opérationnelles. D’abord, sur la manière de les évaluer, et ensuite sur le coût important que cela représenterait et qui devrait être réintégré dans le coût de la formation, provoquant une inflation des prix contre-productive.

Cette étude de la théorie de la qualité nous renseigne sur la manière dont la normalisation peut s’opérer sous l’angle de la qualité. Par une spécification des produits, par la fixation de règles de production, en se focalisant sur la satisfaction des clients, ou par une combinaison de ces trois dimensions. Dans tous les cas, ces éléments vont nous aider à comprendre les enjeux de la normalisation de la qualité de la formation professionnelle, et son impact sur l’organisation du prestataire.