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Les sens littéral et historique de l’IRAY («UN») en tant que frère-soeur

LES SENS LITTERAL ET HISTORIQUE DE L’IRAY («UN»)

1- Les sens littéral et historique de l’IRAY («UN») en tant que frère-soeur

1-1- L’IRAY («UN») porte en lui le sens littéral en tant que frère-soeur

L‟IRAY («UN») entre Ralahady et Razafy est l‟IRAY («UN») en tant que frère-soeur. Ils sont «devenus» réellement frère-soeur, partout où ils sont, au sens littéral (et non au sens métaphorique) du mot car ils vivent du même et unique aina240 venant de Ravao et de Raly. Toutes les relations qui existent entre eux sont des relations guidées par cet IRAY («UN») en tant que frère-soeur. Cet IRAY («UN») en tant que frère-soeur n'est pas le fruit d'une imagination, mais il est fondé sur l’aina donné par Zanahary, donc sur la réalité. Ainsi, le concept IRAY («UN») porte en lui, en dessous de lui, au fond de lui quelque chose de strictement ontologique et non quelque chose relevant de l'imagination.

Ralahady et Razafy sont «devenus» frère-soeur. Ils le sont vraiment et

ontologiquement, au sens littéral du mot, car ils ont l‟IRAY («UN») en tant que frère-sœur.

Ici, toutes les implications de cet IRAY («UN») se trouvent confirmées dans leur sens littéral. Reprenons notre exemple sur Razafy et Ralahady liés par l‟IRAY («UN») en tant que frère- sœur :

1- Razafy et Ralahady sont «devenus» des personnes concrètes, des olona (au sens littéral du mot personne et olona) ;

240

Cf. Le lexique, le terme aina : ce qui fait que l'homme vit selon son développement normal, la vie la plus intime et la plus concrète d‟un être, signification n° : 1.

2- Razafy et Ralahady vivent du même aina241 venant de Raly et de Ravao (au sens littéral du mot aina242) ;

3- Razafy et Ralahady, quant à leur mode de relation, ils sont «devenus» vraiment et

réellement IRAY («UN») car ils vivent du même aina. Ils sont «devenus» aussi

«DIFFERENTS» car chacun a sa tête, sa personnalité, son histoire, son irremplaçable unicité, son originalité (au sens littéral du mot IRAY («UN») et DIFFERENT) ;

4- Razafy et Ralahady, quant à leur première origine, viennent de Raly et de Ravao, de leurs Ancêtres respectifs, voire de Zanahary (Dieu-Soleil). Quant à leur deuxième origine, ils viennent de Madagascar (au sens littéral du mot origine). 1-2- L’IRAY («UN») porte en lui le sens historique en tant que frère-soeur

Ce que nous venons de voir, dans le dernier paragraphe à propos du sens littéral, ne suffit pas encore à montrer tous les aspects de l‟IRAY («UN»). Ce terme porte également en lui le sens historique. En effet, ceux ou celles qui sont IRAY («UN») sont invité(e)s à vivre, dans l'espace et le temps, le sens littéral de leur IRAY («UN»). C'est là le sens historique de leur IRAY («UN»).

Pour notre exemple, Ralahady et Razafy sont invités à vivre - dans l'espace et le temps - le sens littéral de leur être IRAY («UN») en tant que frère-soeur. C'est le sens historique de cet IRAY («UN»). Rappelons que Razafy est née le 26 juin 1960, tandis que Ralahady le 25 décembre 1963. Depuis la naissance de ce dernier, voire depuis sa conception, Ralahady et Razafy sont désormais «devenus» frères. Cette réalité est irréversible historiquement parlant. L‟IRAY («UN») en tant que…s‟enracine toujours dans l'histoire. Autrement dit,

1- Razafy et Ralahady sont «devenus» des personnes concrètes, des olona (des personnes concrètes, des olona dans l'espace et le temps) ;

2- Razafy et Ralahady vivent du même aina, (souffle de vie, psychè) venant de Raly et de Ravao (aina vécu dans l'espace et le temps) ;

3- Razafy et Ralahady, quant à leur mode de relation sont «devenus» vraiment et

réellement IRAY («UN») car ils vivent du même aina. Ils sont aussi

«DIFFERENTS» car chacun a sa tête, sa personnalité, sa culture, son histoire, son

241

Cf. Le lexique, le terme aina, signification n° : 1.

irremplaçable unicité, son originalité (ils sont «devenus» IRAY («UN») et «DIFFERENTS» dans l'espace de temps) ;

4- Razafy et Ralahady, quant à leur première origine, viennent de Raly et de Ravao, de leurs Ancêtres respectifs, voire de Zanahary (Dieu-Soleil): origine à la fois divine et humaine. Quant à leur deuxième origine, ils viennent de Madagascar. (Madagascar existe sur la mappemonde).

1-3- Preuve de ces sens littéral et historique de l’IRAY («UN») : l’inceste coupe ontologiquement et historiquement l’IRAY («UN») en tant que frère-soeur

Pour l'inceste, il y a des définitions, des découpages différents pour chaque culture. Mais cette pratique est toujours prohibée selon des critères précis. Pour les Malgaches, il coupe carrément l‟IRAY («UN») en tant que frère-sœur, l‟IRAY («UN») en tant que père-fille, l‟IRAY («UN») en tant que mère-fils…

En outre, d'après les analyses de Robert DUBOIS, les Malgaches considèrent

également l'inceste non pas comme une faute mais un péché parce que ce mal est senti par eux comme violant la volonté de Zanahary, et condamné par Lui :

«Les hommes n‟ont pas la même conception du mal qu‟ils commettent. Les uns considèrent le mal non comme quelque chose dont Dieu s‟occupe, mais seulement comme quelque chose que les cohabitants condamnent; dans ce cas, le mal commis ne peut pas s‟appeler péché mais faute. Si personne ne remarque la faute d‟un homme, ce dernier ne peut être condamné et sa faute passe inaperçue. Mais, par contre, si le mal commis est senti par les hommes comme violant la volonté de Dieu, et condamné par Dieu, cette mauvaise action est alors considérée comme un péché. Les nations qui ont eu conscience du péché sont en petit nombre. Les Malgaches en font partie. Ils saisissent clairement que l‟homme qui détruit l‟IRAY («UN») :

transgresse l‟ordre venant du Zanahary (IV.I.4.h);

est sanctionné par Zanahary (IV.I.4.h);

ne peut être purifié que par le Zanahary (IV.I.4.d).

Si quelqu‟un commet un homicide, les gens disent : «C‟est étonnant, il ne craint pas le Zanahary. Si c‟est la crainte du Zanahary qui doit empêcher l‟homme de tuer son semblable, c‟est que c‟est bien Lui qui l‟interdit »243

.

Si jamais Razafy et Ralahady commettent le péché - l'inceste - ils cessent d‟être frère-sœur dans tous les sens (les sens littéral et historique). Ils détruisent leur IRAY

243 R. D

(«UN») en tant que frère-soeur ; leur IRAY («UN») en tant que frère-soeur est aboli. Ils ont un faux IRAY («UN») : l‟IRAY («UN») en tant qu‟époux-épouse : « Si ce sont des «apparentés» qui ont le malheur de s‟unir l‟un à l‟autre, ils acceptent, reconnaissent et fortifient leur DIFFERENCE: en effet, c‟est l‟aina d‟un homme et celui d‟une femme qui s‟unissent. Ils consolident leur DIFFERENCE, détruisent leur IRAY («UN») et leur état de frère-soeur»244. Autrement dit, la culture malgache souligne que la maîtrise sexuelle se situe au niveau de l‟aina et de la pensée. Lorsqu‟un homme désire une femme, il la désire en tant qu‟elle est d‟un autre aina et d‟un autre sexe que lui. Si l‟homme apprend qu‟elle est IRAY («UN») avec lui, son désir doit s'arrêter. L‟homme regarde sa soeur comme étant IRAY («UN») avec elle. Il regarde son épouse comme d‟aina et de sexe différents de lui. Le premier regard tend à éliminer tout désir d‟union sexuelle, le second le favorise. Il en est de même pour la femme.

Dans ce contexte culturel on peut formuler ainsi la morale sexuelle chrétienne : en dehors des époux légitimes, tous les hommes et femmes sont, aux yeux de Dieu, frères et soeurs (cf. He 2, 11).

Le mariage coutumier pour les Malgaches, le mariage sacramentel pour les chrétiens sont les fafy par lesquels Dieu coupe la parenté entre ces personnes et les établit époux et épouse.

En effet, pour établir à nouveau l‟IRAY («UN») en tant que frère-soeur, les Ancêtres malgaches instituent un rite d'ablution particulier : le fafy. Certains fafy coupent la relation de parenté entre les délinquants et la remplace par la relation conjugale. Autrement dit, à l‟occasion du rite du fafy, ce sont ces relations ontologiques que Zanahary modifie : des « pères-fils »245 sont établis « frères », des « frère-sœur », « époux-épouse ». Comme lors de la naissance, Zanahary les situe sur leur flux vital et cette situation nouvelle engendre et la suppression des anciennes relations conflictuelles et l‟existence de relations ontologiques nouvelles. Les délinquants sont passés à travers une mort-renaissace ; l‟une et l‟autre, bien que rituelles, sont réelles : elles ont atteint les personnes dans leur être même.

Razafy et Ralahady sont donc invités, pour être humains et pour élargir leur IRAY («UN»), chacun à leur tour, à prohiber l‟IRAY («UN») en tant qu'époux-épouse car ils sont déjà «devenus» IRAY («UN») en tant que frère-soeur. Ils ne forment qu‟UN SEUL ETRE par l‟IRAY («UN») en tant que frère-soeur. Pourquoi s'unir avec sa propre personne,

244 Ibid., p. 61. 245

Nous prenons ces termes dans leur sens classificatoire, les pères-fils comprennent les pères-filles, les mères fils, les mères filles.

son propre être?246 Leur IRAY («UN») en tant que frère-sœur est déjà une plénitude, capable de satisfaire les deux s‟ils le vivent avec amour. Comme l‟IRAY («UN») vient du non IRAY («UN»), la prohibition de l'inceste humanise l'homme et ouvre le champ aux autres IRAY («UN»), soit par un «UN en tant qu‟époux-épouse, soit par un IRAY («UN») par Fati-drà.