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Établissement des faits stylisés pour le Maroc

Section 1. Antécédents et mise en place du modèle économique colonial (1912-1956) (1912-1956)

1.1.2. Une régulation des usages entre complexité et paradoxes

1.2.1.1. Le secteur agricole

Il est trivial, mais néanmoins indispensable, de rappeler que la justification de la colonisation est avant tout économique. En effet :

« la principale justification pour une domination politique étrangère reposait sur la proposition que les institutions et coutumes marocaines étaient incapables, par elles-mêmes, de mettre en pratique le concept européen de progrès économique, c’est-à-dire le capitalisme » (Pascon, 1986 : 79)192.

L’effort de l’administration française se concentre sur le développement du secteur agricole qui nécessite, dans un premier temps, de domanialiser un grand nombre de terres — ce qui n’était pas sans poser de problèmes compte tenu de la diversité et de la complexité des statuts fonciers marocains. La stratégie coloniale au Maroc essaye de se distinguer de celle appliquée en Algérie,

192 [« The main justification for foreign political domination of Morocco rested on the proposition that

Moroccan institutions and customs were incapable, by themselves, of putting into practice the European concept of economic progress, i.e. capitalism. »]

laquelle est critiquée par Lyautey comme étant de courte vue. On estime que ce dernier encourageait une colonisation de moyens, en respect avec les accords de Protectorat et donc, évitant l’expropriation des terres des Marocains. Néanmoins, dans les faits, l’idée selon laquelle l’appropriation des terres s’est faite absolument sans violence et ne concernait que des terres sans maître est erronée (Pascon, 1986).

Dans un premier temps, la politique agricole coloniale se focalise sur le secteur des céréales, notamment le blé. En effet, l’administration française est persuadée d’une prédisposition marocaine pour la culture de céréales depuis l’antiquité (représentation du Maroc comme l’ancien « grenier de Rome ») (Swearingen, 1988). Notons tout de même que le blé dur représente la culture la plus développée dans le secteur agricole traditionnel.

L’accent mis sur la culture du blé tend à éloigner le spectre de la pénurie alimentaire en cette période de première Guerre mondiale. Une « politique du blé » est énoncée à partir de 1915 par le Comité consultatif pour le ravitaillement de la population civile, créé par le Ministère du commerce afin de développer la production alimentaire pour la métropole. La politique du blé au Maroc est notamment planifiée par Henri Cosnier, agronome et parlementaire193. Cette politique est accompagnée par des infrastructures et un réseau routier qui, en plus d’être des impératifs militaires, sont indispensables pour délivrer les semences, les fertilisants, les équipements agricoles et acheminer les récoltes (Swearingen, 1988). À partir de 1917 et jusqu’en 1931, les programmes de colonisation officielle sont établis. Ils favorisent les grandes exploitations : 97 % des exploitations sont supérieures à 150 hectares et l’exploitation type est d’environ 250 hectares (ce qui était néanmoins loin des 400 hectares recommandés par Cosnier) (1988 : 20). Cette colonisation agricole officielle concerne principalement la région de Fès-Meknès, la région du Gharb, et le Haouz avec 33 400 hectares colonisés au total pour ce dernier (Pascon, 1986 : 83). Swearingen (1988 : 20) note que : « la stratégie de Cosnier de convertir le Maroc en grenier pour la France corroborait le plan d’après guerre de développement de l’empire français d’outre-mer »194. Le tableau suivant montre que malgré le nombre limité de colons officiels, les superficies concernées sont considérables : 245 386 hectares pour 1 583 colons.

Cette politique du blé prévaut jusqu’à la crise agricole des années 1930. Elle se fonde sur quatre points principaux :

la mise en valeur de nouvelles terres pour la production de blé : les superficies dédiées à la production de blé passent de 1,9 millions d’hectares en 1918 à environ 3 millions d’hectares en 1929, soit une augmentation de 60 % ;

un meilleur prix de vente pour les céréales ;

193 D’où le nom de « Mission Cosnier » pour désigner la mission d’enquête qui a eu lieu au Maroc d’avril à

mai 1917.

194 [« The Cosnier strategy to convert Morocco into a breadbasket for France dovetailed with a post war

des subventions et des aides à la production avec, par exemple, une prime spéciale de 3 francs pour chaque quintal de blé tendre produit et une prime de 200 francs pour chaque hectare nouvellement aménagé ;

le développement du machinisme agricole : prime de 25 francs pour chaque hectare exploité à l’aide de machines agricoles (50 francs par hectare si recourt au tracteur).

La politique du blé visait à encourager une production céréalière mécanisée que Pascon (1986 : 99), pour le cas du Haouz, n’hésite pas à qualifier « d’agriculture capitaliste » puisque basée sur : (i) des investissements programmés ; (ii) des assolements contraints par les débouchés commerciaux ; (iii) un salariat agricole permanent, aidé de travailleurs saisonniers temporaires selon les saisons.

Tableau 28 : Colonisation agricole officielle au Maroc (1917-1931)

Année Nombre de colons Superficies (ha)

1917-18 48 7 607 1919 165 12 119 1920 48 10 810 1921 73 17 480 1922 48 9 400 1923 82 14 923 1924 172 22 674 1925 54 27 994 1926 271 34 866 1927 147 30 331 1928 154 17 880 1929 165 11 478 1930 125 22 924 1931 31 4 900 Total 1 583 245 386

Note : ce tableau ne présente pas les chiffres liés à la colonisation privée. Source : Swearingen (1988 : 20).

Le modèle français était largement basé sur l’identification de deux secteurs agricoles : colonial/ indigène ou, sous une formulation plus contemporaine, moderne/traditionnel195. Ce modèle, critiqué par la suite se traduisait par, d’un côté : « un secteur de grandes fermes coloniales, bénéficiant de l’immatriculation foncière, fortement mécanisées, pratiquant surtout des cultures

d’exportation vers un marché protégé » (Bouderbala, 1997 : 156) et, de l’autre, un secteur

traditionnel peu équipé et principalement orienté vers l’économie de subsistance et le marché local. Néanmoins, plusieurs mesures administratives foncières limitaient les prélèvements de terres par les colons. « L’inaliénabilité » des terres habous est décrétée en 1912, celle des terres collectives en

195 Cette formule n’est pas sans rappeler le modèle de croissance basé sur une économie duale décrit par

1919 et des biens de famille melk en 1945. De plus, l’autorité coloniale expérimente une politique sans précédent de « modernisation du paysannat » soutenue par Jacques Berque et Julien Couleau, deux hauts fonctionnaires du Protectorat196.

Encadré 2 : Les différents statuts fonciers au Maroc Six types de régimes fonciers différents coexistent au Maroc :

1- Les terres melk : terres de statut privé, à titre individuel ou dans l’indivision, appartenant à des

personnes physiques ou à des personnes morales (sociétés coopératives). Elles sont transmissibles par voie d’héritage ou par voie de cession onéreuse ou gratuite. Ce statut représente 75,79 % de la SAU total et tend à se développer, au détriment des autres statuts fonciers, en se consolidant par concentration.

2- Les terres collectives : ce sont essentiellement les terres dites tribales (relevant de tribus). La forme de

propriété collective est inaliénable (dahir du 27 avril 1919) et n’est pas issue du droit musulman. Elle a été générée par la coutume comme corollaire de la structure tribale de l’Afrique du Nord. Les terres collectives sont des terres appartenant collectivement à un groupe d’habitants ayant une même origine et descendant d’une même ethnie et dont ils ont la jouissance à titre collectif, selon les modes traditionnels d’exploitation et d’usage. Néanmoins, dans les périmètres d’irrigation, à l’intérieur desquels l’État a entrepris d’importants investissements dont la rentabilisation exigeait la mise en place des conditions nécessaires à une mise en valeur optimale des terres, le principe de melkisation (accès à la propriété des ayants droits) de ces terres a été instauré par le dahir (ou décret) n° 1-69-30 du 25 juillet 1969 relatif aux terres collectives situées dans les périmètres d’irrigation.

3- Les terres guich : les terres guich sont des terres appartenant à l’État ayant été attribuées en jouissance,

par les Sultans du Maroc, à certaines tribus (Chrarda, Oudaia, Ouled Jamaa, Cheraga, etc.) en

récompense du service militaire rendu par ces tribus. Le régime des terres guich est caractérisé par un

démembrement du droit de propriété entre l’État titulaire du droit éminent de propriété et les collectivités

guich, titulaires à titre collectif de l’usufruit (ou « menfaa ») résultant d’une concession du souverain.

Les terres guich peuvent être non concédées ou concédées si le droit éminent de l’État a été concédé aux

collectivités occupantes.

4- Les terres habous : institution de droit musulman qui se présente sous forme d’un bien soustrait du

commerce par le constituant pour servir une œuvre religieuse. On distingue : les habous publics ; les

habous de famille gérés directement par les ayants-droit descendants des familles du constituant et qui, à

l’extinction de ces derniers, deviennent habous publics ; les habous de Zaouïa qui sont gérés par les

dirigeants des sanctuaires. Tous les trois sont sous la tutelle du Ministère des habous et des affaires

islamiques.

5- Les terres du domaine privé de l’État (terres « domaniales ») : terres à vocation agricole, propriété

de l’État, constituées de terres Makhzen, de terres guich non concédées, de terres agricoles de la

récupération des lots de colonisation et du transfert à l’État des terres anciennement détenues par des personnes physiques étrangères et par des personnes morales. La tutelle de cette terre est assurée directement par les services du Domaine ou confiée à d’autres organismes d’État (SODEA, SOGETA, etc.) qui dépendent du Ministère de l’Agriculture).

6- Le régime foncier des terres distribuées dans le cadre de la réforme agraire : ces terres représentent

une superficie totale de 303 573 hectares. Elles ont été loties et attribuées à 20 805 agriculteurs organisés en 671 coopératives regroupées en 11 unions. Les premières distributions de terres ont eu lieu en 1966, toutefois l’essentiel des distributions a eu lieu à partir de 1972.

Sources : Bouderbala (1999 : 66) ; MADRPM (2005 : 137-151) ; Ciparisse (2005 : 78-79).

En 1929, le modèle agricole du Protectorat tombe en crise. Les surplus de blé sur les marchés internationaux, rien que pour la France sont estimés à 11 millions de quintaux, alors même que

196 Cette politique repose sur une vision intégrée (« action de synthèse ») à la fois sociale (écoles, infirmeries)

et économique, et sur une transformation radicale (« action de choc ») du paysannat, notamment grâce à

l’introduction du tracteur (d’où l’expression qui caractérisait cette politique : « jemaâ sur le tracteur »). Sur

cette année-là le Maroc exporte 1 127 000 quintaux, excédant ainsi les quotas fixés à 800 000 quintaux (Swearingen, 1988 : 24), provoquant de fait l’hostilité des producteurs de blé français. Suite à des tractations avec ces derniers, les quotas sont néanmoins élevés à 1 700 000 quintaux par an, sans pour autant résoudre le problème.

En effet, du fait de la sécheresse, des maladies cryptogamiques et des sauterelles qui, à elles seules, ont dévasté plus de 860 000 hectares agricoles, les volumes agricoles produits en 1930 n’atteignent que le tiers de ceux produits en 1929 (369 505 quintaux en 1930 contre 1 127 000 quintaux en 1929). En février 1932, de nouveaux quotas sont fixés. Ils s’élèvent à 1 800 000 quintaux par an pour l’ensemble du blé ; à 1 650 000 quintaux pour le blé tendre, et à 150 000 quintaux pour le blé dur. Néanmoins, la crise de surproduction n’est pas endiguée et le surplus de blé tendre pour l’année 1932 n’ayant pu être exporté ni vendu sur le marché domestique est supérieur à 200 000 quintaux. Ainsi, en 1936, on estime que sur 3 700 exploitants européens, 1 500 connaissent une situation financière grave, dont le tiers (soit une superficie de 120 000 hectares) est en situation de faillite. L’endettement de la colonisation passe de 437 millions de francs de l’époque en octobre 1933 à plus de 650 millions de francs entre 1935 et 1937. Au total, malgré le cadre privilégié offert par la colonisation officielle, on compte 24 % d’échec, c’est-à-dire de colons ayant abandonné leur exploitation (Gadille, 1957). Ainsi, comme le rappelle, non sans ironie, Swearingen (1988 : 15) :

« acquérir une colonie et rendre une entreprise coloniale rentable sont deux choses très différentes. Tout au long de la période du Protectorat français au Maroc (1912-56), il y a eu un écart permanent entre les aspirations coloniales et les réalisations effectives (…). Pendant les deux premières décennies, cependant, cet écart a été causé par l’idéalisme colonial et l’ignorance des réalités de l’environnement marocain. La colonisation française au Maroc et la première politique agricole du Protectorat furent fondées sur des légendes plutôt que sur une logique économique solide »197.

C’est pourquoi l’auteur considère que la politique du blé a été un échec pour deux raisons principales198. La première est liée à l’ignorance de l’environnement du Maroc et de ses répercussions sur la production agricole en général et céréalière en particulier (coûts de production élevés, mauvaises récoltes périodiques, coûts élevés pour soutenir le besoin constant de subventions à la production, etc.). La seconde provient de la concurrence directe entre les productions nationales marocaine et française. La production marocaine était trop coûteuse pour être compétitive sur le marché international et devait être presque exclusivement absorbée par le marché de la métropole.

197 [« Acquiring a colony and making a colonial venture profitable are two quite different affairs. Throughout the French protectorate period in Morocco (1912-56), there was a continuous gap between colonial aspirations and actual accomplishments (…). During the first two decades, however, this gap was caused by colonial idealism and ignorance of Morocco’s environmental realities. French colonization in Morocco and the protectorate’s first agricultural policy were based on legend rather than on solid economic logic. »]

198 De fait, il corrobore le point de vue de Pascon (1986 : 120) pour le cas du Haouz. Pour ce dernier, l’échec

de la politique agricole coloniale est lié à trois éléments : (i) l’ignorance technique des colons ; (ii) le manque d’eau ; (iii) le marasme économique ambiant.

Cette politique agricole prévaut jusqu’à la fin des années 1920. Ensuite, le système colonial s’est tourné vers le modèle dit « californien » (ou encore « d’industrie agricole ») axé sur la production d’agrumes et le maraîchage en irrigué pour l’exportation grâce à l’afflux de personnes et de capitaux. Comme le rappelle Swearingen (1987), entre 1929 et 1933, une demi-douzaine de missions coloniales françaises étudient (voire espionnent) la Californie afin d’importer au Maroc les méthodes d’agriculture, les techniques d’irrigation, les variétés sélectionnées ainsi que les stratégies marketing. Afin d’encadrer et de soutenir le développement des exportations, l’Office chérifien des exportations (O.C.E.)199 est créé le 12 avril 1932 sur le modèle de la « California

Fruit Growers Exchange ». Le Tableau 29 témoigne de ce virage stratégique opéré par le secteur

agricole et son recentrage sur les agrumes, principalement destinés à l’export.

Tableau 29 : Évolution de la culture et des exportations d’agrumes comparée à celle du blé au Maroc français (1912-1956)

Superficies plantées (ha) Volumes exportés (× 1 000 T)

Période

Européens Marocains

Superficies

totales (ha) Agrumes Blé

1912-1928 265 1 205 1 470 / n.c. 1929-1933 2 020 400 3 890 / n.c. 1934-1938 5 745 1 215 10 850 5,5 117,8 1939-1943 5 240 1 420 17 510 11,3 99,9 1944-1948 4 335 1 940 23 785 27,8 10,1 1949-1953 11 216 2 774 37 775 104,8 41,3 1954-1956 7 069 1 436 46 280 127,5 207,7 Source : Swearingen (1988 : 75).

Un long passage de l’étude réalisée par Gadille (1957 : 156) témoigne non seulement de ce phénomène mais aussi de sa surprenante actualité :

« (…) en tout premier lieu [pour] le Souss, où un centre de colonisation était créé de toutes pièces aux Ouled-Teima en 1950, dans une ambiance de “Californie”, dans un élan de vivification d’un désert par d’importants capitaux. À vrai dire, ce qui fait du Souss le type même de cette orientation nouvelle (…) est la façon dont cultures maraîchères et plantation d’orangers se succèdent d’Inezgane aux Ouled-Teima où même elles s’imbriquent dans certaines exploitations. D’Agadir au km 60, des sociétés d’emballages pourvues d’installations très modernes de conditionnement et de packing reprennent, au débouché des petits et grands domaines, ces deux types de production, dont l’attraction spéculative intéresse bon nombre de fellahs marocains à Inezgane. Le “noeud” de cette colonisation se situe au km 44, car la législation de 1938 sur l’interdiction d’aliéner une terre tribale excluait cette partie du Souss. Ainsi s’explique le bourgeonnement des exploitations en ce point, assez irrationnel quant à l’exploitation de la nappe phréatique ».

Afin de soutenir cette nouvelle stratégie de développement — mais aussi, dans une certaine mesure, pour soutenir le développement de l’agriculture paysanne et contredire les revendications nationalistes —, l’administration lance en 1938 un plan « à la fois idéaliste et ambitieux »

(Swearingen, 1987 : 42) : l’irrigation d’un million d’hectares vers l’an 2000200. Cette option s’explique aussi par l’arrivée en 1925 du résident général Steeg qui, contrairement à Lyautey, est favorable à une colonisation de peuplement. Afin de l’encourager, il crée dès 1927 la Caisse de l’hydraulique agricole et de la colonisation pour drainer les crédits. De plus, les années 1936 et 1937 sont marquées par un exode rural sans précédent causé par un épisode de sécheresse qui débute en 1935 et qui cause une famine touchant plusieurs centaines de milliers de Marocains.

Ce plan, interrompu par la seconde Guerre mondiale, reprend à partir de 1948 sous la gouverne du général Juin. De 1948 à l’indépendance, le Protectorat se focalise sur certains axes prioritaires :

concentration des investissements agricoles dans cinq périmètres irrigués essentiellement situés dans les plaines côtières (Haouz-N’Fis, Beht, Doukkala, Mouloya-Triffa, Tadla-Beni Amir-Beni Moussa) ;

au sein de ces périmètres, production de récoltes à haute valeur ajoutée (principalement des agrumes) destinées à être exportées ;

mise en place d’une réforme agraire comportant la fourniture d’eau d’irrigation et le versement d’une aide spéciale à moins d’1 % des petits paysans marocains ;

production de récoltes irriguées stratégiques au niveau des petites fermes remembrées dirigée de manière autoritaire (Swearingen, 1987).

Tableau 30 : La grande hydraulique sous l’ère coloniale

Capacité (Mm3) Nom Bassin Année de mise en service (1) (2) (3) Superficie irrigable (ha) (3) Usages (3)

Sidi Saïd Machou Oum Er Rbia 1929 1,502 2 1,52 H, P

Mellah Mellah 1931 8,8 18 18 800 I, P

Kasba Tadla Oum Er Rbia 1931 0,1 1 / 23 000 I, H

Ali Thelat Laou 1935 30 25 25 1 400 I, H

El Kansera Sebou 1935 266 297 290 28 000 I, P, H

Lalla Takerkoust Tensift 1935 69 75 31 4 000 I, P, H

Ouezzane Bou Droua 1937 0,4 0,4 0,4 P

Imfout Oum Er Rbia 1944 27 83 25 40 000 I, H

Zemrane Bouregreg 1950 0,6 0,6 0,6 T, P

Daourat Oum Er Rbia 1950 9,5 24 24 H

Bin el Ouidane Oum Er Rbia 1953 1 384 1 500 1 484 63 000 I, H

Aït Ouarda Oum Er Rbia 1953 4 3,8 4 H

Mechra Homadi Moulouya 1955 12 42 14 61 000 I, H, P, T

Taghdout Sud Atlas 1956 3 3 3 250 I

Notes : compte tenu du désaccord entre les sources quant à la capacité théorique des retenues, nous

présentons trois sources. Il semble que les données issues du Ministère soient actualisées et concernent les capacités actuelles (avec envasement) et non pas les capacités théoriques initiales.

Usages : I : irrigation ; H : hydroélectricité ; T : industrie ; P : eau potable.

Sources : élaboration propre d’après (1) : Ministère de l’équipement et des transports (2002) ; (2)

Commission internationale des grands barrages (1984 : 612) ; (3) Popp (1984 : vi).

En comparaison du développement des ouvrages et des aménagements hydrauliques ultérieurs, les infrastructures développées sous l’ère coloniale apparaissent très limitées201. Ainsi, sous le Protectorat, l’aménagement des terres grâce à la grande hydraulique a concerné environ 38 100 hectares, pour une superficie totale irrigable estimée, à l’époque, à 497 000 hectares (soit environ 7,6 %) (El Faïz et al., 2007). Néanmoins, on considère que les années 1920 marquent un tournant en faveur de l’option pour les barrages réservoirs et la grande hydraulique (Pérennès, 1993) et amorcent le passage au paradigme hydraulique ultérieur. Le géographe Jan Brunhes dénonce très tôt cette dérive techniciste, notamment lors du Congrès de l’eau qui a lieu en Algérie en 1928 où il s’oppose vivement à l’exposé d’un ingénieur des Ponts et chaussées (Martin) venu présenter un rapport sur la technique de construction des grands barrages prônant l’idée de limiter le ruissellement vers la mer (El Faïz, 1999).