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VI. MÉTHODOLOGIE

3. L’ANALYSE DES DONNÉES

3.2 Pour le second volet de la recherche

Afin de réaliser l’analyse permettant de répondre à nos questions de recherche, nous avons effectué, d’une part, des analyses a priori des tâches réalisées en devoirs, d’autre part, un tableau synoptique présentant succinctement le déroulement de la séance filmée. Ces analyses, de même que le tableau, figurent en annexes (annexes 13 à 16). Puis, nous avons construit notre grille d’analyse, dont les catégories choisies ont permis d’élaborer le « Tableau des topos », représentant ainsi notre premier niveau d’analyse des données, au niveau « méso ». Le choix d’événements significatifs, apportant des réponses à nos questions de recherche, constituent l’analyse au niveau

« micro », puisqu’ils permettent d’analyser finement nos données.

Analyses a priori

L’une des deux chercheuses a effectué des analyses a priori des activités données en devoirs à Aurore par l’enseignante A. Ces analyses concernent l’exercice « Viser pile » et les problèmes 1 et 2, en mathématiques. Pour ce faire, la chercheuse s’est aidée des méthodologies COROME, soit des livres du maître de 5e et 6e Harmos, du livre de l’élève de 6e Harmos et du fichier de l’élève de 6e Harmos (Danalet, C., Dumas, J.P., Studer, C. & Villars-Kneubühler, F., 1998, 1999a, 1999b, 1999c).

Les indications obtenues lors de l’entretien ciblé sur les devoirs d’Aurore, mené auprès de l’enseignante A, de même que les informations complémentaires, demandées par mail par la chercheuse à l’enseignante A et à sa collègue qui dispense les mathématiques à Aurore, ont permis de compléter ces analyses.

Celles-ci ont permis de dégager le savoir et les compétences en jeu, les décisions et variables didactiques, les difficultés inhérentes à la tâche, les procédures attendues et erreurs susceptibles d’être commises par l’enfant en situation de devoirs. Cerner les enjeux de savoir des tâches à réaliser

permet de vérifier si l’enfant a acquis les compétences requises pour réaliser les tâches demandées et de mieux expliquer/interpréter certaines de ses erreurs. Les chercheuses ont pu également examiner, lors de l’analyse de l’observation filmée, si le parent a repéré ces enjeux et en a tenu compte lors de son intervention, pour permettre à son enfant d’atteindre, au terme de la « séance » de devoirs, les objectifs visés par la tâche et, de manière sous-jacente, par l’enseignant.

L’analyse a priori « crée la distance nécessaire à la perception des caractères du contrat [didactique] » (Mercier & Salin, 1988, p. 204). Elle aide les chercheurs à « préparer l’observation de phénomènes didactiques relevant du contrat, ou de l’épistémologie du savoir » (Ibid., p. 204).

Tableau synoptique

En ce qui concerne l’observation filmée, il nous a paru judicieux de construire un tableau synoptique de la séance (cf. annexe 16) faisant apparaître le découpage chronologique des tâches réalisées en devoirs (1re colonne), les modalités de travail, en individuel ou avec aide de la mère (2e colonne) et, enfin, les étapes principales de la séance (3e colonne). Le découpage chronologique par rapport aux tâches réalisées au fil de la séance filmée correspond à l’angle d’analyse adopté en didactique des mathématiques.

L’en-tête de ce tableau synoptique est le suivant : DÉCOUPAGE PAR

RAPPORT À LA TÂCHE

MODALITÉS DE TRAVAIL

DÉROULEMENT DE LA RÉALISATION DES TÂCHES

Ce tableau synoptique permet de bénéficier d’un aperçu global des étapes de la séance de réalisation des devoirs, en fournissant des indications succinctes sur l’évolution de la chronogenèse.

Nous avons repris ce tableau pour effectuer un premier niveau d’analyse des données, en y ajoutant la colonne « positions de la mère A (topogenèse) » en vis-à-vis des étapes principales de la séance, afin d’indiquer le type d’intervention du parent envers son enfant durant la tâche de devoirs (cf. Chapitre VII., point 2.1.2).

Élaboration de nos catégories d’analyse et construction du « Tableau des topos »

Afin de pouvoir construire le « Tableau des topos », nous avons tout d’abord élaboré une grille d’analyse des « topos » occupés par la mère. Pour élaborer cette grille, nous avons visionné la vidéo et avons relevé les différentes postures que nous pouvions observer chez la mère, dès lors que son attitude ou son type d’intervention auprès de sa fille nous paraissait changer. Nous avons donné un intitulé à chacune de ces postures, afin de créer des catégories d’analyse spécifiques. Lorsque ces types de postures apparaissaient plusieurs fois dans la séance ou semblaient décrire une position à part entière, nous les avons sélectionnés en tant que catégories d’analyse. Ainsi, comme pour le premier volet de notre recherche, notre grille d’analyse s’est construite progressivement, par déduction/induction, à partir essentiellement de l’observation filmée. Les entretiens de recherche auprès des enseignantes spécialisées et des parents d’élèves, de même que les apports du cadre théorique, nous ont également donné des pistes quant au type d’intervention d’un parent en situation de devoirs, ce qui nous a aidées à répertorier ces différentes positions.

Voici la grille d’analyse – présentant les 8 positions (catégories d’analyse) que nous avons répertoriées, accompagnées de leur fonction – sur laquelle nous nous sommes basées pour réaliser l’analyse : nécessaire à leur réalisation. De plus, il se tient à disposition de l’enfant en cas de besoin.

Le « parent-élève » Il souhaite aider son enfant mais ne comprend pas la tâche à réaliser, en raison d’informations manquantes (fournies en classe). Dès lors, il doit se reposer sur les explications de son enfant pour tenter de comprendre la tâche. Il occupe alors une position « basse » face à son enfant qui est en position

Il donne les réponses du devoir et les explique à son enfant.

Le « parent-enseignant adoptant une pratique guidée » ou

« parent-enseignant/guide »

Il guide l’enfant dans les premières applications, pose des questions reliées au nouveau contenu ou aux nouveaux apprentissages, donne des explications complémentaires et les reformule au besoin, fournit des feed-backs, donne des l’enfant-élève et lui pose des questions pour l’amener à se corriger ou à compléter sa réponse. parent qui indique les difficultés rencontrées par l’enfant et son niveau d’autonomie).

En nous appuyant sur le tableau synoptique (annexe 16), nous avons ensuite visionné à nouveau la vidéo et l’avons découpée très précisément en fonction des huit positions répertoriées dans notre grille d’analyse. Pour présenter nos résultats, nous avons élaboré le tableau suivant – que nous avons intitulé « Tableau des topos » – dans lequel les positions occupées par la mère A

sont indiquées en vis-à-vis du déroulement de la réalisation des tâches (3e colonne du tableau synoptique archivé) :

DÉCOUPAGE PAR RAPPORT À LA TÂCHE

MODALITÉS DE TRAVAIL

POSITIONS DE LA MÈRE A (TOPOGENÈSE)

DÉROULEMENT DE LA RÉALISATION DES TÂCHES

Il est possible de constater que cet en-tête reprend celui du tableau synoptique, avec l’ajout d’une colonne supplémentaire : « positions de la mère A (topogenèse) ». Ce tableau met clairement en évidence les différentes positions occupées par la mère A face à sa fille, à propos des objets de savoir, tout au long de la séance de devoirs. Il figure au Chapitre VII. Présentation et analyse des résultats, point 2.1.2.

Par ailleurs, nous avons sélectionné des événements significatifs qui mettent en lumière la nature des interactions amenant la mère A à occuper telle ou telle posture répertoriée comme catégorie d’analyse. Ces événements-clefs révèlent, de manière significative, certaines postures occupées par la mère A. L’analyse de ces événements s’inscrit dans une démarche explicative/compréhensive.

Choix d’événements significatifs

Afin de découvrir la nature du contrat « didactique » familial, par rapport au contrat didactique scolaire et de mieux saisir les interactions amenant la mère A à occuper telle ou telle posture, nous avons sélectionné des événements significatifs pertinents, laissant place à des interprétations susceptibles d’apporter des éléments de réponses à nos questions de recherche. En effet, à partir de la transcription des interactions produites entre les acteurs de l’observation, nous avons pu mettre précisément en lumière le type d’intervention du parent auprès de son enfant, en situation de devoirs, ce qui nous a donné des indications quant aux caractéristiques du contrat particulier qui les lie (cf. Chapitre VII. Présentation et analyse des résultats, point 2.1.1).

3.2.2 Analyse et présentation des résultats

Nous nous inscrivons, pour ce second volet de la recherche, essentiellement dans une approche clinique/expérimentale (Schubauer-Leoni & Leutenegger, 2002) impliquant une démarche explicative/compréhensive.

L’importance attribuée en didactique comparée à la compréhension des pratiques d’enseignement/apprentissage « telles qu’elles sont » – par le biais de l’observation du système didactique mettant en relation les trois pôles, savoir, enseignant et élève(s) – implique une démarche clinique du terrain. Nous réaliserons cette démarche par l’observation du système « didactique » familial, mettant en relation savoir, parent et enfant-élève.

Cependant, cette démarche doit être articulée à un dispositif expérimental pensé de façon telle à favoriser, par la suite, l’articulation de traces pertinentes permettant ainsi d’adopter une démarche explicative/compréhensive.

En effet, la compréhension de phénomènes didactiques ne peut avoir lieu que lorsque le chercheur aboutit, par le principe de questionnement réciproque des traces recueillies, à une information suffisante réduisant l’incertitude des interprétations effectuées.

Dans le cadre de notre observation, nous avons procédé selon le modèle utilisé en didactique comparée consistant à prendre comme point de départ l’action conjointe, établie non entre l’enseignant et l’élève mais entre le parent et l’enfant-élève, aux prises avec des objets de savoir en mathématiques. Ce n’est qu’ensuite que nous avons « remonté » la chaîne transpositive, en nous référant aux analyses a priori construites à partir des tâches données en devoirs, donnant ainsi des indications sur le savoir à enseigner. Nous nous sommes également référées aux propos de l’enseignante spécialisée, révélant ses intentions didactiques par rapport aux devoirs conçus et son projet global d’enseignement.

L’analyse de type clinique « croise » entre elles les traces des faits observés avec le but de construire une série signifiante (au sens de Foucault) que nous nommerons un système de signes, de façon à obtenir une réduction de l’incertitude quant à l’interprétation que l’on donne à la (ou aux) séance(s) observée(s). (Schubauer-Leoni & Leutenegger, 2002, p. 248)

À partir des événements significatifs choisis, nous avons pu décrire le contrat « didactique » familial, particulièrement du point de vue du descripteur de la topogenèse, en analysant de manière spécifique l’évolution du système de places occupées par le parent au cours de la séance, à propos des objets de savoir traités. Comme expliqué au point 3.2.1 ci-dessus, c’est en nous basant sur notre grille d’analyse que nous avons pu faire une analyse de premier niveau, relative aux topos occupés par la mère au cours de l’observation. Ce premier niveau d’analyse est présenté sous forme d’un tableau. Ce « Tableau des topos » dévoile les positions occupées par la mère en fonction des interactions produites au cours de l’observation, au sujet du savoir mathématique. De plus, il a été possible de constater, entre autres, quelle position s’est avérée prégnante au cours de la séance filmée, ce qui nous a permis, par la suite, à l’appui de l’analyse d’événements significatifs, de déterminer dans quelle mesure l’intervention du parent a été en conformité avec les attentes de l’enseignante spécialisée. Les attentes de cette dernière ont été exposées au cours de l’entretien ciblé sur les devoirs d’Aurore (cf. annexe 8).

Ainsi, afin d’enrichir les interprétations produites, ces analyses internes ont été confrontées, d’une part, aux propos de l’enseignante A, de la mère A et de l’enfant Aurore, au cours des entretiens ; d’autre part, aux productions réalisées au cours de l’observation et aux analyses a priori.

Les analyses a priori des trois exercices de mathématiques du devoir ont permis de définir, d’un point de vue didactique, l’intervention du parent au regard des objectifs didactiques des tâches et de leurs enjeux de savoir. Quant aux traces écrites produites par Aurore lors de l’observation, elles sont aussi venues appuyer l’analyse réalisée.

Le croisement de ces données est essentiel pour consolider les interprétations et pouvoir les considérer comme valables.

Trois principes éclairent donc l’analyse des différentes traces :

- le principe de rétroaction. Ce principe rend compte de l’effet d’« après-coup » dont relèvent les analyses. Le propre des traces est de permettre une sorte de « hors temps », voire la construction

d’une temporalité propre à l’analyse qui retravaille, sur un autre plan la temporalité dans la série des événements ;

- le principe de questionnement réciproque entre les différents types de traces à disposition. Le système de validation procède par comparaisons systématiques entre les observables et les interprétations avancées à leur propos ;

- le principe de symétrie. Il concerne à la fois les événements, les objets et les acteurs qui les portent puisque chaque instance et chaque témoin de la scène didactique sont considérés comme légitimes et susceptibles de concourir à la construction de configurations signifiantes.

(Schubauer-Leoni & Leutenegger, 2002, p. 245)