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LE CONTEXTE SOCIOPOLITIQUE DE LA PREMIÈRE DÉCENNIE RÉPUBLICAINE : DÉFINIR LA PÉRIODE

SE RATTRAPER AUPRÈS DES SECTEURS NÉGLIGÉS

Au sujet de la cohésion sociale, les célébrations du dixième anniversaire de la République comptent un invité d’honneur : le village. Depuis l’irruption de la culture occidentale dans l’Empire, le peuple turc de la campagne devient l’objet d’un intérêt croissant qui atteint son apogée lorsque le nationalisme en fait son centre d’inspiration. Issus pour la plupart du milieu des Jeunes Turcs, partisans en tout cas de ce nationalisme, les dirigeants républicains font appel aux couches paysannes pour alimenter une partie importante de la nouvelle identité. Il faut ajouter à cela le fait qu’il s’agisse du secteur social le plus vaste d’un pays essentiellement rural, ce qui le rend indispensable à un régime qui a besoin de se répandre sur tout le territoire. C’est donc peut-être par un sentiment de dette morale, peut-être par préoccupation pour l’économie nationale, en tout cas par intérêt politique que le gouvernement manifeste très tôt son intérêt pour le village.218 Les mentions récurrentes de ce dernier et des

218 Des mesures visant au développement économique et culturel des villages sont proclamées par la Grande Assemblée même avant la fondation de la République —cela dans des buts qui ne sont pas toujours tout à fait désintéressés. En 1920, l’Assemblée approuve une loi sur les tailles [Baltalık Kanunu] qui attribue environ deux hectares de ce type de terrain à des familles paysannes pour qu’elles en exploitent les ressources et satisfassent ainsi leurs besoins. Les Nationaux souhaitent par cette initiative encourager la création d’une bourgeoisie nationale et gagner la faveur du peuple à un moment de besoin d’effectifs au front. Les conséquences de la loi sont désastreuses pour la géographie forestière du pays qui se réduit pour le coup drastiquement : les paysans, au lieu d’entretenir les terrains, les taillent et les transforment en terrains de culture, qu’ils vendent aussi parfois. La loi est abolie lors de la signature du traité de Lausanne. En février 1923, le gouvernement de facto célèbre à Izmir un congrès économique où il compte établir les bases économiques de la future république. Parmi les premières mesures, il envisage la suppression de la dîme [aşar vergisi], considérée comme un obstacle au développement de la campagne au début de la phase libérale du régime. La réforme est enfin proclamée en février 1925. Elle amène, certes, une hausse de production mais celle-ci n’atteint pas la vitesse désirée à cause notamment du sous-développement technologique. (Güven Gülöksüz et Yiğit Gülöksüz, « Kırsal Yapı [La structure rurale] » dans İletişim Yayınları (éd.), Cumhuriyet Dönemi Türkiye Ansiklopedisi [Encyclopédie turque de la période républicaine], Istanbul, İletişim, 1983, vol. 5/10, p. 1247.) La réforme est toutefois aussi bien présentée que perçue par le régime comme un succès de sa politique de développement vis-à-vis de la campagne.

paysans dans les discours de Mustafa Kemal témoignent entre autres de l’ambition du leader de gagner la faveur de la Turquie rurale.

Cependant, les kémalistes restent dans la pratique concentrés sur les populations citadines et sur les grandes fortunes de la campagne, qui ne représentent qu’une partie infime de sa population.219 La fête de la République ne s’est même jamais célébrée dans les villages jusque-là, tout au plus dans les capitales de province.220 Le fossé entre la ville et le village, l’une des priorités initiales du régime, non seulement ne s’est pas réduit mais se manifeste maintenant avec encore plus de force. Cela entraîne un premier problème de cohésion nationale, et ce problème entraîne un second pire encore : plus le village est éloigné de la ville, plus il reste imperméable à la doctrine du régime et à la campagne d’homogénéisation qui garantirait la stabilité actuelle et future du kémalisme. Les initiatives menées dans les années 1930 en direction des villages, la section, par exemple, de soutien aux villages des Maisons du peuple, viennent justement lutter contre cette forme de négligence qui est récemment devenue une menace pour le régime. En 1933, quelques mois avant la célébration du dixième anniversaire de la République, des cours de soutien au village sont organisés à Ankara, à Adana, à Izmir et à Bursa. Leur but est de former les futurs instituteurs de campagne dans les travaux habituels de ce milieu pour qu’ils puissent ensuite les apprendre aux locaux. L’article de Cumhuriyet qui rapporte cette initiative dépeint les paysans turcs non seulement

219 Le code civil de 1926 autorise pour la première fois l’achat et vente de propriétés immobilières sous une garantie de protection juridique. Cela favorise principalement les grandes familles propriétaires qui commencent ainsi à accumuler de plus en plus de terrains. Quant aux petits propriétaires fonciers qui ont bénéficié du partage des anciens terrains abandonnés par les Grecs et les Arméniens, ils préfèrent maintenant les vendre aux grands propriétaires. Par ailleurs, le régime approuve en 1929 une régulation qui permet d’enregistrer en tant que biens immobiliers privés un ensemble de terrains dont le droit d’exploitation date de la période ottomane et que l’État avait attribués, encore, à certaines grandes familles. L’étape libérale du régime pendant laquelle il met en œuvre des mesures pour la création d’une bourgeoisie nationale représente, par conséquent, une période prospère notamment pour les grands propriétaires terriens turcs qui augmentent en nombre et voient en même temps grimper en flèche le volume de terrains sous leur contrôle (Yahya Sezai Tezel, Cumhuriyet Dönemi İktisadi Tarihi: 1923-1950 [Histoire économique de la période républicaine], Küçükesat, Ankara, Yurt, 1982, p. 344.) Il faut dire, en lien avec la note de bas de page précédente, que lorsque l’abolition de la dîme est proposée, la mesure fait l’objet d’une entrave de la part de différents groupes de professionnels. Ceux-ci composent à l’époque, avec les grands propriétaires terriens, un secteur de population très puissant qui empêche le gouvernement d’agir en faveur des couches rurales sans ressources : les petits propriétaires terriens et les agriculteurs sans terres. Yahya Sezai Tezel confirme que « outre la suppression de la dîme, le gouvernement ne réussit pas dans les années 1920 à mettre en place de mesures effectives au profit des petits producteurs ». (« Hükümet, 1920’lerde, aşarın kaldırılması dışında küçük üretici köylülerin yararına etkili bir uygulama ortaya koyamadı. » Ibid., p. 345.)

220 N. Demirhan, Cumhuriyetin Onuncu Yılının Türk İnkılap Tarihinde Yeri ve Önemi [La place et l’importance du dixième anniversaire de la République dans l’histoire de la révolution turque], op. cit., p. 3.

comme le fondement de la patrie mais comme l’objet d’une négligence ancestrale que le gouvernement républicain aurait finalement comblée.221 Les intentions du régime pour consolider ou plutôt retisser les liens avec une population qui n’a pas assimilé la nouvelle identité deviennent, par toutes ces raisons, évidentes.

Si le dixième anniversaire de la République survient dans un contexte compliqué pour la relation entre la ville et le village, l’événement offre au cabinet un prétexte formidable d’agir sur le problème. Sa stratégie vis-à-vis de la campagne se déroule, pour ainsi dire, en deux phases. La première consiste à susciter chez les paysans le sentiment d’appartenance au groupe, au grand groupe qu’est la nation. C’est à cette fin que le régime insiste sur le thème de l’unité nationale, mais surtout qu’il manifeste publiquement son attention pour les secteurs ruraux et qu’il force leur participation dans les célébrations. Le CHP publie Köylülere Konferans [Conférence aux paysans], un livret que le parti fait distribuer le grand jour dans les villages du pays.222 Le texte met en relief la contribution du gouvernement au développement de la campagne et recense les réformes proclamées dans cette direction au cours de la dernière décennie. Il insiste, pour en donner un exemple, sur la décision de supprimer la dîme (1925), que le régime percevait à l’époque comme une entrave à la production rurale : « Notre République a supprimé la dîme, le plus grand malheur du paysan turc ; elle l’a sauvé des fermiers, cruels et injustes. Notre gouvernement est devenu un gouvernement national qui écoute nos soucis, qui guérit nos blessures, qui ne veille qu’à notre bien-être ».223 Cette réforme en particulier est en fait devenue depuis sa proclamation la preuve récurrente du régime par rapport à son engagement avec la Turquie rurale.

Une initiative particulièrement symbolique visant à ce que les paysans rejoignent la nation consiste à provoquer justement la rencontre entre la ville et le village, que le journal nationaliste Akşam rapporte comme suit :

221 Cumhuriyet, 13 août 1933, no 3329, p. 3.

222 Cumhuriyet Halk Partisi, Köylülere Konferans [Conférence aux paysans], Ankara, Hakimiyeti Milliye Matbaası, 1933, 8 p.

223 « Cumhuriyetimiz Türk köylüsünün en büyük baş belası olan aşarı kaldırdı, köylüyü merhametsiz ve haksız mültezimlerden kurtardı. Hükûmetimiz her derdimizi dinleyen, her yaramıza sargı saran, yalnız iyiliğimizi düşünen bir Millet Hükûmeti oldu. » N. Demirhan, Cumhuriyetin Onuncu Yılının Türk İnkılap

Tarihinde Yeri ve Önemi [La place et l’importance du dixième anniversaire de la République dans l’histoire

À l’occasion de sa dernière réunion, la commission chargée des préparatifs des célébrations du dixième anniversaire de la République […] a pris plusieurs décisions qui permettront à nos paysans de participer aux grands événements programmés dans la ville.

Selon cette décision, chaque village choisira une femme, un homme et le plus travailleur et intelligent des élèves de la dernière année de collège. Ils viendront dans notre ville, seront hébergés chez l’une des familles de la ville, on leur donnera à manger et à boire pendant trois jours et trois nuits, on leur montrera la ville et les fera participer à tous les amusements qui auront lieu dans la ville.224

Les nouvelles publiées le lendemain du grand défilé d’Istanbul précisent que les paysans hébergés dans la ville n’ont pas seulement suivi l’événement en restant sur les trottoirs mais plusieurs d’entre eux ont même rejoint la rue et ont paradé ; ils ont reçu des vivats et de longs applaudissements de la part des spectateurs.225 C’est par ce témoignage que les journaux favorables au régime rapportent l’accueil que les paysans auraient eu en ville : en effet, pour que la démarche soit efficace, l’expérience apparemment positive de ces privilégiés devait parvenir aux oreilles de toute la campagne.

Quant au but de susciter chez eux le lien d’appartenance au grand groupe, il consiste à réussir à ce qu’ils se sentent concernés par ses processus, ses dynamiques, ses problèmes, son identité. Cela nous conduit à la seconde phase de la stratégie en direction des paysans : après les avoir prédisposés à les assimiler, il faut désormais leur inculquer les valeurs de la République et les principes du citoyen nouveau. Une série d’activités sont mises en œuvre à cette fin, adaptées aux particularités de la cible. Un bon exemple se trouve dans l’initiative de la Haute Commission, qui commande la préparation d’une série de destan au sujet des réformes et des réussites de la République, exprimés dans un langage populaire de façon à être déclamés par des

224 « Cumhuriyet onuncu yıldönümü merasimine ait hazırlıklarla meşgul bulunan [...] komisyon son içtimaında şehirde yapılacak büyük şenliklere köylülerimizin de iştirakini temin edecek bazı kararlar vermiştir.

Bu karara göre her köyden intihap edilen bir kadın, bir erkek ve bir de o mektebin son sınıf talebesinden en çalışkan ve en zekisi şehrimize gelecekler, bunlar şehirdeki ailelerden birinde misafir edilecekler, üç gün, üç gece yedirilip içirilecekler, şehirde gezdirilecekler ve şehirde yapılan bütün eğlencelere iştirak ettirileceklerdir. » Akşam, 5 septembre 1933, no 5354, p. 3.

225 Akşam, 30 octobre 1933, no 5409, p. 2., Cumhuriyet, 30 octobre 1933, no 3407, p. 8., Milliyet, art cit, p. 5.

bardes et des poètes-musiciens dans les cafés, les places et les lieux de réunion des villages.226 Elle élabore également un riche programme de représentations théâtrales spécifiquement orientées vers les paysans portant sur les sujets récurrents : la guerre d’Indépendance, la critique de la période ottomane et la nouvelle identité turque.

Ces initiatives illustrent bien les ambitions du régime pour insuffler la fierté nationale et la nouvelle identité à une population largement exclue du processus de construction nationale. Mais elles dévoilent surtout la prédilection du régime pour la ville et sa volonté, non pas de rapprocher la ville et le village, mais de « citadiniser » ce dernier. Il est sans doute plus difficile de porter un message politique à la campagne, contrairement à la ville, qui compte des infrastructures de communication plus développées et des populations plus vastes. D’ailleurs cela explique, du moins en partie, le décalage entre ville et village en termes d’assimilation des réformes. Cependant, il s’agit clairement de l’un des contextes où l’essence citadine des élites qui dirigent le gouvernement, celles qui imposent d’en haut leur modèle de société, prévaut sur la source d’inspiration nationale que les paysans constituent ou sur le discours officiel de conciliation avec le village.

Le clivage entre ville et village constitue de loin l’enjeu le plus important des politiques visant à rassembler le peuple. Mais à côté des paysans, il faut compter un autre secteur important systématiquement à l’écart de la construction nationale, à savoir les minorités religieuses et les étrangers de la Turquie. Cette population exclue, étouffée et harcelée devient maintenant également la cible des initiatives à l’occasion du dixième anniversaire de la République. Pour la première fois depuis la fondation du pays, les collèges d’étrangers et de minorités d’Istanbul, leur ville principale, participent au défilé officiel du 29 octobre : les lycées grecs de Fener, le Zappeion et le Zographeion, les lycées arméniens Getronagan et Esayan pour filles et le lycée juif, ainsi que le collège américain d’Üsküdar, le collège anglais pour filles et le lycée et l’école de commerce allemands.227 Entre autres personnalités qui s’expriment à l’occasion du grand événement se trouve d’ailleurs le directeur de l’école grecque de Fener Konstantin Vapuridis. Dans son discours, il évoque la grandeur du peuple turc, les progrès du pays dans la dernière décennie, Mustafa Kemal, qu’il remercie d’avoir atteint les buts des

226 N. Demirhan, Cumhuriyetin Onuncu Yılının Türk İnkılap Tarihinde Yeri ve Önemi [La place et l’importance du dixième anniversaire de la République dans l’histoire de la révolution turque], op. cit., p. 53.

générations précédentes, et fait un appel aux jeunes qu’il exhorte à protéger le pays.228

Son intervention reste neutre, officielle, voire ambiguë ; en tous les cas, il ne mentionne pas la communauté grecque ni ses relations avec les Turcs. En partant de l’attitude de Vapuridis, nous pouvons bien imaginer la cordialité et les bonnes relations que les deux parties, minorités et gouvernement, ont intérêt à promouvoir en général : pour les premières, la Turquie est leur pays de résidence ; quant au second, il en profite —peut-être il en a même besoin— pour donner une image de tolérance et de bienveillance, notamment aux yeux de la communauté internationale.229 En tout cas, même si le but d’inviter ces populations aux célébrations était de leur inculquer l’identité républicaine, elles en ont déjà une qui les définit, à laquelle elles ne comptent en fait point renoncer.230

228 CHF (Parti républicain du peuple), Cumhuriyet’in Onuncu Yıldönümü Münasebetiyle Söylenen Nutuklar [Les discours prononcés à l’occasion du dixième anniversaire de la République], Istanbul, 1933, 258 p. Le sigle CHF fait référence à Cumhuriyet Halk Fırkası, nom précédent du CHP.

229 Les mois qui s’écoulent entre l’annonce des célébrations du dixième anniversaire et le jour même connaissent la publication de nombreux articles de presse sur l’acceptation et l’intégration des juifs de Turquie. Au mois d’août le régime accueille, en plus, un groupe de professeurs universitaires et intellectuels allemands fuyant le nazisme, dont plusieurs juifs, ce qui fait couler encore plus d’encre au sujet de la minorité. La presse turque ne manque pas à rapporter l’opposition de la communauté internationale vis-à-vis de Hitler et à mettre en relief la posture bienveillante de la Turquie, qui s’alignera à ce sujet sur des partenaires stratégiques. Elle contribue ainsi à alimenter l’image d’une Turquie tolérante et conciliatrice.

230 Les années 1920 connaissent des épisodes conflictuels entre le régime et les minorités de la Turquie, mais le pire est encore à venir. Plusieurs des chapitres les plus sombres du futur du pays sont directement en rapport à la discrimination, au harcèlement, même à l’expulsion des membres de communautés ethniques-confessionnelles autres que la turque. Déjà en 1934, juste après la célébration du dixième anniversaire de la République dont le gouvernement profite pour exhiber une facette de tolérance, se produit ce que l’on a appelé les Incidents de Thrace, une série d’actes violents contre la communauté juive de la région qui oblige beaucoup de ses membres à vendre leurs propriétés et à se réinstaller à Istanbul. Plus tard, en novembre 1942, le gouvernement proclame un impôt sur le patrimoine [Varlık Vergisi] sous prétexte d’attaquer les profiteurs de guerre qui obéit en réalité à des critères confessionnels. En fait, il distingue entre contributeurs musulmans et non-musulmans et oblige ces derniers au paiement d’impôts beaucoup plus élevés : tandis que les premiers sont taxés de 4,94% de leur capital, les Arméniens le sont de 232%, les juifs et 179% et les chrétiens orthodoxes de 156%. (Marc David Baer, The Dönme:

Jewish Converts, Muslim Revolutionaries, and Secular Turks, Stanford, California, Stanford University

Press, 2010, p. 232.) En plus le régime établit la date limite de février 1943 pour régler ses impôts, faute de quoi les contributeurs sont conduits à des champs de travail dans l’Est anatolien. Ces événements sont à l’origine de la débandade de juifs en Palestine, qui surpasse trois mille cent personnes entre janvier 1943 et juin 1944—la plupart des juifs émigrent après la fondation de l’État d’Israël. (Corry Guttstadt, Die Türkei,

die Juden und der Holocaust, Berlin, Assoziation A, 2008, p. 210.) La nouvelle d’une bombe dans le musée

d’Atatürk à Thessalonique provoque la nuit du 6 au 7 septembre 1955 une série d’émeutes violentes dans les rues d’Istanbul contre des commerces et des maisons de citoyens non musulmans, principalement grecs. La détérioration des relations gréco-turques dans la décennie suivante à cause des conflits pour l’île de Chypre débouche sur l’annulation des droits de résidence pour les citoyens grecs de Turquie datant des années 1930. C’est en vertu de cette décision que des milliers de Grecs sont forcés de quitter le pays en 1964 sans pouvoir porter rien d’autre qu’une valise de vingt kilos de vêtements et un maximum de deux-cents lira (22$) dans la poche. (Alexis Alexandris, The Greek Minority of Istanbul and Greek-Turkish

Les célébrations du dixième anniversaire de la République se concluent après trois jours d’un intense programme d’activités qui, en résumé, ont pour but essentiel de provoquer l’union des citoyens de la Turquie et de consolider les principes de la nouvelle identité. La fin des événements voit la publication de nombreux articles de presse relatant les célébrations, évoquant leur répercussion ou la réaction de la communauté internationale ; dans ces colonnes, la République et son leader font encore et encore l’objet de louanges. Ces activités ne s’arrêtent pas en réalité à ce moment-là, mais sont complétées et poursuivies de façon méthodique encore de longues années par les Maisons du peuple, en fonctionnement depuis l’année précédente et très activement impliquées dans les célébrations de la grande date. À cet égard, il est intéressant de noter que non seulement elles coordonnent beaucoup des activités prévues à cette