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CHAPITRE 3 : ANALYSE DES RÉSULTATS

3.2.2.1 Sans savoirs de formation

Pour le critère C1, Yannick indique que l’élève auteur de la production a eu recours à la

visualisation à travers une déconstruction : « l’élève a décomposé le solide en plusieurs parties pour déterminer son volume » (annexe 2; analyse de productions d’élèves sans savoir de formation; production 1 : L4). Il admet que la visualisation est également mise en œuvre

par la reconnaissance de figures géométriques dans la production 2 : « L’élève connaît ce que c’est qu’un triangle rectangle. L’élève connaît ce que c’est qu’un segment » (annexe 2; analyse de productions d’élèves sans savoir de formation ; production 2 : L19-L20). Selon

Yannick, les élèves mettent en outre en œuvre la visualisation par l’utilisation d’instruments de géométrie : « l’élève sait utiliser une équerre pour tracer un angle droit » (annexe 2;

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analyse de productions d’élèves sans savoir de formation; production 2 : L20). Yannick

indique par ailleurs que l’élève, auteur de la production 1, est capable de mettre à contribution un raisonnement à partir des calculs d’aires : « L’élève sait manifestement comment calculer l’aire d’un rectangle. Il sait calculer l’aire d’un triangle. Et l’élève sait que l’aire totale d’un solide est égale à la somme des aires des faces qui le compose » (annexe 2; analyse de productions d’élèves sans savoir de formation; production 1 : L6-L8). Yannick montre ici sa

capacité à décrire les démarches en des termes positifs c’est-à-dire en indiquant ce que font les élèves et non ce qu’ils auraient dû faire. Yannick semble donc adopter la posture de l’enseignant capable de décrire les démarches des élèves sans émettre de jugement de valeur. Pour le critère C2, Yannick identifie deux erreurs dans les productions 1 et 2 qu’il estime être

en lien avec les raisonnements des élèves. Pour la production 1, il s’agit d’une confusion entre les concepts de volume et d’aire : « … il confond les notions de volume et d’aire. Au lieu de calculer le volume, il calcule l’aire de chaque face » (annexe 2; analyse de productions d’élèves sans savoir de formation; production 1 : L4-L6). Dans la production 2, Yannick

pointe une induction effectuée à partir d’un nombre très limité de cas : « … il circonscrit les lieux géométriques des points N et P à une seule position » (annexe 2; analyse de productions d’élèves sans savoir de formation; production 2 : L20-L21). Ces descriptions pointent l’un ou

l’autre des deux registres ce qui montre une influence de la posture de l’ancien élève. Pour le critère C3, Yannick affirme que : « l’élève ignore une propriété de son cours

nécessaire pour résoudre ce problème » (annexe 2; analyse de productions d’élèves sans savoir de formation; production 2 : L21-L22). Il pointe ici les « caractéristiques de l’élève »

qui pourraient amener l’élève à ne pas faire l’effort d’apprendre. Il est possible de voir là l’expression de « rapports traditionnels à l’erreur » traduisant une influence de la posture de l’ancien élève.

Pour le critère C4 et concernant la production 1, Yannick indique que :

Pour aider l’élève à prendre conscience de son erreur, à savoir sa confusion des concepts volume et aire, il suffit de faire des comparaisons. Apprendre à l’élève que volume veut dire contenance, capacité. Si on prend une pièce, son volume c’est l’espace intérieur de la salle qui se constitue en trois dimensions, à savoir la longueur, la largeur et la côte ou hauteur. Dans la formule de calcul d’un volume, on doit donc retrouver trois valeurs. En l’occurrence, aire rime avec surface, c’est

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la valeur chiffrée d’une surface. Celle-ci est donc bidimensionnelle, car une surface comprend toujours et seulement une longueur et une largeur sauf le cas d’un cercle. Si donc la formule de l’élève ne prend que deux dimensions, alors il s’agit d’une aire et non d’un volume (annexe 2; analyse de productions d’élèves sans savoir de formation; production 1 : L9-L17).

Concernant la production 2, Yannick résume l’aide à une explication de la construction : « pour aider l’élève à réaliser son erreur, il suffit de tracer un cercle et un triangle inscrit dans celui-ci avec de ses côtés comme diamètre du cercle. Alors, il réalise que tout point pris sur le cercle, autre que A et B, à chaque fois le triangle est rectangle » (annexe 2; analyse de productions d’élèves sans savoir de formation; production 2 : L26-L28).

Le projet d’intervention de Yannick porte donc essentiellement sur le raisonnement déductif. Cela met à jour une dimension épistémique de ses rapports à faire apprendre de modalité 1. En effet, Yannick fait appel à la visualisation dans sa fonction d’illustration. Autrement dit, une fois le dessin réalisé, Yannick ne base son intervention que sur le raisonnement déductif sans exploration graphique. En outre, le type d’aide préconisée par Yannick se ramène à des explications soit des constructions à réaliser, soit des démarches démonstratives à orienter. Cela nous amène à considérer qu’il pourrait privilégier un style explicatif traduisant une préoccupation pour l’enseignement. Yannick semble par conséquent agir sous influence de la posture de l’ancien élève.

3.2.2.2 Avec savoirs de formation

Pour le critère C1 et concernant la production 3, Yannick affirme que : « L’élève utilise le

paradigme G1, il s’appuie sur le dessin et sur l’expérience » (annexe 2; analyse de productions d’élèves avec savoirs de formation; production 3 : L4). Il reconnaît ainsi la mise

œuvre de la visualisation en faisant référence au paradigme G1 (Houdement et Kuzniak, 1999). Ce savoir de formation est également mis à contribution pour décrire la visualisation mise en œuvre dans la production 4 : « L’élève reste dans le paradigme G1 [...] Il a construit un carré et se retrouve donc avec quatre angles de 90°» (annexe 2; analyse de productions d’élèves avec savoirs de formation; production 4 : L15-L17). Le fait que Yannick ait recours

au savoir de formation relatif au concept de paradigme montre qu’il pourrait adopter la posture de l’étudiant. Par ailleurs, Yannick qualifie les raisonnements de l’élève auteur de la production 4 de « purement intuitif » du fait que celui-ci se base exclusivement sur la

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visualisation : « il reste sur un raisonnement purement intuitif en s’appuyant sur la figure » (annexe 2; analyse de productions d’élèves avec savoirs de formation; Production 4 : L15-

L16). Il ne fait référence à aucun savoir de formation pour décrire et pour qualifier les

raisonnements des élèves. Il semblerait que ces savoirs paraissent peu opératoires à Yannick. Ce qui le place dans la posture de l’ancien élève n’accordant que très peu de valeur aux savoirs de formation pour résoudre les problèmes de la pratique. C’est ce qui pourrait expliquer qu’il préfère soit les évoquer, sans expliciter, les raisons qui justifient ce recours, soit s’en passer dans ses analyses. Cela peut être interprété comme un argument en faveur de l’existence d’une tension entre les postures de l’ancien élève et de l’étudiant. Cette tension pourrait expliquer une certaine conservation des rapports aux savoirs de Yannick qui semble continuer à être préoccupé par le raisonnement déductif.

Pour le critère C2 et les erreurs en lien avec la visualisation, Yannick considère que le fait

que l’élève auteur de la production 3 s’appuie sur le dessin est une erreur. Il signale aussi une assimilation du cas du quadrilatère au cas du carré dans la production 3 : « il circonscrit les quadrilatères au seul carré » (annexe 2; analyse de productions d’élèves avec savoirs de formation; production 3 : L19). On reconnaît là l’apprenant formé à se méfier de la

visualisation, source potentielle d’erreur, tout au long de sa scolarité qui adopte donc ici la posture de l’ancien élève. S’agissant des erreurs de raisonnement, Yannick indique une confusion aire/volume dans la production 3 : « l’élève n’a pas fait la différence entre aire et volume » (annexe 2; analyse de productions d’élèves avec savoirs de formation; production 3 : L5-L6). Il évoque pour cette même production, l’utilisation d’une formule erronée : « La

démonstration de l’élève s’appuie sur une formule erronée » (annexe 2; analyse de productions d’élèves sans savoir de formation ; production 3 : L7). Enfin, il signale

l’application d’une opération inappropriée dans la production 4 :

Au lieu donc de faire une somme, l’élève se retrouve à faire une multiplication à savoir 90° × 4 = 360° … L’élève démarre déjà dans l’erreur, car il ne respecte pas l’énoncé au lieu de faire une somme il effectue une multiplication, mais si on se fond dans sa logique, il trouve la réponse » (annexe 2; analyse de productions d’élèves avec savoirs de formation; production 4 : L18-L21).

Cette description des erreurs montre que Yannick qualifie certaines démarches d’erreur sans réellement expliquer en quoi celles-ci sont erronées. Il parle ainsi de « formule erronée » ou « d’opération inappropriée » sans que l’on comprenne pourquoi cette formule est « erronée »

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ni ce qui constitue le caractère « inapproprié » de son opération. On reconnaît là la une manifestation de la posture de l’ancien élève qui pourrait sous-estimer l’utilité d’une analyse approfondie des erreurs des élèves.

Pour le critère C3, Yannick ne propose aucune hypothèse sur les origines des erreurs

contenues dans les productions 3 et 4. La posture de l’ancien élève pourrait une fois de plus avoir contrarié une analyse approfondie de ces productions. Les savoirs de formation sur les hypothèses pouvant expliquer les origines des erreurs semblent être considérés comme des savoirs théoriques sans lien direct avec la pratique. Il pourrait s’agir là d’une manifestation de la posture de l’ancien élève. Cela pourrait expliquer que ces savoirs de formation soient très peu mis à contribution par Yannick dans ses analyses.

Pour le critère C4 et dans le cas de la production 3, Yannick affirme : « pour aider l’élève, il

faut trouver des méthodes pour lui faire apprendre son cours (interrogations, rappels du cours pendant les travaux dirigés). Il faut également aider l’élève à faire la différence entre l’aire qui est la valeur d’une surface et le périmètre qui lui est la largeur du pourtour d’une figure » (annexe 2; analyse de productions d’élèves avec savoirs de formation; production 3 : L10-

L13).

Concernant la production 4, il considère que : « pour aider l’élève à réaliser son erreur, il suffit de lui faire comprendre que quadrilatère signifie à quatre côté et donc le carré n’est qu’un cas particulier » (annexe 2; analyse de productions d’élèves avec savoirs de formation; production 4 : L22-L23). Ces projets d’intervention montrent une préoccupation pour le

raisonnement déductif qui pourrait renvoyer aux modalités 0 et 1. Ils montrent également que Yannick pourrait privilégier un style explicatif révélateur d’une préoccupation pour l’enseignement. Yannick pourrait donc adopter la posture de l’ancien élève.

3.2.2.3 Bilan

Ces analyses mettent en lumière une influence des interactions entre les postures adoptées par Yannick sur ses rapports aux savoirs. Ces rapports aux savoirs se structurent autour de l’assimilation de l’apprentissage et l’enseignement de la géométrie à un enseignement de la démonstration. En effet, pour Yannick les erreurs pourraient être évitées par la multiplication d’exercices et par l’exposé de méthodes. Ce qui traduit des rapports traditionnels à l’erreur.

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En outre, ces rapports aux savoirs pourraient intégrer une dimension épistémique de modalités 0 et 1. La formation à l’interprétation ne semble pas avoir perturbé la prégnance de l’influence de la posture de l’ancien élève sur les interventions de Yannick. Ainsi, du fait de cette influence, Yannick s’est illustré par une résistance à la mobilisation des savoirs de formation pourtant discutés lors de la séquence de formation. Les rapports aux savoirs de Yannick n’ont par conséquent pas connu de transformation notable lors de la formation à l’interprétation et semblent même avoir été confortés.