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Les déficits prévus dans le programme de stabilité pour les années 2015 à 2017 reposent sur l’hypothèse du respect des objectifs pour 2014.

Tout écart défavorable sur les résultats de 2014 par rapport à ces objectifs risque de se reporter sur ceux des années suivantes. Au-delà de cet aléa tenant à l’année 2014 (cf. chapitre III), plusieurs facteurs de risque pèsent sur les soldes de 2015 à 2017.

1 - Les risques spécifiques sur les soldes de 2015

La réduction du déficit public est du même ordre de grandeur (0,8 point de PIB) chacune des années 2015 à 2017, mais l’année 2015 est caractérisée, dans le programme de stabilité, par une croissance économique plus faible et une baisse plus forte des prélèvements obligatoires. En conséquence, l’effort prévu sur les dépenses est plus

important, avec une baisse en volume des dépenses publiques de 0,3 % en 2015 contre des hausses de 0,3 et 0,2 % en 2016 puis 2017.

Les risques sur les recettes ne sont pas négligeables. En effet, la croissance pourrait être moins riche en emplois et salaires que prévu et l’élasticité des recettes pourrait être un peu plus faible.

Mais la principale difficulté pour 2015 est de réaliser des économies à hauteur de 21 Md€. Le programme de stabilité ne donne que des indications partielles sur la nature de ces économies et leurs modalités de mises en œuvre.

Il apparait que beaucoup d’économies seront identiques chaque année ou croissantes dans le temps, ce qui est peu compatible avec une concentration de leurs effets sur 2015. La baisse des dotations aux collectivités locales serait ainsi la même (3,7 Md€) chaque année. Les nouvelles réformes des régimes complémentaires et de l’Unédic qui sont anticipées n’interviendraient probablement pas avant 2015 avec des effets surtout sur 2016 et 2017.

Les économies dans le domaine de la santé seraient croissantes dans le temps, la progression prévue de l’ONDAM étant de 2,1 % en 2015, de 2,0 % en 2016 et 1,9 % en 2017, alors que l’objectif attendu d’économies sur l’ensemble des dépenses publiques est le plus important en 2015.

Seule la désindexation pendant un an des prestations sociales porte principalement sur 2015.

Le respect de l’objectif de croissance des dépenses publiques pour 2015 repose en fait sur l’hypothèse d’une forte baisse de l’investissement local et sur la construction d’un budget très serré pour l’État .

L’investissement des collectivités locales diminuerait de 6,9 % en 2015 (soit une baisse d’environ 3 Md€) après une diminution de 2,5 % en 2014. Certes, les dépenses d’équipement des communes sont généralement faibles dans les deux premières années d’une mandature et la baisse des dotations de l’État aura probablement pour effet de les réduire encore plus. Toutefois, les collectivités locales pourraient moins réduire leurs investissements en augmentant le taux des impôts locaux et en empruntant plus, leurs conditions de financement s’étant améliorées.

Le programme de stabilité repose de surcroît sur l’adoption d’un budget de l’État pour 2015 caractérisé par une baisse significative des crédits dans le champ de la norme en valeur, ce qui suppose de profondes réformes.

Or les économies qui résultent de la démarche de modernisation de l’action publique (MAP) sont encore loin d’être à la hauteur de cet enjeu (cf. chapitre V). Dans ces conditions, la construction du budget de l’État pour 2015 sera très tendue alors qu’elle est déterminante pour respecter les objectifs de dépenses et de déficit publics.

Le respect des objectifs de déficit public, effectif et structurel, pour 2015 sera, dans ces conditions, très difficile.

2 - Les risques spécifiques sur les soldes de 2016 et 2017 La réduction des déficits, effectif et structurel, en 2016 et en 2017 est supposée s’opérer à un rythme moins élevé qu’en 2015, mais elle suppose de maintenir dans la durée un effort très significatif. Une croissance des dépenses publiques de moins de 0,3 % en volume en moyenne sur deux ans (2016 et 2017) serait inédite, surtout après une baisse en 2015.

Pour ce qui concerne les recettes, la croissance du PIB pourrait être moins forte que prévu mais, en revanche, l’élasticité des recettes au PIB pourrait être un peu plus élevée, notamment en 2017.

3 - Les risques sur l’endettement

Le programme de stabilité prévoit une stabilisation de la dette publique, à 95,6 % du PIB entre fin 2014 et fin 2015 puis sa décrue jusqu’à 91,9 % du PIB fin 2017. Cette trajectoire suppose que la variation de la dette d’une année à l’autre est exactement égale au montant du déficit public. Autrement dit, les opérations financières (attributions et remboursements de prêts, cessions et acquisitions d’actions, etc.) auraient un impact globalement nul, ce qui suppose notamment l’absence de toute nouvelle intervention en faveur d’établissements bancaires français, en particulier de ceux qui sont issus de la restructuration de Dexia, ou de pays en difficulté de la zone euro par l’apport de nouveaux fonds propres au mécanisme européen de stabilité.

En outre, toute variation du déficit public, à la hausse, et du PIB, à la baisse, par rapport au programme de stabilité se traduirait automatiquement par un rapport de la dette publique au PIB plus élevé.

Il est donc probable que l’endettement public, rapporté au PIB, continue à augmenter au moins jusqu’à la fin de 2015.

______________________ CONCLUSION _____________________

Les déficits publics effectifs prévus dans le programme de stabilité sont plus élevés que ceux inscrits dans la loi de programmation et dans le rapport économique, social et financier (RESF) de septembre 2013.

L’équilibre structurel des comptes publics, prévu en 2016 dans la loi de programmation et le RESF, est reporté à 2017. Si la loi organique ne fixe pas d’échéance pour l’atteindre, en renvoyant sa fixation à la loi de programmation, cette nouvelle trajectoire devra être validée par le Conseil de l’Union européenne et, le cas échéant, inscrite dans une nouvelle loi de programmation.

Le programme de stabilité intègre 35 Md€ de baisse de prélèvements obligatoires correspondant au pacte de responsabilité et de solidarité décidé au début de 2014 (26 Md€) et à la montée en charge du CICE (9 Md€), mais l’augmentation d’autres prélèvements, prévue dans le programme, limite la baisse nette des prélèvements obligatoires à 14 Md€. Pour être compatible avec la réduction prévue du déficit public, cette baisse des prélèvements impose un fort ralentissement de la croissance des dépenses.

Pour tenir compte des mesures décidées début 2014 dans le cadre du pacte de responsabilité et de solidarité, ce ralentissement est encore plus important que celui prévu à l’automne 2013. L’augmentation des dépenses publiques de 2014 à 2017 est ainsi limitée à 62 Md€, contre 70 Md€ à l’automne.

Les 50 Md€ d’économies annoncées pour atteindre ce nouvel objectif sont mesurées par différence avec la croissance tendancielle des dépenses publiques estimée par le Gouvernement sur cette période à 112 Md€. Cette croissance tendancielle repose sur des hypothèses conventionnelles peu documentées, non harmonisées entre les pays européens, et qui ont été révisées à la baisse dans le programme de stabilité, conduisant à maintenir inchangé l’effort d’économie. S’il est logique que la croissance tendancielle des dépenses soit révisée périodiquement, les conventions et méthodes utilisées pour l’estimer et mesurer, par différence, les économies nécessaires au respect des objectifs devraient être rendues publiques.

Les économies annoncées ne sont pas toutes documentées et certaines sont hypothétiques car elles devront être réalisées par des administrations publiques dont l’État ne maîtrise pas les dépenses : les régimes complémentaires d’assurance vieillesse, l’Unédic et, surtout, les collectivités territoriales à hauteur de 11 Md€. Ces dernières peuvent en effet compenser en partie la baisse de leurs dotations par une hausse des taux des impôts locaux ou un accroissement de leur endettement.

Le respect des objectifs de dépenses du programme de stabilité est loin d’être acquis. Il existe aussi des risques non négligeables sur les prévisions de recettes tenant notamment au scénario macroéconomique retenu. Le Haut Conseil des finances publiques a notamment jugé optimistes les prévisions de croissance pour 2016 et 2017.

Les déficits effectifs et structurels, ainsi que la dette publique, pourraient donc être plus élevés que ceux inscrits dans le programme de stabilité. Ce risque est plus particulièrement important pour l’année 2015, caractérisée par un objectif d’économies plus élevé que pour les suivantes. Les déficits prévus pour 2016 et 2017 ne sont pas pour autant faciles à atteindre car une croissance des dépenses publiques de moins de 0,3 % en volume en moyenne sur deux ans (en 2016 et 2017) après une baisse (en 2015) serait inédite.

Chapitre V Des mesures structurelles d’économies à

engager

La modernisation de l’action publique (MAP) engagée par le gouvernement issue des élections de 2012 pourrait permettre d’identifier une partie importante des 50 Md€ d’économies nécessaires sur les années 2015-2017 pour atteindre les objectifs de croissance des dépenses du programme de stabilité. Il apparaît toutefois que le montant des économies pouvant résulter des travaux entrepris dans le cadre de la MAP est très en-deçà des objectifs du programme de stabilité et que d’autres mesures doivent être envisagées.

Dans son rapport de juin 2013 sur la situation et les perspectives des finances publiques, la Cour a présenté, de façon plus complète que les années précédentes, les pistes d’économies qui résultaient, pour toutes les catégories de dépenses publiques, de ses travaux sur l’efficience des politiques publiques. Cette année, elle centre ses observations sur les pistes d’économies structurelles envisageables dans trois domaines qui lui paraissent particulièrement importants pour la maîtrise des finances publiques dans les années 2015-2017 : la masse salariale des administrations publiques, les prestations d’assurance maladie et les dépenses des collectivités territoriales.

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