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A - La distinction nécessaire entre objectifs et règles budgétaires

La loi organique prévoit que les lois de programmation définissent les « orientations pluriannuelles des finances publiques » qui comprennent notamment, pour chaque exercice concerné, les objectifs et règles prévus par les textes communautaires : l’objectif à moyen terme de

solde structurel, la trajectoire des soldes structurels et effectifs, les efforts structurels annuels112 (article 1 de la loi organique).

Ces « orientations pluriannuelles » comprennent aussi des règles et objectifs non prévus par les textes communautaires (norme de dépenses de l’État ou objectif de dépenses des régimes obligatoires de base de sécurité sociale, par exemple) (article 2).

L’article 5 prévoit enfin qu’un rapport annexé au projet de loi de programmation et donnant lieu à approbation du Parlement présente des éléments d’information tels que les perspectives de recettes, de dépenses et de solde des administrations publiques et de leurs sous-secteurs, ou les hypothèses et méthodes retenues pour établir la programmation.

Dans son rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques de juin 2013, la Cour avait noté que les dispositions seulement indicatives et celles plus contraignantes des lois de programmation

« pourraient être mieux distinguées ». Cette distinction devrait trouver à s’appliquer tant aux objectifs et règles d’origine communautaire qu’à ceux dont l’origine est nationale.

1 - Les objectifs et règles prévus par les textes communautaires a) Les obligations communautaires

Le traité de Maastricht a créé des règles budgétaires communautaires, en fixant des limites au déficit public effectif (3,0 % du PIB) et à la dette publique (60 % du PIB) qui ne doivent pas être dépassées, sauf circonstances exceptionnelles, et en mettant en place une procédure de correction des « déficits publics excessifs ». S’il a, comme tout traité, une autorité supérieure à celle des lois, il ne prévoit pas l’inscription de ces règles dans les législations nationales. En particulier, les programmes de stabilité, qui doivent présenter l’évolution des finances publiques à moyen terme, ne sont pas inscrits dans le droit français bien qu’ils fassent l’objet d’un vote du Parlement.

112 Le règlement du 16 novembre 2011 prévoit que, pour déterminer si des progrès suffisants ont été accomplis en vue de la réalisation de l’OMT, le Conseil et la Commission examinent l’augmentation annuelle des dépenses publiques corrigée des mesures nouvelles en matière de recettes par référence à la croissance potentielle du PIB, ce qui revient en pratique à suivre un indicateur proche de l’effort structurel.

Le traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance (TSCG) au sein de l’Union économique et monétaire, signé en 2012, a instauré de nouvelles règles budgétaires selon lesquelles le déficit structurel ne doit pas dépasser un objectif cible à moyen terme (OMT) et, sinon, doit converger rapidement vers cet OMT. Un mécanisme de correction doit être « déclenché automatiquement » si des « écarts importants » sont constatés par rapport à l’OMT ou à la trajectoire d’ajustement.

Le TSCG a innové par rapport au traité de Maastricht en ajoutant que « ces règles prennent effet dans le droit national des parties contractantes… au moyen de dispositions contraignantes et permanentes, de préférence constitutionnelles, ou dont le plein respect et la stricte observance tout au long des processus budgétaires nationaux sont garantis de quelque autre façon ».

b) La différence entre les objectifs de déficit effectif et la règle budgétaire d’équilibre structurel

Parmi les dispositions des lois de programmation prévues à l’article 1 de la loi organique, seule la trajectoire de solde structurel a les caractéristiques d’une règle budgétaire au sens de la directive de 2011. En effet, la loi organique prévoit son suivi par un organisme indépendant, le Haut Conseil des finances publiques, et un mécanisme de correction en cas d’écart important par rapport à la trajectoire fixée. Le Gouvernement et le Parlement sont libres de choisir les mesures de correction, sous le contrôle du Conseil constitutionnel.

La trajectoire des soldes effectifs, prévue aussi à l’article 1 de la loi organique, est un objectif indicatif. Comme la Cour l’a noté dans son rapport sur les finances publiques de 2013, une règle contraignante de solde effectif est très difficile, voire impossible, à tenir en période de crise. En outre, elle peut conduire à un relâchement inopportun de la discipline budgétaire lorsque la conjoncture économique est bonne.

L’effort structurel est aussi un objectif indicatif. En effet, la loi organique ne prévoit ni suivi par un organisme indépendant, ni correction au cas où il ne serait pas réalisé.

c) La clarification des dispositions de la loi de programmation Dans la loi de programmation de décembre 2012, l’article 2 présente la trajectoire des finances publiques à la fois en termes de solde effectif et de solde structurel, pour l’ensemble des administrations

publiques et, pour le solde effectif, par sous-secteur113. L’article liminaire des lois de finances doit être cohérent avec la trajectoire de solde structurel décrite à cet article 2. L’article 3 présente « l’objectif d’effort structurel ».

Afin de bien distinguer règles budgétaires et objectifs indicatifs, il serait souhaitable de ne faire figurer dans l’article 2 que la seule trajectoire de solde structurel, parce qu’elle donne lieu à une règle budgétaire en droit national.

L’article 3 pourrait, comme actuellement, présenter l’objectif d’effort structurel qui est indicatif.

Un article 4 nouveau pourrait décrire la trajectoire du solde effectif, avec sa décomposition par sous-secteurs et par composante (conjoncturelle, structurelle et exceptionnelle), en précisant qu’il s’agit d’un objectif indicatif dont la réalisation dépend de l’évolution de la conjoncture économique114.

2 - Les objectifs et règles d’origine nationale

Les chapitres II et III de la loi de programmation sont consacrés respectivement aux dépenses des administrations publiques et aux seules dépenses de l’État . Une distinction pourrait être faite entre les articles dont les dispositions ont les caractères d’une règle au sens de la directive de 2011 et ceux qui ont une nature seulement indicative.

a) Les règles

Les normes de dépenses de l’État ont des caractéristiques de règles budgétaires. Les crédits sont en effet pour la plupart limitatifs et il existe des dispositifs de contrôle et de pilotage qui permettent de les faire respecter. La Cour des comptes, dans son rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques, alerte le Parlement sur les risques de dépassement en cours d’année.

113 L’article 1 approuve le rapport annexé.

114 Un article 4 bis pourrait reprendre l’actuel article 4 qui précise « les objectifs », en pourcentage du PIB, de dépenses publiques, de taux de prélèvements obligatoires et d’endettement en précisant qu’il s’agit d’objectifs indicatifs.

L’objectif national des dépenses d’assurance maladie s’analyse comme une règle budgétaire au sens de la directive de 2011. En effet, il existe un dispositif de suivi et de pilotage infra-annuel ; il est suivi par un organisme indépendant, le comité d’alerte, qui peut déclencher des mesures de correction si un risque de dépassement supérieur à un seuil prédéfini apparaît en cours d’année ; comme il est fixé en niveau sur plusieurs années, un dépassement de l’objectif une année donnée devrait entraîner la mise en œuvre de mesures correctrices permettant de le respecter l’année suivante. Il est d’ailleurs compris dans le recensement des règles budgétaires nationales effectué par la Commission européenne.

b) Les objectifs

Les dépenses des régimes de base de sécurité sociale, pour la plupart, sont des dépenses de guichet rendues obligatoires par la législation en vigueur et ne peuvent être que des objectifs.

L’incidence minimale des mesures nouvelles en matière de prélèvements obligatoires est un simple objectif et son respect est difficile à vérifier. Comme l’a noté la Cour dans son référé de décembre 2013 sur les prévisions de recettes fiscales de l’État , le chiffrage de ces mesures nouvelles pose de difficiles problèmes méthodologiques dont le traitement par le ministère des finances n’est pas assez transparent.

Si des objectifs de dépenses des administrations publiques locales et des administrations de sécurité sociale, au sens des comptes nationaux, étaient inscrits dans les lois de programmation, comme il est envisagé plus loin, il ne s’agirait que d’objectifs indicatifs, seule la mise en place éventuelle ultérieure de mécanismes de pilotage et de suivi par un organisme indépendant, comme pour l’ONDAM, étant susceptible de les faire évoluer vers des règles budgétaires.

c) Les dispositions de portée incertaine

Si les normes de dépenses de l’État ont le caractère de règles budgétaires, la portée des plafonds de crédits par mission figurant à l’article 11 est moins certaine. Tout en respectant la norme globale, les crédits par missions sont fréquemment redéployés d’une loi de finances initiale à l’autre et par les lois de finances rectificatives en cours d’exécution. Comme la Cour l’avait noté dans son rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques de juin 2011, le suivi du respect des plafonds de crédits par mission du budget triennal est quasiment impossible du fait des changements incessants de périmètre des missions.

B - Adapter certaines règles pour les rendre plus

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