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1.3 Les r´ egimes climatiques et l’abattement en Europe

1.3.3 Une revue des r´ egimes climatiques

Cette revue des r´egimes n’est pas exhaustive. Sans explorer en d´etail les r´egimes, elle en pr´esente les principaux, ceux pour lesquels les abattements r´egionaux ont ´et´e calcul´es par les mod`eles sous la contrainte climatique (450 ppmv CO2-´eq.). Cette sous-section

fournit ainsi les grandes lignes des r´egimes afin de savoir selon quelle m´ethode les chiffres europ´eens de r´eduction (donn´es en 1.3.4) ont ´et´e ´etablis.

Le r´egime Multi-´etapes

Initialement d´evelopp´ee par Gupta (1998) [106], cette approche raisonne en termes de partage international de l’effort. L’actuel protocole de Kyoto peut ˆetre consid´er´e comme une version basique du r´egime multi-´etapes.

On retient d’abord un profil d’´emission `a long-terme qui stabilise les concentrations de GES au niveau d´esir´e. Les pays sont divis´es en diff´erents groupes aux caract´eristiques ´

economiques et ´ecologiques comparables, groupes d´elimit´es par des seuils (de revenu par habitant ou d’´emission par habitant).

Chaque groupe se voit assigner une cat´egorie d’engagement, par exemple : contrˆole de l’intensit´e carbonique de l’´economie, stabilisation des ´emissions absolues ou par tˆete, puis r´eduction des rejets, le tout avec un niveau d’effort qui croˆıt graduellement dans le temps. Au cours de leur d´eveloppement, les pays passent ainsi sucessivement par plusieurs groupes ; les pays au d´eveloppement comparable poss`edent des engagements similaires. Dans ce syst`eme, la participation s’´etend graduellement : le nombre de pays participants s’accroˆıt avec un effort individuel qui croˆıt sur la p´eriode. A noter que l’ensemble des parties de l’Annexe 1 se place directement dans la derni`ere ´etape d`es 2012 (r´eduction des ´

emissions), les ´etapes inf´erieures ne s’appliquant qu’aux pays hors Annexe 1. Dans l’ultime ´

une clef qui peut ˆetre les ´emissions par habitant, le revenu par habitant ou l’intensit´e carbonique (burden-sharing).

En r´esum´e, le r´egime multi-´etapes est bas´e sur les principes de capacit´e et de respon- sabilit´e mais inclut un principe ´egalitaire (ce dans l’usage d’une clef de partage par

habitant) [69]24.

La proposition  Dialogue Nord-Sud 

Comme le r´egime multi-´etapes, cette approche est `a groupes multiples mais elle con- sacre un plus grand souci d’´equit´e : les r´eductions sont plus profondes dans les pays du Nord, qui prennent la tˆete de la lutte contre le r´echauffement, alors que les pays du Sud ont des engagements diff´erenci´es.

Les pays sont divis´es en six groupes aux conditions comparables (dont quatre groupes pour les pays hors annexe 1)25 selon un indice agr´eg´e pond´er´e par quatre indicateurs de base. Ces derniers se rapportent au potentiel de r´eduction, `a la capacit´e et `a la responsabilit´e : intensit´e carbonique du PIB, rejets par habitant, ´emissions cumul´ees par habitant depuis 1990 et revenu par habitant ou Indicateur de Developpement Humain (IDH). Cependant, seules les parties hors Annexe 1 sont effectivement r´ef´erenc´ees par l’indicateur.

Ensuite, chaque groupe de pays se voit assigner un type d’engagement avec un niveau d’effort : r´eduction absolue ou limitation des ´emissions, cibles non contraignantes, mesures qualitatives notamment pour les cat´egories inf´erieures (pays les moins avanc´es) [63]. Ou alors, une trajectoire d’´emission est sp´ecifi´ee pour la p´eriode de projection : contrˆole lin´eaire des ´emissions pour atteindre un objectif chiffr´e en 2020 puis r´eductions de x % par d´ecennie [61].

Le r´egime  Contraction et Convergence

D´evelopp´e `a l’origine par Meyer (2000), le r´egime Contraction et Convergence par ha- bitant (CC) est en rupture avec le protocole de Kyoto car au lieu de fixer des objectifs de r´eduction, il d´efinit des droits de rejet en vertu des principes de souverainet´e et d’´egalit´e dans l’utilisation du bien atmosph´erique (logique de partage de ressource).

Comme dans le r´egime multi-´etapes, un profil global d’´emission est dessin´e selon un ob- jectif de stabilisation des concentrations de GES. Ce budget d´´emission est ensuite r´eparti entre les diverses parties afin que les ´emissions par habitant convergent vers une moyenne mondiale, d´efinie de telle fa¸con que les ´emissions globales suivent la trajectoire mondiale recherch´ee [121]. En d’autres termes, les volumes de CO2 ´emis par chaque r´egion ´evoluent

afin de correspondre `a la distribution de la population sur la plan`ete. L’ensemble des parties participe donc apr`es 2012, dot´ees de droits d’´emission convergents (lin´eairement 24. Par ailleurs, on peut pr´esenter ici un r´egime moins consensuel bas´e ´egalement sur la r´epartition internationale de l’effort (burden-sharing) avec extension graduelle de la participation : la propo-

sition br´esilienne, n´ee lors des n´egociations du Protocole de Kyoto (1997) par une proposition de la

d´el´egation br´esilienne pour distribuer la charge de r´eduction entre les parties de l’Annexe 1. Elle est clai- rement orient´ee par le principe de responsabilit´e, en r´epartissant l’effort d’abattement entre les parties de l’Annexe 1 selon leurs responsabilit´es respectives, c’est-`a-dire selon l’accumulation de leurs rejets pass´es (contribution `a la hausse de temp´erature ou ´eventuellement d’autres indicateurs).

Ce principe peut ˆetre ´etendu `a l’´echelle plan´etaire par une allocation de l’effort entre l’Annexe 1 et le reste du monde selon la contribution individuelle de chaque pays `a la hausse des temp´eratures. Sur cette base, en fonction de son degr´e de responsabilit´e dans le r´echauffement, chaque pays participant se voit attribuer un objectif de r´eduction absolue afin de satisfaire le profil global d’´emissions. La participation des zones hors Annexe 1 est en outre sujette `a un seuil de revenu afin de respecter le besoin et le droit au d´eveloppement.

25. Annexe 2, Annexe 1 mais non Annexe 2, pays nouvellement industrialis´es, pays `a industrialisation rapide, autres pays en d´eveloppement, pays les moins d´evelopp´es.

ou non) dans le temps, selon un taux de convergence pr´ealablement d´efini.

Deux dates de convergence sont g´en´eralement envisag´ees : 2050 et 2100. Les pays dont les rejets par habitant sont sup´erieurs `a la moyenne mondiale (en g´en´eral les pays industria- lis´es) sont contraints de r´eduire leurs ´emissions tandis que les pays se situant en dessous (en g´en´eral les pays en d´eveloppement) peuvent augmenter leurs rejets jusqu’`a atteindre la moyenne [158].

Le r´egime  Common but Differentiated Convergence

Une variante,  Common but Differentiated Convergence  (CDC), due `a Hohne

(2006), vise pareillement une ´egalisation internationale des ´emissions par habitant mais selon un timing diff´erenci´e : les parties hors Annexe 1 ne d´ebutent leur mouvement de convergence que lorsque leurs rejets par tˆete atteignent un certain pourcentage de la moyenne mondiale. Les pays n’ayant pas atteint ce seuil peuvent toutefois prendre part `a l’effort par le biais des M´ecanismes de D´eveloppement Propre ou en adoptant des cibles de r´eduction [121].

Le CDC introduit le principe de capacit´e et des besoins fondamentaux ainsi que celui de responsabilit´e historique puisque les r´egions hors Annexe 1 disposent d’un d´elai accru pour accomplir leur d´eveloppement. De plus, leur participation, d´ependant de la moyenne mondiale d’´emission, se trouve de fait li´ee `a l’effort r´ealis´e dans l’Annexe 1 [121].

L’approche Tryptique

Conceptualis´ee initialement par Blok (1997) pour r´epartir l’objectif commun d’abatte- ment entre les pays membres de l’Union Europ´enne durant la premi`ere phase du protocole de Kyoto, l’approche tryptique constitue une vision sp´ecifique. Cette approche assigne des engagements nationaux de r´eduction selon la situation technologique et sectorielle par- ticuli`ere du pays, en prenant tout particuli`erement en compte les indicateurs li´es aux ´

emissions et `a l’abattement des rejets. Des droits d’´emission sont d´efinis pour les divers secteurs, quotas qui sont somm´es pour obtenir une cible nationale. Seule cette derni`ere ´

etant l´egalement contraignante, chaque pays peut accomplir son objectif de r´eduction avec une efficience sectorielle (cost-efficient). N´eanmoins, des r`egles communes sont d´efinies en ce qui concerne les am´eliorations des intensit´es ´energ´etiques et carboniques, tout en lais- sant de l’espace pour la croissance ´economique.

Ainsi, l’approche tryptique, mˆeme si elle est plus complexe, s’av`ere plus respectueuse des conditions propres de chaque pays en permettant la prise en compte des structures ´

economiques, de la comp´etitivit´e des industries exportatrices et du bilan ´electrique. Ce- pendant, des cibles de long terme peuvent ˆetre adopt´ees pour l’intensit´e en GES de la production ´electrique, pour l’efficacit´e ´energ´etique des industries intensives en ´energie ou alors pour les ´emissions par habitant du secteur domestique (sur la base des informations bottom-up sur les potentiels sectoriels) [67].

En r´esum´e, l’approche tryptique pose le probl`eme en termes de partage de l’effort selon une vision bottom-up mais peut ˆetre impl´ement´ee dans le sens top-down. Elle est en outre bas´ee sur une extension graduelle de la participation.

Les cibles intensit´es

Les cibles prennent la forme de variables dynamiques telles qu’un taux de variation de l’intensit´e carbonique du PIB dans le temps. Cette approche ne requiert au mini- mum qu’un d´eveloppement ´economique moins carbon´e et laisse une plus grande marge de flexibilit´e aux pays. Surtout, elle ne limite pas la croissance ´economique du pays en

cas d’´evolution ´economique moins favorable que pr´evu [121]. Cependant, un tel r´egime pose des consid´erations pratiques et surtout ne garantit pas l’atteinte d’une cible globale d’abattement.

L’approche des efforts comparables dans l’Annexe 1

Pour r´epartir la charge d’abattement au sein des Parties de l’Annexe 1, den Elzen, Hohne et van Vliet (2009) [66] adoptent une approche o`u les droits d’´emission sont cal- cul´es de fa¸con `a accomplir une ´egalit´e selon un crit`ere donn´e :

– Egalit´e du pourcentage de r´eduction sous un baseline (ou sous une ann´ee de r´ef´erence). – Egalit´e des coˆuts marginaux de r´eduction ou des coˆuts moyens de r´eduction.

– Egalit´e des coˆuts totaux de r´eduction rapport´es au PIB ou au nombre d’habitants (autrement dit ´egalit´e du taux d’effort).

Cette approche couvre d’ailleurs le r´egime contraction et convergence (´egalit´e des ´emissions par habitant) et le r´egime tryptique (convergence des standards technologiques ou des cibles sectorielles).

ME DNS CC CDC TRY INT COMP

X X (X) X X X X X X X (X) X X X X X X X X X X X X X X X X X X X X X (X) (X) X X X X X X X X X X X X X X X X X X X X X X X X X X X X X X X X X X X X X X X X X X X (X) X X X bottom‐up quantitatifs qualitatifs non contraignantS emission intensite capacite responsabilite souverainete egalitarisme graduelle universelle differencies egaux predefinis dynamiques Participation internationale Criteres d'equite Problematique Methode Type d'engagementS

Application des engagements

Definition des engagements

besoins fondamentaux

partage de l'effort partage de la ressource

top‐down

Table 1.2 – Caract´eristiques des r´egimes climatiques

Source : tableau construit `a partir de den Elzen et Lucas (2005)

Note : ME = Multi-´etapes, DSN = Dialogue Nord-Sud, CC = Contraction et Convergence, CDC = Common but