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Ressources au travail et stratégies d’ajustement des enseignants face aux exigences

3. Mode d’analyse de données et résultats

3.2. Résultats

3.2.4. Ressources au travail et stratégies d’ajustement des enseignants face aux exigences

Les résultats indiquent que les enseignants élaborent des stratégies flexibles et diversifiées pour s’ajuster aux exigences de leur métier (voir Figure 19). En effet, la conscience professionnelle et l’envie d’aider des élèves sérieux, motivés et respectueux sont une ressource incontournable pour pallier à ces exigences (83 occurrences, soit 25.30%). Plus précisément, les enseignants disent fournir d’importants efforts et se sentent heureux du fait

qu’ils aient un sentiment de responsabilité et travaillent avec des élèves motivés et disciplinés. Le coping évitant constitue aussi l’une des principales stratégies d’ajustement élaborées face aux difficultés du travail de l’enseignant (50 occurrences, soit 15.24%). Il réfère en fait à des stratégies d’évitement (e.g., s’habituer aux contraintes, essayer de les ignorer, moins s’impliquer dans son travail, s’engager davantage dans les activités extra-professionnelles) qui ont pour vocation d’éviter le problème et non pas le résoudre. En outre, il s’avère que les enseignants ont recours à d’autres stratégies de coping dites actives. Parmi elles, nous retenons les efforts déployés pour résoudre le problème de faiblesse du niveau des élèves (40 occurrences, soit 12.20%). Par exemple, les enseignants impliquent les élèves en leur donnant des devoirs à domicile. Ils prévoient des séances de soutien scolaire et simplifient, autant que se peut, les contenus des cours. De la même manière, pour remédier au problème de manque d’outils de travail et de contraintes de déplacement, ces enseignants utilisent leur ordinateur personnel, achètent des outils géométriques, font du covoiturage, etc. (34 occurrences, soit 10.37%). Pour faire face à la longueur des programmes scolaires, les enseignants mobilisent des stratégies diversifiées (27 occurrences, soit 8.23%). A titre d’exemple, ils adaptent le programme au niveau des élèves à travers la sélection des contenus utiles ou le remplacement du contenu préconisé par une vidéo ou un texte plus fonctionnel. Ils prévoient également des heures supplémentaires pour pouvoir terminer lesdits programmes. Pour gérer le problème d’indiscipline et le manque d’assiduité des élèves, les interviewés ont recours à deux stratégies distinctes. La première consiste à gérer ce problème de façon administrative et ferme. Il s’agit par exemple de la prise des mesures disciplinaires, du renvoi des élèves et de l’appel à la direction de l’établissement (23 occurrences, 7.01%). La deuxième stratégie, quant à elle, réfère à une gestion plutôt souple de ce problème via la communication, le dialogue et l’encouragement des élèves concernés (17 occurrences, soit 5.18%). Toujours dans le cadre des stratégies de coping centrées sur le problème, les participants optent

généralement pour le choix d’un contenu commun et/ou le fait de donner la priorité à un niveau plus qu’un autre dans les classes combinées ou hétérogènes (13 occurrences, soit 3.96%). Par ailleurs, les enseignants semblent mobiliser un autre type de stratégie d’ajustement qui est la recherche de soutien social (26 occurrences, soit 7.93%). Cette stratégie consiste à solliciter l’aide des collègues-enseignants, du chef d’établissement et des surveillants généraux lorsqu’ils sont confrontés à des problèmes professionnels.

Figure 19. Ressources et stratégies d’ajustement face aux exigences du métier

Avoir la conscience professionnelle et l’envie d’aider des élèves sérieux et motivés

Recours aux stratégies d’évitement

(désengagement, optimisme, patience,

résignation, etc.)

Gérer la faiblesse du niveau des élèves par la réalisation des séances de soutien, la simplification des cours, la diversification des méthodes pédagogiques, etc.

Mobilisation de stratégies actives pour faire face au manque de moyens de travail et aux contraintes de déplacement (utilisation, de son ordinateur personnel, covoiturage, etc.) Gestion de la longueur des programmes scolaires à travers l’adaptation du contenu des cours aux niveaux des élèves, la sélection des contenus de cours pertinents, l’organisation d’heures supplémentaires, etc. Soutien et recherche de soutien social auprès

des collègues, chef d’établissement,

personnel administratif, etc.

Gestion du problème de l’indiscipline des élèves de façon administrative et ferme (mesures disciplinaires, autoritarisme, faire appel à la direction de l’école, aux parents d’élèves, etc.)

Gestion du problème de l’indiscipline des

élèves de façon souple (dialogue,

communication, etc.)

Gestion des classes combinées et

hétérogènes à travers le choix d’un contenu commun et/ou de donner la priorité à un niveau plus qu’un autre

Autres : Pas de solution pour le problème de sureffectif, travail en petits groupes, auto-formation, etc.

D’autre part, les résultats indiquent que les enseignants n’ont pas recours aux mêmes stratégies de coping selon le cycle d’enseignement où ils officient. En effet, les stratégies d’évitement sont plus utilisées par les enseignants du lycée (24 occurrences), suivis de ceux du primaire (17 occurrences) et de ceux du collège (9 occurrences). Ce sont aussi les enseignants du lycée qui s’appuient davantage sur la conscience professionnelle et l’envie d’aider des élèves sérieux avec 38 occurrences par rapport à ceux du collège (26 occurrences) et ceux du primaire (19 occurrences). De plus, les enseignants du lycée mobilisent davantage les stratégies actives pour gérer la faiblesse du niveau des élèves (19 occurrences) en comparaison avec leurs homologues du collège (9 occurrences) et du primaire (12 occurrences). En revanche, ce sont les enseignants des écoles primaires qui ont plus tendance à mobiliser des stratégies actives pour faire face au manque d’outils de travail et aux difficultés de déplacement (21 fois), comparativement à ceux du collège (5 fois) et à ceux du lycée (8 fois). Les enseignants du primaire ont cependant rarement recours aux stratégies liées à la gestion de l’indiscipline des élèves, que ce soit de façon administrative (1 occurrence) ou d’une manière souple (0 occurrence), alors que ces stratégies occupent une place relativement centrale chez les enseignants du lycée (respectivement 12 occurrences, 10 occurrences) et ceux du collège (respectivement 10 occurrences, 7 occurrences). Par ailleurs, il s’avère les enseignants du primaire ont plus recours aux stratégies visant à remédier au manque des moyens de travail et de déplacement, alors que les enseignants du collège se focalisent davantage sur comment gérer l’indiscipline des élèves. Pour les enseignants du lycée, ils mettent davantage en exergue les stratégies liées à la gestion de la faiblesse du niveau des élèves (voir Tableau 25, Annexe 26).

Comme le révèlent les analyses effectuées selon le milieu d’exercice, la conscience professionnelle et l’envie d’apporter de l’aide à des élèves motivés constituent une ressource beaucoup plus importante pour les enseignants en milieu rural avec 48 fois comparativement à

ceux en milieu urbain avec 35 fois. Concernant les stratégies visant à surmonter le problème de défaut de matériel pédagogique et de déplacement, ce sont les enseignants en zone rurale qui les mentionnent davantage (27 fois) par rapport à leurs homologues en zone urbaine (7 fois). Le soutien et la recherche de soutien social sont largement évoqués par les enseignants en milieu rural (22 fois) en comparaison à ceux en milieu urbain (4 fois). Toutefois, concernant la gestion de l’indiscipline des élèves, ce sont les enseignants en zone urbaine qui rapportent plus le recours à des stratégies fermes (16 fois) et à des stratégies souples (11 fois) par rapport aux enseignants en milieu rural (respectivement 7 fois, 6 fois). D’une manière globale, il semble que les enseignants en milieu rural se focalisent davantage sur comment faire face au manque des moyens, alors que leurs homologues en milieu urbain se concentrent largement sur comment gérer la faiblesse du niveau des élèves (voir Tableau 26, Annexe 27).

L’analyse des entretiens rapporte en outre que les stratégies d’évitement sont fréquemment utilisées par les enseignants en début de carrière (23 occurrences), en comparaison avec les enseignants en milieu de carrière (14 occurrences) et ceux avancés en carrière (13 occurrences). S’appuyer sur la conscience professionnelle et l’envie d’aider des élèves est une ressource qui a plus d’importance pour les enseignants débutants (42 fois) que pour leurs homologues moyennement expérimentés (25 fois) et plus expérimentés (16 fois). Ce sont aussi les enseignants débutants (19 fois) et ceux en milieu de carrière (14 fois) qui ont le plus recours aux stratégies actives pour remédier à la faiblesse du niveau des élèves, comparativement à ceux avancés en carrière (7 fois). Une autre stratégie qui revient davantage chez les enseignants débutants se rapporte au soutien et à la recherche de soutien, relevée 16 fois, alors qu’elle est évoquée uniquement 6 fois par les moyennement expérimentés et 4 fois par les plus anciens. Inversement, l’utilisation de stratégies actives pour faire face au manque de moyens de travail et aux difficultés de déplacement sont relevées davantage par les enseignants en milieu de carrière (16 fois) en comparaison aux enseignants débutants (11 fois)

et avancés en carrière (7 fois). En résumé, il s’avère que les enseignants en milieu de carrière et ceux avancés en carrière mettent plus d’efforts pour contourner la faiblesse du niveau des élèves et le manque des moyens de travail. En plus de comment gérer la faiblesse du niveau des élèves, les enseignants en début de carrière consacrent des efforts à gérer la surcharge des programmes scolaires et sollicitent du soutien des autres (voir Tableau 27, Annexe 28).

A l’instar des résultats évoqués précédemment, nous pouvons indiquer que les enseignants ne subissent pas toujours les difficultés de leur métier mais élaborent des réponses, cherchent des solutions et s’appuient sur des ressources pour y répondre et maintenir leur équilibre personnel. Ces stratégies de coping peuvent être réparties en trois grandes catégories. La première catégorie englobe les stratégies actives ou centrées sur le problème (e.g., sélectionner un contenu de cours adapté au niveau des élèves, gérer les cas d’indiscipline de façon souple ou ferme, prévoir des heures de soutien pour remédier à la faiblesse du niveau des élèves). La deuxième catégorie comprend les stratégies d’évitement (e.g., se désengager du travail, s’impliquer davantage dans les activités extra-professionnelles). La troisième catégorie reflète les stratégies liées à la recherche de soutien social (e.g., demander de l’aide des collègues, du directeur de l’établissement).