• Aucun résultat trouvé

3. Mode d’analyse de données et résultats

3.2. Résultats

3.2.2. Perception des indicateurs et des facteurs de bien-être au travail

Cette partie vise à montrer comment les enseignants marocains définissent leur bien-être professionnel, les facteurs qui le favorisent et ceux qui peuvent l’améliorer.

Quels sont les dimensions du bien-être au travail pour les enseignants ?

D’après les résultats de la Figure 13, les dimensions du bien-être au travail sont selon l’ordre de grandeur comme suit. La première dimension est les relations harmonieuses et positives avec les collègues, la hiérarchie et les parents d’élèves (42 occurrences, soit 23.20%). La deuxième dimension se rapporte à la communication, au sérieux et à l’envie d’apprendre des élèves (37 fréquences, 20.44%). La troisième dimension concerne la réalisation des objectifs que l’enseignant s’est fixés ou qui lui sont assignés (37 fréquences, 20.44%). Les enseignants pointent ici le dévouement dans le métier, la compréhension des cours et le succès des élèves comme critères leur permettant de juger leur réussite dans le métier. Comme quatrième dimension, il y a la réalisation d’un travail que l’enseignant aime et qui lui procure du plaisir (30 fréquences, soit 16.57%). Cela révèle une certaine implication au travail (e.g., assiduité au travail, envie d’aller au travail) et une appréciation de son activité professionnelle (e.g., aimer son travail, être fier de son travail). La cinquième dimension réfère à l’absence de stress et au sentiment de sérénité qui revient 14 fois (soit 7.73%). La sixième dimension correspond au fait de disposer de temps libre et d’autonomie au travail (13 fois, soit 7.18%).

Figure 13. Dimensions du bien-être au travail de l’enseignant

Lorsque l’on vérifie comment ces dimensions varient d’un cycle d’enseignement à un autre, nous constatons que les relations positives avec l’entourage professionnel et social sont largement rapportées par les enseignants du lycée (24 fois) que par ceux du collège (8 fois) et du primaire (10 fois). De la même manière, les enseignants du lycée invoquent à un niveau plus important la communication et le sérieux des élèves (21 occurrences) comparativement à leurs homologues du collège (11 occurrences) et du primaire (5 occurrences). D’autre part, il est à indiquer que la dimension la plus valorisée par les enseignants du lycée est les relations avec leur entourage, alors que les enseignants du collège mettent plus l’accent sur le fait de réaliser un travail qu’on aime, et enfin les enseignants du primaire relèvent plutôt l’importance de l’atteinte des objectifs (voir Tableau 7, Annexe 8).

Comme l’indiquent les résultats obtenus, l’entente avec son entourage fait l’objet de consensus entre les enseignants en milieu rural (23 occurrences) et ceux en milieu urbain (19 occurrences). Toutefois, il y a trois dimensions sur lesquelles les enseignants se différencient nettement et qui sont considérablement repérées dans les propos des enseignants en zone

Les relations harmonieuses avec les collègues, les supérieures hiérarchiques et l’entourage

La communication, le sérieux et l’envie d’apprendre des élèves

L’atteinte des objectifs au travail Faire un travail qu’on aime et qui procure du plaisir

L’absence de stress et le sentiment de sérénité

Le fait de disposer de temps libre et d’autonomie au travail

Autres : Satisfaire et faire plaisir à Dieu, bien-être essence du métier, etc.

rurale. Il s’agit de l’atteinte des objectifs au travail (rural : 25 occurrences vs. urbain : 12 occurrences), de l’implication et de l’amour de son travail (rural : 20 occurrences vs. urbain : 10 occurrences), et enfin de de la communication et l’envie d’apprendre des élèves (urbain : 22 fois vs. rural : 15 fois). Ces résultats montrent en outre que les enseignants en milieu rural semblent valoriser largement l’atteinte des objectifs, tandis que leurs homologues en milieu urbain valorisent plus la communication et le sérieux des élèves (voir Tableau 8, Annexe 9).

Selon les analyses effectuées en fonction de l’ancienneté, il s’avère que les enseignants en milieu de carrière mettent largement en avant les bonnes relations avec la hiérarchie, les collègues et les tuteurs d’élèves (20 fois) en comparaison aux enseignants en début de carrière (12 fois) et à ceux avancés en carrière (10 fois). Par contre, les enseignants débutants accordent plus d’importance à la communication et au sérieux des élèves (17 occurrences) que les enseignants moyennement expérimentés (10 occurrences) et plus expérimentés (10 occurrences). De même, la réalisation d’une activité que l’enseignant aime et qui lui procure du plaisir est davantage rapportée par les moins expérimentés (23 fréquences) que leurs homologues en milieu de carrière (6 fréquences) et avancés en carrière (1 fréquence). En dépit de ces différences, il semble que les enseignants avancés en carrière accordent la même importance aux relations avec l’entourage et au sérieux des élèves, tandis que les enseignants en milieu de carrière valorisent les relations positives au travail et enfin, les enseignants débutants mentionnent davantage la communication et le sérieux des élèves les données (voir Tableau 9, Annexe 10).

A travers l’ensemble de ces résultats, nous pouvons affirmer que les indicateurs du bien-être les plus saillants dans les discours des enseignants se rapportent aux relations avec les autres (e.g., collègues, hiérarchie, élèves, parents d’élèves), suivis de celles relevant du rapport avec le travail (e.g., appréciation de son travail, atteinte des objectifs) et enfin, de celles traduisant le rapport avec soi (e.g., équilibre, quiétude).

Maintenant que nous avons forgé une idée relativement précise sur ce que les enseignants entendent par bien-être au travail, il est lieu d’aborder les facteurs qui le favorisent.

Quels sont les facteurs favorisant le bien-être au travail des enseignants ?

Les résultats représentés dans la Figure 14 indiquent que le bien-être des enseignants résulte de six facteurs majeurs. Le premier facteur est intimement lié aux élèves. Il s’agit de la communication, du sérieux et de l’envie d’apprendre des élèves qui sont cités 73 fois (soit 27.55%). Le deuxième facteur désigne les comportements d’entraide et la bonne ambiance qui règne au sein et en dehors de l’établissement (61 fois, soit 23.02%). Plus spécifiquement, les participants mentionnent les bonnes relations qu’ils entretiennent avec leur collègues-enseignants (e.g., aide réciproque, respect, considération). Ils mettent également en avant les bons rapports avec la hiérarchie (e.g., respect, collaboration, soutien) et les parents/tuteurs d’élèves (e.g., remerciements, reconnaissance, valorisation). Le troisième facteur est l’atteinte des objectifs de travail et la réalisation d’un travail utile (57 fois, soit 21.51%). Le quatrième facteur correspond au métier d’enseignant en lui-même. Plus précisément, il semble que l’exercice d’un métier honorable, valorisé et valorisant, et assurant une sécurité d’emploi favorise le bien-être de ces enseignants (25 fois, soit 9.43%). Le cinquième facteur se rapporte à la possibilité de disposer de temps libre pour se consacrer à sa vie privée (e.g., réaliser des activités extraprofessionnelles, se reposer, voyager, poursuivre des études) et au fait de disposer de marges d’autonomie au travail (e.g., absence de hiérarchie rigide, certaine liberté dans la façon de gérer la discipline enseignée) qui est cité 21 fois (soit 7.92%). Le sixième facteur réfère à l’exercice de la pratique pédagogique dans un environnement adéquat (15 occurrences, soit 5.66%). Autrement dit, la disponibilité des moyens pédagogiques, la

propreté des locaux et la proximité du lieu de travail permettent à ces enseignants de se sentir à l’aise.

Figue 14. Facteurs du bien-être au travail des enseignants

Les facteurs de bien-être au travail que nous venons de voir semblent se différencier selon les cycles d’enseignement dans lesquels les participants interviennent. C’est en effet dans les discours des enseignants du lycée que l’on repère fortement la communication et le sérieux des élèves (38 fois), comparativement aux enseignants du collège (18 fois) et à ceux du primaire (17 fois). De même, les relations positives avec l’entourage professionnel et social sont plus invoquées par les enseignants du lycée (30 occurrences) que par leurs homologues du primaire (18 occurrences) et du collège (13 occurrences). Il en va de même pour l’atteinte des objectifs et la réalisation d’un travail utile (lycée : 28 fois vs. collège : 16 fois vs. primaire : 13 fois). D’une manière générale, notons que la communication et le sérieux d’apprendre des élèves est le principal facteur du bien-être des enseignants du lycée et du collège, alors que les relations positives et la bonne ambiance de travail et en dehors de

La communication, le sérieux et l’envie d’apprendre des élèves

Les relations positives et la bonne ambiance au sein et en dehors de l’établissement

L’atteinte des objectifs et la réalisation d’un travail utile

Le métier en lui-même : caractère noble, valorisant, respect et stabilité d’emploi Le fait de disposer de temps libre et d’autonomie au travail

Le fait de disposer de conditions de travail favorables

Autres : Avoir la récompense de Dieu, vivre avec sa famille, métier pas fatiguant, etc.

travail arrivent en tête des facteurs du bien-être des enseignants du primaire (voir Tableau 10, Annexe 11).

Par ailleurs, les résultats obtenus en fonction du milieu d’exercice montrent que la réalisation des objectifs ou d’un travail utile est le facteur de bien-être le plus important pour les enseignants en milieu rural (37 fois) que pour ceux des enseignants en milieu urbain (20 fois). A contrario, la communication, le sérieux et l’envie d’apprendre des élèves arrive en tête des facteurs de bien-être des enseignants en milieu urbain (37 fois), alors qu’il est cité seulement 15 fois par leurs homologues en milieu rural (voir Tableau 11, Annexe 12).

Enfin, l’analyse des résultats selon l’ancienneté des enseignants rapporte que les interactions et le sérieux des élèves reviennent davantage chez les enseignants débutants (30 fois) et moyennement expérimentés (25 fois) que leurs homologues plus expérimentés (18 fois). C’est également le cas pour la réalisation des objectifs et d’un métier utile observée 31 fois auprès de débutants, 16 fois chez les moyennement expérimentés et 10 fois chez les plus anciens. En revanche, la bonne ambiance qui règne au sein et en dehors de l’établissement est davantage cité par les enseignants en milieu de carrière (27 fois), suivis des enseignants en début de carrière (19 fois), et enfin de ceux avancés en carrière (10 fois). Au total, il s’avère que les enseignants débutants mettent largement en avant l’atteinte des objectifs au travail et la réalisation d’un travail utile comme facteur de bien-être. Par contre, les enseignants moyennement expérimentés apprécient considérablement les bonnes relations et le bon climat qui règne au sein et en dehors de l’établissement. Enfin, les plus anciens mettent davantage l’accent sur la communication et le sérieux des élèves (voir Tableau 12, Annexe 13).

Au regard des résultats précédents, nous pouvons dire que les facteurs du bien-être au travail des enseignants peuvent être réunis en trois groupes. Le premier groupe s’articule autour du volet relationnel. Il réfère à la bonne ambiance, aux comportements d’entraide et aux bonnes relations que l’enseignant entretient avec les collègues enseignants, la hiérarchie,

les élèves et l’entourage de l’établissement. Le deuxième groupe englobe des facteurs qui proviennent du métier d’enseignant proprement dit (e.g., métier noble, utile). Le troisième et dernier groupe recouvre des aspects relevant des conditions de travail physiques et de déplacement (e.g., disponibilité de moyens de travail, proximité de lieu de travail).

Après avoir précisé les dimensions du bien-être au travail des enseignants et les facteurs qui le favorisent, il convient de nous interroger sur les facteurs susceptibles de le promouvoir.

Quels sont les facteurs pouvant améliorer le bien-être au travail des enseignants ?

Les résultats de l’analyse thématique indiquent que les enseignants proposent plusieurs facteurs pour améliorer leur bien-être au travail (voir Figure 15). Ils sont selon l’ordre d’importance comme suit. Le premier facteur concerne la nécessité d’améliorer les conditions de travail (e.g., réduire le sureffectif, fournir les moyens pédagogiques) qui revient 69 fois, soit 27.82%. Le deuxième facteur consiste à revaloriser l’image de l’enseignant et revoir le système de gestion de carrière (47 fréquences, 18.95%). Le troisième facteur concerne l’amélioration des modes de management (43 occurrences, soit 17.34%). Le quatrième facteur porte sur l’amélioration de leur salaire de sorte à ce qu’il soit équitable, motivant et adéquat aux efforts qu’ils déploient (33 occurrences, soit 13.31%). Le cinquième facteur renvoie à la révision des programmes scolaires et au fait d’attribuer plus d’autonomie au travail à l’enseignant (27 occurrences, soit 10.89%). En d’autres mots, ces enseignants proposent d’alléger les contenus des manuels scolaires, d’adapter les programmes au niveau des élèves et d’accroître leur autonomie pédagogique. En ce qui concerne le sixième facteur, les enseignants insistent sur la nécessité d’améliorer les conditions de déplacement entre le domicile et le lieu de travail (18 occurrences, soit 7.26%).

Figure 15. Facteurs de promotion du bien-être au travail

Lorsque l’on examine la variation des facteurs que nous venons d’évoquer, nous constatons que l’amélioration de l’environnement de travail semble être une préoccupation partagée pour les enseignants quel que soit le cycle d’enseignement (lycée : 22 occurrences vs. collège : 26 occurrences vs. primaire : 21 occurrences). En revanche, la revalorisation du rôle de l’enseignant et le changement de système de gestion de carrière sont réclamés à un niveau plus important par les enseignants des écoles primaires (20 occurrences) et du lycée (19 occurrences) par rapport à ceux du collège (8 occurrences). Cependant, la restructuration et la redéfinition du rôle de la hiérarchie sont plus largement évoquées par les enseignants du lycée (20 fois) que par leurs homologues du collège (13 fois) et du primaire (10 fois). En somme, soulignons que les enseignants s’accordent sur la nécessité d’améliorer leur environnement et conditions de travail comme première priorité (voir Tableau 13, Annexe 14).

En outre, les résultats obtenus nous apprennent que les propositions susmentionnées sont davantage mises en évidence par les enseignants travaillant en milieu rural. Pour en donner quelques exemples, la promotion des conditions de travail et l’amélioration des

Améliorer l’environnement et les conditions de travail

Revaloriser l’image de l’enseignant et revoir le système de la gestion de carrière et de motivation des enseignants

Revoir le fonctionnement et le rôle de la

direction des établissements et de

l’inspection pédagogique

Améliorer le salaire de l’enseignant

Réviser les programmes scolaires et accorder plus d’autonomie pédagogique à l’enseignant Améliorer les conditions de déplacement entre domicile-lieu de travail

Autres : Promouvoir les activités

conditions de déplacement sont plus citées par les enseignants en zone rurale (respectivement 39 occurrences, 17 occurrences) que par ceux en milieu urbain (respectivement 30 occurrences, 1 occurrence). De façon similaire, la redéfinition du rôle des responsables hiérarchiques est plus largement repérée chez les enseignants en zone rurale (30 occurrences) que par ceux en zone urbaine (13 occurrences). En dépit de ces variations, les enseignants travaillant dans le milieu rural comme dans le milieu urbain soulignent encore une fois l’importance d’agir d’abord sur l’environnement et les conditions de travail (voir Tableau 14, Annexe 15).

D’autre part, les résultats indiquent que la nécessité d’améliorer les conditions d’exercice du métier est mentionnée davantage par les enseignants en début de carrière (30 fois) que par ceux en milieu de carrière (22 fois) et par ceux avancés en carrière (17 fois). Repenser les modes de management et revisiter le fonctionnement de la hiérarchie semblent avoir plus d’importance pour les enseignants moins expérimentés (21 fois), suivis par les moyennement expérimentés (15 fois) et les plus expérimentés (7 fois). Il en va de même pour l’amélioration du revenu de l’enseignant, qui revient 15 fois chez les enseignants en début de carrière, 12 fois chez ceux en milieu de carrière et 6 fois chez les plus anciens. En revanche, la proposition selon laquelle l’enseignant a besoin de plus d’estime et de valorisation au sein de la société et d’équité en matière de promotion au travail est mentionnée à un degré plus important par les enseignants plus expérimentés (18 fois) et les enseignants moyennement expérimentés (17 fois) en comparaison avec les enseignants débutants (12 fois). Au final, nous pouvons noter que les enseignants débutants et moyennement expérimentés mettent davantage en avant l’importance d’améliorer leur environnement et leurs conditions de travail, alors que les enseignants plus expérimentés donnent une importance quasi-identique à la promotion de leur environnement de travail ainsi qu’à l’amélioration de leur statut social et professionnel (voir Tableau 15, Annexe 16).

A partir des résultats précédents, nous retenons que les facteurs pouvant améliorer le bien-être au travail des enseignants touchent aussi bien aux conditions de travail (e.g., outils didactiques, salles de cours, sureffectifs, programmes scolaires) et d’emploi (e.g., salaire, conditions de déplacement) qu’aux modes de management et à l’image de l’enseignant de la société. Ces résultats nous amènent en outre à nous demander à quel point ces propositions concordent avec les exigences du travail auxquelles ces enseignants sont exposés.