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PREMIÈRE PARTIE LE CONTEXTE GÉNÉRAL DE

UNE RELIGION SYNTHÉTIQUE

Les pages précédentes ont permis de mettre en lumière quelques-unes des grandes caractéristiques de l'umbanda : nous avons affaire à une religion récente et urbaine, qui se forme en relation avec les mutations socio-économiques considérables que connaît la société brésilienne au début de ce siècle et dans laquelle se rencontrent des éléments qui proviennent de diverses expressions religieuses qui préexistaient à son apparition sur le sol brésilien. Dans le présent paragraphe, nous souhaiterions nous attarder sur cette dernière particularité et insister notamment sur le caractère éminemment synthétique de l'umbanda. Ceci est un point important dans la mesure, où comme nous le verrons, ce caractère synthétique s'exprime aussi dans la dimension plus spécifiquement thérapeutique de la religion, l'umbanda réalisant dans ce domaine une synthèse profondément originale et assez déroutante de pratiques et de représentations. Cette discussion nous amènera à nous expliquer sur le choix des termes "synthétique" et "synthèse" que nous utilisons de préférence à ceux de "syncrétique" et "syncrétisme".

II - 1 - L'umbanda, un syncrétisme ?

Diverses sont les matrices religieuses qui ont participé, à des degrés différents, à la formation de l'umbanda, et le caractère syncrétique de la

religion a été souligné par de nombreux auteurs. Tous, ou presque, tombent d'accord pour dire qu'elle est une religion syncrétique qui intègre des éléments noirs, indiens, catholiques, spirites, occultistes. Mais de quel syncrétisme s'agit-il ? Car, comme l'umbanda, le candomblé est lui aussi communément qualifié de syncrétique. Or, s'il l'on considère l'oeuvre du syncrétisme dans la première et dans le second, on est tenu de constater qu'elle ne se réalise pas de façon identique dans les deux cultes.

M. Augras (1992 : 32) nous dit de l'umbanda :

"Cette religion est syncrétique par définition 102, car elle mélange les dieux

et les saints déjà connus, à d'autres qui apparaissent chaque jour. C'est une religion en plein essor, en transformation continuelle, et de ce fait, assez difficile à étudier. On est en droit de parler d'un véritable syncrétisme, car il ne se limite pas à un simple amalgame de divinités et de rites d'origines diverses. Il se produit au niveau idéologique. Les valeurs des autres religions sont réellement incorporées à sa doctrine. Par exemple, l'opposition entre le bien et le mal est nettement tranchée (...). Les dieux africains sont représentés par les statues et les chromos des saints catholiques, et leurs histoires se confondent".

De son côté F. Laplantine (1989 : 287) écrit de l'umbanda qu'elle

"réalise la forme la plus achevée du syncrétisme 103, puisqu'elle intègre les

esprits autochtones des Indiens, les orixás des candomblés , les saints protecteurs du catholicisme, ainsi que le thème de la réincarnation africaine réinterprété dans les termes du spiritisme européen".

Comment faut-il comprendre "syncrétique par définition", "véritable syncrétisme", "forme la plus achevée du syncrétisme" ? Sans doute faut -il entendre que l'umbanda réalise un genre particulier de syncrétisme, plus poussé que d'autres ; un syncrétisme si poussé, si "achevé", que l'on peut être tenté de penser, à la suite de R. Ortiz, qu'il cesse d'être un syncrétisme pour devenir une synthèse.

102 C'est nous qui soulignons. 103 C'est nous qui soulignons.

Dans un article daté de 1975, "Du syncrétisme à la synthèse", cet auteur examine ce que le syncrétisme signifie, comment il se réalise, et dans quelle mesure l'umbanda peut être considérée comme une religion syncrétique et, plus particulièrement, noire. Critiquant, comme l'avait fait R. Bastide, la conception qu'A. Ramos a du syncrétisme - envisagé uniquement comme le résultat d'une série d'additions de traditions différentes 104 - R. Ortiz insiste sur la logique interne qui président à ces

rapprochements : "le syncrétisme est loin de la notion de mélange et d'incohérence. Chaque élément possède des significations propres et ne peut être mis en rapport avec d'autres que selon une loi de similitude qui règle la disposition entre eux. Ainsi, si Iemanjá s'assimile à la Vierge Marie, c'est bien parce qu'il y a des caractères similaires entre elles, par exemple celui d'être mère" (p. 92). Poursuivant son examen de la notion de syncrétisme, l'auteur considère la définition structurale qu'en a donné R. Bastide (1970(a)), en partant de la notion de mémoire collective et en considérant comme exemple particulier la mémoire des esclaves noirs venus au Brésil. Pour R. Bastide, la mémoire collective "est une mémoire structurée, un système de relations. Chaque élément a sa place déterminée, et l'ensemble de tous ces éléments n'a de sens qu'en tant que résultat des interactions des éléments qui le forment" (p. 92). Arrachés à leur terre, les acteurs noirs se voient dans l'impossibilité de retrouver au Brésil tous les éléments qui constituent cette mémoire. De là l'oubli, la sélection des souvenirs et le rôle que la "conscience des trous" va jouer dans la mémoire collective des Noirs transplantés. Loin de chez eux, ces derniers subissent une perte de sens dans leur représentation du monde, dans leur religion. Ils cherchent alors dans le nouveau pays des éléments qui sont suffisamment similaires à ceux qui manquent pour remplir de sens les "trous" et redonner ainsi du sens à l'ensemble. Loin d'être de simple additions, les nouveaux éléments qui remplissent les vides s'organisent en un tout cohérent. C'est donc à la fois du sentiment de perte de sens et de l'effort fait pour le combler que découle la définition que R. Bastide (1970(a) : 101) donne du

104 Selon cette conception, les cultes africains, purs dans leurs origines, se sont mélangés, d'abord entre eux

puis avec les cultes indiens et les religions blanches, le spiritisme et le catholicisme. Dans la liste qu'il dresse des divers syncrétismes existants au Brésil, l'auteur situe l'umbanda au niveau 7, c'est-à-dire à une étape très poussée de désintégration des pratiques afros (A. Ramos, 1940 : 168).

syncrétisme, lequel "consiste à unir des morceaux d'histoires mythiques de deux traditions différentes, dans un tout qui reste ordonné par un même système" 105.

Il y a donc une matrice religieuse de base, "un "système-départ" auquel correspond une première tradition, ensuite une deuxième tradition qui fournit des éléments qui sont intégrés dans le système-départ. C'est toujours ce dernier qui ordonne et commande le choix des nouveaux éléments ; une tradition lui correspond qui peut être considérée comme dominante par rapport à la deuxième (celle qui fournit les éléments syncrétisés)" (R. Ortiz, 1975(b) : 93-94). Pour illustrer ce processus, l'auteur prend l'exemple du syncrétisme de Iansã - orixá féminin des vents et des tempêtes - avec Sainte Barbara, et montre comment, parmi toutes les saintes du catholicisme, la tradition dominante (africaine) sélectionne celle qui, de par ses caractéristiques, correspond le mieux à Iansã. Cependant Sainte Barbara n'est pas Iansã puisque toutes les caractéristiques de cette sainte ne sont pas pertinentes pour l'ensemble qui l'a choisie. Elle n'est Iansã que dans la mesure où son histoire comporte pluie, tonnerre et foudre. D'ailleurs, les pères de saint de candomblé ne confondent pas leurs orixás avec les saints catholiques, ce qui n'est déjà pas le cas, comme nous l'avons constaté, des pères de saint de l'umbanda. Le syncrétisme réalisé entre orixás et saints n'est d'ailleurs pas partout le même : il reflète la dispersion des acteurs noirs et de la mémoire collective noire sur le sol brésilien en même temps que l'effort propre à chaque région dans la recherche de correspondances entre les divinités africaines et les saints catholiques. Par exemple, Xangô - orixá des éclairs et du tonnerre - est Saint Jérôme à Bahia et São Paulo, Saint Jean à Alagoas, Saint Michel Archange à Rio.

Le syncrétisme se réalise quand "deux traditions étant mises en contact, il y a une tradition dominante qui fournit le système de signification,

105 Si on doit forcément la rattacher à l'idée de "trous" dans la mémoire collective, cette conception du

syncrétisme ne rend compte que du "bricolage" opéré au plan de la complémentarisation de rituels qui ont perdu leur sens. Car, dans d'autres cas, le syncrétisme ne résulte pas d'un manque de sens dans le système significatif africain : c'est le cas notamment du syncrétisme des orixás avec les saints catholiques puisque l'orixá existait avant et continue d'exister après le phénomène de syncrétisme. Mais comme le fait remarquer R. Ortiz (p. 93), ce n'est pas tant le syncrétisme qui intéresse R. Bastide que le lien entre mémoire collective et "sociologie du bricolage", et la définition qu'il propose du syncrétisme apparaît comme le résult at d'une démarche qui ne la vise pas directement. Aussi, dans la suite de son article, R. Ortiz s'autorise-t-il à considérer cette définition indépendamment du contexte où elle fut énoncée.

choisit et ordonne les éléments de la tradition sous-dominante" (p.94). Mais, s'interroge R. Ortiz, dans quelle mesure la tradition dominante se maintient- elle en tant que telle avec le temps, celui, historique et social, des hommes et de la société ? Reprenant l'exemple de l'Afro-Brésilien, il constate le caractère d'ambigüité dont relève le syncrétisme : plus la mémoire africaine intègre de nouveaux éléments dans son système, plus elle tend à s'éloigner de son caractère spécifiquement africain.

C'est bien pourquoi le maintien et l'existence du candomblé au Brésil sont intimement liés à son enkystement dans la société. "Pour pouvoir exister physiquement, le candomblé doit refuser de s'intégrer dans l'ensemble des valeurs socialement légitimes : il affirme ainsi sa tradition dominante qui est africaine" (p. 95). C'est cette caractéristique des candomblés afro-brésiliens qui conduisit R. Bastide (1967) à les qualifier de "religions en conserve" 106, souhaitant par cette expression même indiquer

leur caractère très conservateur de la dogmatique comme de la pratique africaine : résistant en se figeant, ils représentent selon lui un phénomène de "minéralisation culturelle" 107. Les "religions en conserve" ne sont

cependant pas incapables d'innover. Seulement l'innovation ne constitue pas alors un processus d'évolution mais un processus de maintien. Les éléments nouveaux qu'incorpore le candomblé n'impulsent pas un processus interne d'évolution l'amenant à s'adapter aux transformations de la société globale : ils sont intégrés dans la mesure où il permettent au schéma africain de subsister. M. Aubrée (1988 : 51) va dans le sens de cette analyse lorsqu'elle constate que dans le candomblé, l'élément exogène n'est absorbé que s'il est intégrable à la structure centrale. "Dans le cas contraire, il n'est généralement pas rejeté mais simplement "accroché" sur la structure sans que soit modifiée aucune des relations que celle-ci suppose. Quand, de par les circonstances sociales globales, son maintien en tant qu'ornement ou écran extérieur n'aura plus de raison d'être, il sera éliminé" 108.

106 qu'il distingue des "religions vivantes" : "une religion sera dite vivante si elle change pour s'adapter au

monde changeant, en tant que totalité, ou ensemble de représentations mystiques et de pratiques culturelles, totalement extérieure et supérieure aux personnes qui la composent" (1967 : 137).

107 R. Bastide fait sans doute plus particulièrement référence ici au candomblé nagô sur lequel il a beaucoup

travaillé et qui conserve le mieux les traditions africaines.

108 Prenant l'exemple des saints catholiques, l'auteur fait observer qu'avec la fin de la répression ouverte

Laissons à présent le candomblé et la façon particulière dont s'y réalise l'oeuvre du syncrétisme, pour revenir, avec R. Ortiz, au temps du syncrétisme : au fur et à mesure qu'il passe, il y a intégration de nouveaux éléments au sein de l'ancien système. "Subsiste alors une ambigüité : les éléments syncrétisés sont non seulement ordonnés par la tradition dominante, mais encore, ils portent en eux un résidu de la tradition sous- dominante ; ce qui implique de nouvelles significations". L'auteur prend un exemple de syncrétisme au niveau du rituel, la pénétration de l'autel catholique dans les rites afro-brésiliens. S'interrogeant sur la fonction de cet autel dans les fêtes religieuses du candomblé, R. Bastide (1973(b)) estimait qu'il n'était lié à aucune fonction et que son annexion au rituel n'était en définitive qu'un élément du décor. En ce qui concerne la macumba, culte atteint, comme nous l'avons vu, par un développement assez poussé du syncrétisme, A. Ramos (1940 : 123-124) donne une description qui montre que l'autel n'est déjà plus simple objet du décor. Les fidèles "frappent la tête" (batem a cabeça, salutation) devant l'autel sur lequel repose divers objets cultuels. Et dans l'umbanda, l'autel - source d'émanation de "forces" bénéfiques - joue un rôle important dans les cérémonies. "Les éléments de la tradition sous-dominante apparaissent donc comme des unités significatives ; elles portent un surplus de significations qui peut, dans certains cas, réorganiser les éléments du "système-départ". Cette réorganisation implique non seulement un élargissement de l'ensemble mais aussi une nouvelle signification dans le système" (p. 94).

Les changements qui affectent l'ensemble de départ - au niveau de la compréhension qui l'ordonne - ne sont pas seulement le résultat d'un surplus de significations et de fonctions directement lié au phénomène de syncrétisme et caractéristique de ce dernier. Ils résultent également des transformations sociales et économiques qui affectent la société dans laquelle se manifeste et est immergé le syncrétisme en question. Nous avons vu que ces bouleversements (l'esclavage et ses conséquences, l'abolition de l'esclavage, l'industrialisation, l'urbanisation, l'immigration

préservé le système symbolique dont ceux-ci sont le pilier - sont devenus moins indispensables au bon fonctionnement des terreiros de candomblé. Les saints catholiques "commencent à disparaître dans le discours de ceux qui, il y a sept ou huit ans, les employaient presque toujours conjointement au nom de leur

européenne), provoquent aussi une modification de la mémoire collective noire.

II - 2 - La synthèse umbandiste

Arrive donc un moment où il n'est plus vraiment pertinent de se demander qu'elle est la tradition dominante, quelle est la matrice religieuse principale, qui ordonne les différents éléments du système. "Dans la mesure où les éléments les plus disparates sont incorporés, dans la mesure même où la signification du "système-départ" subit un changement considérable (...), un moment vient où une rupture s'établit entre l'ancien "système- départ" et le nouveau système" (p. 96). A ce moment-là, nous n'avons plus affaire à un syncrétisme mais à une synthèse : "La tradition dominante n'existe plus, les "morceaux d'histoires mythiques" sont maintenant ordonnés selon une nouvelle pertinence qui n'est plus l'ancienne. Il y a une coupure épistémologique qui sépare le nouveau système de l'ancienne tradition dominante" (p. 96).

En ce sens, l'umbanda est bien une synthèse. Sa formation se caractérise par l'appropriation d'éléments qui proviennent de diverses matrices religieuses - afro-brésilienne, catholique, spirite, indienne - et par leur réélaboration et réinterprétation à l'intérieur d'une nouvelle structure. Mais aucune de ces diverses matrices religieuses ne représentent, dans l'umbanda contemporaine, un système-départ qui fournirait le système de signification, une matrice centrale qui ordonnerait et commanderait le choix des éléments exogènes provenant des autres traditions religieuses. Il serait aussi arbitraire de prétendre que le spiritisme représente cette matrice principale que d'estimer que ce sont les religions se rattachant à la tradition africaine. L'umbanda est une nouvelle religion qui se différencie des expressions religieuses qui ont participé à sa formation et n'est identifiable à aucune d'entre elles. C'est pourquoi elle ne saurait être aujourd'hui considérée ni comme un culte afro-brésilien - auquel beaucoup l'assimilent - ni comme une variété du spiritisme.

M. Aubrée (1987(a) : 17) nous dit que "l'umbanda emprunte [aux cultes afro-brésiliens] quelques-uns de leurs orixás (...). A la source indigène elle puise toute une série de personnages plus ou moins mythiques. Du

christianisme elle extrait la prétention à l'universalisme et l'opposition du bien et du mal, avec la subséquente division des êtres. Enfin, elle reprend au kardécisme la thèse de la réincarnation et le monde des esprits". En fait, on ne saurait faire le tour de l'ensemble des divers éléments que l'umbanda tient - tant au niveau de son rituel que de ses croyances - des diverses matrices religieuses auxquelles elle a emprunté. Cette dissection n'a d'ailleurs pas beaucoup d'intérêt dans la mesure où l'umbanda a transformé, parfois considérablement, les éléments empruntés : ses saints ne sont pas ceux du catholicisme, ses orixás ne sont pas ceux du candomblé, l'opposition bien/mal est loin d'être aussi nette et tranchée dans l'umbanda qu'elle peut l'être dans le catholicisme, etc.

Si l'umbanda tient du catholicisme, du kardécisme, de la tradition africaine, de cultes indiens, elle n'est ni catholique, ni spirite, ni afro, ni indienne, ni une "forme dégradée" d'aucune de ces religions. Présentant "des traits nouveaux typiquement brésiliens" (Ortiz, 1975(b) : 97), cherchant à tout prix à s'intégrer dans la société brésilienne moderne, elle est une religion brésilienne et peut-être, la religion nationale du Brésil, comme se plaisent à le dire de nombreux umbandistes et comme le pensent certains anthropologues (dont R. Ortiz).

Il importe d'ailleurs de remarquer que, dans la constitution de son univers, l'umbanda n'a pas emprunté et n'emprunte pas seulement aux différentes expressions religieuses précédemment citées et les plus communément évoquées dans la littérature ethnologique et sociologique. La synthèse umbandiste possède, depuis ses origines, deux grandes caractéristiques : sa constante ouverture sur l'extérieur et sa prodigieuse capacité à ingérer et à digérer, sur le mode cumulatif, les matériaux culturels de toutes sortes et de toutes provenances - religieux et non religieux, brésiliens et non brésiliens - qui se trouvent à sa portée : occultisme, ésotérisme, cartomancie, astrologie, numérologie, éléments de religions d'origine asiatique (le bouddha, le ying et le yang), chansons et rythmes populaires, pratiques et représentations issus des cultures populaires régionales, etc. L'umbanda est "polyphage" 109 et, dans le cours de ce

travail, nous aurons l'occasion de constater à quel point cette "polyphagie" et son résultat bigarré et synthétique s'expriment dans le domaine des

représentations et des pratiques liées à la santé et à sa conservation, à la maladie et à son traitement.

Du fait de ces caractéristiques, la synthèse umbandiste n'est ni achevée ni ne peut prétendre à l'homogénéité parfaite. Elle incorpore toujours de nouveaux éléments et présente des différences et des divergences régionales et locales qui tiennent, entre autres, aux caractéristiques culturelles et historiques des diverses régions dans lesquelles elle se trouve implantée 110, à l'idiosyncrasie des terreiros et aux

influences religieuses qui les atteignent différentiellement, à la créativité, à la personnalité, à l'origine géographique, à l'appartenance sociale, à la trajectoire religieuse, aux aspirations des pères de saints qui les dirigent, et aux contributions des fidèles.

C'est la pluralité qui fonde l'umbanda dans ce qu'elle a d'unique.

II - 3 - Une religion une et multiple

Dans ces conditions, il n'existe pas à proprement parler "une synthèse umbandiste" qui serait "l'umbanda" - "la vraie", "l'officielle" - mais une variété d'arrangements, une diversité de modalités combinatoires qui sont autant d'umbandas réunies sous le même vocable d'"umbanda", par les adeptes eux-mêmes. Comment appréhender cette multiplicité et comment caractériser l'umbanda et ses différentes formes ? La tâche n'est pas aisée et toute tentative de caractérisation absolue est d'emblée vouée à l'échec : à l'image de l'umbanda elle-même, la caractérisation se doit d'être plastique.

L'umbanda est parcourue par de multiples influences, et toutes ne sont pas également présentes et prédominantes dans la synthèse particulière que réalise chaque terreiro. Comme l'écrit P. Birman (1985 : 90, trad. pers.) :

"Chacune de ces influences imprime sa marque à la pratique religieuse, donnant un ton à l'argumentation, des directions inusitées aux rituels, composant, en somme, des manières diversifiées de pratiquer la religion. On rencontre, donc, des umbandas mélangées avec le candomblé, le catholicisme,

110 Par exemple, l'empreinte indienne est beaucoup plus marquée dans l'umbanda des régions amazoniennes