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1.3 Pistes de solutions et exemples régionau

1.3.5 Recyclage et réutilisation des eaux usées

Le recyclage de l’eau vise à réutiliser des eaux usées pour un usage tolérant une qualité inférieure, par exemple à des fins d’irrigation agricole. Le traitement des eaux usées afin d’en restaurer la qualité initiale correspond également à cette pratique. L’opinion publique est une limite à l’application de cette approche. En effet, la population entretient des doutes au sujet du recyclage de l’eau à des fins de consommation humaine de même que pour certaines industries, notamment la transformation alimentaire. Cette perception évolue cependant lorsque la population est confrontée à des situations de stress hydrique absolu ou chronique. Les avantages ne sont d’ailleurs pas négligeables puisque le recyclage de l’eau utilise six fois moins d’énergie que le dessalement (WEF, 2011 dans WWAP, 2012) et est plus respectueux de l’environnement. Il réduit en effet l’émission d’eaux usées en plus d’éviter la production et le rejet d’eaux saumurées. La GWI publiait, en 2009, le Municipal Water Reuse Markets report dans lequel il concluait que le marché du recyclage de l’eau était moins important que celui du dessalement, mais que sa croissance devrait être plus élevée au cours des prochaines années. La capacité municipale de 28 M de m3 par jour (10,2 km3/an) en 2009 serait appelée à passer à 79 M de m3 par jour (28,8 km3/an) en 2016 (GWI, 2009). Un article de GWI daté de janvier 2012 relativisait toutefois cet optimisme puisque le recours au recyclage par les municipalités aurait été ralenti par divers facteurs dont : la crise économique mondiale, des pluies plus généreuses en Australie de même que dans l’ouest et le sud-ouest américain, le printemps arabe et le contexte socio-politique instable de cette région, ainsi que la priorité accordée à des investissements préalables dans les systèmes de collecte des eaux usées en Arabie Saoudite et en Oman (Gasson, 2012). Ces éléments ont causé une baisse de l’engouement municipal envers la solution mais les industries auraient compensé en partie par une hausse de leurs investissements. Les plus actives dans le domaine sont notamment les industries pétrolières (en particulier celle des sables bitumineux canadiens), l’extraction minière, la transformation alimentaire et la production énergétique. Selon Christopher Gasson, éditeur en chef de GWI, l’industrie s’éveille à l’importance du recyclage de l’eau :

« Les industries s’éveillent au fait que l’eau pourrait être la plus importante entrave à la poursuite de leur croissance. Si vous êtes un producteur de pétrole de l’Alberta, une raffinerie de la baie de Bohai, un producteur d’électricité de Gujarat, une compagnie

minière au Pérou ou un fabricant de semi-conducteurs à Taïwan, vous savez que vous aurez à dépenser beaucoup d’argent dans des technologies reliées à l’eau afin de rester en affaires pour les cinq prochaines années. La quantité d’eau sur terre est limitée, mais la demande est croissante, surtout dans les économies émergentes et dans les pays riches en ressources qui les alimentent. Développer de nouvelles sources d‘approvisionnement en eau douce grâce au dessalement de l’eau de mer, et maximiser l’utilisation des sources actuelles grâce au recyclage de l’eau, sont les seules façons pour plusieurs industries d’envisager l’avenir ».

(traduction libre de : Gasson, 2012 dans GWI, 2012)

L’utilisation des eaux usées municipales en agriculture est difficilement quantifiable en l’absence de données validées. Il semble toutefois que cette pratique gagne en popularité dans des régions en manque d’eau, notamment au Moyen-Orient et dans la vallée de Tula, près de la ville de Mexico (FAO, 2012a). L’impact global de cette solution serait présentement limité et ne permettrait donc pas de réduire significativement l’empreinte en eau de l’agriculture. Elle pourrait par contre s’avérer une solution efficace sur une base régionale ou locale. En Californie, Sea Mist Farms cultive plusieurs produits maraîchers. À l’instar de plusieurs cultivateurs de la région, la ferme est aux prises avec la raréfaction de l’eau qui menace ses activités. L’entreprise s’est alors tournée vers l’eau recyclée pour ses besoins d’irrigation et a constaté que sa qualité agronomique était meilleure que celle de l’eau des puits. Selon Dale Huss, directeur général de l’entreprise, Sea Mist Farms serait le plus grand utilisateur d’eau recyclée au monde (Pacific Institute, 2010).

Un exemple de succès en matière de gestion intégrée de l’eau est Singapour. Ce pays comptait en 2011 sur un apport d’eau renouvelable de 115,7 m3/p/an, plaçant le pays en situation de stress hydrique absolu (FAO, 2012b). Le Public Utilities Board (PUB) a développé une stratégie en quatre phases pour assurer la sécurité hydrique du pays : la récolte des précipitations locales, l’importation massive d’eau, le recyclage des eaux usées (programme NEWater) et le dessalement de l’eau de mer (WWAP, 2012). Le programme NEWater permet d’alimenter 30 % de la demande du pays et cette proportion devrait croître à 50 % en 2060. Le dessalement correspond pour sa part à 10 % des besoins et devrait passer à 30 % durant la même période (ibid.).

Tableau 1.8 : Avantages et contraintes de mise en oeuvre : recyclage et réutilisation des eaux usées

Critères d’analyse Commentaires

Maîtrise technique Technologie de pointe existante mais questionnée par l’opinion publique. Impacts

environnementaux Moins des rejets d’eaux usées et du besoin d’implanter des solutions générant potentiellement de plus grands impacts (dessalement, détournement, etc.). Impact sur les

populations en aval Aucun impact pour les populations en aval.

Impacts politiques N’implique pas d’arbitrage des usages de l’eau, accroît l’indépendance et n’affecte pas les nations voisines. Opinion publique défavorable pour certains usages dont la consommation humaine et la transformation alimentaire.

Impacts

économiques Investissement requis en installations de traitement des eaux mais consommation énergétique six fois moindre que le dessalement.

Mise en oeuvre / impacts : Aisée / faibles; complexe / moyens; ardue / élevés. Mise en oeuvre / impacts : Aisée / faibles; complexe / moyens; ardue / élevés. Mise en oeuvre / impacts : Aisée / faibles; complexe / moyens; ardue / élevés.