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Exemples de seuils environnementaux et de systèmes de gestion des ressources naturelles La volonté de limiter les impacts de l’activité humaine sur l’environnement a mené à l’instauration

Total 3 129 881 383 100,0 % 100 % * Exclus les codes 2211 (production, transport et distribution d'électricité autres que de combustibles fossiles),

3. RÉFLEXIONS POUR UN CADRE QUÉBÉCOIS D’EXPLOITATION DES RESSOURCES HYDRIQUES

3.2 Seuil socio-environnemental et autorisation de prélever l’eau

3.2.2 Exemples de seuils environnementaux et de systèmes de gestion des ressources naturelles La volonté de limiter les impacts de l’activité humaine sur l’environnement a mené à l’instauration

de différents seuils environnementaux. L’eau, comme plusieurs autres ressources naturelles et bon nombre d’impacts environnementaux résultant de l’activité humaine, n’est pas circonscrite aux limites des diverses juridictions. Des exemples de gestion de ressources naturelles ou d’impacts environnementaux impliquant plusieurs entités juridiques existent et peuvent inspirer la création d’un cadre québécois. Trois exemples de seuils environnementaux ont ainsi été retenus pour différentes raisons. Un premier exemple vise justement la gestion de l’eau mais ne s’adresse qu’à un seul pays, l’Australie, et n’implique pas plusieurs acteurs gouvernementaux. C’est pourquoi des systèmes de gestion faisant l’objet d’ententes internationales sont également retenus. Ils ont comme caractéristique commune de limiter l’exploitation de ressources naturelles ou l’émission de contaminants afin de limiter les impacts négatifs sur l’environnement. Ils sont accompagnés ou non de droits de prélèvements (échangeables ou non) vendus ou distribués aux utilisateurs.

Gestion des droits de l’eau dans le bassin Murray-Darling

Aux prises avec d’importants déséquilibres entre l’offre et la demande en eau, les autorités australiennes, principalement celles du bassin Murray-Darling, sont passées à l’action afin de contrôler la situation. Depuis le début des années 2000, l’Australie a été frappée régulièrement par des périodes de sécheresse dont l’intensité a culminé lors de l’été 2006-2007. Cette saison-là, la rivière Murray a connu dix mois records de faible débit, si bien que durant cette période il a été de 60 % inférieur à la pire période de sécheresse précédente, celle de l’été 1982-1983. Les signes évidents de dommages environnementaux potentiellement irréversibles ont alors généré les conditions sociales et politiques favorables à l’allocation de provisions d’eau additionnelles à l’environnement. En effet, le gouvernement australien a initié le développement de marchés de l’eau durant les années 1980 à 1994 et ces marchés se sont ensuite élargis durant la période de 1994 à 2007. Le système a permis durant ces années de distribuer et d’échanger les droits de prélèvements entre les usagers et ainsi d’effectuer un arbitrage économique entre les usages. La valeur des transactions sur ces marchés est aujourd’hui évaluée à 2,4 G AUD par année. (Australie. NWC, 2011)

Néanmoins, la distribution excessive de droits est, encore aujourd’hui, un phénomène bien connu. En effet, le niveau d’allocation de droits a été instauré en fonction d’un niveau historique d’activité économique. Malgré cette situation, les impacts négatifs sur l’environnement sont partiellement limités puisque les droits donnent accès à une part d’un volume total d’eau disponible pour consommation et non d’un volume fixe. Ainsi, en situation de sécheresse, les autorités peuvent établir que seule une

portion des droits pourra être utilisée, limitant du coup, pour chaque utilisateur autorisé, les prélèvements qui se trouvent donc à évoluer en fonction des précipitations saisonnières. Dans le but de mieux protéger l’environnement, un fonds de 10 G AUD a été créé en 2007 afin d’investir en infrastructures d’irrigation efficientes et pour racheter des droits qui sont affectés aux services environnementaux. La quantité de droits rachetés devait correspondre aux limites durables de prélèvements. C’est le Murray-Darling Basin Authority qui a été mandaté pour définir ce seuil. Or, établir un tel seuil sur la seule base des limites environnementales et sociales à maintenir s’avère un défi auquel se butent encore aujourd’hui les autorités, si bien que le système ne peut toujours pas être qualifié de durable. Les opérations de rachats de droits se poursuivent donc sans qu’une limite environnementale durable n’ait été véritablement instaurée et avec le souci d’éviter de générer des impacts indus sur le marché des droits de l’eau. (Australie. NWC, 2011)

Gestion des émissions de GES

Le Protocole de Kyoto, par lequel 38 pays et l’Union Européenne se dotaient, en 1998, de cibles en matière de réduction des GES (Nations Unies, 1998), constitue sans doute l’exemple international le plus connu de seuil environnemental. Sous l’égide de la Convention cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (CCNUCC), le Protocole de Kyoto vise, entre 1990 et 2012, une réduction de 5,2 % des émissions de GES pour les parties prenantes. Si le choix de l’année de référence et de la période d’engagement peut, à certains égards, sembler arbitraire, la cible de réduction d’émissions peut être vue comme un premier pas en direction d’une limite environnementale scientifiquement établie. En effet, des experts ont établi qu’une concentration atmosphérique de 450 ppm de CO2 ne devait pas être dépassée d’ici 2050, si on voulait limiter la hausse des températures à 2oC depuis l’ère préindustrielle. Ce seuil de réchauffement global permettrait aux systèmes humains de s’adapter aux changements climatiques à un coût économique, social et environnemental acceptable (EU Climate Change Expert Group, 2008). Même à l’intérieur de cet intervalle, certains systèmes naturels pourraient ne pas survivre si l’augmentation de température s’avérait trop rapide (ibid.). Une hausse supérieure à 2oC résulterait pour sa part en une élévation importante des coûts d’adaptation aux changements climatiques et à l’apparition de dommages environnementaux irréversibles et à grande portée (ibid.). Pour espérer atteindre un seuil environnemental établi au niveau mondial, les pays signataires devaient se répartir l’effort de réduction à fournir sur la base des principes reconnus par la CCNUCC, dont ceux d’équité intra et intergénérationnelle et de « responsabilités communes, mais différenciées ». Après maintes négociations, et les échecs pour s’entendre sur un système de répartition équitable pour tous, les pays signataires se sont dotés de cibles individuelles sur une base volontaire12. Le pari était alors que l’adhésion volontaire des pays générerait un effet d’entraînement et que l’instauration du marché des crédits de carbone permettrait une rétribution des efforts de réduction des émissions qui allait encourager les pays à poursuivre dans cette voie et à se doter de cibles de plus en plus exigeantes. Les pays ont par ailleurs convenu d’une méthodologie permettant de quantifier les émissions et la

12 Il revient à chaque pays d’établir ses mesures de réduction des émissions de GES au niveau national ou

progression vers l’atteinte des cibles. Cependant, la non ratification du protocole par les États-Unis, en raison de l’absence d’engagements contraignants pour les économies émergentes, ou encore le retrait du Canada, font que la plupart des grands émetteurs mondiaux de GES en sont exclus. La portée du Protocole de Kyoto en vue d’atteindre le seuil environnemental fixé en est donc fortement compromise.

Heureusement, après les déceptions de Copenhague et les succès mitigés de Cancun, les récentes négociations de la 18e session de la Conférence des Parties à la CCNUCC (COP18) et à la 8e session de la Conférence des Parties agissant comme réunion des parties au Protocole de Kyoto (CMP8) ont permis des avancées modestes, mais indispensables à la continuité de l’engagement international dans la lutte aux changements climatiques (COP18 and CMP8, 2012). En effet, le Protocole de Kyoto a été amendé pour prévoir son prolongement jusqu’en 2020. De plus, les 194 signataires se sont entendus sur un calendrier de travail visant à déposer, dès décembre 2015, un accord mondial qui devrait contenir des engagements contraignants pour tous les grands émetteurs à partir de 2020 (France. Ministère des Affaires étrangères, 2012). L’accord prévoit aussi que le seuil de 2oC pourrait être révisé selon l’évolution des connaissances scientifiques sur les risques d’une élévation des températures globales.

Gestion des populations d’espèces aquatiques migratrices

Un autre exemple de gestion de ressources naturelles prenant directement compte de l’état de l’environnement et impliquant une coordination internationale est celui des ressources halieutiques migratrices. Les systèmes de gestion de ces ressources constituent des comparables particulièrement intéressants dans le contexte de la gestion de l’eau. Comme l’eau, les stocks de poissons évoluent dans le temps et nécessitent une évaluation périodique. De plus, comme c’est le cas des limites des bassins versants, les zones de migration de plusieurs espèces aquatiques exploitées commercialement ne correspondent pas aux limites administratives. La gestion de ces ressources requiert donc l’implication des parties prenantes de plusieurs juridictions différentes et une acceptation des méthodologies d’évaluation des populations de poissons.

Les pêcheurs québécois vivent cette situation dans le cas de la pêche commerciale de onze espèces (MAPAQ, 2011). Le thon rouge de l’Atlantique en est un exemple. Dans le but de préserver la population de cette espèce et d’assurer la pérennité de cette activité économique, une structure administrative internationale a été instaurée. La Commission internationale pour la conservation des thonidés de l’Atlantique (CICTA) assure le suivi des stocks pour les 48 pays contractants (ce nombre inclut la Communauté européenne) et identifie les volumes qui pourront être prélevés dans la zone comprenant l’océan Atlantique et les mers adjacentes (CICTA, 2007). Ces recommandations font ensuite l’objet de négociations entre les pays contractants. C’est ainsi que le Canada s’est vu autoriser la capture de 483,2 tonnes de thon rouge de l’Atlantique pour l’année 2012 (Pêches et Océans Canada, 2012). Ce volume est ensuite réparti entre les provinces et finalement entre les différents types de pêcheurs autorisés à l’intérieur des provinces.