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1.3 Pistes de solutions et exemples régionau

1.3.10 Incitatifs économiques

Les régions en manque d’eau, après avoir maximisé le potentiel de leurs sources d’approvisionnement, doivent parfois s’en remettre à des mesures de nature économique, souvent politiquement impopulaires, afin de soulager une partie de la demande d’eau. Ces mesures peuvent prendre diverses formes. La plus fréquente et généralement la première instaurée est la tarification de l’eau. Les prix exigés, qui diffèrent selon que l’usage soit domestique ou industriel, permettent de limiter les gaspillages et d’encourager l’investissement en technologies, procédés et équipements plus efficients dans leur consommation d’eau. Dans les cas plus critiques, des systèmes plus complexes de droits de prélèvement, échangeables ou non, sont instaurés. Leur objectif est de permettre l’affectation des ressources aux usages les plus efficaces de l’eau tant à l’intérieur d’un secteur industriel qu’entre ceux-ci.

Par exemple, l’Australie reçoit des précipitations dont les volumes varient énormément entre les régions, de même que d’une saison ou d’une année à l’autre. Dans le but de protéger la ressource et d’allouer l’eau disponible aux usages les plus productifs, le gouvernement australien a instauré, depuis les années 1980, un système d’allocation de droits de prélèvement et a établi un marché de l’eau. Les usagers se voient ainsi accorder une allocation leur donnant droit à un pourcentage des volumes d’eau pouvant être prélevés durant une saison. Le volume total disponible pour prélèvement est établi par les autorités gouvernementales en fonction des disponibilités saisonnières et en respectant un niveau durable de prélèvement global afin de limiter les impacts sur les écosystèmes (Australie. National Water Commission (NWC), 2011). Les détenteurs de titres peuvent prendre la décision de les vendre, en tout ou en partie, renonçant alors de façon permanente à leur droit en retour d’une contrepartie économique. Il est aussi possible, en fonction de la disponibilité de l’eau, des besoins limités des détenteurs de permis durant une saison donnée ou de la valeur de l’eau sur le marché, de réaliser une transaction ponctuelle (commerce d’allocation). Cette transaction repose sur une situation prévalant à court terme et n’engage pas les parties sur le long terme. Il s’agit ni plus ni moins que la location temporaire du droit de prélèvement du détenteur (Australie. National Water Markets, 2012). Selon la Commission nationale de l’eau de l’Australie, le marché de l’eau génère un chiffre d’affaires annuel moyen de 2,4 G de dollars australiens (AUD) (Australie. NWC, 2011).

Tableau 1.13 : Avantages et contraintes de mise en oeuvre : incitatifs économiques

Critères d’analyse Commentaires

Maîtrise technique Compteurs d’eau nécessaires. Concepts économiques existants. Impacts

environnementaux Limitent la pression sur la ressource en encourageant l’investissement en conservation et en efficience de l’eau. Dans le cas des permis de prélèvement, la consommation totale d’eau est liée à la disponibilité de la ressource.

Impact sur les

populations en aval Impact positif sur la disponibilité de l’eau pour les populations en aval.

Impacts politiques La tarification au volume est exposée à l’opinion publique. Dans le cas des permis de prélèvement, un arbitrage des usages entre les secteurs est nécessaire.

Impacts

économiques Implantation de compteurs d’eau et mesures de suivi. Mise en place et supervision du marché de l’eau si les permis de prélèvements sont échangeables. Suivi de l’évolution de l’apport en eau renouvelable.

Mise en oeuvre / impacts : Aisée / faibles; complexe / moyens; ardue / élevés. Mise en oeuvre / impacts : Aisée / faibles; complexe / moyens; ardue / élevés. Mise en oeuvre / impacts : Aisée / faibles; complexe / moyens; ardue / élevés.

1.4 Perspectives

Les pressions sur la ressource eau sont fortes. La croissance démographique, l’augmentation globale du revenu et son impact sur les habitudes de consommation, notamment sur le plan alimentaire, l’urbanisation et la demande énergétique sans cesse croissante contribuent à la progression de la demande régionale et globale en eau. D’un autre côté, la dégradation de la qualité des eaux limite sa disponibilité. Il en résulte un équilibre régional parfois précaire entre l’offre

et la demande d’eau. Ces facteurs représentent des tendances lourdes qui, dans la plupart des cas, ne peuvent être renversées à court terme voire même à plus long terme dans d’autres cas.

Pour ajouter à l’aspect critique de la situation, la répartition géographique déjà inégale de l’eau s’aggrave selon plusieurs scientifiques et experts, dont ceux du GIEC. Les glaciers continentaux fondent et cesseront, à terme, d’alimenter les régions en aval. Les océans stockent des quantités de plus en plus grandes d’eau au détriment des réservoirs d’eau douce. L’augmentation du niveau de la mer menace également les îles et les régions côtières d’intrusion d’eau salée dans la nappe phréatique. En raison des changements climatiques, les variations des précipitations pourraient s’intensifier considérablement dans les prochaines décennies. Il en résulterait une augmentation de la fréquence et de la durée des épisodes de sécheresse et des précipitations intenses, limitant la quantité d’eau pouvant être recueillie et utilisée par les humains et les écosystèmes terrestres.

La situation inquiète les gouvernements et les dirigeants d’entreprises qui voient le mode de vie de leurs populations et leurs perspectives de croissance menacés. Selon les prévisions du Water Ressource Group 20307, en considérant les présentes sources d’approvisionnement en eau qualifiées de fiables et durables, l’efficience actuelle de notre utilisation de l’eau et une croissance moyenne de l’économie mondiale de 2 %/an jusqu’en 2030, le déficit en eau pourrait s’élever à 40 % dès 2030 (Addams et autres, 2009).

Heureusement, les pistes de solutions, à l’image des usages, sont nombreuses. Aucune ne peut cependant à elle seule remédier à la situation, mais elles peuvent contribuer à diminuer l’ampleur des crises, surtout lorsqu’un ensemble de mesures est appliqué conjointement. La seule piste permettant véritablement de générer de nouvelles sources d’eau, est celle du dessalement. Cependant, les coûts élevés de cette approche technologique et les imposantes quantités d’énergie qu’elle nécessite limitent la capacité de plusieurs régions à la mettre en oeuvre. Il est par conséquent prévisible que les mesures de conservation, de recherche d’efficience de l’utilisation de l’eau, de contrôle et d’arbitrage des usages et de commerce massif et virtuel de l’eau s’avèreront des voies de plus en plus exploitées par les pays en situation de stress hydrique pour les années à venir.

7 Le Water Ressource Group 2030 est composé de l’International Finance Corporation (membre du Groupe de

la Banque Mondiale), de McKinsey & Company (gestionnaire du projet) et des entreprises privées Groupe Barilla, Coca-Cola Company, Nestlé S.A., SAB Miller plc, New Holland Agriculture, Standard Chartered Bank et Syngenta AG.

2. CONTEXTE QUÉBÉCOIS : POTENTIEL D’EXPLOITATION DES RESSOURCES HYDRIQUES