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SECTION 1.- LE DÉPLOIEMENT INACHEVÉ DES DISPOSITIFS DE PAIEMENTS POUR SERVICES ENVIRONNEMENTAUX

A.- LA RECONNAISSANCE DE LA FONCTION ENVIRONNEMENTALE DE L'ACTIVITÉ AGRICOLE ET FORESTIÈRE

40. Largement dépendantes de leur environnement, et exposées aux conséquences de sa dégradation, les activités agricoles et forestières jouent un rôle déterminant dans la gestion de l’espace257. En dépit d’une communauté étroite de liens entre l’agriculture et la forêt, leurs « rapports […] se sont longtemps exprimés en termes de concurrence quant à l’occupation de l’espace »258. En témoigne la répartition des dispositions qui les concernent dans deux codes distincts, le Code rural, et le Code forestier. Érigée en objectif commun des politiques agricoles

254 HERMON C., DOUSSAN I., Production agricole et droit de l’environnement, LexisNexis, 2012, p. 3.

255 Article 39 du Traité instituant la Communauté économique européenne ; BLUMANN C. (dir)., Politique agricole commune et politique commune de la pêche, Institut d’étude européenne, 3e éd., 2011, p. 25 ; V. notamment en ce sens : LAMOTTE H., « Rapport général », in FALQUE M., LAMOTTE H. (eds.), Ressources agricoles et forestières. Droit de propriété, économie et environnement, Bruylant, 2014, pp. 32-33.

256 Sur les prestations qui étaient jusque-là fournies gratuitement à la société par l’agriculture en même temps que l’acte de production, V. notamment : ULMANN L., « La prime à l’herbe, une aide à l’agriculture fonctionnelle ? », in BARTHÉLÉMY D., DELORME H., LOSCH B., MOREDDU C., NIEDDU M. (dir.), La multifonctionnalité de l’activité agricole et sa reconnaissance par les politiques publiques, Quæ, 2003, p. 338 ; sur le caractère bien établi de la fonction écologique et sociale de la forêt, V. : DOUSSAN I., « Agriculture et forêt : rapprochements et divergences autour du développement durable et de la multifonctionnalité », in CORNU M., FROMAGEAU J. (dir), La forêt en France au XXIe siècle : enjeux politiques et juridiques, L’Harmattan, 2004, p. 69.

257 « Comme le souligne la FAO dans son rapport en 2007, les PSE se justifient par l’existence d’externalités positives (à privilégier) ou négatives (à réduire) induites par des activités de production (agricoles ou forestières) qui jouent un rôle déterminant dans la gestion des espaces » : FROGER G., MÉRAL P., LE COQ J.-F., AZNAR O., BOISVERT V., CARON A., ANTONA M., « Regards croisés de l’économie sur les services écosystémiques et environnementaux », préc., §. n° 28.

258 DOUSSAN I., « Agriculture et forêt : rapprochements et divergences autour du développement durable et de la multifonctionnalité », préc., p. 67.

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et forestières (1), la multifonctionnalité s’est ainsi imposée comme un « facteur de rapprochement des activités agricoles et forestières »259. En révélant l’existence d’une fonction environnementale, non rémunérée, qui bénéfice à l’ensemble de la société, la reconnaissance de la multifonctionnalité s’est accompagnée d’une volonté de légitimer le versement de contreparties financières aux agriculteurs et aux gestionnaires forestiers (2).

1.- La reconnaissance juridique des fonctions environnementales de l’activité agricole et forestière

41. Le concept de multifonctionnalité de l’activité agricole a été progressivement introduit en droit européen à partir des années 1980260. Dans une communication « Un avenir pour l'agriculture européenne » du 18 décembre 1985, la Commission des Communautés européennes constatait « une prise de conscience croissante du fait que 1’agriculture, au-delà de sa fonction économique, est appelée à assurer un rôle de plus en plus important dans l’aménagement du territoire, pour le maintien d’un certain tissu socio-économique ou pour la sauvegarde de l’environnement et du paysage. Ces services rendus à la collectivité s’avèrent essentiels dans les régions qui, en raison de l'éloignement des centres urbains et des conditions naturelles difficiles, sont confrontées à un processus progressif de désertification et d’appauvrissement à la fois économique et culturel »261. Mobilisant pour la première fois le terme de « fonctions », le règlement n° 1760/87 du Conseil du 15 juin 1987262 énonce que « les agriculteurs situés dans des zones sensibles du point de vue de la protection de l'environnement ou du maintien de l'espace naturel peuvent exercer une véritable fonction au service de l'ensemble de la société ». Dans le prolongement, la communication de la Commission européenne de 1988 sur « L'avenir du monde rural » soulignera « le rôle constructif que l'agriculture et la sylviculture peuvent jouer dans la protection de

259Ibid., p. 69.

260 V. notamment sur ce point : BLUMANN C. (dir)., Politique agricole commune et politique commune de la pêche, préc., p. 276 et s.

261 Commission des Communautés européennes, Un avenir pour l'agriculture européenne. Orientations de la Commission à la suite des consultations dans le cadre du "Livre vert", Communication de la Commission au Conseil et au Parlement européen, COM/1985/0750 final, p. 3.

262 Règlement (CEE) n° 1760/87 du Conseil du 15 juin 1987 modifiant les règlements (CEE) n° 797/85, (CEE) n° 270/79, (CEE) n° 1360/78 et (CEE) n° 355/77 en ce qui concerne les structures agricoles et l'adaptation de l'agriculture à la nouvelle situation des marchés et le maintien de l'espace rural, JOCE n° L 167 du 26 juin 1987, p. 1.

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l'environnement rural »263. Le concept de fonction environnementale de l’activité agricole sera par la suite pleinement consacré lors de la réforme de la politique agricole commune (PAC) – réforme « Mac Sharry » – issue du règlement n° 2078-92 du Conseil du 30 juin 1992264. Ce dernier considérera en effet, que « sur la base d'un régime d'aides approprié, les agriculteurs peuvent exercer une véritable fonction au service de l'ensemble de la société par l'introduction ou le maintien de méthodes de production compatibles avec les exigences accrues de la protection de l'environnement et des ressources naturelles ou avec les exigences du maintien de l'espace naturel et du paysage »265. L’idée selon laquelle « les agriculteurs [peuvent] exercer une véritable fonction au service de l'ensemble de la société » s’inscrira également au cœur premier règlement de développement rural (RDR1) du 17 mai 1999, instituant un cadre commun de soutien communautaire en faveur d'un développement rural durable266.

42. Largement déclinée en droit européen, la multifonctionnalité sera formellement introduite pour la première fois en droit rural français par la loi d’orientation agricole du 9 juillet 1999267. Elle dispose, en ces termes, que « la politique agricole prend en compte les fonctions économique, environnementale et sociale de l'agriculture et participe à l'aménagement du territoire, en vue d'un développement durable. Elle a pour objectifs, en liaison avec la politique agricole commune et la préférence communautaire : […] - la préservation des ressources naturelles et de la biodiversité, et l'entretien des paysages, l'équilibre économique des exploitations ne devant pas être mis en péril par les obligations qui en découlent, notamment en matière de préservation de la faune sauvage, sans qu'il en résulte des charges supplémentaires pour l'Etat […] »268. Selon Carole Hernandez-Zakine, « ces trois fonctions sont mises sur un

263 Commission des Communautés européennes, L’avenir du monde rural, Communication de la Commission, COM(88) 501 final, p. 10.

264 Règlement (CEE) n° 2078-92 du Conseil du 30 juin 1992 concernant des méthodes de production agricole compatibles avec les exigences de la protection de l’environnement ainsi que l’entretien de l’espace naturel, JOCE n° L 215 du 30 juillet 1992, p. 85.

265Ibid.

266 Règlement (CE) n° 1257/1999 du Conseil du 17 mai 1999 concernant le soutien au développement rural par le Fonds européen d'orientation et de garantie agricole (FEOGA) et modifiant et abrogeant certains règlements, JOCE n° L 160 du 26 juin 1999, p. 80.

267 « La politique agricole prend en compte les fonctions économique, environnementale et sociale de l'agriculture et participe à l'aménagement du territoire, en vue d'un développement durable. Elle a pour objectifs, en liaison avec la politique agricole commune et la préférence communautaire : […] - la préservation des ressources naturelles et de la biodiversité, et l'entretien des paysages, l'équilibre économique des exploitations ne devant pas être mis en péril par les obligations qui en découlent, notamment en matière de préservation de la faune sauvage, sans qu'il en résulte des charges supplémentaires pour l'Etat […] » : art. 1 de la loi n° 99-574 du 9 juillet 1999 d'orientation agricole, JO du 10 juillet 1999, p. 10231.

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pied d’égalité et se substituent à la seule mission de production confiée jusqu’alors aux agriculteurs par la loi »269. Si la réalité des fonctions environnementales assurées par l’activité agricole est largement établie, leur généalogie semble en revanche opposer deux visions. Pour les uns, « la fonction de base de l’agriculture, celle de production de biens et de services, se complète ainsi de nouveaux devoirs : la préservation de l’eau, des sols, des paysages et de la biodiversité, le maintien, voire la création d’emplois, l’animation du milieu rural »270. Pour d’autres, ces « prestations », inhérentes à l’activité agricole271, étaient jusqu’à présent fournies gratuitement à la société en même temps que l’acte de production agricole. Quoi qu’il en soit, la baisse des prix des produits agricoles, couplée à l’augmentation des coûts de production, a néanmoins contribué à leur dégradation, voire à leur disparition272. Dès lors, la consécration juridique de la fonction environnementale de l’activité agricole s’est accompagnée d’une volonté d’en assurer la rémunération pour en garantir la perpétuation.

43. Avant même la consécration de la multifonctionnalité, « l’idée selon laquelle les forêts remplissent une fonction écologique et sociale est par ailleurs déjà ancienne et peu controversée »273. Si l’intervention communautaire dans le secteur forestier n'est pas

269 HERNANDEZ-ZAKINE C., « Analyse juridique de la multifonctionnalité de l’agriculture : l’intérêt général au cœur de l’agriculture (1ère partie) », RDR, n° 283, mai 2000, p. 263.

270 PATRIAT F., Rapport fait au nom de la commission de la production et des échanges sur le projet de loi d’orientation agricole (n° 977), Doc. AN n°1058, 8 juillet 1998, p. 115.

271 « Contrairement à ce que laissent parfois penser les discours, les réformes agricoles européenne et françaises de 1999 n’ont pas inventé la multifonctionnalité de l’agriculture. L’agriculteur a toujours assuré des fonctions dépassant le simple cadre économique (Heuchel, 2001). La multifonctionnalité de l’agriculture est un fait. […] L’an 1999 n’est donc que l’année de son officialisation » (BODIGUEL L., « Le territoire, vecteur de la reconnaissance juridique de l'agriculture multifonctionnelle », préc., p. 61).

272 ULMANN L., « La prime à l’herbe, une aide à l’agriculture fonctionnelle ? », préc., p. 339 ; VÉRON F., « Rémunérations liées à l'entretien de la nature », préc., p. 215.

273 DOUSSAN I., « Agriculture et forêt : rapprochements et divergences autour du développement durable et de la multifonctionnalité », préc., p. 69 ; dans le même sens, M. Roger Douroure, rapporteur de la loi « forêt », énonçait en 1985 que « comme toutes les forêts, la forêt française assure depuis son origine une fonction écologique qui vise la protection et la conservation du milieu naturel : la forêt épure et réoxygène l’atmosphère ; elle protège le sol contre l’érosion par le vent […] et elle contribue au maintien des équilibres biologiques : composition de l’air, équilibre faune-flore, régime climatique, régime des eaux. Par ailleurs, l’homme lui a donné depuis qu’il existe une fonction économique : satisfaire les besoins en bois de feu puis en bois d’œuvre, et l’ère industrielle a ajouté, au XXe siècle, le bois de trituration ou bois d’industrie. Enfin, phénomène moderne, la forêt joue de plus en plus une fonction sociale en offrant un espace de détente, de loisirs à une population citadine qui ressent le besoin d’un contact direct à la nature » : Doc. AN, CR de la 1e séance du jeudi 9 mai 1985 sur le projet de loi relatif à la forêt, JO de l’AN du vendredi 10 mai 1985, p. 631 ; sur les principales étapes de la construction du régime forestier français et la prise en compte juridique des liens entre forêt et prévention des risques naturels, V. BILLET Ph., « La forêt fonctionnelle. La formalisation juridique de l’instrumentalisation de la forêt », in HARPET C., BILLET Ph., PIERRON J.-P., À l’ombre des forêts. Usages, images et imaginaires de la forêt, l’Harmattan, 2014, pp. 101-118.

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« nouvelle » 274, en revanche la définition et la mise en œuvre des politiques forestières nationales ont longtemps relevé de la seule compétence des États275. Implicite dans la loi du 4 décembre 1985 relative à la gestion, la valorisation et la protection de la forêt276, la « multifonctionnalité » s’est peu à peu imposée à partir du milieu des années 1980 dans la terminologie employée en droit européen277, ainsi que par les forestiers278. Elle sera formellement consacrée en droit forestier par la loi du 9 juillet 2001 d'orientation sur la forêt279. Selon le Député Germinal Peiro, cette loi a contribué à apporter « dans la période récente, les changements de fond les plus significatifs au code forestier, en mettant notamment l’accent sur l’aspect économique des forêts et l’encouragement à l’exploitation »280. Reconnaissant d’intérêt général la mise en valeur et la protection des forêts, le législateur énonce que « la politique forestière prend en compte les fonctions économique, environnementale et sociale des forêts et participe à l'aménagement du territoire, en vue d'un développement durable. Elle a pour objet d'assurer la gestion durable des forêts et de leurs ressources naturelles, de développer la qualification des emplois en vue de leur pérennisation, de renforcer la compétitivité de la filière de production forestière, de récolte et de valorisation du bois et des autres produits forestiers et de satisfaire les demandes sociales relatives à la forêt »281.

274 BAVARD D., CHEVALIER B., « Un premier "paquet” forestier adopté à Bruxelles », Revue Forestière Française, n° 1, 1990, p. 7.

275 « Les États membres doivent déterminer les conditions auxquelles doivent répondre les boisements des superficies agricoles » : règlement (CEE) n° 1609/89 du Conseil du 29 mai 1989 modifiant, en matière de boisement des superficies agricoles, le règlement (CEE) n° 797/85 concernant l'amélioration de l'efficacité des structures de l'agriculture, JOCE n° L 165 du 15 juin 1989, p. 1.

276 « La politique de mise en valeur économique, écologique et sociale de la forêt relève de la compétence de l’Etat » : Art. 2 de la loi n° 85-1273 du 4 décembre 1985 relative à la gestion, la valorisation et la protection de la forêt, JO du 5 décembre 1985, p. 14105 ; codifié à l’article L. 101 du C. forest. (ancien) ; la formule retenue par le législateur se révèle cependant moins explicite que celle contenue dans le projet de loi « Méhaignerie » relatif à la forêt, qui disposait que « les bois, forêts et terrains à boiser, quel qu'en soit le propriétaire, doivent être gérés en vue de remplir leurs fonctions économique, écologique et sociale ».

277 Résolution du Conseil du 15 décembre 1998 relative à une stratégie forestière pour l’Union européenne, JOCE n° C 56 du 26 février 1999, p. 1 ; Règlement (CE) n° 2152/2003 du Parlement européen et du Conseil du 17 novembre 2003 concernant la surveillance des forêts et des interactions environnementales dans la Communauté, JOUE n° L 324 du 11 déc. 2003, p. 1 ; Communication de la Commission au Conseil et au Parlement européen concernant un plan d'action de l'Union européenne en faveur des forêts, COM/2006/0302 final.

278 BARTHOD C., « La multifonctionnalité des forêts entre discours et pratiques : illusion ou réalité à assumer ? »,

Revue Forestière Française, n° 5, 2015, p. 298.

279 Loi n° 2001-602 du 9 juillet 2001 d'orientation sur la forêt, JO du 11 juillet 2001 p. 11001.

280 PEIRO G., Rapport fait au nom de la Commission des affaires économiques sur le projet de loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt (n° 1548), Doc. AN n° 1639, 13 déc. 2013, p. 477.

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2.- La légitimité de la rémunération des fonctions environnementales des activités agricole et forestière

44. À l’image des travaux de l’OCDE282, les décennies 1980 et 1990 vont être marquées par la revendication selon laquelle, en l’absence de prise en compte par le marché des effets positifs de l’agriculture sur l’environnement, leur rémunération apparaîtrait dès lors justifiée283. Cette volonté de rémunérer les activités agricole et forestière va se révéler en réalité concomitante à la reconnaissance juridique des fonctions environnementales de ces activités. Le livre vert de la Commission européenne du 13 juillet 1985 énonce, qu’au regard du « rôle de l’agriculture en tant que protection de l’environnement » 284, « la société devrait lui en être reconnaissante en lui donnant les ressources financières nécessaires [pour remplir ses taches] » 285. Il ajoute, que « les paiements effectués pourraient en même temps soutenir et diversifier le revenu des agriculteurs et contribuer à limiter la production »286. La communication de la Commission européenne de 1988 sur « L'avenir du monde rural » soulignera également, qu’en protégeant l’environnement, l'agriculture et la sylviculture deviennent par conséquent « fournisseurs d'un bien public nécessaire et apprécié » justifiant que « des aides incitatives ou compensatoires » soient versées, « à la limite même de façon permanente »287. De la même manière, le règlement n° 2078-92 du 30 juin 1992 dispose que « sur la base d'un régime d'aides approprié, les agriculteurs peuvent exercer une véritable fonction au service de l'ensemble de la société »288. Plus encore, les travaux préparatoires de la loi d'orientation agricole du 9 juillet 1999 ont clairement souligné que les nouvelles missions « assignées par la société aux agriculteurs, [devaient] aussi être compensées par une rémunération »289.

282 V. notamment en ce sens : OCDE, L'évaluation monétaire des avantages des politiques de l'environnement, Paris, 1989, 91 p. ; OCDE, Réforme de la politique agricole : nouvelles orientations, le rôle des paiements directs au revenu, Paris, 1994, 217 p.

283 MADELIN V., « La rémunération des externalités positives », Économie rurale, n° 220-221, 1994, p. 210 ; MADELIN V., « La rémunération des services environnementaux rendus par l'agriculture », Économie & prévision, n° 117-118, 1995, pp. 78-80.

284 Commission des Communautés européennes, COM(85) 333 final, Perspectives de la politique agricole commune, 13 juillet 1985, p. VI.

285Ibid.

286Ibid., p. 52.

287 Commission des Communautés européennes, L’avenir du monde rural, préc., p. 10.

288 Règlement (CEE) n° 2078-92 du Conseil du 30 juin 1992, préc., souligné par nous.

289 Audition de M. Jean-François Hervieu, président de l’Assemblée permanente des chambres d’agriculture (APCA), retranscrite dans le rapport sur le projet de loi d’orientation agricole : Doc AN n° 1058, 9 juillet 1998.

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45. De même qu’en matière agricole, la reconnaissance de la fonction environnementale des forêts va s’imposer comme un moyen de justifier leur rémunération. La résolution H1 Dans le cadre de la Conférence d’Helsinki sur la gestion des forêts de 1993 énonçait que « les propriétaires forestiers qui font bénéficier la communauté des avantages découlant d’un usage multiple de leurs forêts devraient être encouragés, et lorsque de telles prestations entrainent pour eux des frais excessifs, ils devraient recevoir, le cas échéant, le soutien de la société ou d’autres bénéficiaires »290. Reconnaissant d'intérêt général la mise en valeur et la protection des forêts, la loi d’orientation sur la forêt du 9 juillet 2001 encourage la recherche « de justes contreparties pour les services rendus par la forêt et les forestiers en assurant les fonctions environnementale et sociale lorsque cela conduit à des contraintes ou à des surcoûts d'investissement et de gestion »291. Cette orientation nouvelle est particulièrement explicite dans l’exposé des motifs du projet de loi d’orientation sur la forêt, qui entend ouvrir « la voie de la contractualisation avec des propriétaires pour satisfaire une demande collective, clairement identifiée, et négociée, dans les domaines environnementaux, économiques ou sociaux. À travers cette approche territoriale, [le projet de loi] facilite l'émergence de nouvelles formes de rémunération des fonctions non marchandes des forêts »292. Bien qu’il ait été sollicité par un rapport du Sénat293 et un amendement294, le législateur n’a toutefois pas souhaité affirmer le principe selon lequel les forestiers devraient bénéficier de contreparties (systématiques) pour les services qu'ils rendent à la société en garantissant la fonction environnementale et sociales de la forêt. De la même manière qu’en matière agricole, le droit forestier ne s’oriente pas vers un « principe de compensation »295. La rémunération de la fonction environnementale de l’activité forestière n’est ainsi pas systématique, mais conditionnée, les « services rendus » par

290 Résolution H1 « Principes généraux pour la gestion durable des forêts », adoptée lors de la Conférence interministérielle d'Helsinki pour la protection des forêts, 1993.

291 Art. 1 de la loi n° 2001-602 du 9 juillet 2001 d'orientation sur la forêt, préc.

292 Projet de loi d’orientation sur la forêt, Doc. AN n° 2332, 12 avril 2000.

293 « Votre commission vous propose d’inscrire, en outre, dans le livre préliminaire du code forestier parmi les objectifs de la politique forestière, le principe d’une contrepartie juste et équilibrée des contraintes et des surcoûts résultant du développement des fonctions environnementales et surtout sociales de la forêt. Ceci constitue un élément essentiel pour encourager les propriétaires à développer ainsi des politiques d’accueil du public, en les assurant que, de manière contractuelle, les contraintes et surcoûts qui en découlent seront pris en compte » : FRANÇOIS Ph., Rapport sur le projet de loi d’orientation sur la forêt, Doc. Sénat n° 191, 17 janvier 2001, p. 35.

294 « Nous proposons de détailler beaucoup plus les mesures que nous pouvons prendre après le rapport de la conférence d'Helsinki. Conformément à l'engagement international de la France, cet amendement […] vise donc à affirmer le principe selon lequel les forestiers devraient bénéficier de contreparties pour les services qu'ils rendent à la société en assurant les fonctions environnementales et sociales de la forêt, lorsque cela conduit à des contraintes ou des surcoûts : Doc. Sénat, CR de la séance du 4 avril 2001, amendement n° 145 rectifié bis.

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les forestiers n’étant rémunérés qu’à la condition que leur réalisation engendre « des contraintes particulières ou des surcoûts d'investissement et de gestion »296. La reconnaissance simultanée de la fonction environnementale assurée par les activités agricole et forestière et de la nécessité d’en assurer la rémunération va rapidement s’accompagner du déploiement de nouveaux dispositifs de rémunération de ces fonctions dans le cadre de la politique agricole commune.

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