• Aucun résultat trouvé

Recherche du microenvironnement humain induisant la modulation de la virulence

Dans l’optique de déterminer le ligand naturel de BvgS, permettant à la bactérie de passer en phase Bvg- ou Bvgi, des modèles d’infections cellulaires ont été mis au point. En effet, il a été montré que des souches virulentes de B. pertussis pouvaient être internalisées dans des cellules phagocytaires telles que les macrophages et monocytes, mais également dans des cellules non phagocytaires. Ainsi, il semblerait que la bactérie ait développé des mécanismes d’invasion cellulaire dans le but d’échapper à la réponse immunitaire de l’hôte (Martín et al., 2015).

195

Différentes souches ont été construites et portent la fusion traductionnelle de la mRFP1 avec la sous-unité S1 de la toxine pertussique (ptx, Fig. 128), en vue de détecter la protéine de fusion au microscope.

Ci-dessous sont référencées les différentes souches utilisées et leur rôle dans ces expériences :

Souches But

ΔPAS 65 et BPSM Contrôles d’infection sans fluorescence BPSM (pBBRptx-mRFP1) Si fixation ligand antagoniste :

diminution/perte de fluorescence

ΔPAS 65 (pBBRptx-mRFP1) Si fixation ligand antagoniste : apparition de fluorescence

ΔPAS 65 (pBBRptx-mRFP1) pré-activé par

MgSO4 dans le milieu BG Activation pour que la bactérie ait tous les facteurs de virulence nécessaires pour favoriser son entrée dans les cellules eucaryotes

ΔPAS 65 VFT1-SS (pBBRptx-mRFP1) Contrôle positif où la fluorescence doit rester constante

Figure 128 : Descriptif des différentes souches utilisées pour les infections cellulaires pour déterminer le ligand physiologique de BvgS.

Dans l’hôte, l’infection par B. pertussis stimule le recrutement de granulocytes polynucléaires, de macrophages alvéolaires ainsi que de lymphocytes (Vandebriel et al., 2003). Comme B. pertussis ne peut pas survivre dans les granulocytes polynucléaires, ce type cellulaire ne constitue pas une niche intracellulaire pour ce pathogène (Vandebriel et al., 2003). En revanche, après internalisation par les macrophages une majorité des bactéries est tuée mais une petite proportion empêcherait la fusion du lysosome et pourrait se répliquer dans un compartiment non acide (Lamberti et al., 2010). Il faut cependant noter que B.

pertussis ne peut survivre à un pH inférieur à 4,5 (Schneider et al., 2000). Un autre type de

cellules, les cellules dendritiques, jouent un rôle important dans l’immunité innée et permettent l’élaboration d’une réponse de défense antimicrobienne grâce à la production de cytokines inflammatoires et d’autres médiateurs de l’immunité (Stefanelli et al., 2009). Nous avons donc utilisé des cellules immunitaires phagocytaires de type macrophages et des cellules dendritiques

1. Infection de THP-1, monocytes humains différenciés chimiquement en macrophage

a. Matériel et méthodes

Des infections cellulaires ont été réalisées en vue d’observations microscopiques et de dénombrements des bactéries (CFU pour ‘colony-forming unit’).

Pour le dénombrement bactérien, l’expérimentation a été réalisée en plaque de 6 puits, et 1,8 millions de monocytes humains (lignée THP-1) ont été disposés dans chaque puits. La différenciation en macrophage se fait par ajout de PMA (Phorbol 12-myristate 13-acetate, Sigma, 20 ng/mL) 18 h minimum avant l’infection. Ensuite, le tapis cellulaire est lavé deux fois, puis infecté à une multiplicité d’infection (MOI) de 200 pendant une heure. Deux

196

lavages au PBS sont réalisés et de la polymyxine B (100 µg/mL) est utilisée pour tuer les bactéries extracellulaires. L’ajout de l’antibiotique est considéré comme correspondant au temps 0. Après une heure d’action, le tapis cellulaire est lavé deux fois au PBS puis la concentration de polymyxine B est diminuée à 5 µg/mL. Après 4 h, 24 h et 48 h, le tapis cellulaire est lavé deux fois au PBS, puis de la saponine (0,1% final) est utilisée pour décrocher le tapis cellulaire. Des dilutions en série sont réalisées, et les boîtes sont ensemencées pour le dénombrement des bactéries au bout de 5 jours. Le protocole expérimental diffère légèrement pour les observations microscopiques. Les monocytes sont déposés dans une plaque de 24 puits contenant une lamelle, à raison de 400 000 cellules par puits. Cette fois de la formaline (Sigma) est utilisée à la place de la saponine dans le but de fixer le tapis cellulaire à la lamelle et ainsi pouvoir effectuer l’observation microscopique après préparation de la lame.

b. Résultats

Les résultats de dénombrement bactérien suite à l’infection de THP-1, préalablement différenciés en macrophage, sont présentés dans la figure 129.

Figure 129 : Dénombrement bactérien issu de l'infection de THP-1 différenciés, par différentes souches bactériennes (voir Fig. 128). Le temps T0 correspond à l’inoculum bactérien utilisé pour l’infection. Les temps 4 et 24 sont comptés après l’ajout de la polymyxine B. Il s’agit d’une expérience préliminaire.

Pour les différentes souches testées, les résultats de dénombrement bactérien sont semblables. La souche ΔPAS 65 à régulation inversée est internalisée indépendamment de l’expression de tous ses facteurs de virulence. Son internalisation et sa survie sont comparables à celles de la souche sauvage ou de la souche exprimant de manière constitutive les facteurs de virulence (ΔPAS 65 VFT1-SS).

Les analyses des souches fluorescentes en microscopie ont été réalisées plusieurs fois mais ne nous ont pas permis d’observer une réactivation de la souche ΔPAS 65 dans nos conditions expérimentales, en comparant les champs avec ceux de cellules non infectées ou infectées avec des bactéries non fluorescentes.

Récemment, une étude du protéome de B. pertussis a été réalisée suite à l’infection de THP-1 sur la fraction des bactéries qui survivent et se multiplient à l’intérieur de la cellule. Une

197

modification du profil d’expression des protéines montre l’adaptation de la bactérie aux conditions intracellulaires. La plupart des facteurs de virulence exprimés en phase Bvg+ tels que la FHA, PTX et ACT ont été identifiés 3h et 48 h après infection des cellules phagocytaires, suggérant que ces facteurs de virulence sont requis pour l’infection et la survie intracellulaire. Il n’y aurait donc pas de passage en phase d’avirulence des bactéries dans les macrophages (Lamberti et al., 2016). Mes résultats indiquant que la modulation de virulence de B. pertussis ne se produit pas dans les cellules THP-1 sont cohérents avec ces résultats de protéomiques.

2. Infection de cellules dendritiques DC2-4

a. Matériel et méthodes

Le protocole expérimental d’infection des cellules dendritiques de souris DC2-4 est le même que pour l’infection des THP-1 excepté que les cellules sont adhérentes et ne nécessitent pas de différenciation au PMA. Toutefois, le temps d’infection est augmenté à 2 h, et la polymyxine B est utilisée à 20 µg/mL pendant 3 heures puis diminuée à 5 µg/mL (Stefanelli et al., 2009).

b. Résultats

Les résultats de dénombrement obtenus après infection de cellules dendritiques par les différentes souches d’intérêt sont présentés dans la figure 130.

Figure 130 : Dénombrement bactérien issu de l'infection de cellules dendritiques de souris DC2-4, par différentes souches bactériennes. Le temps T0 correspond à l’inoculum bactérien utilisé pour l’infection. Les temps 4 et 24h sont comptés après l’ajout de la polymyxine B. Il s’agit d’une expérience préliminaire.

De légères différences de survie dans ces cellules sont obtenues pour les différentes souches de bactéries, mais il s’agit de résultats préliminaires issus d’une seule expérience. Ces derniers devront être répliqués. A l’heure actuelle, ces résultats restent difficiles à interpréter.

Les observations microscopiques suite à l’infection des cellules dendritique par différentes souches de B. pertussis ont été réalisées plusieurs fois mais n’ont pas permis d’observer de réactivation pour le mutant à régulation inversée.

198

Les expériences d’infection cellulaire constituent des tests préliminaires. Toutefois, il semble que les types cellulaires utilisés ne permettent pas la modulation de la virulence de nos souches bactériennes, et donc vraisemblablement ne produisent pas le stimulus nécessaire au passage en mode phosphatase de BvgS. Différentes études ont montré que B. pertussis était capable d’infecter les cellules épithéliales de différentes origines, respiratoires ou non (Hela229, CHO, Caco2). L’invasion des cellules épithéliales est un processus dépendant de l’expression des facteurs de virulence impliqués dans l’adhésion cellulaire, étant donné que des mutants de BvgS sont significativement moins invasifs (Bassinet et al., 2000). D’autres types cellulaires pourront alors être utilisés dans nos prochaines expérimentations, comme des cellules épithéliales (A549 ou HTE) ou d’autres cellules immunitaires telles que des MHS (macrophages alvéolaires). Les cellules A549 correspondent à des cellules épithéliales issues d’un carcinome de poumon humain, tandis que les cellules HTE sont des cellules humaines épithéliales de trachée qui produisent des cytokératines et possèdent des microvillosités ainsi que des jonctions serrées, caractéristiques des cellules épithéliales (Bassinet et al., 2000). Des cellules épithéliales de larynx telles que les cellules HEP-2 pourront également être utilisées dans notre modèle infectieux. Enfin, il a été proposé que les macrophages alvéolaires consisteraient une niche intracellulaire pour B. pertussis étant donné que des bactéries viables sont retrouvées au niveau de ces cellules immunitaires plus de 21 jours après l’infection de souris (Lamberti et al., 2010). Il serait également intéressant d’utiliser un second gène rapporteur, comme la gfp (‘green fluorescent protein’) exprimé de façon constitutive, pour pouvoir distinguer parmi les bactéries présentes celles qui expriment la fluorescence rouge dépendant de l’activité de BvgS. Il sera alors possible de réaliser ces expériences de manière plus automatisée pour l’acquisition des résultats en utilisant un matériel de type opéra/opérette.