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4. Cadre théorique

4.2 Attitudes et intégration/inclusion scolaire

4.2.1 Le rôle des attitudes parentales dans le projet d’intégration/inclusion

intellectuelle, Côté, Ouellet et Lachance (1990) constatent qu’« au fil des ans […] les attitudes

des publics d’accueil ont reçu moins d’attention que les préoccupations administratives et organisationnelles » et qu’« il ne faut alors pas se surprendre que plusieurs projets de réinsertion créent des remous ou ne voient jamais le jour » (p. 21). Les attitudes du public ont un rôle important dans la réussite d’une pratique qui modifie ses habitudes. Plusieurs auteurs relèvent ainsi l’importance du rôle joué par les attitudes des parents lorsque le cas d’une pratique scolaire intégrative/inclusive est considéré (Balboni & Pedrabissi, 2000 ; Beaupré, Bédard, Courchesne, Pomerlau & Tétreault, 2004 ; Kalyva et al., 2007 ; Stoneman, 2001).

L’adhésion de ces derniers à cette pratique, ou au contraire leur opposition, aura des incidences sur sa réussite et, à terme, sur sa généralisation. Stoiber, Gettinger et Goetz (1998) relèvent l’importance de comprendre que les croyances des parents et des praticiens influencent le processus de changement d’une pratique éducative ainsi que les standards de cette dernière. Pour qu’une pratique évolue, il est nécessaire que l’ensemble des acteurs concernés adhère et participe au processus de changement. Il est donc impératif d’y inclure les parents d’élèves et de (re)connaître leurs croyances vis-à-vis de cette pratique.

La recherche de York et Tundidor (1995), réalisée aux Etats-Unis, est un exemple d’une étude qui se fonde essentiellement sur cette exigence participative. Les auteurs ont constitué quarante-cinq groupes de discussion en réunissant enseignants ordinaires et spécialisés, administrateurs, personnel de soutien, parents d’élèves et élèves. En tout, 335 personnes ont pris part à la recherche. Les groupes provenaient de diverses écoles d’un même district, sélectionnées selon les critères suivants : situation géographique, taille, diversité ethnique et culturelle, type et nombre de programmes d’éducation spécialisée mis en place. Chacun des groupes a été invité à discuter de l’implantation d’un modèle éducatif inclusif. La parole a ainsi été donnée à l’ensemble des personnes impliquées dans le projet d’inclusion, et les espaces de discussion créés ont permis de donner un aperçu des préoccupations de chacun. La recherche devait ainsi servir de guide dans la mise en pratique d’une politique inclusive voulue par le district.

Concernant les obstacles potentiels à l’inclusion scolaire identifiés par les participants, les auteurs relèvent le manque de temps alloué pour la collaboration entre enseignants spécialisés et réguliers, le caractère rigide du programme scolaire, l’insuffisance des ressources matérielles et humaines pour mener à bien un tel projet, les attitudes négatives du corps enseignant et des élèves sans déficience, la crainte que les enfants sans déficience puissent être pénalisés dans leurs apprentissages, l’inadéquation de la pratique inclusive pour les élèves avec des déficiences graves (troubles importants du comportement, besoins médicaux conséquents) (York & Tundidor, 1995). Nous reviendrons sur les résultats qui concernent plus

particulièrement les parents d’élèves sans déficience dans la partie consacrée aux craintes généralement exprimées par ces derniers lors de la mise en place d’une pratique intégrative/inclusive.

Stoneman (2001) relève que les parents d’enfants sans déficience peuvent influer de deux façons sur le succès d’un programme inclusif : de façon directe, au travers de leur influence sur le programme ; de façon plus indirecte, au travers de la socialisation de leur enfant.

De façon directe, les parents d’élèves exercent un poids considérable sur les administrateurs et les enseignants, ce qui peut avoir des répercussions sur la politique de l’établissement et sur les décisions qui y sont prises. Les parents pourraient par exemple demander que certains enfants turbulents ou perturbateurs quittent le programme. Ou réclamer une réduction d’effectif des classes ou une augmentation du nombre de professionnels présents pour assurer le suivi de chaque élève. Ces revendications, si elles fédèrent un groupe de parents suffisamment important, devront nécessairement être entendues, et les modifications souhaitées devront être discutées ou apportées au programme (Stoneman, 2001).

De façon indirecte, les parents influencent la réussite d’un programme au travers de la socialisation de leurs enfants, plus particulièrement au travers de leur socialisation à la différence et au handicap. Si elle est moins concrète, cette influence n’en demeure pas moins importante. Nous proposons d’en détailler quelque peu le fonctionnement.

Les attitudes et la perception vis-à-vis des autres s’apprennent. Des recherches récentes suggèrent que les attitudes des enfants envers des personnes avec une déficience se développent durant les années préscolaires et les premières années de l’école primaire (Innes

& Diamond, 1999) ; dès l’âge de quatre ans, les enfants distinguent les différences physiques et comportementales chez leurs pairs (Dyson, 2005). Leurs attitudes vis-à-vis de la déficience se construisent sur la base de leurs propres expériences au contact de leurs pairs avec une déficience ainsi qu’à partir des informations qu’ils obtiennent de la part des adultes qui les entourent (Innes & Diamond, 1999). Selon Stoneman (2001), c’est avant tout les adultes, notamment les parents, qui donnent du sens aux différences que l’enfant observe et découvre en grandissant (Stoneman, 2001). Ce sont eux qui apprennent à l’enfant ce que signifie avoir une incapacité, en expliquent les causes particulières et certaines caractéristiques qui lui sont liées. Ces savoirs enseignés dessinent les contours de la composante cognitive des attitudes de l’enfant vis-à-vis de personnes en situation de handicap.

Les parents transmettent également des modèles de réponses émotionnelles face au handicap.

Les informations que récolte l’enfant auprès de ses parents sont multiples et parfois très

subtiles. Il observera par exemple leur langage corporel ou l’intonation de leur voix (Stoneman, 2001).

Enfin, les parents transmettent à leurs enfants des comportements. Ils peuvent par exemple insister auprès d’eux sur des comportements d’entraide, de soutien, fondés sur l’altruisme et l’empathie. Le contact de leur enfant avec un enfant en situation de handicap est également l’occasion pour les parents de lui transmettre des valeurs plus fondamentales. Ils peuvent par exemple leur enseigner que les enfants se ressemblent davantage qu’ils ne sont différents, soit insister sur les similitudes entre les êtres humains plutôt que sur ce qui les différencie (Stoneman, 2001).

Ainsi, les adultes exercent une influence sur les trois composantes principales de l’attitude de leurs enfants vis-à-vis des personnes porteuses d’une déficience : la composante cognitive, la composante émotionnelle et la composante comportementale. Leurs connaissances de la déficience ainsi que leur comportement et leur position face à la différence influenceront ceux de leurs enfants. Cette influence des parents sur les attitudes de leurs enfants est liée à leurs propres attitudes et croyances vis-à-vis de l’intégration/inclusion et, plus généralement, des personnes en situation de handicap (Stoneman, 2001).

Il est essentiel que les enfants impliqués dans une situation d’intégration ou d’inclusion aient dans leur ensemble des attitudes positives vis-à-vis de l’élève en situation de handicap et de sa présence dans la classe. « Les pairs de la classe sont des acteurs importants dans la réussite de l’inclusion. Leur acceptation de l’élève intégré est […] la principale condition de réussite, reconnue depuis longtemps » (Beaupré et al., 2004, p. 62). Les pairs peuvent jouer les rôles de modèles, de guides, de motivateurs ou de soutiens auprès de l’élève en situation de handicap (Beaupré et al., 2004). Des attitudes négatives des parents peuvent donc, par leur influence sur les propres attitudes de leur enfant, mettre à mal ce soutien naturel à l’intégration/inclusion.

Si les parents ne constituent bien entendu pas l’unique chance de réussite d’un projet de ce type, ils représentent néanmoins des partenaires qu’il ne faut pas négliger.

A ce stade de notre réflexion, la question qui se pose tout naturellement est la suivante : comment les parents se positionnent-ils en général vis-à-vis de l’intégration/inclusion scolaire ?

4.2.2 Les attitudes de parents d’enfants sans déficience vis-à-vis d’une

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