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Une résistance farouche de la frange conservatrice du régime

Deuxième partie : Marianne s’intéresse autant à la situation interne de l’Iran des ayatollahs qu’à son rôle international

B) Une résistance farouche de la frange conservatrice du régime

Peu de temps après la prise de pouvoir de Mohammad Khatami, Marianne souligne la difficulté pour les modérés de s'imposer face aux « durs du régime ». (01/10/97)

« l'Iran est en crise politique majeure permanente. En raison précisément de l'impossible coexistence entre le principe de tyrannie et le principe de démocratie. L'intérêt puissant des derniers événements est de montrer, sous une lumière crue, l'inanité d'un régime où toute réforme de la condition des citoyens se heurte au dogme de droit divin. Khatami a tenté de contourner ce dogme. Puis il a finalement renoncé. Aujourd'hui, en menaçant de démissionner, il sort de sa léthargie. Il reconnaît que le peuple ne peut rien espérer d'un système verrouillé. »

Houchang Golchiri Interviewé par Michel Vagner le 6 octobre 1997

« Il y a toujours la guerre entre les deux factions du régime: les conservateurs et la gauche islamique. L'islam a plusieurs branches. Dans le chiisme, qui est la religion d'Etat, il y a plusieurs visions. Pour l'instant, le pouvoir essaie d'en imposer une très restreinte. »

Christian Hoche 01/12/97 « En ordonnant la fermeture des bureaux et la saisie des biens de l'ayatollah Hussein Ali Montazeri, dans la ville sainte de Macchad, en menaçant de déférer ce haut dignitaire religieux devant le Tribunal spécial du clergé, les autorités judiciaires ont mis à jour les luttes intestines qui déchirent le pouvoir. » Safa Haeri 05/10/98 « Alors que la bataille pour le pouvoir fait rage au sein du régime islamique, le président iranien, Mohammad Khatami, a décidé de passer à l'offensive en refermant le dossier Salman Rushdie »

Safa Haeri 21/12/98 « En ces temps qui ont fait croire, à tort, que l'Iran allait connaître enfin son Thermidor, rapts et assassinats se multiplient contre les «modernistes», affaiblissant un peu plus encore le président Khatami. En moins d'un mois, cinq personnalités connues pour leur courage et leur indépendance ont été assassinées », « Tout indique que l'objectif est de terroriser les partisans de l'ouverture et que les ordres sont donnés au plus haut sommet de l'Etat. » « Un terrible bras de fer est désormais engagé entre réformateurs et conservateurs. » Safa Haeri 27/07/98

Un an après l'élection de Mohammad Khatami, il n'est plus question pour ce dernier de se faire respecter par les conservateurs, mais tout simplement, de conserver le pouvoir dont ils veulent le déposséder. A la question posée par Marianne, « qui détient réellement le pouvoir en Iran? », Ahmad Rezaï répond : « deux hommes: Ali Khamenei, le guide de la révolution, et Ali Akbar Hachemi-Rafsandjani, président du Conseil de discernement, la plus haute instance consultative. Ils contrôlent tous les pouvoirs: les forces armées, les services de sécurité, le clergé, le judiciaire, le

-91- législatif. Jusqu'à l'an dernier, ils avaient aussi la haute main sur l'exécutif. Mais la victoire de Mohamad Khatami à l'élection présidentielle a été ressentie comme un gigantesque camouflet. C'est pour cette raison qu'ils s'acharnent sur Khatami, le représentant de l'aile moderniste du régime et l'espoir de toute la jeunesse iranienne. Il constitue donc un danger. Pour le destituer, ils sont capables de l'accuser d'espionnage au profit des Etats-Unis. »

Par la suite Marianne se pose en quelque sorte en arbitre de cette confrontation pour le pouvoir : (Christian Hoche 10/05/99). « dans l'interminable bras de fer entre le clergé chiite radical et le courant réformateur, les libéraux viennent de marquer un point majuscule » En atteste encore ce titre du 19 juillet 1999 : « deux ans d'escarmouche ».

25/12/00 « C'est une guerre sourde, sans concession, que se livrent depuis quatre ans les dignitaires du clergé chiite. D'un côté, les conservateurs crispés sur les «valeurs» de la République islamique. De l'autre, les réformateurs, animés par le souci de sortir démocratiquement l'Iran de son «splendide isolement » »

Au final, Marianne prend peu à peu acte du fait que les conservateurs ont pris le pas sur Mohammad Khatami. C'est ce qu'exprime Martine Gozlan le 18 juin 2001 : « Pas d'actes - puisque Khatami est otage des mollahs décideurs - mais un idéal. »

Interviewé par Safa Haerie le 10 septembre 2001, Karim Lahidji répondait à la question « La présidence de Mohamad Khatami avait soulevé d'immenses espoirs, notamment auprès de la jeunesse et des femmes ?» de la manière suivante : « Cet espoir a été très vite déçu. Khatami est aux ordres du clergé conservateur et il n'a aucune marge de manoeuvre. Pas plus d'ailleurs que le Majlis (Parlement), bien qu'il soit dominé par le courant réformateur. Il faut noter qu'en vertu de la Constitution Ali Khamenei ne peut intervenir dans les débats parlementaires. Or, il s'est autoaccordé un droit d'ingérence qui lui permet de faire pression sur les députés: on l'a bien vu, l'an dernier, quand il leur a fermement demandé de ne pas toucher à la loi sur la presse. Dans ces conditions, il sera, pour l'instant, difficile à l'Iran de sortir de son «splendide isolement» »

Le 2 novembre 2002, Martine Gozlan enterrait définitivement les espoirs de renouveau démocratique fondés sur Mohammad Khatami et avec eux, s'évanouissaient également sinon la sympathie du moins les a priori positifs à l'égard des dirigeants modérés : « Bien que la république islamique soit dirigée par un président supposé réformateur, Mohamed Khatami, c'est toujours «le guide religieux suprême», Ali Khamenei qui détient le vrai pouvoir, celui de la terreur. »