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Les Iraniens : une population qui tente de faire face au régime

Deuxième partie : Marianne s’intéresse autant à la situation interne de l’Iran des ayatollahs qu’à son rôle international

C) Les Iraniens : une population qui tente de faire face au régime

Longtemps perçus comme étant des fanatiques faisant corps avec le régime les Iraniens sont avant tout présenté comme victimes d'une dictature religieuse par

Marianne : (01/01/97) « Jusqu'à ces dernières heures, on pensait que les Iraniens,

épuisés par trop de souffrance, ne voulaient plus entendre parler de révolution. Les tyrans de Téhéran sont peut-être en train de les faire changer d'avis. »

Safa Haeri 27/07/98 « La jeunesse iranienne ne supporte plus ce régime. Si Khatami tente une ouverture de dialogue avec l'Amérique, il exprime le désir de toute une génération. S'il veut mettre fin au terrorisme, il applique la volonté des 20 millions d'Iraniens qui ont voté pour lui le 23 mai 1997. Le clergé conservateur n'a plus d'assise populaire »

Des victimes qui résistent comme indique Houchang Golchiri interviewé par Michel

Vagner le 6 octobre 1997: « ils achètent des livres en cachette, regardent

clandestinement des cassettes vidéo. Mes livres, qui ne sont pas publiés au grand jour, sont vendus au marché noir. Aucune société ne peut vivre en autarcie aujourd'hui. Aucun pouvoir ne peut contrôler une société. Les Iraniens ont deux visages, comme Janus. Un à l'intérieur, l'autre à l'extérieur [...]. »

Suite aux élections législatives de février 2000, Martine Gozlan loue même la raison des Iraniens. L'image des masses fanatisées est bien loin : (28/02/00) « Oui, il y a

-93- bien quelque chose de sacré en Iran: c'est la raison ! C'est le triomphe enfin du jugement des hommes (et surtout des femmes) face à ceux qui, dissimulés derrière les prétoires d'Allah, ne mégotaient pas en coulisses sur les avantages sonnants et trébuchants de leur divin statut. »

2) Un Etat qui inspire néanmoins méfiance et peur

A) Un pays arriéré

a) Une justice moyenâgeuse

Si Mohammad Khatami présente représente l'espoir du renouveau iranien, et si le peuple iranien bénéficie de la compassion des journalistes de l'hebdomadaire, il n'en demeure pas moins que reste fermement attaché à l'Iran, l'image d'un pays violent. Violence incarnée par l'institution judiciaire3.

11/05/98 « Accusé d'espionnage et d'adultère, deux délits sévèrement réprimés en Iran mais de nature assez différente, le journaliste Mokteza Firouzi, ancien rédacteur en chef de l'Iran News, risque à la fois la pendaison et la lapidation, selon le nouveau code pénal de novembre 1995, qui prévoit aussi la flagellation pour les infractions plus anodines. » « C'est ce qu'en Iran on appelle la justice... »

26/03/01 « Les idéalistes au pouvoir en Iran ne se contentent pas d'amputer les voleurs et de lapider les femmes adultères. Ils traitent aussi sans ménagement les vendeurs de paradis artificiels. Cinq trafiquants de drogue, dont une femme, ont ainsi été pendus en public à Téhéran »

Prime également l'idée d'un décalage plus profond, un clivage quasi civilisationnel :

(09/02/98) « Quel crime abominable a donc commis cet importateur de pièces

d'automobiles et de textile ? Chez nous, cela s'appelle l'amour. »

« Mais les juges, arguant du fait que, justement, Helmut n'était pas musulman, rendirent un verdict non seulement moyenâgeux, mais surtout ouvertement raciste. A part ça, les ayatollahs se veulent les guides spirituels de l'islam ! »

Martine Gozlan 22/05/00 « cette affaire renvoie aux procès staliniens et aux juifs pris comme boucs émissaires. Que cherchent exactement les mollahs du tribunal révolutionnaire ? »

Eric Dior 14/05/01 « l'Iran, l'Azerbaïdjan et l'Arabie Saoudite, trois contrées réputées, à juste titre, pour leur mépris granitique de l'individu »

L'Iran : un pays où « flambe la barbarie la plus sombre » Martine Gozlan 18/06/01 La rédaction souligne également le rapport ambigu qu'entretient la population iranienne avec les châtiments publics : (06/07/98) « les habitants de Behbahan, dans la province iranienne de Fars, ont été privés, récemment, d'une de leurs rares distractions: un homme, condamné à être pendu pour adultère et viol, est mort d'une crise cardiaque avant l'exécution de la sentence. La potence est tout de même restée dressée, afin qu'un délinquant en meilleure santé puisse, au pied levé, remplacer le criminel défaillant ! »

La barbarie ne semble pas être le seul fait de l'institution judiciaire : (18/12/00) « Il apprend sa séropositivité à son retour chez lui, et l'annonce aussitôt à sa famille. Mais, en guise de réconfort, tous ses proches, à l'exception du seul père, quittent sur- le-champ le domicile familial, par crainte d'être à leur tour contaminés ! C'est alors que le père décide, comme un seul homme, de mettre un terme radical à une telle situation qui, on l'aura compris, est loin d'être entrée dans les moeurs de la république islamiste: il s'empare d'une hache et tue son fils... »

-95- A propos de la flagellation en place publique : (10/09/01) « On n'ose dire qu'il n'y a pas là de quoi fouetter un chat, puisque, selon une rumeur persistante, l'ayatollah Khamenei s'est jadis rendu célèbre pour des actes de cruauté envers d'honorables membres de l'espèce féline »

b) Une vision acerbe des religieux

Marianne relaie une vision très critique du clergé chiite et des règles de vie qu'il a imposé suite à la révolution islamique. Pour preuve, cette interview d'Houchang Golchiri par Michel Vagner le 6 octobre 1997 : « Ce que les talibans ont fait en Afghanistan, on l'a fait petit à petit en Iran, en dix-huit ans. Cela va de la manière de s'habiller aux relations entre les hommes et les femmes. Les livres étrangers traduits subissent une censure féroce. On arrache les antennes paraboliques des toits. Si, dans un roman, un croyant et un laïc parlent, la partie laïque est supprimée. Dans la version filmée d'Othello que l'on trouve à Téhéran, le rôle de Desdémone a été supprimé. On n'y comprend rien. A Noël, dans un documentaire sur Jésus, on I a coupé la crucifixion parce que les musulmans pensent qu'elle n'a pas eu lieu. C'est cela, l'islamisation. »

Christian Hoche 20/04/98

« La vie n'est pas drôle, si l'on doit être islamiquement correct. La liste des interdits est interminable. Interdit pour les filles de porter un jean, de mettre des foulards découvrant la nuque, des bas transparents, un vernis à ongles voyant, du rouge à

lèvres, des bijoux, de sortir sans manteau long. Interdit de danser, de chanter, de

faire de la musique. Même chez soi. Gare aux hezbollahi, sorte de police des moeurs, qu'on appelle parfois les «hooligans de l'islam» et qui n'hésitent pas à utiliser le bâton. Toute insensée qui se risquerait dehors peu ou mal voilée est passible de 74 coups de fouet, voire de deux mois d'emprisonnement. Interdit de toucher un homme, fût-ce pour lui serrer la main. Interdit encore de flirter, de s'aimer, de regarder des vidéos ou des chaînes étrangères. »

26/03/01 « La justice iranienne condamne à la peine capitale toute personne qui se trouve en possession de plus de 30 g d'héroïne, la religion musulmane étant le seul opium du peuple toléré par les imams... »

Névrosé, inquisiteur, le clergé est affublé de qualificatifs divers mais tous aussi percutants : (18/06/01) « Les femmes ne supportent plus la névrose des fous de Dieu ». Martine Gozlan qualifier les mollahs : « les turbans de l'Inquisition ».

Des dignitaires religieux qui sont aussi navrant à l'image de l'ayatollah Ali Khamenei, «guide» de la révolution islamique en Iran pour qui, il (30/04/01) « existe des preuves que les sionistes entretenaient des relations intimes avec les nazis et que les statistiques sur le massacre des juifs sont exagérées»

En réalité, bien loin est la confiance et l'espoir placé par le peuple iranien dans ces religieux. Religieux qui incarnaient la résistance face au Shah et seuls capables d'instaurer un nouvel ordre en Iran. Pour Martine Gozlan (18/06/01) : « être mollah

ne suscite plus, au pays qu'ils séduisirent, qu'un dégoût intégral. Un turban hèle-t-il

un taxi dans une avenue de Téhéran ? Le chauffeur accélère. Enfer et damnation pour les clercs ! Ceux qui se firent une gloire d'incarner, par tradition chiite, l'opposition intellectuelle aux petitesses des princes, symbolisent désormais la bestialité matérialiste: le fric et la force. La captation de la manne pétrolière. La répression qui sévit contre l'esprit et la grâce. Le chiisme, religion messianique hantée par l'édification d'une sagesse capable de hâter les résurrections de la vérité, dégringole de ses limbes. Cadre d'une contre-société avant le renversement du Shah, le clergé, en calquant ses méthodes sur celles de la défunte monarchie, s'est moralement suicidé. D'où la défection d'une nuée de religieux dissidents. »

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B) Un Etat dont on retient surtout le soutien au terrorisme et les ambitions