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Mohammad Khatami, l'espoir déçu d'une ouverture de l'Iran

Deuxième partie : Marianne s’intéresse autant à la situation interne de l’Iran des ayatollahs qu’à son rôle international

A) Mohammad Khatami, l'espoir déçu d'une ouverture de l'Iran

Elu à une large majorité le 23 mai 1997, Mohammad Khatami est considéré, notamment par la plupart des pays Occidentaux, comme le premier président réformiste d'Iran. Au cours de sa campagne présidentielle il promeut l'État de droit, la démocratisation et la participation de tous les Iraniens dans le processus de décision politique. Cette posture lui vaut une sincère sympathie de la part des dirigeants occidentaux mais également des médias. Marianne lui affiche un soutien enthousiaste. (02/06/1997) « Or c'est en Iran que, à l'issue d'une élection présidentielle au pluralisme relatif, le candidat qui incarnait une volonté de «changement» l'a triomphalement emporté. »

L'hebdomadaire se fait l'écho des espoirs de la population iranienne : (Christian Hoche 01/12/97).« Il est devenu en quelque sorte le symbole de la société civile face à un pouvoir conservateur et rétrograde ». « Un outsider modéré et moderniste », « Mohammed Khatami, un religieux dont Montazeri est proche. Du nouveau président, les Iraniens attendent tout. »

(Fariba Adelkhah par Elisabeth Lévy 20/04/98) « Il y a une certaine autonomisation de la société, dont des pans entiers se mobilisent. Pour ne citer que cet exemple, l'affirmation des femmes sur la scène sportive est frappante: les clubs de gymnastique fleurissent et les femmes se sont imposées dans les stades lors de la qualification de l'équipe iranienne de football. »

Marianne loue le programme politique du candidat (Christian Hoche, 01/09/97)

« durant sa campagne, il s'est prononcé contre l'islamisation des universités ou l'interdiction des antennes paraboliques et pour une plus grande participation des

femmes aux affaires. Ce faisant, Khatami, qui appartient tout de même au sérail a pris discrètement mais courageusement ses distances avec l'establishment. » mais également sa modestie : « Mohammad Khatami, le nouveau président de la République islamique d'Iran, a interdit à tous les organismes d'Etat l'utilisation de «titres pompeux» et les «salamalecs» à son égard et envers les membres du gouvernement. Il a précisé qu'un simple adjectif «respectable» suffisait pour désigner le chef de l'Etat ou ses collaborateurs. »

L'arrivée au pouvoir de Khatami est pour Marianne l'occasion de questionner l'opportunité d'une réouverture du dialogue avec l'Iran : (Christian Hoche, 22/10/97) « faut-il renouer avec Téhéran, et à quelles conditions ? L'élection, en mai, à la présidence de l'Iran de Mohammad Khatami, un religieux à l'image réformiste, ainsi que la formation de son gouvernement autorisent, sans doute, une nouvelle approche. »

M.K. 30/03/98 « Aujourd'hui, alors que Khatami s'est prononcé pour «un dialogue entre les civilisations et une détente dans [les] relations [de l'Iran] avec l'étranger», certains croient deviner qu'il existe enfin une possibilité de dialogue «constructif» et non plus «critique». Dans cette perspective, les Européens bénéficient d'un infléchissement de l'attitude américaine envers la «mollachie ».

« Après dix-neuf ans de diabolisation mutuelle, l'Arabie Saoudite et l'Iran ont cessé leurs invectives. L'arrivée de Mohamed Khatami à la présidence iranienne y a largement contribué »

Rached Ghannouchi par Safa Haeri 31/08/98

« En moins d'un an, le président Mohamad Khatami a fait en sorte que la République islamique réintègre le monde. L'Iran est actuellement le seul pays musulman qui s'achemine vers une véritable démocratie, sans pour autant renier ses traditions, son histoire, sa culture et l'héritage de son islam chiite. »

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Martine Gozlan 18/06/01. « Rien n'a changé mais les images ont glissé. A celles des foules fanatiques vomissant leur haine de l'Occident ont succédé celles des rassemblements de jeunes réclamant le droit et la liberté. Ce renversement médiatique qui redonne sa place à l'Iran dans le concert des nations, c'est Khatami. » Deux ans après l'élection de Mohammad Khatami, Christian Hoche fait le point sur l'évolution en Iran : (08/03/99) « Iran : le voile se lève un peu », (10/05/99). « Iran : un petit courant d'air frais ».

Philippe Boggio 23/02/98

« pour le neuvième anniversaire de la fatwa prononcée par l'ayatollah Khomeyni, les milieux les plus extrémistes ont été relayés cette année par le ministère des Affaires étrangères qu'on pensait pourtant favorable à une politique d'ouverture »

Si durant les deux premières années de mandat du président Khatami, Marianne relate avec optimisme le renouveau progressif de la démocratie en Iran, les doutes ne tardent pas à arriver : (19/07/99 Christian Hoche) « L'espoir qu'avait fait naître, le 23 mai 1997, l'élection à la présidence de Mohammad Khatami a été vite déçu, bien que son bilan soit globalement positif. Nombre d'Iraniens lui reprochent son excessive prudence et ses compromis avec le clergé chiite. C'est oublier que Khatami n'est pas vraiment un apôtre intrépide du renouveau démocratique et qu'il reste islamiquement correct. Pour le président, l'islam, en effet, doit continuer à fonder l'identité culturelle de l'Iran, et il est hors de question de séparer l'Eglise de l'Etat ».

« Lorsque Mohammad Khatami a été porté à la présidence de la République islamique, un grand espoir est né en Iran, notamment auprès des jeunes et des femmes. Mais, assez vite, son électorat a déchanté: les réformes tardent à venir et le courant démocratique se heurte à l'intransigeance du clan conservateur. »

La posture se fait moins enthousiaste mais toujours positive : (19/07/99) « si le président Khatami a déçu nombre d'espoirs que les laïcs et les libéraux avaient mis en lui, il est un domaine dans lequel sa réussite était incontestable: la liberté de la

presse. Les médias se sont considérablement développés depuis deux ans, quoique non sans mal, les conservateurs multipliant les coups bas pour les bâillonner. »

Yasmina Salhi 28/02/00

« Si l'Iran de Khomeyni a été un phare pour les tenants d'un islam conquérant et archaïque, celui de Khatami peut en devenir un pour tous ceux qui, au Maroc, en Algérie, en Egypte et ailleurs se battent pour la démocratie. Il laisse espérer qu'islam et modernité ne sont pas incompatibles. Assez de démoniser une religion réduite à ses ultras ! Assez de cette suspicion qui pèse sur les millions de musulmans du monde, qui ne sont pas tous des terroristes ! Mais cette victoire pleine de promesses ne doit pas faire oublier deux choses. Un: pour «modérés» qu'ils soient, les partisans du président Khatami sont issus de la révolution khomeyniste, et n'ont jamais évoqué la possibilité de rétablir la laïcité. Deux: si le triomphe des réformateurs va donner un peu plus de latitude au président, les conservateurs gardent un fort pouvoir de nuisance. »

Au fur et à mesure l'ouverture tant attendue de la République islamique semble même prendre des airs Perestroïka2. (01/05/00) « Khatami, nous l'aimons tous, mais il

risque de devenir le Gorbatchev de l'Iran »

Si Martine Gozlan se félicite de la réélection de Mohammad Khatami, elle apparaît sceptique quant à la capacité du président de changer la donne en Iran : (18/06/01) « Mohamed Khatami, le président réformateur - le chantre de la Renaissance - triomphalement réélu avec 77% des suffrages - Légitimé par une écrasante majorité du pays, comment va-t-il gérer son impuissance face à la minorité de mollahs discrédités- les turbans de l'Inquisition - qui détiennent tous les rouages du pouvoir ? »

Les références à l'URSS vont ainsi se multiplier. Martine Gozlan présente ainsi le président Khatami comme le « Gorbatchev persan »

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Kaveh Mohseni par Martine Gozlan le 22/07/02

« Des commerçants du bazar exhortent à manifester et tout le monde s'interroge sur les moyens de restaurer un peu de démocratie. Mais les prisons sont pleines, les bourreaux torturent, les arrestations pleuvent. Sans la moindre réaction du président Khatami. A des étudiants qui voulaient l'alerter récemment sur les geôles du régime, il a rétorqué qu'il n'y avait pas de prisonniers politiques dans la république islamique... Khatami, c'est une perestroïka de salon ! »

Cinq ans après son arrivée au pouvoir Mohammad Khatami bénéficie toujours de la sympathie occidentale mais son aptitude à réformer l'Iran est désormais oubliée. Pour Martine Gozlan, c'est du côté des conservateurs qu'il faut chercher la clé du pouvoir réel : (28/10/02) « que le président Khatami ait les mains liées par un pouvoir exécutif dominé par des mollahs archaïques ne change rien aux circonstances: c'est bel et bien une énorme révolte des individus qui l'a porté par deux fois à la présidence. »