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VII, Le concours

III. La réglementation en matière bancaire

Contrairement aux autres domaines financiers et commerciaux, le secteur 4 bancaire connaissait, bien avant l'entrée en vigueur des normes pénales répri-mant le blanchissage d'argent et le défaut de vigilance en matière d'opérations financières, une réglementation qui proscrivait l'acceptation de fonds d'origine criminelle et exigeait la vérification diligente de l'identité de l'ayant droit économique des avoirs confiés aux banques.

Les banques suisses sont soumises, en vertu de l'art. 1 er LB, à l'autorisation et à la surveillance de la Commission fédérale des banques. Cette dernière est en particulier chargée de vérifier que l'administration et la gestion des établisse-ment.<; bancaires présentent toutes les garanties d'une activité irréprochable (art. 3 al. 2 lit. c LB). Dès le milieu des années septante, la Commission fédérale des banques s'est efforcée d'élargir la portée de cette disposition «de manière à consolider les bases de la confiance dont le secteur bancaire en tant" que tel doit se montrer digne» (message, FF 1989 II p. 967; cf. également CHAPUIS, RPS 1995 p. 257 s.;

ZULAUF, recht 1989, pp. 80 s., 86 sS.; ATF 111 1 b 127; 108 lb 193; 106 1 b 148).

L'acceptation de fonds d'origine criminelle, qu'elle soit intentionnelle ou résulte d'une négligence grave, n'est pas compatible avec la garantie d'une activité irréprochable (CFB, Rapport de gestion 1988, p. 23/154; Rapport de gestion 1992, p.230; ZULAUF, recht 1989, p.87; selon la Circ.-CFB 91/3 Blanchiment de capitaux, ch. 6, la négligence simple est également incompati-ble avec la garantie d'une activité irréprochaincompati-ble; ZULAUF, RDS 1994 p. 406).

Dans cette perspective, la banque a <d'obligatiofl d'exiger des précisions et d'éclaircir l'arrière-plan économique d'une opération, non seulement lorsque celle-ci comporte un risqlu, mais également en cas d'opération fiduciaire, (lorsque des indices donnent à penser qu'elle pourrait être un élément d'une transaction immorale ou illicite, ou lorsqu'il s'agit d'une affaire compliquée, inusuelle ou importante'»(message, FF 1989 Il p. 967, citant le Bull. CFB 11 [1982] p. 15; dans le même sens, Bull. CFB 23 [1993] p. 25).

Suite à l'entrée en vigueur des dispositions pénales réprimant le blanchissage 6

d'argent et le défaut de vigilance en matière d'opérations financières, la Commission fédérale des banques a publié des Directives relatives à la prévention et à la lutte contrele blanchimmt de capitaux du 18 décembre 1991 (Circ.-CFB 91/3) qui visent à fixer sa pratique relative à la garantie d'une activité irréprochable et à l'organisation interne adéquate exigée des banques, ainsi qu'à fournir des éléments d'interprétation pour les art. 305 bis et 305 ter.

A côté des devoirs découlant de l'exigence légale d'une activité irréprochable 7

et de sa concrétisation par la Commission fédérale des banques, les milieux bancaires suisses, avant tout soucieux de préserver la réputation de leur place

financière, ont eux-mêmes pris des mesures pour assurer le respect de certaines règles de diligence, en particulier en ce qui concerne l'identification de

"origine des fonds déposés auprès des banques. La diligence requise du banquier est définie dans la CotlVcntion relative à l'obligation de diligence des banques (CDB), conclue en 1977 et remaniée en 1982,1987 et 1992. Il s'agit d'une convention privée (ATF 109 1 b 154), liant l'Association suisse des banquiers et les banques suisses, mais qui est dotée d'un caractère «officieux~ indéniable (GRAHER,RSDA 1995 p. 162). La CDB arrête - entre autres obligations de diligence - les vérifications que les établissements bancaires doivent effectuer lorsqu'ils entrent en relations d'affaires avec un client, afin d'établir l'identité de leur cocontrac-tant et, le cas échéant, de l'ayant droit économique des fonds confiés. La diligence qu'eUe impose aux banques est un slmldard mitlÎmum reconnu par la Commission fédérale des banques et par le Tribunal fédéral, mais qui ne lie pas les instances étatiques de manière contraignante, notamment quand il s'agit

d'interpréter l'arc. 3 al. 2 lit.c LB concernant 1a garantie d'une activité

irré-prochable (ATF 111 [b 128; 109 [b 153; ZUlAUF, RDS 1994 p. 406). De la même manière, ce standard minimum ne saurait lier de manière absolue les tribunaux pénaux dans l'application des art. 305bîs et 305 ter. même s'il fournit une aide précieuse au juge dans l'interprétation de ces dispositions, en particu-lier en ce qui concerne la vigilance requise dans l'identification de l'ayant droit économique (GRABER, RSDA 1995 pp. 161 [in toto]).

Art.305bi•

Plan note L Le bien juridique protégé. . . .. . . ... . . 1 Il. Les ~Iémen(s cons[Î[utifS objectifS. . . . . . . . . 6 A. L'objet de l'infraccion ... ___ ... _ . _ . . . 6 1. Les valeurs patrimoniales _ . ____ . __ . .. . . . 7

2. La provenance criminelle. . . . 8

2.1 L'identification du crime dont provient la valeur patrimoniale

blanchie .. ___ . . . . . . . . . 9 2.2 La notion de crime. . . . 11 2.3 Le crime préalable commis à l'étranger (art. 30Sbis ch. 3) . . . 15 2.4 La provenance directe ou indirecte du crime préalable ... _ _ 18 B. Le comportement incriminé . . . . . . . . . . ........ _ . 26

1. L'acte propre à entraver l'identification de l'origine, la découverte ou la confiscation de valeurs patrimoniales . . . __ . 26 2. Les actes de blanchissage . . . ... _ . 31 3. L'entrave par abstention . . . ... _ . _ . . • . . . 43 C.L'aucofavorisatioll . . . ................... 46 III. Les élémen<s subjectifs. . . . . . 50 IV. La peine .. . . . . . . 53 V. Le blanchissage aggravé (an. 30Sbis. ch. 2) . . . 54 1. L'auteur agit cOllune membre d'une organisation criminelle (fit. a) 56 2. L'auteur agit comme membre d'une bande de blanchisseurs (lit. b) . . 58 3. L'auteur réalise un chiffie d'affaires ou un gain importants en faisane

métier de blanchir de l'argent (lit. c). . . . . . . 60 VI. Le concours ... . . . ... , ... , 62

1. Le bien juridique protégé

Le blanchissage de l'argent sale est le processus par lequel l'existence, la source illicite, ou }' emploi illicite de valeurs patrimoniales est dissimulé, dans le but de faire apparaître ces dernières comme acquises de manière légitime (définition de la PresÎdent's Commission on Organized Crime américaine de 1984, reprise par la doctrine dominante, A CKERMhNN, p. 5; BERNASCONI, Rap-port explicatif, p. 35.; GRABER, Geldwa5cherei, p. 55; PIETH, Zur Einftihrung, p. 8). L'activité du blanchisseur vise à intégrer l'argent provenant du crime dans l'économie légale.

2 La répression du blanchissage de l'argent sale a été conçue comme un instru-ment de lutte COntre les organisations criminelles qui s'enrichissent au moyen de leur activité illicite, notamment par le commerce de la drogue, le trafic d'armes, la prise d'otages, l'extorsion (racket). Pour ces organisations, la

réin-Art.305bis

troduction de l'argent sale dans le circuit de l'économie légale comporte un certain nombre de risques; ene représente le "talon d'AchiUe» des organisations criminelles (BERNASCONI, Finanzunterwelt, p. 27; message, FF 1989 II p.963;

ATF 119 IV 247). En introduisant des mesures propres à lutter contre le blanchissage de l'argent sale, le législateur visait donc en premier lieu à combattre le crime organisé (PIETH, RPS 1995 p. 226).

Si l'objectif premier poursuivi par l'incrimination du blanchissage est d'atteindre 3

les orgallisafiofls crimifJelles, le texte légal de l'art. 305 bis ne reflète nullement ce but de la norme (FORSTER, Die Korrektur des strafrechtlichen Rechtsgüter-und Sanktionenkatalogcs im gesellschaftlichen Wandel,RDS 114 (1995) p. 145;

SCHMID, Insiderdelikte und Geldwascherci, p. 199; STRATENWERTH, G eldwa-scherei, p. 102; id., BT Il, § 54, n. 22, p. 310). L'art. 305bi, réprime une entrave à la confiscation, soit la soustraction d'une valeur patrimoniale à la mainmise des autorités pénales (Sachbegü115tigHug ou, plus précisément, WertbegÜtlsligtltlg).

Le bien juridique protégé est donc ici, comme pour les autres infractions du titre dix-septième,I'adminÎstration de la jll5tice, en l'occurrence, de la justice pénale (pour une conception plus large, visant les intéTêts des "investigations en tant que telles», cf. mess'ge, FF 1989 Il 981). C'est par conséquent très justement que le Tribunal fédéral a renoncé à l'exigence d'un quelconque lien de 'l'infraction de blanchissage avec le crime organisé (ATF 119 IV 62).

Conformément à son chiffre 3, l'art. 30Sbis réprime également le blanchissage 4

portant sur des valeurs patrimoniales obtenues par une infraction préalable commise à l'étranger, protégeant par là l'administration de la justice pénale étrangère (cf. n.15. i,ifra; dans le même sens, ACKERMANN, p.218; contra:

GRASER, RSDA 1995 p. 163, note 14, estime que le bien juridique protégé par cette· disposition est la place financière suisse).

Lorsque la valeur patrimoniale qui est soustraite à la confiscation a été obtenue grâce à un crime contre des intérêts individuels, l'acte dt! dissimulation peut également porter atteinte aux intérêts patrimoniaux de la victime de l'infrac-tion préalable. Cetce dernière peut par conséquent se constituer partie civile dans la procédure dirigée contre le blanchisseur (ordonnance non publiée de la Chambre d'accusation du canton de Genève nO 173, du 30 juin 1994).

II. Les éléments constitutifs objectifs