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VII, Le concours

A. La circonstance aggravante

II. Le champ d'application de l'art. 309

3 Sous la note marginale «(qffaires administratives}), l'art. 309 vise d'une part les procédures administratives conduites par les «tribllnaux administratifs» et les

«autorités et !Dfu.riomlaires de l'administration ayant qualité pOlir recevoir des témoi-gllages,> et d'autre part les procédures devant les «(arbitres'>.

A. Les affaires administratives

En premier lieu, J'arr. 309 déclare que les infractions aux art. 306 et 307 peuvent être commises devant les tribunaux administratifs, soit les tribunaux mis en place par les cantons pour trancher les contentieux administratifs, de même que la chambre administrative du Tribunal fédéral et le Tribunal féd~ral

des assurances. Cette référence est inutile s'agissant de l'infraction à l'art. 307.

puisque les procédures devant les tribunaux administratifs sont des procédures

«(cnjustice" ((gerichtliche Veifahren,» au sens de cette disposition (PFAFFLI, p. 12).

Quant à la référence à la fausse déclaration d'une partie en justice (art. 306), elle est sans pertinence, puisque cette infraction ne pourrait être réalisée que dans l'hypothèse d'une déposition de partie - en l'espèce donc de l'administré - qui aurait valcur de preuve en sa faveur, Or, la procédure applicable devant les tribunaux administratifs ne connaît pas de mesure probatoire analogue à l'audition de partie constituant un moyen de preuve au sens de l'art. 306.

5 En second lieu, l'art. 309 étend l"application des art. 306 et 307 aux procédures devant les autorités et.fonctionnaires de l'administration qui ont ((qualité pOlir recevoir des témoignages'>.

6 La formulation légale vise l"hypothèse du faux témoignage au sens de l'art. 307.

infraction qui ne peut être commise devant les autorités et fonctionnaires de l'administration que dans la mesure où ceux-ci sont habi1ités non seulement à recueillir des renseignements auprès de particuliers, mais à entendre ces derniers comme témoins. Cette compétence doit découler d'une disposition légale expresse (HAFTER, p. 807; HAUSER, RPS 1975 p. 351; LOGoz, n. 2 ad art. 307, p. 726s.;

Art. 309

PFAFFLI,p. 14; SCHULTZ, RPS 1958 p. 245; TRECHSEL, n. 1 ad art. 309). C'est ainsi qu'il ne saurait être question de réprimer par le biais de l'art. 309 les fausses déclarations faites devant les fonctionnaires de la police, qui échappent en général à l'art. 307 au motif précisément que la plupart des législations canto-nales dénient aux autorités policières la compétence d'entendre des témoins au sens de cette disposition (LoGoz, n. 2 ad art. 307, p. 727; PFAFFLI, p. 15; il ya, cependant, des exceptions à ce principe, cf. n. 2 ad art. 307).

La formulation légale de l'art. 309 qui exige que les autorités et fonctionnaires ï aient qualité pour recevoir des témoignages n'est manifestement pas adaptée aux hypothèses de la fausse expertise et de la fausse traduction. 11 faudrait exiger, pour qu'il puisse y avoir infraction à l'art. 307 (en conjonction avec l'art. 309) à ce titre, que les autorités et fonctionnaires aient, de par la loi, la faculté d'ordonner une expertise ou d'avoir recours à un traducteur ou à un interprète (pa~ exemple, art. 19 LPA, renvoi aux art. 57 à 61 PCF concernant l'expertise).

La formulation légale de l'art. 309 n'est pas adaptée, non plus, à l'hypothèse H visée par l'art. 306, infraction qui ne peut être réalisée que devant une autorÎté·

ayant qualité pour recevoir les déclarations des parties corlslÎluatlt lm mOl/cu de preuve

"'Javel/rdl/ déclarant (HAFT"R, p. 798; HAUSEI1./REHBERG, p. 320; LOGoz, p. 737;

STRATENWE'UH, ET II, § 53, n. 6, p. 290;WINTER, p. 19, note 1). Ce n'est donc que devant des autorités administratives qui posséderaient cette qualité en vertu d'une base légale expresse (W'NTER,p. 25) que l'infraction réprimée à l'art. 306, en conjonction avec l'art. 309, pourrait être commise. La réalisatÎon de cette hypothèse n'est pas compatible avec la nature de la procédure administrative.

Elle a d'ailleurs été expressément écartée à l'occasion de l'élaboration de la procédure administrative fédérale, le message du Conseil fédéral y relatif précisant à cet égard qu'il (m'y a pas lieu de prévoir, en matière de procédl(re admiuistrative, l'interrogatoire des parties SOllS sermetlt Olt 11011 seloll l'art. 306 du code pénal» (Message du Conseil fédéral à l'appui d'un projet de loi sur la procédure administrative [Procédure administrative fédérale], du 24 septembre 1965; FF 1965 JI 1383, p. 1402; également, KOLZ/HANER, n.116, p. 80).

En matière de procédure admirûstrative fédérale, le droit de recueillir des té moi- ') gnages n'existe pas de façon générale, mais est conféré à titre subsidiaire et de manière sélective à certains organes supérieurs de l'administration (K6LZ/

HANEK, n. 121, p.82; SALADIN, PETER, Dos Verwaltungsverfahrensrecht des Bundes, Bâle et Stuttgart, Helbing & Lichtenhahn, 1979, p. 124). Conformé-ment au message précité du Conseil fédéral (FF 1965 1\ 1383, p. 1402), cette limitation de la faculté d'entendre des témoins à certains fonctionnaires et autorités se justifie par (d'intérêt du respect des pritlcipes de {'Etat régi par le droit et eu égard aux peines sévères prévues pour lefaux témoigl/age par les art. 307 à 309 du

code pénal». L'art. 14 LPA confère b faculté d'entendre des témoins au Conseil fédéral et à ses départements (lit. a), à la Division de la justice du Département fédéral de justice et police (lit. b) et aux commissions fédérales de recours et d'arbitrages (lit. c). Les autorités mentionnées sous lit. a et b peuvent charger de l'audition de témoins un fonctionnaire qualifié pour cette tâche (art. 14 al. 2 LPA); le Conseil fédéral et ses départements sont en Qutre habilités à conférer à des personnes étrangères à une autorité chargées d'une enquête officielle le droit d'entendre des témoins (art. 14 al. 3 LPA).

10 En matière de droit pénal administratif, Je droit d'entençire des témoins découle de l'art. 41 DPA. La procédure est soumise aux art. 74 à 85 PPF, et le témoin doit donc être informé de son devoir de dire la vérité, ainsi que des dispositions pénales en matière de faux témoignage (art. 82 PPF). Quant à l'inculpé, il est entendu dans un interrogacoire au sens de l'art. 39 et ne se rend pas punissable s'il. refuse de répondre aux questions qui lui sont posées, de même que si ses déclarations ne correspondent pas à la vérité. Enfin,le DPA connaît également l'audition de personnes à titre de renseignement (art. 40 DPA), qui ne saurait donner lieu à l'application de l'art. 307.

11 La procédure d!entraide internationale en matière pénale est une procédure admi-nistrative (ATF 120 1 b 119). L'audition de témoins en Suisse à la requête d'un Etat étranger agissant par la voie de l'entraide bénéficie de la protection des art. 307 et 309.

12 Enfin,la procédure administrative cantonale peut égaJement conférer à des autorités et fonctionnaires la compétence d'entendre des témoins. Il en va ainsi de la loi su.r la procédure administrative genevoise (du 12 septembre 1985) qui confère ]a compétence d'entendre des témoins à certaines autorités., dans la mesure où les faits ne peuvent être éclaircis autrement (art. 28 LPA - GE). L'art. 34 exige en outre, dans l'hypothèse seulement où le témoin a des relations avec une partie, qu'il soit exhorté à dire la vérité et averti des sanctions pénales prévues à l'art. 307.

B. Les procédures arbitrales

13 A côté des procédures administratives proprement dites, l'arc. 309 men-tionne les procédures devant les arbitres. Ce faÎsam,le texte de cette disposition va nettement au-delà de la portée de sa note marginale, «affaires administratives», car il vise non seulement l'arbjtrage en vertu du droit public, mais avant tout les procédures en matière d'arbitrage privé (LOGoz, p. 737;WlNTElt, p. 20). Cette référence a été ajoutée au texte légal lors des débats parlementaires, sans que

""1

Art. 309 cette adjonction n'ait toutefois été accompagnée d'une adaptation de la note marginale (BOCN 1929 pp. 606,610; BOCE 1931 p.670; THoRMANN/voN OVERBECK, n. 1 ad art. 309, p. 444).

Contrairement à l'opinion de SCHULTZ (RPS 1958 p. 244; contra: PFÂFFLI, p. 13), "

la procédure devant les arbitres n'est pas une procédure «en justice» au sens de J'art. 307. L'élargissement de l'art. 309 était donc bel et bien nécessaire si l'on visait à accorder à l'administration des preuves en matière d'arbitrage la même protection que devant les tribunaux civils. Une tout autre question est celle de l'opportunité de cet élargissement, niée par une partie de la doctrine (Snl..A-TENWERTH, BT II, § 53, n. 6, p. 290; PFAFFLl, p. 13, note 3).

L'arbitre dit le droit au même titre que le juge étatique; en autorisant l'arbitrage, 15

l'ordre juridique suisse a concédé aux arbitres une parceUe du pouvoir de rendre la justice (HABSCHEID, p. 515). Or, le but visé par les art. 306 et 307, soit que l'administration des preuves puisse aboutir à des constatations conformes à la vérité matérielle, mérite d'être poursuivi en matière arbitrale tout COlnme devant les juridictions étatiques. S'il convient néanmoins de se montrer très réservé quant à l'application de la sanction pénale en matière d'arbitrage, cela ne tient donc pas à la définition du bien juridique protégé par les art. 306 et 307, mais au fait que ces mesures probatoires ne bénéficient pas d'un cadre légal suffisamment précis, leur aménagement étant largement laissé au bon vouloir des parties et de l'arbitre.

L'art.309 revêt, par certains aspects, un caractère de norme de blanc-seing 16

(,Blankettnorm.), puisqu'il déclare les art. 306 et 307 applicables à des procé-dures régies par un grand nombre de dispositions légales fédérales et cantonales.

Dans ces conditions, le principe de la légalité (art. 1 cr CP) exige au moins que les normes légales gouvernant l'administration des preuves disposent sans équivoque que les arbitres ont le droit de procéder à l'audition des parties et témoins et qu'elles soient suffisamment détaillées pour assurer que les personnes soient entendues selon des modalités qui ne laissent subsister aucun doute quant à la portée de cette audition. En effet, bien que le texte légal ne l'exprime pas clairement, puisqu'il ne formule l'exigence de la compétence pour entendre des témoins qu'en ce qui concerne les aucorités et fonctionnaires de l'adminis-tration, il ne saurait y avoir faux témoignage ou fausse déclaration d'une partie en l'absence d'une base légale claire conférant aux arbitres la compétence de procéder à des auditions de témoins et des dépositions de parties cor/stituant un moyen de preuve.

Les procédures arbitrales ne sont donc protégées par les art. 306 et 307, en conjonction avec l'art. 309, qu'à la condition que cette exigence soit respectée (HAusEK/REHDERG, p. 320; COtitra: ROTH, p. 24, note 109, estime que l'art. 309 ne requiert pas des arbitres qu'ils aient la compétence légale d'entendre des

parties ou témoins). Une telle réglementation légale claire des mesures proba-toires fait défaut en matière d'arbürage, puisque le choix de la procédure, y compris le choix de procéder ou non à l'audition de témoins, est laissé dans une large mesure à la discrétion des parties (ROTH, Ioe. cit,).

17 En matière cl' arbitrage Înteruatiollol, l'art. 182 LDIF dispose que «les parties peuvent, directement, Olt par réjérmce à IHl règlement d'arbitrage, régler la procédure arbitrale,' elles peuvent aussi soumettre celle-d à la loi de procédure de lellr choix». La compétence même de procéder à des auditions de témoins découle de l'art. 184 LDIP qui consacre le principe de l'immédiateté en copférant au tribunal arbitral la faculté de procéder lui-même aux mesures probatoires (al. 1 cr). Or, l'audition de témoins est une mesure probatoire classique. On peut néanmoins se demander s'il s'agit là d'une base légale suffisamment précise pour fonder une condamnation pour faux témoignage, et à plus forte raison pour fausse décla-ration d'une partie au sens de l'art.306 (contra: ROTH, 10c. cit.), puisque le déroulement de cette procédure probatoire ne bénéficie d'aucune fixation dans la loi. La situation ne serait pas différente dans l'hypothèse où les parties se : soumettraient à une procédure qui réglerait expressément les témoignages et la déposition de partie ayant une valeur de preuve en sa faveur, car la menace des sanctions pénales prévues par les art. 306 et 307 ne saurait dépendre de la seule volonté des parties. L'application de ces dispositions est en revanche envisageable dans l'hypothèse où l'audition est conduite par le juge en appli-cation de l'art. 184 al. 2 LDIP.

18 La situation n)est pas différente en matière d'arbitrage interne. Le Concordat intercantonal sur l'arbitrage, adopté par la Conférence des directeurs cantonaux de justice ct approuvé par le Conseil fédéral en 1969, dispose à son art. 24 que la procédure arbitrale est déterminée par accord entre les parties. ou à déf:lut par décision du tribunal arbitral (al. le~. En l'absence d'un accord entre les parties ou d'une décision du tribunal arbitral, la procédure civile fédérale est applicable par analogie. Cette dernière loi prévoit certes J'audition de témoins (art. 42 ss. PCF) et celle des parties (art. 62 PCF), conférant à cette mesure une valeur de preuve lorsque les conditions de forme de l'art.64 PCF sont respectées. Il ne s'agit là toutefois que d'une application analogique et au surplus subsidiaire par rapport à la volonté des parties et du tribunal arbitral, dont il est douteux qu'elle puisse constituer une base légale suffisante. Il convient de noter, par ailleurs, que les garanties de procédure fixées par le Concordat sur l'arbitrage (art. 25 lit. c CIA: droit d'assister atL'( audiences d'administration des preuves) sont minimales et qu'en l'absence de règles concernant le déroulement formel des auditions, rien ne garantit que les témoins soient pleinement conscients du fail que leurs déclarations ont une importance comparable à des témoignages

r

Art. 309

devant un juge étatique. Il convient dès lors d'exclure, ici encore, l'app1ication des art. 306 et 307.

Il en va différemment dans J'hypothèse visée par l'art. 27 al. 2 CIA qui dispose, 19

à titre d'exception au principe de l'inlmédiateté consacré à l'art. 27 al. lèr, qu'en

«cas de nécessité», le tribunal arbitral «peut requérir le concours de l'autorité judiciaire» (cf. également l'art. 3 lit. d CIA).11 en va ainsi lorsque l'audition d'un témoin qui refuse de se présenter spontanément doit être effectuée sons la contrainte (HABSCHEID, p. 538), de même que lorsqu'il s'agit d'asserrnenter le témoin, compétences qui échappent aux tribunaux administratifs (ROTH, p. 16).

Dans ces hypothèses, il peut y avoir faux témoignage.