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2 D ES MODALITÉS DE FORMATION

2.1 Le régime d’études à temps partiel

Le régime d’études constitue sans contredit une condition déterminante de l’expérience étudiante, en particulier pour des personnes qui concilient les études avec des occupations professionnelles ou des responsabilités familiales. En plus d’influencer la charge de travail et, du coup, le rythme et la durée des études, on verra que le régime d’études à temps partiel a plusieurs incidences, par exemple pour ce qui est de l’accès à certains avantages.

Une conception relativement partagée des deux régimes

Dans l’ensemble, les règlements des établissements déterminent que les études à temps plein correspondent à 12 crédits par trimestre au premier cycle et à 9 crédits aux cycles supérieurs (exception faite des périodes « en rédaction », lorsque le nombre de crédits du programme est atteint). Dans les deux cas, les études à temps partiel sont associées à un nombre moindre de crédits. Néanmoins, il est parfois clairement mentionné que, pour les études à temps plein au premier cycle, le nombre normal de crédits pour une session est de 15 (McGill, Université Laval, UQAM, UQAR, UQAT). D’ailleurs, cette information est souvent implicite dans le calcul de la durée dite normale des études (abordée plus loin).

Le régime d’études : pas toujours un choix

L’analyse des documents des universités québécoises, notamment les règlements des études, révèle d’emblée que, si le régime d’études semble souvent présenté comme une option au premier cycle, il en va autrement aux cycles supérieurs, en particulier dans le cas des programmes axés sur la recherche pour lesquels les études à temps plein sont souvent privilégiées.

Par ailleurs, dans deux cas tout particulièrement, deux établissements spécialisés en génie, le régime d’études à temps plein semble en général encouragé et parfois même obligé, ce qui semble indiquer l’effet d’une culture disciplinaire.

• À l’École Polytechnique, l’étudiant régulier du premier cycle doit s’inscrire à temps plein (minimum de 12 crédits), sauf au dernier trimestre si le régime à temps partiel lui est « avantageux »26

• À l’ETS, le régime d’études à temps plein est « obligatoire à la première session d’inscription dans un programme de baccalauréat », si bien que « tout étudiant qui modifie son régime d’études à temps complet par l’abandon de cours sera automatiquement inscrit comme étudiant libre » (ETS, 2012b, art. 5.5.1). L’exigence se trouve aussi à la maîtrise avec mémoire ainsi qu’au doctorat pour lesquels l’étudiant « doit s’engager à s’inscrire à temps complet chaque session dès son admission » bien qu’il puisse, exceptionnellement, s’inscrire plutôt à temps . Aux cycles supérieurs, les étudiants admis dans un programme axé sur la recherche sont tous réputés à temps plein, peu importe le nombre de crédits auxquels ils s’inscrivent chaque trimestre. Ceux qui sont inscrits à un programme axé sur les cours doivent être inscrits à 9 crédits ou plus au cours du trimestre pour être réputés à temps plein. Par ailleurs, l’inscription à temps partiel ne s’applique qu’aux candidats admis dans un programme de « maîtrise de type cours » ou dans un programme conduisant au diplôme d’études supérieures spécialisées. De surcroît, l’étudiant à temps plein qui souhaite assumer des responsabilités d’enseignement dans l’École doit s’assurer que celles-ci n’exigent pas plus de neuf heures par semaine et qu’il a l’autorisation de son directeur d’études ou de recherche (École Polytechnique, 2011b, art. 7.4, 7.5).

26. « L’étudiant qui a des raisons particulières d’étudier à temps partiel à un trimestre donné doit le justifier par écrit au Registrariat, en joignant un document officiel pour cela (attestation d’employeur ou de médecin, par exemple) » (École Polytechnique, 2011a, art. 6.2.2). Certains aménagements sont, mais une fois seulement, aussi possibles au premier ou au deuxième trimestre.

« Fidèle à sa tradition d’accessibilité, l’Université Concordia porte une attention particulière aux étudiants adultes et à temps partiel. En effet, tous ont la possibilité de suivre les mêmes cours ou laboratoires et ont accès aux mêmes professeurs, qu’ils soient inscrits à temps plein ou à temps partiel. Il y a cependant deux exceptions…» (Université Concordia, 2009a, p. 4).

partiel s’il peut « faire une démonstration satisfaisante de conditions favorables lui permettant de travailler tout en complétant son programme, notamment par l’appui de son employeur » (ETS, 2012a, art. 12.3 et 13.3).

Des contraintes plus ou moins strictes quant au changement de régime d’études

Par-delà la possibilité de s’inscrire à temps partiel, signalons que le changement de régime d’études, aux cycles supérieurs du moins, peut faire l’objet de certaines limites, notamment quant au moment où il peut survenir et quant au nombre total de changements qui peuvent être accordés. Les exemples suivants en témoignent.

• À l’UQAR, aux cycles supérieurs, un changement de régime doit être fait « au plus tard avant l’inscription à la dernière session prévue à la durée maximale du régime à temps complet » (UQAR, 2002, art. 93).

• L’INRS est, du moins à notre connaissance, l’établissement où on insiste le plus fortement pour encadrer les changements de régime en fixant des exigences relativement nombreuses et en limitant le nombre de ces changements à un (voir l’encadré ci-dessous).

En revanche, du côté de l’UQO et de l’UQAT, les règlements prévoient qu’aux cycles supérieurs, le temps maximum consenti pour terminer un programme est ajusté dans les cas où un étudiant modifie son régime d’études. En l’occurrence, la règle prévoit qu’« un trimestre à temps complet équivaut à un trimestre et demi d’inscription à temps partiel ».

L’inscription à temps partiel comme perspective de développement

Le plus souvent, les étudiants peuvent choisir à leur guise leur régime d’études. Certains établissements font même la promotion de cette possibilité, par exemple l’Université Concordia (voir

l’encadré ci-contre) et la TELUQ dont,

précisément, 93 % des étudiants sont à temps

partiel27. Au moins dans un document

institutionnel, de l’UQAC, il est mentionné qu’on mise explicitement sur cette possibilité pour relever le défi d’accroître la fréquentation des études universitaires. Le schéma directeur 2006-2011 Réussir ensemble (UQAC, 2006) cible d’ailleurs le recrutement de nouvelles catégories

d’étudiants, dont ceux à temps partiel de diverses tranches d’âge. Enfin, du côté de l’Université McGill,

certains28

27. Une fraction d’entre eux proviennent d’autres établissements et pourraient donc être inscrits dans ces derniers à temps complet.

relèvent que l’absence de programmes d’études accessibles à temps partiel représente un facteur qui entrave l’accès aux études de certains étudiants, comme ceux qui occupent un emploi ou

28. Il s’agit de points de vue recueillis auprès de la communauté mcgilloise, dans le cadre des travaux du Groupe d’étude de la principale sur la diversité, l’excellence et l’engagement communautaire (2011).

Le changement de régime d’études à l’INRS

« Lorsqu’un programme prévoit deux régimes d’études, le changement d’un régime d’études choisi à l’admission s’effectue selon les règles suivantes :

a) la personne qui désire changer de régime d’études doit en faire la demande en remplissant le formulaire prévu à cette fin. La personne doit exposer sur ce formulaire les motifs qui l’amènent à solliciter un changement de régime d’études;

b) le changement est autorisé lorsqu’il est recommandé par le directeur du programme et approuvé par le directeur des études;

c) lorsque la personne est en recherche, le changement de régime d’études conduit à une modification de l’entente d’encadrement, à la satisfaction des deux parties;

d) l’étudiant ne peut demander de changement de régime d’études qu’une seule fois pour le programme auquel il a été admis;

e) à un trimestre donné, une modification d’inscription n’entraîne pas un changement du régime d’études de la personne. » (Source : INRS, 2011, art. 1.4.)

La Commission des affaires étudiantes de l’Université Laval (2010, p. 25) soulève la possibilité « de réduire le nombre de crédits par session nécessaires à l’obtention du statut à temps plein, de permettre d’échelonner sur trois sessions les crédits annuels à réaliser, d’autoriser un congé parental de trois sessions au cours des études sans perte de statut ou de fermeture de dossier, d’assouplir les critères d’admission aux programmes de bourses d’études, de créer des bourses d’études réservées aux étudiants-parents ».

qui sont parents. C’est pourquoi le Groupe d’étude de la principale sur la diversité, l’excellence et l’engagement communautaire (2011, p. 30) a proposé « d’augmenter les possibilités de s’inscrire à

des études à temps partiel ». Signalons enfin qu’à l’Université Laval, la Commission des affaires

étudiantes a recommandé en 2010, à la suite d’une réflexion au sujet des étudiants-parents, de revoir l’obligation d’être à temps plein dans certains programmes pour s’ajuster aux premiers mois de vie d’un enfant.

Les désavantages associés au statut d’étudiant à temps partiel

Bien que les études à temps partiel y soient possibles, certains établissements réservent l’accès à certains services ou mesures aux étudiants à temps plein. C’est le cas de l’admissibilité à certaines bourses décernées par un établissement (comme il en sera question dans la section 4), mais aussi de l’accès à certains services aux étudiants.

• Par exemple, à l’UQAT, le soutien psychologique et l’aide individualisée du Service aux étudiants sont essentiellement offerts aux étudiants à temps plein.

• L’analyse de situation du Plan quinquennal de soutien à la réussite de l’UQTR relève « l’accès inégal aux mesures d’aide à la réussite durant les études », puisque « les étudiants à temps partiel ont un accès limité aux mesures d’aide à la réussite en raison, notamment, des horaires d’ouverture (sic) des services universitaires qui ne correspondent pas à leur disponibilité » (Groupe de travail sur la réussite étudiante, 2008, p. 46).

Dans certains cas, comme à l’École Polytechnique, les désavantages associés aux études à temps partiel sont précisément explicités à l’intention des étudiants dans le but d’éclairer leur choix de régime d’études (voir l’encadré ci-après).

En 2008, le Service aux étudiants de l’École Polytechnique a produit un document intitulé Étudier à temps partiel : des conséquences possibles… Pensez-y bien! (École Polytechnique, 2008). Dans ce « guide de réflexion aux conséquences potentielles des études à temps partiel pour les étudiants au baccalauréat », on entend porter à l’attention des étudiants les avantages concrets rattachés aux études à temps plein, par exemple au regard du programme gouvernemental d’aide financière aux études et des bourses d’études de l’École, mais aussi en ce qui a trait aux frais de transport en commun, à l’admissibilité aux assurances pour la santé offertes par l’Association des étudiants, voire à certains forfaits pour la fréquentation du centre sportif.

Dans d’autres établissements, comme à l’Université Laval, certains cherchent des moyens d’élargir l’accès au statut d’étudiant à temps plein pour que plus d’étudiants puissent bénéficier des avantages auxquels il est associé. De fait, à l’issue d’une réflexion sur les « nouvelles réalités étudiantes », la Commission des affaires étudiantes de l’Université Laval (2010) relève que le statut d’étudiant à temps plein est nécessaire pour avoir droit à certains avantages. En plus d’envisager certaines « pistes d’action » qui lui ont été soumises en cours de

consultation au sein de l’établissement (voir l’encadré ci-contre), elle suggère de revoir la définition du statut d’étudiant à temps plein. Consciente que l’établissement ne peut se doter d’une définition originale du statut à temps plein et encore moins modifier les définitions qu’en ont les

différents ministères et organismes, la

Commission recommande que l’Université Laval « entreprenne des discussions avec les autres universités au sein de la CREPUQ sur les façons

de redéfinir la notion du statut d’étudiant à temps complet en fonction de nouvelles réalités, notamment la conciliation "Études-Travail-Famille" » (p. 26). L’idée est reprise par l’AELIES (2013) qui, dans son mémoire déposé au Sommet sur l’enseignement supérieur, propose la reconnaissance d’un statut d’étudiant-parent (il en sera question plus amplement dans la section 4 relative aux services et aux appuis aux étudiants) qui permettrait aux étudiants-parents de s’inscrire à temps partiel tout en bénéficiant des privilèges et des avantages associés à l’inscription à temps plein.

Une volonté de mieux soutenir les étudiants à temps partiel

Plusieurs documents institutionnels expriment une préoccupation à l’égard du fait que les études à temps partiel sont associées à l’allongement de la durée des études et à des probabilités plus faibles de diplomation. Considérant l’accès limité des étudiants à temps partiel à certains services, des actions stratégiques sont envisagées par au moins deux établissements pour mieux soutenir les étudiants qui optent pour ce régime d’études.

• Dans le Plan de développement 2009-2014, l’UQAT (2009, p. 5), en lien avec l’enjeu « le recrutement, l’accueil, la persévérance, la réussite et l’accompagnement », fait état d’actions particulières telles que « mettre en œuvre des stratégies d’accueil et d’animation en faveur des étudiantes et étudiants à temps partiel en lien avec leurs projets d’études ».

• Dans le Plan quinquennal de soutien à la réussite de l’UQTR (Groupe de travail sur la réussite étudiante, 2008), il est proposé, entre autres choses, d’inciter les directeurs de départements et de programmes à soumettre au Bureau de la réussite des projets de soutien à la réussite pour les études à temps partiel (tels que des ateliers) et de veiller à l’offre en périphérie d’une portion des activités, adaptées au besoin, prévues au plan du cours « UQTR 10129

Des préoccupations associées au financement des établissements universitaires ».

Il semble que l’accueil d’étudiants à temps partiel puisse susciter des préoccupations d’ordre financier pour les établissements, en particulier du fait que les études à temps partiel sont associées à des probabilités plus faibles de diplomation. En fonction des règles de financement des universités (abordées dans la partie B sur les orientations étatiques), la déperdition entraîne en effet une perte d’inscriptions et, du coup, de financement pour les établissements. Dans le cas des étudiants inscrits à un programme menant à un grade, la répercussion financière des abandons apparaît d’autant plus grande vu les « primes à la diplomation30

Pour sa part, la FQPPU (2013, p. 30), prévoyant que la hausse du taux général de fréquentation étudiante devrait se faire « de façon plus marquée par le biais de la fréquentation au temps partiel pour les années qui viennent », soutient que « ce type d’étudiant nécessite généralement un soutien plus important et des prestations de formation généralement diversifiées selon les individus et plus ajustées à leurs besoins ». C’est notamment pour cette raison qu’elle plaide pour l’embauche de ressources professorales additionnelles.

». Cette situation est décrite comme suit dans un récent avis de la Commission des affaires étudiantes de l’Université Laval (2010, p. 22) : « [m]is à part le côté humain, il est aussi important de savoir qu’en cas de décrochage, d’abandon ou de départ de l’Université sans diplôme, l’Université ne reçoit pas du ministère l’allocation destinée à chaque diplômé [d’un programme menant à un grade] ».

***

Somme toute, la possibilité d’opter pour un régime d’études à temps plein ou à temps partiel est parfois présentée comme un avantage pour les étudiants. Toutefois, le régime à temps plein est, dans certains cas, encouragé sinon obligé, en particulier en formation à la recherche et dans certains domaines (comme en médecine, en génie et en droit). Bien qu’aucun argument fondant la valorisation du temps plein n’ait été repéré parmi le corpus de documents analysés, on peut penser qu’ils sont d’ordre pédagogique, c’est-à-dire liés à la structure des programmes conçus comme des séquences d’activités de formation qui impliquent un certain ordre et une certaine concentration dans le temps. Il reste que, dans certains établissements, on observe des efforts sensibles pour faire des populations étudiantes à temps partiel des groupes qui méritent une attention spéciale, tant pour ce qui est de leur recrutement que pour ce qui est de leur accompagnement pendant les études et des services auxquels ils peuvent avoir accès.

29. L’idée d’un tel cours s’inspire d’une « expérience réalisée à l’Université de la Caroline du Sud dont l’objectif initial était expressément la rétention et l’accès au diplôme. Implantée dans plusieurs universités, cette stratégie a pour objet « les habiletés d’études, de vie et d’interaction à l’Université » et vise à maximiser le potentiel individuel de l’étudiant, tout en lui permettant d’assumer son succès. Les thèmes abordés pendant le cours sont : la gestion du temps, les habiletés de lecture, les techniques de prise de notes, la préparation aux examens, la communication interpersonnelle, la santé, la gestion d’un budget personnel, la capacité d’identifier les ressources disponibles de l’établissement et de s’y référer » (Groupe de travail sur la réussite étudiante, 2008, p. 22).

30. Comme on le verra dans la section sur les encadrements étatiques, la « prime à la diplomation » est constituée des allocations versées annuellement par le MESRST aux établissements en fonction du nombre de grades universitaires décernés, soit actuellement 500 $ par baccalauréat, 1 000 $ par maîtrise et 7 000 $ par doctorat.