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LES RÉFORMES PROPOSÉES

Dans le document DE L ÉTAT LÉGAL À L ÉTAT DE DROIT (Page 121-134)

LA CRISE DU RÉGIME REPRÉSENTATIF

Section 3 LES RÉFORMES PROPOSÉES

suffrage universel.

Section 3 LES RÉFORMES PROPOSÉES

Puisque le régime est en crise, il s'agit de le réformer, sauf à encourir le risque d'une nouvelle révolution. Le contenu des propositions de réforme découle logiquement de l'analyse que font les publicistes de la crise. Et puisque celle-ci est due selon eux à l'omnipotence parlementaire, elle-même causée par le mode de recrutement des élus, il faut d'abord changer le système électoral et diminuer les prérogatives du parlement.

§ 1. - LA RÉFORME ÉLECTORALE

Pour l'essentiel, les réformes proposées s'orientent dans deux directions différentes, mais non forcément opposées, retrouvant ainsi les ambiguïtés sur lesquelles se fonde le régime représentatif. Les unes ont en effet pour objet d'améliorer la représentation de l'opinion en faisant une place aux diverses minorités;

les autres tentent de restaurer l'idée d'un gouvernement des capacités par l'organisation du suffrage universel. Dans tous les cas, il s'agit de mettre un frein à la force du nombre qui donne la prépondérance à une majorité purement numérique.

A — La représentation proportionnelle

La représentation proportionnelle, d'abord apparaît comme l'une des questions sur lesquelles se concentre le débat politique jusqu'à la première guerre mondiale. Au point qu'en 1912, la chambre des députés vote l'instauration de ce mode de scrutin pour les prochaines élections législatives ; mais le projet n'aboutit pas du fait de l'opposition du sénat à son encontre311. La représentation proportionnelle figure pourtant au programme de nombreux partis politiques, tant à droite qu'à gauche. En réalité, elle est soutenue par la plupart des courants minoritaires jusqu'au jour où, comme pour le parti radical, le scrutin majoritaire lui devient profitable312. La question des avantages et inconvénients de la représentation

311 « Chronique législative », R.D.P. 1912, p. 579 ; J. BARTHELEMY, « Les résistances du Sénat », R.D.P.

1913, pp. 371-410.

312 Les positions des différents partis concernant la réforme électorale n'ont cessé d'évoluer. On peut distinguer trois périodes pour schématiser ces positions. La première période qui va de 1873 à 1889 se caractérise par de nombreux revirements centrés sur l'alternative scrutin uninominal/scrutin de liste, sans qu'il soit pratiquement question de représentation proportionnelle : lors du vote des lois constitutionnelles, les républicains sont favorables au scrutin de liste majoritaire, les conservateurs obtiennent l'adoption du scrutin uninominal ; les premières élections législatives ayant été favorables aux républicains, les positions des partis s'inversent (les républicains deviennent favorables au scrutin uninominal, les conservateurs défendent le

proportionnelle n'est pas débattue seulement chez les politiques ; on la retrouve aussi chez les publicistes dont la majorité se prononce en faveur de ce système313.

Ces préférences pourraient surprendre si l'on se souvient des critiques adressées à la souveraineté du nombre : la représentation proportionnelle ne se fonde-t-elle pas, plus encore que le scrutin majoritaire, sur une conception purement numérique et individualiste du suffrage ? C'est d'ailleurs cet argument que développent ses adversaires : Esmein, toujours partisan du statu quo (à défaut peut-être de pouvoir revenir au statu quo ante), reste résolument attaché au scrutin majoritaire d'arrondissement. Il oppose à la proportionnelle les mêmes arguments que ceux qu'il formule à l'encontre du mandat impératif. Non seulement la représentation des minorités est contraire selon lui au principe de la souveraineté nationale, en ce qu'elle renvoie à la conception de l'électorat-droit et du suffrage atomisé, et partant à la théorie de la souveraineté atomisée du peuple314. Mais elle est également indéfendable du point de vue de ses conséquences pratiques, car elle tend à diviser les assemblées en groupes de plus en plus nombreux et introduit des complications dans l’opération électorale qui risquent de désintéresser les électeurs du choix de leurs députés315.

Certains partisans du système proportionnel voient au contraire dans ce dernier point un avantage essentiel : dans la mesure où elle suppose nécessairement le scrutin de liste, la représentation proportionnelle peut être une façon efficace d'éloigner l'élu de l'électeur, de restaurer une certaine indépendance du premier vis-à-vis du second. Delpech y voit explicitement un moyen de diminuer l'influence des potentats locaux et de donner quelque chance à la constitution de partis mieux structurés316. Ainsi, par le biais du scrutin de liste, l'influence des partis et associations pourrait se substituer à celle des individus isolés, la poursuite d'objectifs politiques à celle d'intérêts particuliers.

scrutin de liste majoritaire) ; vers 1880, une partie des républicains (les radicaux sous l'influence de Gambetta) recommencent à défendre le scrutin de liste, mais sans succès jusqu'au 16 juin 1885, date de l'adoption d'une nouvelle loi électorale instituant le scrutin de liste majoritaire par département. Mais il s'avère rapidement que le scrutin de liste ne profite pas nécessairement à ses partisans et la peur du boulangisme conduit les républicains à modifier une nouvelle fois la loi électorale avec le retour au scrutin uninominal en février 1889. La deuxième période (1889-1895) est marquée par la mise en sommeil de la question électorale. Les débats sur une éventuelle réforme reprennent au contraire à partir de 1895 et mettent cette fois en jeu l'alternative scrutin uninominal/scrutin proportionnel. Mais toutes les propositions faites pour instituer la représentation proportionnelle échouent soit devant la chambre des députés, soit plus tard devant le sénat. Sur ce point, voir JL. CHARDON, La réforme électorale en France, thèse Paris, Rousseau, 1910.

313 J. BARTHELEMY, A. BESSON (Essai sur la représentation proportionnelle de la majorité et des minorités, thèse Dijon. 1897); J. DELPECH ; L. DUGUIT ; F. LARNAUDE ; A. DE SAINT GIRONS ; N.

SARIPOLOS ; R. SALEILLES.

314 A. ESMEIN, « Deux formes de gouvernement », loc. cit.; Éléments ..., op. cit., p. 625. Comparer avec A.

BESSON, op. cit., favorable à la représentation proportionnelle et à la conception d'une souveraineté individuelle (atomisée) qu'il attribue, lui aussi, à Rousseau.

315 A. ESMEIN, « Deux formes de gouvernement loc. cit. ; Eléments... , op. cit., p. 626

316 J. DELPECH, « La notion de parti et le Party government », R.D.P. 1910, pp. 534-570, p. 568 ; E.

D'EICHTAL, op. cit.

C'est pour cette raison que Saleilles défend la représentation proportionnelle qui permettrait selon lui de transcender les intérêts de classe et de ressouder la communauté politique : « La représentation proportionnelle n'est fondée ni sur un système de classes, ni sur un système de collectivités, mais sur un système de partis.

Or les partis peuvent bien s'adapter aux classes ; mais ils reposent avant tout sur l'association libre et sur l'association des esprits et des idées (...). La libre association brisera les cadres répondant aux groupements purement sociaux : la vie politique englobera tous ces courants divers et la représentation proportionnelle en groupera la synthèse définitive, pour en faire sortir, comme résultante, la ligne d'orientation directrice correspondant au progrès de la vie nationale »317.

En donnant aux partis «une fonction électorale, et surtout un profit électoral»318, la représentation proportionnelle renforcerait la cohérence du monde politique puisque les députés dépendraient des états-majors des partis (de la classe politique elle-même) plutôt que de comités électoraux incontrôlables ou d'électeurs.

Là encore, on pourrait s'étonner de voir les mêmes hommes critiquer la constitution d'une classe de politiciens professionnels et réclamer le système proportionnel pour renforcer l'influence de partis organisés sur la vie politique. Ce n'est donc pas le fait que la politique soit devenue une profession à part entière qui est critiqué ; c'est plutôt l'arrivée au pouvoir de nouveaux notables locaux, journalistes, avocats, sur lesquels les états-majors politiques n'ont pas de prise suffisante pour leur imposer les traditions parlementaires ; c'est surtout l'absence de maîtrise de la classe politique sur le recrutement de ses membres319.

La représentation proportionnelle permet enfin de faire contrepoids à la

« tyrannie majoritaire». S'agit-il pour autant d'aboutir à une représentation réellement plus exacte de l'opinion ? On peut en douter si l'on considère le faible nombre de partisans de l'extension du suffrage320 et le relatif mépris dans lequel est tenu l'électeur. Pour certains, il est clair que la représentation proportionnelle doit permettre de défendre le pouvoir de l'élite qu'ils croient menacé : « Les classes pauvres ou peu aisées deviennent aujourd'hui de plus en plus maîtresses absolues du pouvoir », dit Saripolos ; « le danger qui peut en résulter saute aux yeux. Il faut protéger les classes possédantes contre le danger qui les menace »321.

317 R. SALEILLES, « La représentation proportionnelle », R.D.P. 1898, tome IX, loc. cit., p. 401.

318 R. SALEILLES, ibidem, p. 397.

319 C’est d'ailleurs ce que dénonce à Genève le publiciste COMBOTHECRA : « l e système proportionnel ne donne satisfaction qu'à la vanité des partis, aux hommes influents de second ordre (...) Pour l'élection des députés, chefs et sous-chefs ne donnent leur investiture qu'à des soldats disciplinés, incapables d'insubordination, aux dépens des hommes de talent et d'initiative. Les chefs redoutent la création de nouveaux sous-chefs et les sous-chefs redoutent la perte de leur influence. Avec le système proportionnel, les cadres sont nettement tracés, chaque groupe compte ses soldats, s'inquiète peu de leurs idées et est soucieux de leur obéissance » (X.S. COMBOTHECRA. « la représentation proportionnelle à Genève », R.D.P. 1902, tome XVII, pp. 50-77, p. 55).

320 Il n'y a guère que Duguit pour envisager le droit de vote des femmes.

321 N. SARIPOLOS, op. cit., p. 300, et p. 301 : « La protection de la minorité devient aujourd'hui de plus en plus suspecte ; l'État est chargé, de plus en plus, de fonctions nouvelles qui touchent de près aux intérêts immédiats, économiques, de la minorité possédante ».

Et si la recherche d'une représentation de l'opinion réelle du corps électoral se traduit toujours chez les auteurs par la proposition d'instituer la représentation proportionnelle plutôt que par d'autres systèmes (referendum, extension du suffrage, mandat impératif,...), c'est que la représentation des minorités peut constituer un facteur de paix sociale322 en offrant aux opposants une possibilité d'intégration au régime sans remettre en cause la séparation des élus et des électeurs.

L'un des arguments avancés en faveur de la représentation proportionnelle peut d'ailleurs s'analyser comme celui du moindre péril : refuser le système proportionnel serait courir le risque d'un rejet brutal du scrutin majoritaire, de revendications plus radicales pour le mandat impératif ou le referendum. En instituant la représentation proportionnelle, le régime pourrait faire l'économie de telles réformes, d'autant plus facilement que des courants fort différents peuvent y trouver satisfaction. Cette hétérogénéité des partisans de la représentation des minorités se retrouve chez les publicistes, puisque ce que l'on pourrait appeler

«l'école de Dijon »323, aussi bien que les adversaires de la « souveraineté individuelle»324 lui sont favorables.

Même hétérogénéité d'ailleurs chez les auteurs hostiles à la représentation proportionnelle325 : nous avons vu Esmein soutenir le scrutin majoritaire contre le système proportionnel ; G. Scelle, quant à lui, se place à un autre point de vue pour combattre la représentation proportionnelle. Il estime avec quelque raison qu'il s'agit là d'un faux débat, d'une solution illusoire pour des problèmes réels. « L'origine du mal, dit-il, c'est que la représentation politique ne répond plus aux besoins du corps social, et que le corps social ne s'y intéresse plus (...) La crise de la représentation politique est très nette, mais c'est ne pas vouloir voir que de croire qu'elle se concrétise en une lutte entre le système majoritaire et le système proportionnaliste.

Elle va bien au-delà, elle est un des symptômes de la transformation économique de la société actuelle, et tout ce qu'on fera sans tenir compte de cette transformation ne sera qu'une œuvre vaine »326.

322 A. DE SAINT-GIRONS, Manuel, op. cit., p. 151; E. NAVILLE, Questionnaire pour l'étude de la représentation proportionnelle, Genève, Kündig, 1900, p. 35 et p. 44.

323 Voir notamment A. BESSON, op. cit.

324 Voir R. SALEILLES, « La représentation proportionnelle », R.D.P. 1898, tome IX, pp. 215-234 ; et pp.

385-414

325 Mis à part ESMEIN, on peut citer parmi ces adversaires E. D’EICHTAL, J.G. COURCELLE SENEUIL, Ch. BENOIST qui a d'abord été un adversaire de la représentation proportionnelle (La crise de !Etat moderne. De l'organisation du suffrage universel, Paris, Didot, 1897) avant de devenir l’un de ses partisans les plus acharnés.

326 G. SCELLE, « A propos de la crise actuelle de la représentation politique », R.D.P. 1911, pp. 525-557, p.

540 et p. 557. De l'attitude de G. Scelle, on peut rapprocher celle de Th. DUCROCQ, Cours de droit administratif. 7ème éd., tome 3. 1898.

B — Les autres propositions de réforme

La question de la réforme électorale ne se résume donc pas à l'alternative : scrutin majoritaire / système proportionnel. D'autres propositions sont faites qui ne visent pas simplement à une représentation plus exacte de l'opinion, mais qui recherchent surtout une meilleure représentation de la nation dans tous ses éléments327, pour finalement restaurer le gouvernement des capacités par le système de la représentation professionnelle. Les deux types de réformes ne s'opposent pas en tant que choix antagonistes. Au contraire, nombre de partisans de la représentation proportionnelle sont également favorables à l'idée d'une représentation professionnelle qui donnerait une certaine influence aux éléments organiques de la nation à côté de celle donnée au nombre. Ainsi Duguit souhaite voir organiser l'élection des sénateurs d'après ce système328.

Une fois encore, cette réforme peut réunir les suffrages des conservateurs comme ceux des progressistes. Malgré son aspect corporatiste, la représentation professionnelle permet en effet d'intégrer les syndicats à la vie politique selon des voies légales, et, au-delà du problème syndical, elle substitue à la conception individualiste de la représentation un système fondé sur les groupes, les collectivités.

Pour G. Scelle, on peut même considérer qu'il s'agit d'opérer une transformation radicale en ce sens que la représentation, de politique, doit devenir sociale. La réforme se présente ainsi comme l'achèvement de l’extension du suffrage par la confusion qu'elle opère entre le corps électoral et la société civile. C’est aussi une façon éventuelle de désamorcer l'antiparlementarisme en substituant l'efficacité et la compétence à la politique politicienne, en remplaçant les partis politiques par les organisation professionnelles329. Si les conservateurs sont également tentés par cette solution, c'est à la fois parce qu'elle laisse libre d'imaginer toutes sortes de combinaisons possibles quant aux organes qui doivent être représentés, et parce qu'elle permet de restaurer l'idée d'un « gouvernement des capacités »330.

327 F. MOREAU, « Régime parlementaire et principe représentatif », Congrès international de droit comparé, loc. cit., pp. 223-274, p. 235 ; L. DUGUIT, Manuel ..., p. 491 : « qu'on accorde à tous une participation à la puissance publique, cela est juste puisque tous ont intérêt à ce que les affaires publiques soient bien gérées et que tous supportent les charges publiques. Mais qu'on accorde à tous une égale participation à la puissance publique, sous prétexte que tous sont membres du corps social, c'est là un pur sophisme, car si tous les individus sont membres du corps social, ils rendent à la société des services différents et ont une capacité différente. Par conséquent, pour respecter le principe d'égalité, on devrait accorder à chacun une participation à la puissance politique variant suivant sa capacité et les services qu'il est susceptible de rendre et qu'il rend en effet à la société ».

328 L. DUGUIT, « L'élection des sénateurs », R.P.P. 1895, tome V, pp. 300-475 , p. 474: « Dans une proportion qu'il est impossible de déterminer d'avance, et qui d'ailleurs pourra varier constamment, le législateur devra donner des représentants aux associations commerciales, aux corporations ouvrières, aux syndicats industriels, aux associations agricoles, aux groupes administratifs, aux universités » ; L. DUGUIT, Congrès international de droit comparé, tome 2, loc. cit., pp. 319 et s.

329 G. SCELLE, « A propos de la crise actuelle ... », loc. cit.

330 Voir Ch. BENOIST, La crise de l’Etat moderne. De l'organisation da suffrage universel, op. cit.; Ch.

FRANÇOIS, La représentation des intérêts dans les corps élus, Paris, 1899 ; Th. FERNEUIL, « La crise de la souveraineté nationale et du suffrage universel », loc. cit., pp. 503-504: « l'intervention du groupes

Il n'est nullement certain qu'une représentation professionnelle, quelle qu'elle soit, donne de meilleurs gages de compétence qu'une représentation confiée aux politiques. En revanche, un tel système donne généralement le pouvoir à des

«élites » plutôt qu'à cette masse « ténébreuse et inconsciente » dont parlait d'Eichtal.

Tout le problème est de savoir quelles élites il faut faire prévaloir : les syndicats, les organisations patronales, les « intelligences »... ? Or, si l'on s'attache à étudier les modalités de cette représentation professionnelle, on s'aperçoit d'une part que de nombreux auteurs évitent de les préciser, d'autre part que ceux qui en donnent le détail tendent généralement à revenir au système des corporations de l'Ancien Régime. Charles Benoist, qui est sans doute l'un des plus fermes partisans du suffrage « organique », propose l'élection de la chambre des députés (et non plus du sénat) au suffrage universel direct par un corps électoral organisé en catégories souvent faites au corps électoral de poursuivre des intérêts catégoriels.

Au nom de la compétence, d'autres vont plus loin encore en proposant d'instituer le vote plural 332. Puisqu'il est impossible de revenir sur le suffrage universel, ce dernier n'est pas remis en cause directement ; mais toutes sortes de modalités sont envisagées pour restreindre l'influence de la masse dans la conduite

collectifs dans le recrutement des assemblées empêcherait le despotisme du nombre et des masses populaires en assurant la représentation de certaines catégories sociales qui, du jour où elle auraient la perspective d'exercer leur part légitime dans la vie politique, ne songeraient plus à tromper et à corrompre le suffrage universel, ou à se tenir systématiquement à l'écart des affaires publiques. En outre, on pourrait corriger la représentation du nombre dont la capacité et l'indépendance laissent souvent tant à désirer, par la représentation des grands intérêts sociaux qui se sont déjà révélés sur un théâtre moins vaste, dans les groupements collectifs comme les chambres de commerce ou d'agriculture, les universités, les syndicats, les associations professionnelles ou philanthropiques, et qui viendraient apporter au Parlement le concours précieux de compétences déjà éprouvées, d'intelligences et de caractères déjà mûris et trempés par l'expérience de la vie publique » ; et p. 507 : « Combien le Sénat ne verrait-il pas grandir son prestige et son autorité, quand il comprendrait dans son sein non plus seulement les représentants de tous les groupes territoriaux, mais ceux de tous les groupements collectifs qui collaborent à la vie nationale (...) La Chambre haute se recruterait alors véritablement parmi l'élite intellectuelle et morale du pays et, grâce à sa composition, elle pourrait remplir dans toute son étendue, ce rôle de pouvoir modérateur que lui assigne la Constitution, parce qu'en face de la Chambre basse, représentant les intérêts passagers et mobiles des individus, elle incarnerait les intérêts permanents et durables des groupes sociaux ». Cf D. MULLER, « Le système électoral de l'avenir: la représentation régionale », R.D.P. 1903, tome XX, pp. 409-414, pp. 410-411 : « un système électoral qui éloignerait les représentants de leurs électeurs offrirait de sérieux avantages (...) Le remède au mal dont nous souffrons serait la création de circonscriptions régionales comprenant chacune de cinq à six départements ayant autant que possible les mêmes intérêts économiques ».

331 Ch. BENOIST, op. cit., 2e éd. pp. 250 et s.

332 F. LARNAUDE, « Analyse du livre de Arthur Desjardins, De la liberté politique dans l’Etat moderne, Paris, 1894 », R.D.P. 1894, tome I, pp. 151456, p. 155: « le vote plural et la représentation des minorités sont aussi nécessaires dans un pays monarchique que dans un pays républicain » ; G. TARDE se prononce aussi en faveur du vote plural dans Congrès international de droit comparé tenu à Paris du 31 juillet au 4 août1900, Paris, LGDJ, 1905, tome 1, p.112.

des affaires de l'Etat. Ferneuil, par exemple, propose un système de double vote au profit des chefs de famille et des « intelligences » : « Si l'on est d'accord pour reconnaître la supériorité sociale du père de famille sur le célibataire, du citoyen instruit sur l'illettré, est-il donc impossible de constater ces deux causes de

des affaires de l'Etat. Ferneuil, par exemple, propose un système de double vote au profit des chefs de famille et des « intelligences » : « Si l'on est d'accord pour reconnaître la supériorité sociale du père de famille sur le célibataire, du citoyen instruit sur l'illettré, est-il donc impossible de constater ces deux causes de

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