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La référence à un modèle de pilotage

Dans le document UNIVERSITE MONTPELLIER II (Page 112-119)

par les Progiciels de Gestion Intégrés

2.2 La référence à un modèle de pilotage

Ceci conduit à décrire la dynamique du processus dans une analyse temporelle:

quelles décisions, quels événements, quelles conséquences sont survenues. La technologie est alors bien considérée comme une opportunité de changement (Orlikowsky & Tyre, 1994, Barley, 1986), avec une "fenêtre" d'activation très restreinte, limitée au seul processus de mise en place. Il y a des acteurs à l'affût du changement, qui profitent de ces phases privilégiées ; à l'inverse, d'autres acteurs manifestent une certaine inertie. L'objectif est de modifier par l'action les caractéristiques structurelles. Au sein du processus de mise en place apparaissent alors des instants privilégiés propices à des modifications : de l'action vers la structure. La mise en place apparaît bien ici comme un moment d'observation à privilégier. Mais ce n'est pas un phénomène spontané : il faut donc s'intéresser à sa conduite.

L'importance de la dynamique du processus de mise en place étant ainsi affirmée, son pilotage devient un problème central de la gestion de ce projet : comment les actions des acteurs - pilotes peuvent-elles interagir avec les actions des acteurs - utilisateurs pour converger vers la solution cible ? Ceci conduit à nous référer à un modèle de pilotage du projet.

Figure 5 - Modèle de pilotage du processus de mise en place d’un PGI

Il s'agit d'un modèle de pilotage de processus qui distingue plusieurs niveaux de commande:

‰ Un niveau supérieur (niveau 1), qui est celui où s'exerce le pilotage du processus de mise en place. C'est à ce niveau que sont fixés les objectifs généraux du projet, notamment ceux liés à l'intégration. Le degré de précision de ces objectifs peut être variable, ce qui concourt à définir les marges de manœuvre rencontrées dans le processus de mise en œuvre.

‰ Un ou plusieurs niveaux opérationnels (niveau 2 et 3), celui (ou ceux) du processus de mise en place lui-même. A ce niveau apparaissent les latitudes décisionnelles concédées par les niveaux supérieurs. Ce niveau est celui au sein duquel se construit la solution via, notamment, la résolution des problèmes transverses.

Chaque niveau a des objectifs et des variables de commande. La latitude décisionnelle permet l'existence d'objectifs spécifiques au niveau 2 ou 3. Il y a pluralité d'objectifs à des niveaux hiérarchiques donnés et entre niveaux hiérarchiques, avec pluralité des représentations du fonctionnement de l'organisation (Markus, Robey, 1988). Si ces objectifs ne sont pas totalement compatibles, alors il y a conflit potentiel entre les parties prenantes.

Processus de mise en place

Pilotage Information

objectifs du niveau 1

Intégration obtenue (résultat)

Niveau 1 Niveau 2 Niveau 3

Centre de Commande

objectifs du niveau 2 Intégration visée (objectif)

Il faut caractériser le plus précisément possible les marges de manœuvre par un catalogue des décisions possibles ou interdites (changer les processus existants, imposer des formats de données, etc.) aux niveaux inférieurs, liées par l'existence ou non d'un cahier des charges imposé au chef de projet, au départ puis, ensuite par le processus de pilotage du niveau supérieur (rôle du comité de pilotage, processus de contrôle du déroulement de projet). L'espace de commande des niveaux inférieurs (défini par les marges de manœuvre) peut être très variable (quasi nul si on impose la solution standard) et éventuellement évolutif (on peut resserrer ou élargir le contrôle en cours de processus).

Dans ce cadre, des variables de commande envisagées pourraient être, pour le niveau supérieur : formulation de l'objectif, cahier des charges, choix du chef de projet et composition des groupes de travail, attribution de moyens, implication, etc. Pour les niveaux inférieurs : (chef de projet, utilisateurs) choix de la démarche et de la méthodologie, planification, conduite de réunions, pouvoir formel (quelles décisions est-il autorisé à prendre ?), etc.

2.2.2 Implications pour la problématique de recherche

Cette structure de référence conduit à recentrer l'analyse sur le processus commandé, mais largement indéterminé, caractérisé par les interactions d'acteurs dans un processus de changement organisationnel. C'est une situation de gestion (Girin, 1990) que l'on choisit d'observer en se référant aux cadres théoriques du changement (Van de Ven & Poole, 1995; Boudreau & Robey, 1999), à une conception structurelle de la technologie (Orlikowsky, 1992; Orlikowsky et Robey, 1991; DeSanctis & Poole, 1990;

Swanson & Ramiller, 1997) et à l'analyse stratégique des acteurs (Crozier, 1973).

Par ailleurs, le modèle proposé nous conduit à revoir la définition de la problématique de recherche, en intégrant le rôle des acteurs. En effet, nous avons montré dans ce chapitre que le processus de mise en œuvre est piloté et qu'il existe des possibilités d'action, contrairement à ce qu'une vision uniquement déterministe aurait pu laisser supposer. D'où les rôles essentiels, selon nous, des acteurs engagés dans la mise en œuvre et de la flexibilité adaptative du PGI, qui se manifeste dans la capacité de ces acteurs à influencer la manière dont sera utilisée la technologie dans le processus de changement.

Il existe donc un déterminisme modéré soutenu par les propriétés structurelles des PGI, qui permet d'envisager la gestion du processus de mise en place, vu alors comme un processus émergent de changement dépendant des interactions entre les acteurs de l'organisation. Ceci nous amène à préciser la question de recherche, à la recentrer sur la conduite du projet et l'analyse du processus de résolution de problème.

Nous serons ainsi amenés à analyser les pratiques des acteurs (leurs stratégies) pour comprendre la dynamique de l'évolution du projet vers une solution. Si l'on choisit à la fois de reconnaître le rôle prépondérant des acteurs du pilotage et l'existence de l'objectif d'intégration, la problématique deviendrait, dans une perspective plus normative: "Comment piloter le processus de mise en place d'un PGI pour obtenir un degré d'intégration élevé?".

Le caractère normatif de la question de recherche que nous retenons s'explique, notamment, par la manière empirique dont a émergé notre questionnement. Celui-ci est en effet proche des problématiques managériales rencontrées par les acteurs, ce qui implique de réfléchir aux règles et contraintes relatives au processus de mise en place. Il faut souligner cependant que cette perspective est une parmi d'autres qui reflètent une formulation plus générale du problème principal soulevé par l'implantation d'un PGI dans une organisation, soit comment converge un processus de résolution de problèmes multi-acteurs.

C

ONCLUSIONS DU

C

HAPITRE

2

La problématique que nous avons choisie pose la question du pilotage du processus de changement organisationnel dans le cas de la mise en place d'un PGI, en supposant que l'objectif d'intégration est recherché. Les cadres conceptuels que nous avons retenus pour envisager cette question sont, d'une part, un déterminisme aménagé basé sur une vision duale de la technologie (qui repose à la fois sur des propriétés structurelles de cette technologie et sur les interactions avec les acteurs) et d'autre

part, la référence à une perspective interactionniste qui affirme l'importance des rôles spécifiques des acteurs et de la dynamique de la mise en place.

Une prochaine étape de la recherche sera donc d'analyser le processus (interactif ? itératif ?) qui réduit les marges de manœuvre et aboutit à un certain résultat. Il nous faudra réaliser une description compréhensive des événements, voir s’il existe une suite, série de décisions et de conséquences. Les résultats de cette analyse processuelle devraient permettre de repérer à la fois les stratégies d'acteurs et les moyens utilisés pour tenter de les réaliser, pour mieux comprendre (en le réinterprétant ?) le processus de construction du Système d'Information à partir du PGI.

Dans ce cadre, le dispositif méthodologique retenu devra s'attacher, notamment, à déceler les stratégies des acteurs et essayer de mettre en évidence les intérêts et limites des pratiques de pilotage utilisées. Il pourrait se situer dans le cadre de l'analyse d'un projet de mise en place de PGI en cours, sans vocation généralisable immédiate.

C

ONCLUSION DE LA PREMIERE

P

ARTIE

Les PGI, par leurs caractéristiques spécifiques (référentiel de données unique, modules interconnectés) semblent offrir la possibilité d'introduire une plus grande cohérence dans le fonctionnement de l'organisation. Cet argument (utilisé par les éditeurs) a séduit un certain nombre de dirigeants d'entreprises, soucieux d'accroître le degré d'intégration de leur organisation. Cependant, les résultats observables ne confirment pas systématiquement les espoirs justifiant l'acquisition des PGI : les effets sont incertains. Cette incertitude est à la base de la question initiale de recherche : si l'on suppose que l'objectif d'intégration existe bien au niveau des responsables de l'acquisition des PGI, à quelles conditions le recours au PGI permet-il d'améliorer le degré d'intégration de l'organisation ?

Afin de vérifier la pertinence de cette problématique d'une part, de mieux apprécier les déterminants du choix des PGI (comme les caractéristiques de la mise en œuvre) d'autre part, une étude exploratoire a été lancée. L'analyse sommaire des processus de choix et d'implantation, menée à travers des entretiens (analyse rétrospective) a produit les résultats suivants, interprétés suivant le filtre théorique présenté dans le Chapitre 2:

‰ L'objectif d'intégration est bien réel. Mais sa formulation semble différente selon le niveau hiérarchique des acteurs ; elle est porteuse d'ambiguïté.

‰ Le concept d'intégration (et les choix qui y sont associés) apparaît lors de la résolution de problèmes transverses.

‰ La conduite du projet d'implantation correspond à un modèle de commande hiérarchisée (au minimum à deux niveaux) avec des espaces de commande imbriqués mais offrant des latitudes décisionnelles au niveau de la conduite de projet : il y a des marges de manœuvre offrant des espaces de gestion.

‰ Le résultat effectif de la résolution du problème est l'aboutissement d'un processus partiellement indéterminé, issu des interactions d'acteurs

poursuivant des stratégies particulières et disposant d'une technologie aux propriétés structurelles spécifiques.

Après avoir examiné les cadres théoriques candidats, nous avons choisi de nous situer dans une perspective interactionniste et de nous référer à un modèle de conduite à plusieurs niveaux de commandes, partiellement hiérarchisés. Il s'agira donc de se centrer sur le repérage des stratégies d'acteurs à l'intérieur d'un processus de convergence vers une solution. Cette posture a des implications sur au moins trois plans, que nous préciserons dans la Partie suivante:

‰ Sur la problématique. Celle-ci analyse la relation entre le mode de pilotage et le degré d'intégration et devient dans sa formulation normative :

"Comment piloter le processus de mise en place d'un PGI pour atteindre un objectif d'intégration élevé?".

‰ Sur le positionnement épistémologique. Retenir le point de vue des acteurs implique une position de type interprétativiste, qui doit s'attacher à examiner le sens attribué aux événements par chaque acteur.

‰ Sur les pratiques méthodologiques. Il s'agira de produire une analyse riche et dynamique (qui s'intéresse à la convergence d'un processus dans le temps). D'où la nécessité de considérer des variables caractéristiques du processus (niveau de participation, séquence de décisions, fréquence des réunions, méthodes d'organisation, etc.), permettant de mieux comprendre les stratégies des acteurs.

Partie 2

Vers une réinterprétation de la mise en place

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